Extrait "En somme, je vais parler de ceux que j'aimais", écrit Albert Camus dans une note pour Le premier homme. Le projet de ce roman auquel il travaillait Lire la suite. 8,40 € Neuf. Poche 8,40 € Ebook 5,99 € Grand format 23,00 € Livre audio 21,90 € Voir tous les.
Le narrateur évoque les souvenirs de son enfance à Alger. Pendant des semaines, l'été et ses sujets se traînaient ainsi sous le ciel lourd, moite et torride, jusqu'à ce que fût oublié jusqu'au souvenir des fraîcheurs et des eaux de l'hiver, comme si le monde n'avait jamais connu le vent, ni la neige, ni les eaux légères, et que depuis la création jusqu'à ce jour de septembre il n'ait été que cet énorme minéral sec creusé de galeries surchauffées, où s'activaient lentement, un peu hagards, le regard fixe, des êtres couverts de poussière et de sueur. Et puis, d'un coup, le ciel contracté sur lui-même jusqu'à l'extrême tension s'ouvrait en deux. La première pluie de septembre, violente, généreuse, inondait la ville. Toutes les rues du quartier se mettaient à luire, en même temps que les feuilles vernissées des ficus, les fils électriques et les rails du tramway. Par-dessus les collines qui dominaient la ville, une odeur de terre mouillée venait des champs plus lointains, apporter aux prisonniers de l'été un message d'espace et de liberté. Alors les enfants se jetaient dans la rue, couraient sous la pluie dans leurs vêtements légers et pataugeaient avec bonheur dans les gros ruisseaux bouillonnants de la rue, plantés en rond dans les grosses flaques, se tenant aux épaules, le visage plein de cris et de rires, renversés vers la pluie incessante, foulaient en cadence la nouvelle vendange pour en faire jaillir une eau sale plus grisante que le vin. A. CAMUS, Le Premier Homme , 1959, publié en 1994 A - QUESTIONS D'OBSERVATION 1. Etudiez les oppositions lexicales dans la première phrase. 2. Justifiez le temps de "s'ouvrait" dans la phrase "Et puis, d'un coup, ...s'ouvrait en deux". 3. Dans le passage "La première pluie de septembre [...] plus grisante que le vin", quels sont les sens sollicités, par "la première pluie de septembre" ? B - QUESTIONS D'ANALYSE, D'INTERPRETATION OU DE COMMENTAIRE 1. Quels sont les pouvoirs de l'eau suggérés par la description que fait Camus ? 2. En vous fondant sur l'ensemble du texte, commentez l'expression "apporter aux prisonniers de l'été un message d'espace et de liberté".
Lepremier homme. Albert Camus; Gallimard - Ecoutez Lire; 25 Juin 2020; Littérature Française Audio Vidéo Ou Produits Tva 20 ; 18.8 X 13.8 cm, 80 grammes ; Prix : 25.19 € 9782072896309. Quantité : Dispo de 1 à 20 jours maxi. Le mot de l'éditeur; Biographie; Prix obtenus par cet auteur «En somme, je vais parler de ceux que j'aimais», écrit Albert Camus Dès qu’ils étaient au complet, ils partaient, promenant la raquette le long des grilles rouillées des jardins devant les maisons, avec un grand bruit qui réveillait le quartier et faisait bondir les chats endormis sous les glycines poussiéreuses. Ils couraient, traversant la rue, essayant de s’attraper, couverts déjà d’une bonne sueur, mais toujours dans la même direction, vers le champ, non loin de leur école, à quatre ou cinq rues de là. Mais il y avait une station obligatoire, à ce qu’on appelait le jet d’eau, sur une place assez grande, une énorme fontaine ronde à deux étages, où l’eau ne coulait pas, mais dont le bassin, depuis longtemps bouché, était rempli jusqu’à ras bord, de loin en loin, par les énormes pluies du pays. AlbertCAMUS, Le Premier Homme, 2000. 1. Kouba, Belcourt : quartiers d’Alger. 2. Almanach Vermot : calendrier comportant des jeux, des dessins humoristiques, des informations dans des domaines variés (météorologie, jardinage, cuisine, santé). Ministère de l’éducation nationale (DGESCO-IGEN) Juin 2012 £& ' ,- v *Çr- - e.,'- „ '^^A ••>"-' f*f. ' ,*' rin^ . J>, - V îU - jjÇ -V. - if^.ffllsHfc- if •• $. A *. Wr -. ffrlSn* s'. ’• i . y, -F ~ ¥ 40 •'.. ' - K % -'-ma v .. - ’• ; vl >Hvrï* *.** >, 5 ^" ! - v - . ; - ** * v ,, -*~. -^v ^. .. f K *$i .?'-• .* V/ ’ ^Y.%- v '.• ' .• V r * **i & *\ * .••** r '•' *îWJ’K-*. • ^ . lu' \- vtR ^. , r . u • - - 4i. -** “ . I ^ ; €ïâ I [. 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Le moment où il entra dans le monde était un temps de crise pour les mœurs nationales la puissance des grands, abaissée et contenue par l’administration despotique et vigoureuse du cardinal de Richelieu, cherchait encore à lutter contre l’autorité; mais à l’esprit de faction on avait substitué l’esprit d’intrigue. L’intrigue n’était pas alors ce qu’elle est aujourd’hui elle tenait à des mœurs plus fortes, et s’exercait sur des objets plus importants. On l’employait à se rendre nécessaire ou redoutable; aujourd’hui elle se borne à flatter et à plaire. Elle donnait de l’activité à l’esprit, au courage, aux talents, aux vertus même; elle n’exige aujourd’hui que de la souplesse et de la patience. Son but avait quelque chose de noble et d’imposant, c’était la domination et la puissance; aujourd’hui, petite dans ses vues comme dans ses moyens, la vanité et la fortune en sont le mobile et le terme. Elle tendait à unir les hommes; aujourd’hui elle les IT NOTICE isole. Plus dangereuse alors, elle embarrassait l’administration et arrêtait les progrès d’un bon gouvernement; aujourd’hui, favorable à l’autorité, elle ne fait que rapetisser les âmes et avilir les mœurs. Alors, comme aujourd’hui, les femmes en étaient les principaux instruments; mais l’amour, ou ce qu’on honorait de ce nom, avait une sorte d’éclat qui en impose encore, et s’ennoblissait un peu en se mêlant aux grands intérêts de l’ambition ; au lieu que la galanterie de nos jours, dégradée elle-même par les petits intérêts auxquels elle s’associe, dégrade et l’ambition et les ambitieux. L’esprit de faction se ranima à la mort de Richelieu, La minorité de Louis XIV parut aux grands un moment favorable pour reprendre quelque influence sur les affaires publiques. M. de La Rochefoucauld fut entraîné par le mouvement général; et des intérêts de galanterie concoururent à l’engager dans la guerre de la Fronde guerre ridicule, parce qu’elle se faisait sans objet, sans plan, et sans chef, et qu’elle n’avait pour mobile que l’inquiétude de quelques hommes, plus intrigants qu’ambitieux, fatigués seulement de l’inaction et de l’obéissance. II était alors l’amant de la duchesse de Longueville. On sait qu’ayant été blessé au combat de Saint-Antoine d’un coup de mousquet qui lui fit perdre quelque temps la vue, il s’appliqua ces deux vers connus de la tragédie d 'Alcyonée de Duryer Pour mériter son cœur, pour plaire à ses beaux yeux, J’ai fait la guerre aux rois, je l’aurais faite aux dieux. Lorsqu’il se brouilla ensuite avec madame de Longueville, il parodia ainsi ces vers Pour ce cœur inconstant, qu’enfin je connais mieux, J’ai fait la guerre aux rois, j’en ai perdu les yeux. On voit par la vie du duc de La Rochefoucauld qu’il s’en- SUR LA ROCHEFOUCAULD. T gageait aisément dans une intrigue, mais que bientôt il montrait pour en sortir autant d’impatience qu’il en avait mis à y entrer. C’est ee que lui reproche le cardinal de Retz, et ce qu’il attribue à une irrésolution naturelle qu’il ne sait comment expliquer. Il est aisé, ce me semble, de trouver dans le caractère de M. de La Rochefoucauld une cause plus vraisemblable de cette conduite. Avec sa douceur naturelle, sa facilité de mœurs, son goût pour la galanterie, il lui était difficile de ne pas entrer dans quelque parti au milieu d'une cour où tout était parti, et où l’on ne pouvait rester neutre sans être au moins accusé de faiblesse. Mais avec cette raison supérieure, cette probité sévère, cet esprit juste, conciliant et observateur, que ses contemporains ont reconnus en lui, comment eût-il pu s’accommoder longtemps de ces intrigues, où le bien public n’était tout au plus qu’un pré- texte; où chaque individu ne portait que ses passions et ses vues particulières, sans aucun but d’utilité générale ; où j les affaires les plus graves se traitaient sans décence et sans principes; où les plus grands intérêts étaient sans cesse sa- crifiés aux plus petits motifs; qui étaient enfin le scandale de la raison comme du gouvernement? L’esprit de parti tient à la nature des gouvernements libres il peut s’y concilier avec la vertu et le véritable patriotisme. Dans une monarchie il ne peut être suscité que par un sentiment d’indépendance ou par des vues d’ambition personnelle, également incompatibles avec un bon gouvernement; il y corrompt le germe de toutes les vertus, quoiqu’il pujssey mettre en activité des qualités brillantes qui ressemblent à des vertus. C’est ce que M. de La Rochefoucauld ne pouvait manquer de sentir. Ainsi, quoiqu’il eût été une partie de sa vie engagé dans des intrigues de parti, où sa facilité et VI NOTICE ses liaisons semblaient l’entretenir malgré lui, on voit que son caractère le ramenait à la vie privée, où il se fixa enfin, et où il sut jouir des charmes de l’amitié et des plaisirs de l’esprit. On connaît la tendre amitié qui l’unit jusqu’à la fin de fia vie à madame de La Fayette. Les lettres de madame de Sévigné nous apprennent que sa maison était le rendez- vous de ce qu’il y avait de plus distingué à la cour et à la ville par le nom, l’esprit, les talents, et la politesse. C’est au milieu de cette société choisie qu’il composa ses Mémoires et ses Réflexions morales. Ses Mémoires sont écrits avec une élégance noble et un grand air de sincérité; mais les événements qui en font le sujet ont beaucoup perdu de l’intérêt qu’ils avaient alors. On ne peut trop s’étonner que Bayle 1 ait donné la préférence à ces Mémoires sur les Commentaires de César; la postérité en a jugé bien autrement. Nous nous en tiendrons à ce mot de M. de Voltaire, dans la notice des écrivains du siècle de Louis XIV a Les Mémoires du' duc de La Rochefoucauld sont lus, et l’on sait par cœur ses Pen- sées. » C’est en effet le livre des Pensées qui a fait la réputation de M. de La Rochefoucauld. Nous ne le louerons qu’en citant encore M. de Voltaire quels éloges pourraient avoir plus de grâce et d’autorité? a Un des ouvrages, dit ce grand homme % qui contribuèrent le plus à former le e goût de la nation, et à lui donner un esprit de justesse b et de précision, fut le recueil des Maximes de François a duc de La Rochefoucauld. Quoiqu’il n’y ait presque a qu’une vérité dans ce livre, qui est que l’amour-propre a est le mobile de tout , cependant cette pensée se présente 1 Dictionnaire critique, article César. * Siècle de Louis XIV , chapitre xxxii, des beaux-arts. SUR LA ROCHEFOUCAULD. VII sous tant d’aspects variés, qu’elle est presque toujours piquante c’est moins un livre que des matériaux pour orner un livre. On lut avidement ce petit recueil il accoutuma à penser, et à renfermer ses pensées dans un tour vif, précis, et délicat. C’était un mérite que personne n’avait eu avant lui en Europe depuis la renais- sance des lettres. » Cet ouvrage parut d’abord anonyme. 11 excita une grande curiosité on le lut avec avidité, et on l’attaqua avec acharnement. On l’a réimprimé souvent, et on l’a traduit dans toutes les langues. Il a fait faire beaucoup d’autres livres ; partout enfin, et dans tous les temps, il a trouvé des admirateurs et des censeurs. C’est là, ce me semble, le sceau du plus grand succès pour les productions de l’esprit humain. On a accusé M. de La Rochefoucauld de calomnier la nature humaine le cardinal de Retz lui-même lui reproche de ne pas croire assez à la vertu. Cette imputation peut avoir quelque fondement ; mais il nous semble qu’on l’a poussée trop loin. M. de La Rochefoucauld a peint les hommes comme il les a vus. C’est dans les temps de factions et d’intrigues politiques qu’on a plus d’occasions de connaître les hommes et plus de motifs pour les observer c’est dans ce jeu continuel de toutes les passions humaines que les caractères se développent, que les faiblesses échappent, que l’hypocrisie se trahit, que l’intérêt personnel se mêle à tout, gouverne et corrompt tout. En regardant l’amour-propre comme le mobile de toutes les actions, M. de La Rochefoucauld ne prétendait pas énoncer un axiome rigoureux de métaphysique. Il n’exprimait qu’une vérité d’observation, assez générale pour être présentée sous cette forme absolue et tranchante qui convient à des pensées détachées, et qu’on emploie tous VIII NOTICE les jours dans la conversation et dans les livres, en généralisant des observations particulières. Il n’appartenait qu’à un homme d’une réputation bien pure et bien reconnue d’oser flétrir ainsi le principe de toutes les actions humaines. Mais il donnait l’exemple de toutes les vertus dont il paraissait contester même l’existence. Il semblait réduire l’amitié à un échange de bons offices, et jamais il n’y eut d’ami plus tendre, plus fidèle, et plus désintéressé. La bravoure personnelle, dit ma- dame de Maintenon, lui paraissait une folie, et à peine s’en cachait-il ; il était cependant fort brave. » Il donna des preuves de la plus grande valeur au siège de Bordeaux et au combat de Saint-Antoine. Sa vieillesse fut éprouvée par les douleurs les plus cruelles de l’âme et du corps. Il montra dans les unes la sensibilité la plus touchante, et dans les autres une fermeté extraordinaire. Son courage ne l’abandonna jamais que dans la perte des personnes qui lui étaient chères. Un de ses fils fut tué au passage du Bhin, et l’autre y fut blessé. J’ai vu, dit madame de Sévigné, son cœur à découvert dans cette cruelle aventure ; il est au premier rang de tout ce que je connais de courage, de mérite, de tendresse, et de raison je compte pour rien son esprit et ses agrc- ments. » La goutte le tourmenta pendant les dernières années de sa vie, et le fit périr dans des douleurs intolérables. Madame de Sévigné, qu’on ne peut se lasser de relire et de citer, peint d’une manière touchante les derniers moments de cet homme célèbre. Son état, dit-elle, est une chose digne d’admiration. Il est fort bien disposé pour sa conscience voilà qui est fait; mais du reste, c’est la maladie et la mort de son voisin dont il est question ; il n’en est pas effleuré.... Ce n’est pas inutilement qu’il SUR LA ROCHEFOUCAUD. IX a fait des réflexions toute sa vie; il s’est approché de telle sorte de ces derniers moments, qu’ils n’ont rien de nouveau ni d’étrange pour lui. » Il mourut en 1680, laissant une famille désolée et des amis inconsolables. Il avait reçu de ses ancêtres un nom illustre; il l’a transmis avec un nouvel éclat à des descendants dignes d’en ac croître l’honneur. Il y a des qualités héréditaires dans certaines familles. Le goût des lettres semble s’être perpétué dans la maison de La Rochefoucauld avec toutes les vertus des mœurs anciennes, unies à celles des temps plus éclairés. Charles-Quiut, à son voyage en France, fut reçu, en 1539, dans le château de Verteuil, par l’aïeule du duc de La Rochefoucauld. En quittant ce château l’empereur déclara, suivant les paroles d’un historien contemporain, n’avoir jamais entré en maison qui mieux sentît sa grande vertu, honnêteté, et seigneurie, que celle-là. » Un successeur de Charles-Quint aurait pu faire la même observation chez les descendants de l’auteur des Maximes. Le dernier des descendants du duc de La Rochefoucauld qui ait porté le titre de duc l’a honoré par ses vertus, et y a ajouté une triste illustration, par sa fin à jamais déplorable. Député de l’ordre de la noblesse aux états généraux, en 1789, il s’y montra ce qu’il avait été à la cour du monarque, l’ami sincère de la liberté et le zélé défenseur des droits du peuple ; il y donna sans efforts l’exempie de tous les sacrifices de fortune et de distinction que lui parut exiger l’intérêt public; mais il eut bientôt à gémir de l’inutilité de ses sacrifices, envoyant l’intrigue et l’esprit de faction déshonorer la plus belle des causes et tourner à la désorganisation de la société tout entière une révolution dont le but n’avait été d’abord que l'amélioration de l’état social. * NOTICE Après la dissolution de l’Assemblée constituante, il fnt nommé à la présidence du département de Paris. La considération personnelle dont il était environné et son iné- branlable fermeté dans tout ce qui était bon et juste ne pouvaient manquer de le rendre très-odieux aux vils bri- ' gands qui commençaient à s’emparer de la domination. ' C’est une vertu trop incommode, » disait l’un d’eux avec une féroce naïveté. Sa mort fut résolue. Il était allé à Forges, joindre sa mère et sa femme, deux personnes que l’union des plus rares vertus met au-dessus de tout éloge; il revenait avec elles par Gisors c’est là [u’après avoir été arrêté par une troupe de sicaires envoyés de Paris, il fut massacré avec une cruauté sans exemple, publiquement, en plein jour, presque sous les yeux de sa mère, de sa femme, et d’un ami, sans qu’au- i cune puissance humaine pût venir à son secours. Cet ami qui eut le malheur d’être témoin de cet horrible meurtre a rendu à M. de La Rochefoucauld un hommage qui mérite d’être recueilli ici. Une perte qui intéresse les sciences et les lettres, et qui surtout a dû porter une sombre affliction dans le cœur de tous ceux qui cultivent les vertus morales, ra nime toute ma sensibilité. Comment arracher de mon souvenir un assassinat commis sous mes yeux, et presque dans mes bras, sous les yeux et presque dans les bras de sa mèreetdesafemme?... Je m’acquitterai envers sa mémoire de ce tribut d’estime et de vénération que réclament ses j vertus; je dirai que sa conduite fut toujours d’accord avec les principes qu’il avait puisés dans une saine philosophie ; car il n’eut pas une pensée qui ne fût avouée par la raison et la justice ; il n’eut pas un désir qui ne fût dirigé vers l’utilité publique ; il n’eut pas une intention qui ne fût pure, qui ne fût exempte de toute tache d’intérêt per- SUR LA ROCHEFOUCAULD. xi sonnel ; il ne se permit pas une action, il ne hasarda pas une démarche, qui n’eût pour objet le plus grand avantage de son pays. Je pourrais me dispenser de le nommer il n’est personne qui se méprenne sur cet homme qui porta sans orgueil un nom illustre, qui re- nonça sans regret et sans ostentation aux distinctions les plus flatteuses, et qui força l’envie à lui pardonner une grande fortune, parce qu’il en jouissait avec simpli- cité et bienfaisance il n’est personne qui ne reconnaisse M. de La Rochefoucauld lorsque je parle de celui dont la vie privée fut une leçon de morale, comme sa vie politique fut une leçon de patriotisme éclairé.... Son amitié m’honorait depuis vingt ans ; depuis vingt ans je m’enorgueillissais de mes liaisons avec lui. Ses dernières paroles me furent adressées il recommandait à mes soins sa mère et sa femme, présentes à cet affreux spectacle, l’esprit croit toujours, pàrson habileté et par ses raisonnements, faire faire u au cœur ce qu’il veut ; mais il se trompe, il en est la dupe; c’est toujours le cœur qui fait agir l’esprit; l’on sert tous ses mouvements, malgré que * l’on en ait, et l’on les suit, même sans croire les suivre. > Aimé Maktln. 32 MAXIMES exil Les défauts de l’esprit augmentent en vieillissant, comme ceux du visage. cxm ll y a de bons mariages; mais il n’y en a point de délicieux. exiv On ne se peut consoler d’être trompé par ses ennemis et trahi par ses amis, et l’on est souvent satisfait de l’être par soi-même. cxv Il est aussi facile de se tromper soi-même sans s’en apercevoir, qu’il est difficile de tromper les autres sans qu’ils s’en aperçoivent. cxvi Rien n’est moins sincère que la manière de demander et de donner des conseils. Celui qui en demande paraît avoir une déférence respectueuse pour les sentiments de son ami, bien qu’il ne pense qu’à lui faire approuver les siens, et à le rendre garant de sa conduite; et celui qui conseille paye la confiance qu’on lui témoigne d’un zèle ardent et désintéressé, quoiqu’il ne cherche le plus souvent, dans les conseils qu’il donne, que son propre intérêt ou sa gloire. cxvuLa plus subtile de toutes les finesses est de savoir bien feindre de tomber dans les pièges qu’on nous tend ; et l’on n’est jamais si aisément trompé que quand on songe à tromperies autres. cxvm L’intention de ne jamais tromper nous expose à être souvent trompés. exix îious sommes si accoutumés à nous déguiser aux autres, qu’enfin nous nous déguisons à nous-même'. exx L’on fait plus souvent des trahisons par faiblesse que par un dessein formé de trahir. * f'ar. La coutume gue nous avons de nous déguiser aux autres » pour acquérir leur estime, fait qu’enfin nous nous déguisons à nous-même. 1665, n° 123, DE LA ROCHEFOUCAULD. 33 cxxi On l'ait souvent du bieu pour pouvoir impunément faire du mal. cxxii Si nous résistons à nos passions, c’est plus par leur faiblesse que par notre force. cxxiii On n’aurait guère de plaisir si on ne se flattait jamais. cxxiv Les plus habiles affectent toute leur vie de blâmer les finesses, pour s’en servir en quelque grande occasion et pour quelque grand intérêt. cxxv L’usage ordinaire de la finesse est la marque d’un petit esprit, et il arrive presque toujours que celui qui s’en sert pour se couvrir en un endroit se découvre en un autre. cxxvi Les finesses et les trahisons ne viennent que du manque d’habileté *. cxxvn Le vrai moyen d’être trompé, c’est de se croire plus fin que les autres. cxxviii La trop grande subtilité est une fausse délicatesse et la véritable délicatesse est une solide subtilité. cxxix 11 suffit quelquefois d’être grossier pour n’être pas trompé par un habile homme. cxxx La faiblesse est le seul défaut que l’on ne saurait corriger. cxxxi Le moindre défaut des femmes qui se sont abandonnées à faire l’amour, c’est de faire l’amour. * Var. Si on était toujours assez habile , on ne ferait jamais de finesses ni de trahisons. 1665, n° 128. 34 MAXIMES . Il est plus aisé d’être sage pour les autres qiue de l’être pour soi-même. cxxxm Les seules bonnes copies sont celles qui font voir le ridicule des méchants originaux *. cxxxiv On n’est jamais si ridicule parles qualités que l’on a que par celles que i’on affecte d’avoir. cxxxv On est quelquefois aussi différent de soi-même que des autres. cxxxvi Il y a des gens qui n’auraient jamais été amoureux s’ils n’avaient jamais entendu parler de l’amour. cxxxvn On parle peu quand la vanité ne fait pas parler {**. cxxxvm On aime mieux dire du mal de soi-même que de n’en point parler cxxxix Une des choses qui fait que l’on trouve à peu de gensquiparaissentraisonnables et agréables dans la conversation, c’est qu’il n’y a presque personne qui ne pense plutôt à ce qu’il veut dire qu'à répondre précisément à ce qu’on lui dit. Les plus habiles et les plus complaisants se contentent de montrer seulement une mine attentive, au même temps que l’on voit dans leurs yeux et dans leur esprit un égarement pour ce qu’on leur dit, et une précipitation pour retourner à ce qu’ils veulent dire ; au lieu de considérer que c’est un mauvais moyen de plaire aux autres ou de les persuader, que de chercher si fort à se plaire à soi-même, et que bien écouter et bien répondre est une des plus grandes perfections qu’on puisse avoir dans la conversation. * Far, Dans l’édition ae 1666 , qui est celle où cette réflexion a paru pour la première fois, on lit des excellents originaux, au lieu de des méchants originaux- "* Var. Quand la vanité ne fait point parler, on n’a pas envie de dire grand’- chose. 1665, n DE LA ROCHEFOUCAULD. 3!> Ccxl Un homme d’esprit serait souvent bien embarrassé sans la compagnie des sots. cxli Nous nous vantons souvent de ne nous point ennuyer, etnous sommes si glorieux, que nous ne voulons pas nous trouver de mauvaise compagnie *. cxlii Comme c’est le caractère des grands esprits de faire entendre en peu de paroles beaucoup de choses, les petits esprits, au contraire, ont le don de beaucoup parler et de ne rien dire. cxliii C’est plutôt par l’estime de nos propressentiments que nous exagérons les bonnes qualités des autres, que par l’estime de leur mérite ; et nous voulons nous attirer des louanges lorsqu’il semble que nous leur en donnons. cxliv On n’aime point à louer, et on ne loue jamais personne sans intérêt. La louange est une flatterie habile, cachée et délicate, qui satisfait différemment celui qui la donne et celui qui la reçoit l’un la prend comme une récompense de son mérite ; l’autre la donne pour faire remarquer son équité et son discernement. cxlv Nous choisissons souvent des louanges empoisonnées , qui font voir par contre-coup en ceux que nous louons des défauts que nous n’osons découvrir d’une autre sorte. cxlvi On ne loue d’ordinaire que pour être loué. cxlvii Peu de gens sont assez sages pour préférer le blâme qui leur est utile à la louange qui les trahit. cxlviii Il y a des reproches qui louent, et des louanges qui médisent. * e"ar. On se vante souvent mal à propos de ne se point ennuyer ; et l’homme est si glorieux, qu’il ne veut pas se trouver de mauvaise compagnie. 1665, n° 143. 3G MAXIMES cxlix Le refus des louanges est un désir d’être loué deux I fois *• cl Le désir de mériter les louanges qu’on nous donne j fortifie notre vertu ; et celles que l’on donne à l’esprit, à la valeur l et à la beauté, contribuent à les augmenter **. j cli Il est plus difficile de s’empêcher d’être gouverné que 1 de gouverner les autres *. clii Si nous ne nous flattions pas nous-même, la flatterie des autres ne nous pourrait nuire. clui La nature fait le mérite, et la fortune la met en œuvre. ; i cliv La fortune nous corrige de plusieurs défauts que la ! raison ne saurait corriger. i clv Il y a des gens dégoûtants avec du mérite, et d’autres qui plaisent avec des défauts ***. clvi Il y a des gens dont tout le mérite consiste à dire et à faire des sottises utilement, et qui gâteraient tout s’ils changeaient de conduite. * Far. La modestie qui semble refuser les louanges n’est en effet qu’un désir d’en avoir de plus délicates. 1665, n° 147. *+ Far, L’approbation que l’on donne à l’esprit, à la beauté et à la valeur, Jes augmente, les perfectionne, et leur fait faire de plus grands effets qu’ils n’auraient été capables de faire d’eux-mêmes, 1665, n 156. 1 Thémistode, montrant son fils, disait que c’était le plus puissant homme de la Grèce pour ce que les Athéniens commandent au demourant de la Grèce, je commande aux Athéniens, sa mère à moi, et lui à sa mère » *. Aimé Martin . *** F’ar. Comme il y a de bonnes viandes qui affadissent le cœur, il t a un mérite fade, et des personnes qui dégoûtent avec des qualités bonnes et estimables. 1665, n° 162. Plutarque, Âpophthegme», DE LA ROCHEFOUCAULD. 37 clvii La gloire des grands hommes se doit toujours mesurer aux moyens dont ils se sont servis pour l’acquérir. clviii La flatterie est une fausse monnaie qui n'a de cours que par notre vanité. clix Ce n’est pas assez d’avoir de grandes qualités, il en ut avoir l’économie. clx Quelque éclatante que soit une action, elle ne doit pas passer pour grande lorsqu’elle n’est pas l’effet d’un grand dessein. clxi 11 doit y avoir une certaine proportion entre les actions et les desseins, si on en veut tirer tous les effets qu’elles peuvent produire. clxii L’art de savoir bien mettre en oeuvre de médiocres qualités dérobe l’estime, et donne souvent plus de réputation que le véritable mérite. clxiii Il y a une infinité de conduites qui paraissent ridicules , et dont les raisons cachées sont très-sages et très- solides. clxiv Il est plus facile de paraître digne des emplois qu’on n’a pas que de ceux que l’on exerce clxv Notre mérite nous attire l’estime des honnêtes gens, et notre étoile celle du public. 1 Dans les premières éditions l'auteur disait Il va des gens qui parais- sent mériter certains emplois, dont ils font voir eux-mêmes qu'ils sont indignes. » D'après une remarque de Segrais, cette maxime fut faite à l'occasion de madame de Montausier, à qui la cour fit oublier tous ses anciens amis. La tournure de la pensée, telle que l'auteur i'a refaite, parait empruntée de Tacite, qui disait, en parlant d’un empereur romain • 11 eût paru digne de l'empire s’il n'avait jamais régné. • Aimé Martin. MAXIMES, SENTENCES ETC. > 38 MAXIMES clxvi Le monde récompense plus souvent les apparences du mérite que le mérite même. clxvti L’avarice est plus opposée à l’économie que la libéralité. clxviii L’espérance, toute trompeuse qu’elle est, sert au moins à nous mener à la fin de la vie par un chemin agréable. clxix Pendant que la paresse et la timidité nous retiennent dans notre devoir, notre vertu en a souvent tout l’honneur *. ctxx Il est difficile de juger si un procédé net, sincère et honnête, est un effet de probité ou d’habileté. clxxi Les vertus se perdent dans l’intérêt, comme les fleuves se perdent dans la mer. clxxii Si on examine bien les divers effets de l’ennui, on trouvera qu’il fait manquer à plus de devoirs que l’intérêt. clxxiii Il y a diverses sortes de curiosités l’une d’intérêt, qui nous porte à désirer d’apprendre ce qui nous peut être utile ; et l’autre d’orgueil, qui vient du désir de savoir ce que les autres ignorent **. clxxiv 11 vaut mieux employer notre esprit à supporter les infortunes qui nous arrivent, qu’à prévoir celles qui nous peuvent arriver. clxxv La constance en amour est une inconstance perpé- * Var. Pendant que la paresse et la timidité ont seules le mérite de nous tenir dans notre devoir, notre vertu en a tout l’honneur. 1665, n 177. *** Par. La curiosité n’est pas, comme l’on croit, un simple amour de la nouveauté; il y en a une d’intérêt, qui fait que nous voulons savoir les choses pour nous en prévaloir; il yen aune autre d’orgueil, qui nous donne envie d’être au-dessus de ceux qui ignorent les choses, et de n’être pas au-dessous de ceux qui les savent. 1665 n° 1S2. N. DE LA ROCHEFOUCAULD 39 luelle, qui fait que notre cœur s’attache successivement à toutes les qualités de la personne que nous aimons , donnant tantôt la préférence à l’une, tantôt à l’autre ; de sorte que cette constance n’est qu’une inconstance arrêtée et renfermée dans un même sujet. clxxvi 11 y a deux sortes de constance en amour l’une vient de ce que l’on trouve sans cesse dans la personne que l’on aime de nouveaux sujets d’aimer; et l’autre vient de ce que l’on se fait un honneur d’être constant. clxxvii La persévérance n’est digne ni de blâme ni de louange, parce qu’elle n’est que la durée des goûts et des sentiments , qu’on De s’ôte et qu’on ne se donne point. clxxviii Ce qui nous fait aimer les nouvelles connaissances n’est pas tant la lassitude que nous avons des vieilles , ou le plaisir de changer, que le dégoût de n’être pas assez admirés de ceux qui nous connaissent trop, et l’espérance del’être davantage de ceux qui ne nous connaissent pas tant. clxxix Nous nous plaignons quelquefois légèrement de nos amis, pour justifier par avance notre légèreté. clxxx Notre repentir n’est pas tant un regret du mal que nous avons fait, qu’une crainte de celui qui nous en peut arriver. clxxxi Il y a une inconstance qui vient delà légèreté de l’esprit, ou de sa faiblesse, qui lui fait recevoir toutes les opinions d’autrui ; et il y en a une autre, qui est plus excusable, qui vient du dégoût des choses. clxxxii Les vices entrent dans la composition des vertus, comme les poisons entrent dans la composition des remèdes. La prudence les assemble et les tempère, et elle s’en sert utilement contre les maux de la vie. 40 MAXIMES clxxxiii Il faut demeurer d’accord, à l’honneur delà vertu, que les plus grands malheurs des hommes sont ceux où ils tom- I bent par les crimes. 1 clxxxiv Nous avouons nos défauts, pour réparer par notre I sincérité le tort qu’ils nous font dans l’esprit des autres *. j clxxxv Il y a des héros en mal comme en bien. jj clxxxvi On ne méprise pas tous ceux qui ont des vices ; 5 mais on méprise tous ceux qui n’ont aucune vertu **. clxxxvii Le nom de la vertu sert à l’intérêt aussi utilement > que les vices. ; 1 CLXxxyiii La santé de l’âme n’est pas plus assurée que celle J du corps ; et quoique l’on paraisse éloigné des passions, on n’est j pas moins en danger de s’y laisser emporter que de tomber j malade quand on se porte bien. ^ clxxxïx 11 semble que la nature ait prescrit à chaque i homme, dès sa naissance , des bornes pour les vertus et pour les vices. \ cxc Il n’appartient qu’aux grands hommes d’avoir de -> grands défauts. j cxci On peut dire que les vices nous attendent dans le ’ cours de la vie, comme des hôtes chez qui il faut successivement j loger ; et je doute que l’expérience nous les fît éviter, s’il nous j était permis de faire deux fois le chemin r . * Far. Nous avouons nos défauts, afio qu’en donnant bonne opinion ue justice de notre esprit, nous réparions le tort qu’ils nous ont fait dans l’esprit des autres 16Gb, n° 193. Nous n’avouons jamais nos défauts que par vanité 1665, n° 200. ** Far. On peut haïr et mépriser les vices, sans haïr et mépriser les vicieux ; mais on a toujours du mépris pour ceux qui manquent de vertu. 1665, n° 195. 1 Pour bien entendre la pensée de La Rochefoucauld il faut substituer le DE LA ROCHEFOUCAULD. 4l cxcii Quand les vices nous quittent, nous nous flattons j de la créance que c’est nous qui les quittons. 1 I cxcui Il y a des rechutes dans les maladies de l’âme comme dans celles du corps. Ce que nous prenons pour notre guérison t’est le plus souvent qu’un relâche ou un changement de mal. i cxciv Les défauts de l’âme sont comme les blessures du corps quelque soin qu’on prenne de les guérir, la cicatrice paraît toujours, et elles sont à tout moment en danger de se rouvrir. cxcv Ce qui nous empêche souvent de nous abandonner à un seul vice est que nous en avons plusieurs. cxcvr Nous oublions aisément nos fautes lorsqu’elles ne sont sues que de nous *. cxcvn Il y a des gens de qui l’on peut ne jamais croire du mal sans l’avoir vu ; mais il n’y en a point en qui il nous doive surprendre en le voyant. i cxcviii Nous élevons la gloire des uns pour abaisser celle ' des autres; et quelquefois on louerait moins monsieur le Prince et monsieur de Turenne si on ne les voulait point blâmer tous i deux. { ! cxcix Le désir de paraître habile empêche souvent de le ; devenir. ce La vertu n’irait pas si loin si la vanité ne lui tenait compagnie. mot passion au mot vice. Vauvenargues a dit L’utilité de la vertu est si manifeste, que les méchants la pratiquent par intérêt.,» Aimé Martin. * Far, Quand il n’y a que nous qui savons nos crimes ils sont bientôt oubliés. 1665 , n° 207. MAXIMES tl cci Celui qui croit pouvoir trouver en soi -même de qud se passer de tout le monde se trompe fort ; mais celui qui iroit qu’on ne peut se passer de lui se trompe encore davantage. ccii Les faux honnêtes gens sont ceux qui déguisent loirs défauts aux autres et à eux-mêmes ; les vrais honnêtes gens ;onl ceux qui les connaissent parfaitement et les confessent. ccm Le vrai honnête homme est celui qui ne se piqus de rien. ccrv La sévérité des femmes est un ajustement et un ard qu’elles ajoutent à leur beauté *. ccv L’honnêteté des femmes est souvent l’amour de eur réputation et de leur repos. ccvi C’est être véritablement honnête homme que de Xu- loir être toujours exposé à la vue des honnêtes gens. ccvn La folie nous suit dans tous les temps de la vie Si quelqu’un paraît sage, c’est seulement parce que ses folies ont proportionnées à son âge et à sa fortune. ccvm Il y a des gens niais qui se connaissent et qubm- ploient habilement leur niaiserie. ccix Qui vit sans folie n’est pas si sage qu’il croit. ccx En vieillissant on devient plus fou et plus sage. ccxi Il y a des gens qui ressemblent aux vaudevilles, q’on ne chante qu’un certain temps **. M Var. Dans la première édition la pensée se terminait ainsi C'et nn aitrait fin et délicat, et une douceur déguisée. * 1665, n° 216. ** yar. 11 y des gens qui ressemblent aux vaudevilles, que tout le ronde hante un certain temps, quelque fades et dégoûtants qu’ils soient. 1665, n°?23j DE LA ROCHEFOUCAULD. 43 ,'ccxn La plupart des gens ne jugent des hommes que par la vogue qu’ils ont ou par leur fortune. ccxiii L’amour de la gloire, la crainte de la honte, le dessein de faire fortune, le désir de rendre notre vie commode et agréable, et l’envie d’abaisser les autres, sont souvent les causes de cette valeur si célèbre parmi les hommes. ccxiv La valeur est dans les simples soldats un métier périlleux qu’ils ont pris pour gagner leur vie. ccxv La parfaite valeur et la poltronnerie complète sont deux extrémités où l’on arrive rarement. L’espace qui est entre deux est vaste, et contient toutes les autres espèces de courage. Il n’y a pas moins de différence entre elles qu’entre les visages et les humeurs. Il y a des hommes qui s’exposent volontiers au commencement d’une action et qui se relâchent et se rebutent aisément par sa durée. Il y en a qui sont contents quand ils ont satisfait à l’honneur du monde, et qui font fort peu de chose au delà. On en voit qui ne sont pas toujours également maîtres de leur peur. D’autres se laissent quelquefois entraîner à des terreurs générales ; d’autres vont à la charge parce qu’ils n’osent demeurer dans leurs postes. Il s’en trouve à qui l’habitude des moindres périls affermit le courage et les prépare à s’exposer à de plus grands. Il y en a qui sont braves à coups d’épée et qui craignent les coups de mousquet ; d’autressont assurés aux coups de mousquet et appréhendent de se battre à coups d’épée. Tous ces courages de différentes espèces conviennent en ce que la nuit augmentant la crainte et cachant les bonnes et les mauvaises actions, elle donne la liberté de se ménager. Il y a encore un autre ménagement plus général car on ne voit point d’homme qui fasse tout ce qu’il serait capable de faire dans une occasion s’il était assuré d’en revenir ; de sorte qu’il est visible que la crainte de la mort ôte quelque chose de la valeur. ccxvi La parfaite valeur est de faire sans témoins ce qu’or serait capable de faire devant tout le monde. 44 MAXIMES ccxvii L’intrépidité est une force extraordinaire de l’âme, qui l’élève au-dessus des troubles, des désordres et des émotions que la vue des grands périls pourrait exciter en elle ; et c’est par cette force que les héros se maintiennent en un état paisible , et conservent l’usage libre de leur raison dans les accidents les plus surprenants et les plus terribles. ccxvm L’bypocrisie est un hommage que le vice rend à la vertu. ccxix La plupart des hommes s’exposent assez dans la guerre pour sauver leur honneur; mais peu se veulent toujours exposer autant qu’il est nécessaire pour faire réussir le dessein pour lequel ils s’exposent. ccxx La vanité, la honte et surtout le tempérament, font .souvent la valeur des hommes et la vertu des femmes. ccxxi On ne veut point perdre la vie, et on veut acquérir de la gloire ce qui fait que les braves ont plus d’adresse et d’esprit pour éviter la mort que les gens de chicane n’en ont pour conserver leur bien. ccxxn Il n’v a guère de personnes qui dans le premier penchant de l’âge ne fassent connaître par où leur corps et leur esprit doivent défaillir. ccxxm Il est delà reconnaissance comme de la bonne foi des marchands elle entretient le commerce ; et nous ne payons pas parce qu’il est juste de nous acquitter, mais pour trouver plus facilement des gens qui nous prêtent. ccxxiv Tous ceux qui s’acquittent des devoirs de la reconnaissance ne peuvent pas pour cela se flatter d’être reconnaissants. ccxxv Ce qui fait le mécompte dans la reconnaissance qu’on DE LA ROCHEFOUCAULD. 45 attend des grâces que l’on a faites, c’est que l’orgueil de celui qui donne et l’orgueil de celui qui reçoit ne peuvent convenir du bienfait. ccxxvi Le trop grand empressement qu’on a de s’acquitter j d’une obligation est une espèce d’ingratitude. ccxxvii Les gens heureux ne se corrigent guère ; ils croieni toujours avoir raison quand la fortune soutient leur mauvaise conduite. ccxxvm L’orgueil ne veut pas devoir, et l’amour-propre ne veut pas payer. tccxxixLe bien que nous avons reçu de quelqu’un veut que nous respections le mal qu’il nous fait *. i ccxxx Rien n’est si contagieux que l’exemple, et nous ne faisons jamais de grands biens ni de grands maux qui n’en produisent de semblables. Nous imitons les bonnes actions par émulation, et les mauvaises par la malignité de notre nature , que la honte retenait prisonnière et que l’exemple met en liberté. vccx txi C’est une grande folie de vouloir être sage tout seul ccxxxii Quelque prétexte que nous donnions à nos affections, ce n’est souvent que l'intérêt et la vanité qui les causent. ccxxxiii Il y adans les afflictions diverses sortes d’hypocrisie. Dans l une, sous prétexte de pleurer la perte d’une personne qui nous est chère, nous nous pleurons nous-même; nous regrettons la bonne opinion qu’elle avait de nous ; nous pleurons la diminution de notre bien, de notre plaisir, de notre considération. Ainsi les morts ont l’honneur des larmes qui ne coulent * Var. Le bien qu’on nous a fait veut que nous respections le mal que l’on nous fait après. 1665 , n. 243. 46 MAXIMES que pour les vivants. Je dis que c’est une espèce d’hypocrisie, à cause que dans ces sortes d’afflictions on se trompe soi-même. 11 y a une autre hypocrisie qui n’est pas si innocente, parce qu’elle impose à tout le monde c’est l’affliction de certaines personnes qui aspirentà la gloire d’une belle et immortelle douleur. Après que le temps, qui consume tout, a fait cesser celle qu’elles avaient en effet, elles ne laissent pas d’opiniâtrer leurs pleurs , leurs plaintes et leurs soupirs ; elles prennent un personnage lugubre, et travaillent à persuader, par toutes leurs actions, que leur déplaisir ne finira qu’avec leur vie. Cette triste et fatigante vanité se trouve d’ordinaire dans les femmes ambitieuses. Comme leur sexe leur ferme tous les chemins qui mènent à la gloire, elles s’efforcent de se rendre célèbres par la montre d’une inconsolable affliction. Il y a encore une autre espèce de larmes qui n’ont que de petites sources, qui coulent et se tarissent facilement. On pleure pour avoir la réputation d’être tendre, on pleure pour être plaint, on pleure pour être pleuré, enfin on pleure pour éviter la honte de ne pleurer pas. * ccxxxiv C’est plus souvent par orgueil que par défaut de lumières qu’on s’oppose avec tant d’opiniâtreté aux opinions les plus suivies on trouve les premières places prises dans le bon parti, et on ne veut point des dernières. ccxxxv Nous nous consolons aisément des disgrâces de nos amis lorsqu’elles servent à signaler notre tendresse pour eux. ccxxxvi 11 semble que l’amour-propre soit la dupe de la bonté, et qu’il s’oublie lui-même lorsque nous travaillons pour l’avantage des autres. Cependant c’est prendre le chemin le plus assuré pour arriver à ses fins ; c’est prêter à usure, sous prétexte de donner; c’est enfin s’acquérir tout le monde par uu moyen subtil et délicat *. * Vax, Qui considéra superficiellement tous les effets de la bonté qui noue fait sortir hors de nous-même, et qui nous immole continuellement à l’avantage de tout le monde , sera tenté de croire que lorsqu’elle agit l’amour*propre s’oublie et s’abandonne lui-même, ou se laisse dépouiller et appauvrir sans s’en apercevoir. De sorte qu'il semble que l’amour-propre soit la dupe de la bonté t DK LA ROCHEFOUCAULD, 47 » ccxxxvn Nul ne mérite d’être loué de sa bonté s’il n’a pat la force d’être méchant. Toute autre bonté n’est le plus souvent qu’une paresse ou une impuissance de la volonté *. ccxxxvnjIl n’est pas si dangereux de faire du mal à la plupart des hommes que de leur faire trop de bien. ccxxxix Rien ne flatte plus notre orgueil que la confiant des grands, parce que nous la regardons comme un effet de notre mérite, sans considérer qu’elle ne vient le plus souvent que de vanité ou d'impuissance de garder le secret. ocxl On peut dire de l’agrément séparé de la beauté, que c’est une symétrie dont on ne sait point les règles, et un rapport secret des traits ensemble et des traits avec les couleurs et avec l'air de la personne. ccxli j La coquetterie est le fond de l’humeur des femmes; mais toutes ne la mettent pas en pratique, parce que la coquetterie de quelques-unes est retenue par la crainte ou par la raison. ccxlii On incommode souvent les autres quand on croit ne les pouvoir jamais incommoder. ccxliii Il y a peu de choses impossibles d’elles-mêmes ; et l’application pour les faire réussir nous manque plus que les moyens. ccxli v La souveraine habileté consiste à bien connaître le prix des choses. cependant c’est le plus utile de tous les moyens dont l’amour-propre se sert pour arriver à ses fins; c’est un chemin dérobé par où il revient à lui-même plus riche et plus abondant, c’est un désintéressement qu’il met à une furieuse usure , c’est enfin un ressort délicat avec lequel il réunit, il dispose et tourne tous les hommes en sa faveur. 1665, n. 250. 1 11 est facile de reconnaître que la maxime de La Rochefoucauld est encore une critique du caractère d’Anne d’Auiri ,he. Aime 48 MAXIMES ccxlv C’est une grande habileté que de savoir cacher son habileté. ccxlvi Ce qui paraît générosité n’est souvent qu’une ambition déguisée, qui méprise de petits intérêts pour aller à de plus grands. ccxLVtiLa fidélité qui paraît en la plupart des hommes n’est qu’une invention de l’amour-propre pour attirer la confiance; c’est un moyen de nous élever au-dessus des autres, et de nous rendre dépositaires des choses les plus importantes * ccxlviii La magnanimité méprise tout pour avoir tout. ccxlixII n’v a pas moins d’éloquence dans le ton de la voix, dans les yeux et dans l’air de la personne, que dans le choix des paroles. cci. La véritable éloquence consiste à dire tout ce qu’il faut, et à ne dire que ce qu’il faut. ccli 11 y a des personnes à qui les défauts siéent bien, * f'ar. La fidélité est une invention rare de l’amour-propre, par laquelle l’homme, s’érigeant en dépositaire des choses précieuses, se rend lui-même infiniment précieux; de tous les trafics de l’amour-propre, c’est celui où il fai 4 ; le moins d’avances et de plus grands profits, c’est un raffinement de sa politique avec lequel il engage les hommes par leurs biens, par leur honneur, par leur liberté et par leur vie, qu'ils sont forcés de confier en quelques occasions, à élever l’homme fidèle au-dessus de tout le monde. 1665, n° 269. 1 Avec une semblable idée de la lidélité, comment La Rochefoucauld a-t-il pu se plaindre de l’ingratitude d’Anne d'Autriche? Cette reine ne pouvait- elle pas lui dire Vous avez été fidèle à mes intérêts, mais c’était une inven- tion de votre amour-propre pour attirer ma confiance , que je ne puis vous donner; en un mot, je ne dois aucune reconnaissance à une idélité dont j’ai été le but et non l’objet? Qu’aurait-il pu répondre? L’auteur aurait dû dire La fidélité qui parait en la plupart des courtisans, et non la plupart des hommes. Quand on a eu le malheur de vivre à la cour, on peut avoir acquis le droit de juger les courtisans, mais non celui de calomnier le genre humain. Aimé Mabtin. DE LA ROCHEFOUCAULD. 49 , et d’autres qui sont disgraciées avec leurs bonnes qualités [ cclti Il est aussi ordinaire de voir changer les goûts qu’il f est extraordinaire de voir changer les inclinations. I ccliii L’intérét met en œuvre toutes sortes de vertus et de vices. ccliv L’humilité n’est souvent qu’une feinte soumission dont on se sert pour soumettre les autres. C’est un artifice de l’orgueil, qui s’abaisse pour s’élever; et bien qu’il se transforme en mille manières, il n’est jamais mieux déguisé et plus capable de tromper que lorsqu’il se cache sous la figure de l’humilité. ! cclv Tous les sentiments ont chacun un ton de voix , des } gestes et des mines qui leur sont propres ; et ce rapport, bon ou mauvais, agréable ou désagréable, est ce qui fait que les per- 1 sonnes plaisent ou déplaisent. cclvi Dans toutes les professions, chacun affecte une mine et un extérieur pour paraître ce qu’il veut qu’on le croie. Ainsi on peut dire que le monde n’est composé que de mines. ^ cclvii La gravité est un mystère du corps, inventé pour cacher les défauts de l’esprit. cclyxii Lebon goût vient plus du jugement quede l’esprit. ccltx Le plaisir de l’amour est d’aimer, et l’on est plus j heuçeux par la passion que l’on a que par celle que l’on donne. ; cclx La civilité est un désir d’en recevoir et d’être es- timé poli. I 1 Répétitions des maximes 90, U>3 et 275. Ainsi, dans un des ouvrages les t olus courts de notre langue la même pensée se retrouve quatre fois. ! Aime .Martin. 50 MAXIMES cclxi L’éducation que l’on donne d’ordinaire aux jeunes gens est un second amour-propre qu’on leur inspire. ccLxnIl n’y a point de passion où l’amour de soi-même règne si puissamment que dans l’amour ; et on est toujours plus disposé à sacrifier le repos de ce qu’on aime qu’à perdre le sien 1 Comme si Ton pouvait sacrifier le repos de ce qu’on aime sans perdre le sien ! Remarquez que l’amour de soi n’est ici que l’égoïsme. Helvétius et les philosophes du dix-huitième siècle ne l'ont pas autrement entendu. Ils savaient bien qu’avilir l’origine de nos sentiments, c’était avilir l’homme; et comme La Rochefoucauld, leur maître, ils espéraient nous dérober la vérité à la laveur d’une définition incomplète. L’amour de soi existe dans tous les hommes; mais il se partage en deux sentiments divers, qu’il est important de bien distinguer l’un nous dirige vers les choses physiques, l’autre vers les choses morales. C’est le double flambeau de notre double nature. Nous donnons au premier le nom d 'intérêt physique, parce qu'il est le moteur de toutes les actions qui n’ont d’autre but que le bien-être matériel ; intérêt trom* peur, qui nous persuade trop souvent que le mal peut produire le bien. La débauche, les friponneries, la lâcheté, ce qui amuse les sens, ce qui sauve le corps aux dépens de la vertu, sont les objets de cette passion. Mais il est un intérêt d'un ordre supérieur, qui, loin de nuire à la pureté de nos actions, les rend dignes des regards de Dieu ; nous lui donnons le nom d 'intérêt moral , parce que, négligeant tous lesbiens matériels, il ne s’attache qu’à ceux de l’aine; et il ne faut pas le considérer comme l’ennemi du corps, il n'est que l’ennemi des excès. Ainsi i’ainour de soi se divise en deux intérêts de l’un vient notre faiblesse, de l’autre vient notre force; l’un est un faux calcul de l’esprit, l’autre est une sublime inspiration de l’ame ; et comme nous donnons au premier le nom d’égoïsme, nous donnerons au second le nom de sagesse. Pris dans ce dernier sens, l’amour de soi devient un sentiment que la conscience éclaire et qui produit la vertu ; et pour tout résoudre par un exemple, voyez ce que l’intérêt physique fit de Tibère et de Cromwell, voyez ce que l’intérêt moral fit de Socrate et de Fénelon. Cette distinction peut jeter un grand jour non-seulement sur le livre de La Rochefoucauld, mais encore sur ceux d’Helvétius et de ses disciples. Si tout nous semble vil dans l’homme des philosophes, c'est qu'ils ont confondu, a dessein, ces deux sortes d’intérêt, ou, pour mieux dire, c’est qu’ils ont présenté l’intérêt physique comme le mobile de toutes nos actions, quoiqu’il ne soit que la source de nos vices. Quant à la maxime qui a servi de texte à ces réflexions, elle reçoit naturellement l’application de nos principes. Celui qui est plus disposé à sacrifier le repos de ce qu'il aime qu'à perdre le sien n’aime pas même sa maîtresse comme il devrait aimer son prochain; DE LA ROCHEFOUCAULD. 51 cclxih Ce qu’on nomme libéralité n’est le plus souvent que la vanité de donner, que nous aimons mieux que ce que nous donnons et si l’on veut appeler cela de l’amour, il ne faut pas au moins en chercher la source dans l’intérêt moral. En terminant, nous remarquerons que la maxime de La Rochefoucauld a été mise envers par Corneille, dans la troisième scène du premier acte de liérénice, et, sans examiner si de pareilles idées sont bien à leur place dans une tragédie, nous mettrons sous les yeux du lecteur ce passage vraiment singulier DOMITIEN. Je trouve peu de jour à croire qu’elle m'aime, Quand elle ne regarde et n’aime que soi-mème. ALBIN. Seigneur, s’il m'est permis de parler librement, Dans toute la nature aime-t-on autrement? L’amour propre est la source en nous de tous les autre» ; C’en est le sentiment qui forme tous les nôtres Lui seul allume , éteint ou change nos désirs, Les objets de nos vœux le sont de nos plaisirs. VouS'même qui brûlez d’une ardeur si fidèle. Aimez-vous Domitie, ou vos plaisirs en elle? Et quand vous aspirez ù des liens si doux , Est-ce pour l'amour d'elle ou pour l’amour de vous? De sa possession l’aimable et chère idée Tient vos sens enchantés et votre âme obsédée; Mais si vous connaissiez quelques desseins meilleurs, Vous porteriez bientôt toute cette âme ailleurs. Sa conquête est pour vous le comble des délices ; Vous ne vous figurez ailleurs que dos supplices ; C’est par là qu'elle seule a droit de vous charmer, Et vous n’aimez que vous quand vous croyez l’aimer. Aimé Martin. L’action de celui qui donne étant celle d’un égoïste, les sentiments de celui qui reçoit seront ceux d’un ingrat, Quepenseriez-vousd’un malheureux dont une main généreuse viendrait soulager la misère, et qui remercierait son bienfaiteur en lui disant ; Foire libéralité n’est que de la vanité , que vous aimez mieux que ce que vous me donnez ? Est-ce donc là ce que votre philosophie peut nous apprendre? Certes, on ne saurait trop le répéter, une maxime i[ui pourrait détruire le repos du genre humain ne peut être qu’une maxime fausse. Ici vous tuez la reconnaissance dans l’ame du malheureux; plus loin, vous tuerez la pitié dans l’âine du bienfaiteur. Vous ôtez à la créature la plus faible les deux seuls refuges de sa misère, la pitié et la bienfaisance. Je ne dis rien de la religion, vous n’en parlez pas ; et pour remplacer ces biens estimables, je ne vois dans votre livre que le mépris de nous-mêmes, la crainte de la mort, la haine des hommes et l’oubli de Dieu ! 'Aimé Martin. 52 MAXIMES cclxiv La pitié est souvent un sentiment de nos propres maux dans les maux d’autrui. C’est une habile prévoyance des malheurs où nous pouvons tomber. Nous donnonsdu secours aux autres, pourles engagera nousen donner en de semblables occasions; et ces services que nous leur rendons sont, à proprement parler, des biens que nous nous faisons à nous-même par avance 1 . cclxv La petitesse de l’esprit fait l’opiniâtreté, et nous ne croyons pas aisément ce qui est au delà de ce que nous voyons. cclxvi C’est se tromper que de croire qu’il n’y ait que les violentes passions , comme l’ambition et l'amour, qui puissent triompher des autres La paresse, toute languissante qu’elle est, ne laisse pas d’en être souvent la maîtresse ; elle usurpe sur tous les desseins et sur toutes les actions de la vie ; elle y détruit et y consume insensiblement les passions et les vertus. ccnxvii La promptitude à croire le mal sans l’avoir assez examiné est un effet de l’orgueil et delà paresse. On veut trouver des coupables , et on ne veut pas se donner la peine d’examiner les crimes. cclxviii Nous récusons des juges pourles plus petits intérêts, et nous voulons bien que notre réputation et notre gloir dépendent du jugement des hommes, qui nous sont tous contraires , ou par leur jalousie ou par leur préoccupation, ou par leur peu de lumières ; et ce n’est que pour les faire prononcer en notre faveur que nous exposons en tant de manières notre repos et notre vie. cclxix Il n’v a guère d’homme assez habile pour connaître tout le mal qu’il fait. 1 Dans le portrait que La Rochefoucauld a tracé de lui-même est un passage sur la pitié qui prouve combien il était loin de l'envisager comme J. J. Rousseau, uni a dit La pitié est un sentiment naturel, qui tend à modérer dans chacun l'activité de l’amour de soi » Aimé Mahtin. y • Distours sur l'origine de l'inégalité. DE LA ROCHEFOUCAULD. 53 L’honneur acquis est caution de celui qu’on doit acquérir. cclxxi La jeunesse est une ivresse continuelle; c’est la lièvre de la raison *. cclxxii Rien ne devrait plus humilier les hommes qui ont mérité de grandes louanges, que le soin qu’ils prennent encore de se faire valoir par de petites choses. cclxxiii Il y a des gens qu’on approuve dans le monde, qui n’ont pour tout mérite que les vices qui servent au commerce de la vie. cclxxi v La grâce de la nouveauté est à l’amour ce que la fleur est sur les fruits elle y donne un lustre qui s’efface aisément, et qui ne revient jamais. I cclxxv Le bon naturel, qui se vante d’être si sensible, est j souvent étouffé par le moindre intérêt. t cclxxvi L’absence diminue les médiocres passions, et augmente les grandes, comme le vent éteint les bougies et allume le feu. ccLXXvnLesfemmescroientsouventaimer, encore qu’elles n’aiment pas. L’occupation d’une intrigue, l'émotion d’esprit que donne la galanterie, la pente naturelle au plaisir d’être aimées, et la peine de refuser, leur persuadent qu’elles ont de la passion lorsqu’elles n’ont que de la coquetterie. cclxxv i T i Ce qui fait que l’on est souvent mécontent de ceux qui négocient, est qu’ils abandonnent presque toujours l’intérêt de leurs amis pour l’intérêt du succès de la négociation, * P'ur. La jeunesse est une ivresse continuelle c’est la fièvre de la santé c’est la folie de la raison. 1665, n. 295. 54 MAXIMES qui devient le leur par l’honneur d’avoir réussi à ce qu’ils avaient entrepris. cclxxix Quand nous exagérons la tendresse que nos amis ont pour nous, c’est souvent moins par reconnaissance que par le désir de faire juger de notre mérite. cclxxx L’approbation que l’on donne à ceux qui entrent dans le monde vient souvent de l’envie secrète que l’on porte à ceux qui y sont établis. cclxxxi L’orgueil, qui nous inspire tant d’envie, nous sert souvent aussi à la modérer. cclxxxii Il y a des faussetés déguisées qui représentent si bien la vérité, que ce serait mal juger que de ne s’y pas laisser tromper. cclxxxiii Il n’y a pas quelquefois moins d’habileté à savoii profiter d’un bon conseil qu’à se bien conseiller soi-même. cclxxxi v Il y ades méchants qui seraient moins dangereux s'ils n’avaient aucune bonté. cclxxx v La magnanimité est assez définie par son nom; néanmoins on pourrait dire que c’est le bon sens de l’orgueil et la voie la plus noble pour recevoir des louanges . cclxxxvi Il est impossible d’aimer une seconde fois ce qu’on a véritablement cessé d’aimer. cclxxxvii Ce n’est pas tant la fertilité de l’esprit qui nous 1 Cett fi pensée est encore une preuve que l’auteur n*a vouiu juger que la ïour et les hommes de cour ; car la magnanimité est une vertu de prince, comme la démence c’est pour eux seuls que ces mots existent. Dans le nonde vulgaire ces vertus prennent le nom de bonté et de générosité. Aixm Maktin. DE LA ROCHEFOUCAULD. 5 r , fait trouver plusieurs expédients sur une même affaire, que c’est le défaut de lumières qui nous fait arrêter à tout ce qui se présente à notre imagination , et qui nous empêche de discerner d’abord ce qui est le meilleur. cclxxxviii Il y a des affaires et des maladies que les remèdes aigrissent en certains temps ; et la grande habileté consiste à connaître quand il est dangereux d’en user. ccLxxxixLa simplicité affectée est une imposture délicate ccxcrilly a plus de défauts dans l’humeur que dans l’esprit. ccxci Le mérite des hommes a sa saison aussi bien que les fruits. ecxcii On peut dire de l’humeur des hommes comme de la plupart des bâtiments, qu’elle a diverses faces les unes agréables et les autres désagréables. ccxciii La modération ne peut avoir le mérite de combat tre l’ambition et de la soumettre elles ne se trouvent jamais ensemble. La modération est la langueur et la paresse de l’âme, comme l’ambition en est l’activité et l’ardeur *. ccxciv Nous aimons toujours ceux qui nous admirent, et nous n’aimons pas toujours ceux que nous admirons. jccxcv 11 s’en faut bien que nous ne connaissions toutes nos volontés **. * Var. La modération dans la plupart des hommes n'a garde de combattre et de soumettre l'ambition , puisqu’elles ne se peuvent trouver ensemble; la modération n’étant d’ordinaire qu’une paresse , une langueur, et un manque de courage de manière qu’on peut justement dire, à leur égard, que la modération est une bassesse de l’âme, comme l’ambition en est l’élévation. 1665, n. 17. ** Var. Comment peut-on répondre de ce qu’on voudra à l’avenir, puisque l’on ne sait pas précisément ce tme l’on veut dans le temps présent? 1665, n. 74. AXIMES Ofi ccxcvi Il est difficile d’aimer ceux que nous n’estimons point ; mais il ne l’est pas moins d'aimer ceux que nous estimons beaucoup plus que nous. ccxcvn Les humeurs du corps ont un cours ordinaire et réglé, qui meut et qui tourne imperceptiblement notre volonté. Elles roulent ensemble, et exercent successivement un empire secret en nous de sorte qu’elles ont une part considérable à toutes nos actions, sans que nous le puissions connaître. ccxcviii La reconnaissance delà plupart des hommes n’est qu’une secrète envie de recevoir de plus grands bienfaits. ccxcxx Presque tout le monde prend plaisir à s’acquitter des petites obligations beaucoup de gens ont de la reconnaissance pour les médiocres ; mais il n’y a quasi personne qui n’ait de l’ingratitude pour les grandes. ccc U y a des folies qui se prennent comme les maladies contagieuses. ccci Assez de gens méprisent le bien , mais peu savent le donner. cccii Ce n’est d'ordinaire que dans de petits intérêts où nous prenons le hasard de ne pas croire aux apparences. cccin Quelque bien qu’on nous dise de nous , on ne nous apprend rien de nouveau. ccciv Nous pardonnons souvent à ceux qui nous ennuient; mais nous ne pouvons pardonner à ceux que nous ennuyons. cccv L’intérêt, que l’on accuse de tous nos crimes, mérite souvent d’être loué de nos bonnes actions. DE LA ROCHEFOUCAULD. 57 cccvr On ne trouve guère d’ingrats tant qu’on est en état de faire du bien. Il est aussi honnête d’être glorieux avec soi-même qu’il est ridicule de l’être avec les autres. cccvm On a fait une vertu de la modération, pour borner l’ambition des grands hommes, et pour consoler les gens médiocres de leur peu de fortune et de leur peu de mérite. cccix 11 y a des gens destinés à être sots qui ne font pas seulement des sottises par leur choix, mais que la fortune même contraint d’en faire. cccx Il arrive quelquefois des accidents dans la vie, d’où il faut être un peu fou pour se bien tirer. cccxt S’il y a des hommes dont le ridicule n’aitjamais paru, c’est qu’on ne l’a jamais bien cherché. cccxn Ce qui fait que les amants et les maîtresses ne s’ennuient point d’être ensemble, c’est qu’ils parlent toujours d’eux- triêmes. cccxiii Pourquoi faut-il que nous ayons assez de mémoire pour retenir jusqu’aux moindres particularités de ce qui nous est arrivé, et que nous n’en ayons pas assez pour nous souvenir combien de fois nous les avons contées à une même personne ? cccxïy L’extrême plaisir que nous prenons à parler de nous-même nous doit faire craindre de n’en donner guère à ceux qui nous écoutent. cccxv Ce qui nous empêche d’ordinaire de faire voir le fond de notre cœur à nos amis n’est pas tant la défiance que nous avons d’eux, que celle que nous avons de nous-même. 58 MAXIMES cccxvi Les personnes faibles ne peuvent être sincères. cccxvn Ce n’est pas un grand malheur d’obliger des ingrats ; mais c’en est un insupportable d’être obligé à uu malhonnête homme. cccxviii On trouve des moyens pour guérir de la folie, mais on n’en trouve point pour redresser un esprit de travers cccxix On ne saurait conserver longtemps les sentiments qu’on doit avoir pour ses amis et pour ses bienfaiteurs, si on se laisse la liberté de parler souvent de leurs défauts. cccxx Louer les princes des vertus qu’ils n’ont pas, c'est leur dire impunément des injures. cccxxi Mous sommes plus près d’aimer ceux qui nous haïssent, que ceux qui nous aiment plus que nous ne voulons. cccxxn Il n’y a que ceux qui sont méprisables qui craignent d’être méprisés. cccxxin Notre sagesse n’est pas moins à la merci de la fortune que nos biens. cccxxiv Il y a dans la jalousie plus d’amour-propre que d’amour. cccxxv Nous nous consolons souvent par faiblesse des maux dont la raison n’a pas la force de nous consoler. cccxxyi Le ridicule déshonore plus que le déshonneur 1 . cccxxvii Nous n’avouons de petits défauts que pour persuader que nous n’en avons pas de grands. ' Le ridicule peut être nuisible, mais il ne déshonore pas ; c'est le vice ciui déshonore. Aimé Martin. DE LA ROCHEFOUCAULD. 59 ^cccxxvm L’envie est plus irréconciliable que la haine. cccxxix On croit quelquefois haïr la flatterie; mais on ne nait que la manière de flatter. cccxxx On pardonne tant que l’on aime. cccxxxi 11 est plus difficile d’être fidèle à sa maîtresse quand on est heureux que quand on en est maltraité. cccxxxn Les femmes ne connaissent pas toute leur coquetterie cccxxxiii Les femmes n’ont point de sévérité complète sans aversion. cccxxxiv Les femmes peuvent moins surmonter leur coquetterie que leur passion '. cccxxxv Dans l’amour la tromperie va presque toujours plus loin que la méfiance. cccxxxvi U y a une certaine sorte d’amour dont l’excès empêche la jalousie. cccxxxvii Il est de certaines bonnes qualités comme des sens ceux qui en sont entièrement privés ne les peuvent apercevoir ni les comprendre. cccxxxviii Lorsque notre haine est trop vive elle nous met au-dessous de ceux que nous haïssons. cccxxxix Nous ne ressentons nos biens et nos maux qu’à proportion de notre amour-propre 1 2 . 1 Cette pensée est modifiée et même réfutée par les maximes 549 et 376. 2 Je voudrais que La Rochefoucauld pût me dire comme l’amour-propre lui vint en aide lorsqu’en 1672 il apprit en un même jour qu’un de ses fiis 60 MAXIMES cccxl L’esprit delà plupart des femmes sert plus à fortifier leur folie que leur raison. cccxli Les passions de la jeunesse ne sont guère plus opposées au salut que la tiédeur des vieilles gens. cccxiai L’accent du pays où l’on est né demeure dans Pexprit et dans le cœur comme dans le langage. cccxuii Pour être un grand homme il faut savoir profiter de toute sa fortune. cccxliv La plupart des hommes ont, comme les plantes, des propriétés cachées que le hasard fait découvrir. cccxlv Les occasions nous font connaître aux autres, et encore plus à nous-même. cccxlyi 11 ne peut y avoir de règle dans l’esprit ni dans le cœur des femmes si le tempérament n’en est d’accord. cccxlyii Nous ne trouvons guère de gens de bon sens que ceux qui sont de notre avis. cccxlvui Quand on aime on doute souvent de ce que l’on croit le plus '. était mort au passage du Rhin, un autre blessé, et que la cour pleurait la perte du jeune duc de Longueville, qu’il chérissait comme ses propres enfants. Madame de Sévigné, témoin de ce désastre, écrit à sa fille J’ai vu son cœur a découvert dans cette cruelle aventure il est au premier rang de ce que j’ai jamais vu de courage, de mérite, de tendresse et de raison; je compte pour rien son esprit et son agrément. » Et, en elTet, que peuvent l'esprit et l’agrément où il ne faut que du courage et de la résignation? Combien madame de Sévigné, dans ces quatre lignes, nous fait regretter que La Rochefoucauld ait si souvent fait usage de cet esprit, de cet agrément qu’elle compte pour rien, et qu’il ait presque toujours craint d’exprimer les sentiments de ce cœur généreux dont elle admirait la résignation ! Aimé Martin. Vous vous en rapportez plus à vos yeux qu’à moi, disait une femme à son amant ; vous ne m’aimrz donc plus. Aimé Martin. DE LiA ROCHEFOUCAULD. 61 cccxlix Le plus grand miracle de l’amour, c’est de guérir de la coquetterie. cccl Ce qui nous donne tant d’aigreur contre ceux qui nous font des finesses, c’est qu’ils croient être plus habiles que nous. cccu On a bien de la peine à rompre quand on ne s’aime plus. t ccclii On s’ennuie presque toujours avec les gens avec qui il n’est pas permis de s’ennuyer. cccliii Un honnête homme peut être amoureux comme un fou, mais non pas comme un sot. cccliv Il y a de certains défauts qui, bien mis en oeuvre, brillent plus que la vertu même. ccclv On perd quelquefois des personnes qu’on regrette plus qu’on n’en est affligé , et d’autres dont on est affligé et qu’on ne regrette guère. ccclvi Nous ne louons d’ordinaire de bon cœur que ceux qui nous admirent. ccclvii Les petits esprits sont trop blessés des petites choses ; les grands esprits les voient toutes, et n’en sont point blessés. ccclviii L’humilité est la véritable preuve des vertus chrétiennes sans elle nous conservons tous nos défauts, et ils sont seulement couverts par l’orgueil qui les cache aux autres, et souvent à nous-même. ccclix Les infidélités devraient éteindre l’amour, et il ne faudrait point être jaloux quand on a sujet de l’être. 11 n’y a que 4 62 MAXIMES les personnes qui évitent de donner de la jalousie qui soient dignes qu’on en ait pour elles. ccclx On se décrie beaucoup plus auprès de nous par les moindres infidélités qu’on nous fait que par les plus grandes qu’on fait aux autres { ccclxi La jalousie naît toujours avec l’amour; mais elle ne meurt pas toujours avec lui. ccclxi i La plupart des femmes ne pleurent pas tant la mort de leurs amants pour les avoir aimés que pour paraître plus dignes d’être aimées. ccclxiii Les violences qu’on nous fait nous font souvent moins de peine que celles que nous nous faisons à nous- même. ccclxiv On sait assez qu’il ne faut guère parler de sa femme ; mais on ne sait pas assez qu'on devrait encore moins parler de soi. ccclxv Il y a de bonnes qualités qui dégénèrent en défauts , quand elles sont naturelles , et d’autres qui ne sont jamais parfaites , quand elles sont acquises. Il faut, par exemple, que la raison nous fasse ménager de notre bien et de notre confiance ; 1 Ainsi La Rochefoucauld trouvait tout naturel que, pour favoriser son ambition et son amour, la belle madame de Longueville eût oublié ce qu’elle devait à son mari, à sa souveraine, à sa patrie, et à elle-même ; et il ne put lui pardonner l'inclination qu’il crut reconnaître en elle pour le duc de Nemours. Devenu l’ennemi de celle qu’il avait aimée, il passa si rapidement de la reconnaissance à l’ingratitude, que plus tard tout le monde pût le reconnaître dans cette autre maxime de son livre ' Plutarque, Jpophthegmet des Lacédémoniens, § 69. 72 MAXIMES à faire naître des occasions qu’à profiter de celles qui se présentent. ccccliv Il n’y a guère d’occasion où l’on fit un méchant marché de renoncer au bien qu’on dit de nous à condition de n’en dire point de mal. cccclv Quelque disposition qu’ait le monde à mai juger, il fait encore plus souvent grâce au faux mérite qu’il ne fait injustice au véritable. cccclvi On est quelquefois un sot avec de l’esprit ; mais on ne l’est jamais avec du jugement. cccclvii Nous gagnerions plus de nous laisser voir tels que nous sommes, que d’essayer de paraître ce que nous ne sommes pas. cccclvui Nos ennemis approchent plus de la vérité dans les jugements qu’ils font de nous, que nous n’en approchons nous-mêmes. cccclix Il y a plusieurs remèdes qui guérissent de l’amour mais il n’y en a point d’infaillible. cccclx Il s’en faut bien que nous connaissions tout ce que nos passions nous font faire. cccclxi La vieillesse est un tyran qui défend, sous peine de la vie, tous les plaisirs de la jeunesse. Le même orgueil qui nous fait blâmer iss défauts dont nous nous croyons exempts nous porte à mépriser les nonnes qualités que nous n’avons pas. cccclxiii Il y a souvent plus d’orgueil que de bonté à plaindre les malheurs de nos ennemis ; c’est pour leur faire sentir que DE LA ROCHEFOUCAULD. 73 nous sommes au-dessus d’eux, que nous leur donnons des marques de compassion. cccclxiv Il y a un excès de biens et de maux qui passe, notre sensibilité. cccclxv Il s’en faut bien que l’innocence trouve autant de protection que le crime. cccclxyi De toutes les passions violentes, celle qui sied le moins mal aux femmes, c’est l’amour. cccclxvii La vanité nous fait faire plus de choses contre notre goût que la raison. cccclxviii 11 y a des méchantes qualités qui font de grands talents. cccclxix On ne souhaite jamais ardemment ce qu’on ne souhaite que par raison. { cccclxx Toutes nos qualités sont incertaines et douteuses, en bien comme en mal ; et elles sont presque toutes à la merci des occasions. cccclxxi Dans les premières passions les femmes aiment l’amant, et dans les autres elles aiment l’amour. cccclxxii L’orgueil a ses bizarreries commeles autres passions on a honte d’avouer que l’on ait de la jalousie, et on se fait honneur d’en avoir eu et d’être capable d’en avoir. cccclxxiii Quelque rare que soit le véritable amour, il l’est encore moins que la véritable amitié. cccclxxiv Il y a peu de femmes dont le mérite dure plus que la beauté. ETC. 74 MAXIMES cccclxxv L’envie d’être plaint ou d’être admiré fait souven la plus grande partie de notre confiance. cccclxxvi Notre envie dure toujours plus longtemps que le üonheur de ceux que nous envions. cccclxxvii La même fermeté qui sert à résister à l’amour sert aussi à le rendre violent et durable ; etles personnes faibles, qui sont tou jours agitées des passions, n’en sont presque jamais véritablement remplies. cccclxxviii L’imagination ne saurait inventer tant de diverses contrariétés qu’il y en a naturellement dans le cœur de chaque personne. cccclxxix Il n’y a que les personnes qui ont de la fermeté qui puissent avoir une véritable douceur ; celles qui paraissent douces n’ont ordinairement que de la faiblesse, qui se convertit aisément en aigreur cccclxxx La timidité est un défaut dont il est dangereux de reprendre les personnes qu’on en veut corriger. cccclxxxi Rien n’est plus rare que la véritable bonté ; ceux même qui croient en avoir n’ont d’ordinaire que de la complaisance ou de la faiblesse. cccclxxxh L’esprit s’attache par paresse et par constance à ce qui lui est facile ou agréable. Cette habitude met toujours des bornes à nos connaissances ; et jamais personne ne s’est donné la peine d’étendre et de conduire son esprit aussi loin qu’il pourrait aller. cccclxxxiii On est d’ordinaire plus médisant par vanité que par malice. cccclxxxi v Quand on a le cœur encore agité par les restes DE LA ROCHEFOUCAULD. 75 d’une passion, on est plus près d’en prendre une nouvelle que quand on est entièrement guéri. cccclxxxv Ceux qui ont eu de grandes passions se trouvent toute leur vie heureux et malheureux d’en être guéris. cccclxxxvi Il y a encore plus de gens sans intérêtque sans envie. cccclxxxvii Nous avons plus de paresse dans l’esprit que dans le corps. ccccLxxxvmLe calme ou l’agitation de notre humeur ne dépend pas tant de ce qui nous arrive de plus considérable dans la vie, que d’un arrangement commode ou désagréable de petites choses qui arrivent tous les jours. cccclxxxix Quelque méchants que soient les hommes, ils n’oseraient paraître ennemis de la vertu ; et lorsqu’ils la veulent persécuter, ils feignent de croire qu’elle est fausse ou ils lui supposent des crimes. ccccxc On passe souvent de l’amour à l’ambition; mais on ne revient guère de l’ambition à l’amour. ccccxci L’extrême avarice se méprend presque toujours; il n’y a point de passion qui s’éloigne plus souvent de son but, ni sur qui le présent ait tant de pouvoir, au préjudice de l’avenir. ccccxcii L’avarice produit souvent des effets contraires il y a un nombre infini de gens qui sacrifient tout leur bien à des espérances douteuses et éloignées ; d’autres méprisent de grands avantages à venir pour de petits intérêts présents'. 1 L'auteur confond ici l'avidité, la cupidité et l'avarice, passions qui ont peut-être une source commune, mais dont les effets sont bien différents 16 MAXIMES ccccxcm Il semble que les hommes ne se trouvent pas assez de défauts ils en augmentent encore le nombre par de certaines qualités singulières, dont ils affectent de se parer, et ils les cultivent avec tant de soin, qu’elles devienneut à la fin des défauts naturels qu’il ne dépend plus d’eux de corriger. ccccxcivCe quifaitvoirqueleshommes connaissent mieux leurs fautes qu’on ne pense, c’est qu’ils n’ont jamais tort quand on les entend parler de leur conduite le même amour-propre qui les aveugle d’ordinaire les éclaire alors, et leur donne des vues si justes, qu’il leur fait supprimer ou déguiser les moindres choses qui peuvent être condamnées. ccccxcv Il faut que les jeunes gens qui entrent dans le monde soient honteux ou étourdis un air capable et composé se tourne d’ordinaire en impertinence. ccccxcvi Les querelles ne dureraient pas longtemps si le tort n’était que d’un côté. ccccxcvn 11 ne sert de rien d’être jeune sans être belle, ni d’être belle sans être jeune. ccccxcviii Il y a des personnes si légères et si frivoles, qu’elles sont aussi éloignées d’avoir de véritables défauts que des qualités solides. ccccxcix On ne compte d’ordinaire la première galanterie des femmes que lorsqu’elles en ont une seconde. L'homme avide est presque toujours pressé de posséder, et souvent il sacrifie de grands avantages à venir à de petits intérêts présents le cupide, au contraire, méprise les avantages présents pour de grandes espérances dans l'avenir tous deux veulent posséder et jouir. Mais l’avare possède et ne jouit que du plaisir de posséder, il ne hasarde rien, il ne donne rien, il n’espère rien ; toute sa vie est concentrée dans son coffre-fort; hors de là, il n'a plus de besoin t Aimé Martin. , DE LA ROCHEFOUCAULD 17 d Il v a des gens si remplis d’eux-mêmes, que lorsqu'ils sont amoureux ils trouvent moyen d’être occupés de leur passion sans l’être de la personne qu’ils aiment. ni L’amour, tout agréable qu’il est, plaît encore plus parles manières dont il se montre que par lui-même. du Peu d’esprit avec de la droiture ennuie moins, à la longue, que beaucoup d’esprit avec du travers. diii La jalousie est le plus grand de tous les maux , et celui qui fait le moins de pitié aux personnes qui le causent. div Après avoir parlé de la fausseté de tant de vertus apparentes, il est raisonnable de dire quelque chose de la fausseté du mépris de la mort. J’entends parler de ce mépris de la mort que les païens se vantent de tirer de leurs propres forces, sans l’espérance d’une meilleure vie. Il y a différence entre souffrir la mort constamment et la mépriser. Le premier est assez ordinaire ; mais je crois que l’autre u’est jamais sincère. On a écrit néanmoins tout ce qui peut le plus persuader que la mort n’est point un mal ; et les hommes les plus faibles, aussi bien que les héros, ont donné mille exemples célèbres pour établir cette opinion. Cependant je doute que personne de bon sens l’ait jamais cru ; et la peine que l’on prend pour le persuader aux autres et à soi-même fait assez voir que cette entreprise n’est pas aisée. On peut avoir divers sujets de dégoût dans la vie ; mais on n’a jamais raison de mépriser la mort. Ceux même qui se la donnent volontairement ne la comptent pas pour si peu de chose, et ils s’en étonnent et la rejettent comme les autres lorsqu’elle vient à eux par une autre voie que celle qu’ils ont choisie. L’inégalité que l’on remarque dans le courage d’un nombre infini de vaillants hommes vient de ce que la mort se découvre différemment à leur imagination , et y paraît plus présente en un temps qu’en un autre. Ainsi il arrrive qu’après avoir méprisé ce qu’ils ne connaissent pas ils craignent enfin ce qu’ils connaissent. Il faut éviter de l’envisager avec toutes ses 78 MAXIMES circonstances, si on ne veut pas croire qu’elle soit le plus grand de tous les maux. Les plus habiles et les plus braves sont ceux qui prennent de plus honnêtes prétextes pour s’empêcher de la considérer ; mais tout homme qui la sait voir telle qu’elle est trouve que c’est une chose épouvantable. La nécessité de mourir faisait toute la constance des philosophes. Ils croyaient qu’il fallait aller de bonne grâce où l’on ne saurait s’empêcher d’aller ; et, ne pouvant éterniser leur vie, il n’y avait rien qu’ils ne fissent pour éterniser leur réputation et sauver du naufrage ce qui en peut être garanti. Contentons-nous, pour faire bonne mine, de ne nous pas dire à nous-mêmes tout ce que nous en pensons, et espérons plus de notre tempérament que de ces faibles raisonnements qui nous font croire que nous pouvons approcher de la mort avec indifférence. La gloire de mourir avec fermeté, l'espérance d’être regretté, le désir de laisser une belle réputation , l’assurance d’être affranchi des misères de la vie, et de ne dépendre plus des caprices de la fortune, sont des remèdes qu’on ne doit pas rejeter. Mais on ne doit pas croire aussi qu’ils soient infaillibles. Ils font pour nous assurer ce qu’une simple haie fait souvent à la guerre pour assurer ceux qui doivent approcher d’un lieu d’où l’on tire quand on en est éloigné, on s’imagine qu’elle peut mettre à couvert; mais quand on en est proche, on trouve que c’est un faible secours. C’est nous flatter de croire que la mort nous paraisse de près ce que nous en avons jugé de loin, et que nos sentiments , qui ne sont que faiblesse, soient d’une trempe assez forte pour ne point souffrir d’atteinte par la plus rude de toutes les épreuves. C’est aussi mal connaître les effets de l’amour-propre, que de penser qu’il puisse nous aider à compter pour rien ce qui le doit nécessairement détruire; et la raison , dans laquelle on croit trouver tant de ressources, est trop faible en cette rencontre pour nous persuader ce que nous voulons. C’est elle, au contraire, qui nous trahit le plus souvent, et qui, au lieu de nous inspirer le mépris de la mort, sert à nous découvrir ce qu’elle a d’affreux et de terrible. Tout ce qu’elle peut faire pour nous est de nous conseiller d’en détourner les yeux pour les arrêter sur d’autres objets. Caton et Brutus en choisirent d’illustres. Un laquais se contenta. DE LA ROCHEFOUCAULD. 79 il y a quelque temps, de danser sur l’échafaud où il allait être roué. Ainsi, bien que les motifs soient différents, ils produisent les mêmes effets de sorte qu’il est vrai que, quelque disproportion qu’il y ait entre les grands hommes et les gens du commun, on a vu mille fois les uns et les autres recevoir la mort d’un même visage; mais c’a toujours été avec cette différence , que dans le mépris que les grands hommes font paraître pour la mort c’est l’amour de la gloire qui leur en ôte la vue, et dans les gens du commun ce n’est qu’un effet de leur peu de lumières, qui les empêche de connaître la grandeur de leur mal, et leur laisse la liberté de penser à autre chose. PREMIER SUPPLÉMENT \ i L’amour-propre est l’amour de soi-même et de toutes choses pour soi ; il rend les hommes idolâtres d’eux-mêmes, el les rendrait les tyrans des autres si la fortune leur en donnait les moyens il ne se repose jamais hors de soi, et ne s’arrête dans les sujets étrangers que comme les abeilles sur les fleurs, pour en tirer ce qui lui est propre. Rien n’est si impétueux que ses désirs, rien de si caché que ses desseins, rien de si habile que ses conduites ses souplesses ne se peuvent représenter, ses transformations passent celles des métamorphoses et ses raffinements ceux de la chimie. On ne peut sonder la profondeur ni percer les ténèbres de ses abîmes. Là il est à couvert des yeux les plus pénétrants ; il y fait mille insensibles tours et retours. Là il est souvent invisible à lui-même il y conçoit, il y nourrit et il y elève, sans le savoir, un grand nombre d’affections et de haines ; il en forme de si monstrueuses, que lorsqu’il les a mises au jour, il les méconnaît, ou il ne peut se résoudre à les avouer. De cette nuit qui le couvre naissent les ridicules persuasions qu’il a de lui-même; de là viennent ses erreurs, ses ignorances, ses grossièretés et ses niaiseries sur son sujet ; de là vient qu’il croit que ses sentiments sont morts lorsqu’ils ne sont qu’endormis ; qu’il s’imagine n’avoir plus envie de courir dès qu’il se repose, et qu’il pense avoir perdu tous les goûts qu’il a rassasiés. Mais cette obscurité épaisse qui le cache à lui-même n’empêche pas qu’il ne voie parfaitement ce qui est hors de lui ; en quoi il est semblable à nos yeux, qui découvrent tout et sont aveugles seulement pour eux-mêmes. En effet, dans ses plus grands intérêts et dans ses plus importantes affaires, où la violence de ses sou- 1 Ces pensées, extraites des premières éditions, avaient été supprimées par l'auteur dans les éditions postérieures. MAXIMES DE LA ROCHEFOUCAULD. 81 haits appelle toute son attention, il voit, il sent, il entend, il imagine, il soupçonne, il pénètre, il devine tout ; de sorte qu’on est tenté de croire que chacune de ses passions a une espèce de magie qui lui est propre. Rien n’est si intime et si fort que ses attachements, qu’il essaye de rompre inutilement à la vue des malheurs extrêmes qui le menacent. Cependant il fait quelquefois en peu de temps, et sans aucun effort, ce qu’il n’a pu faire avec tous ceux dont il est capable dans le cours de plusieurs années d’où l’on pourrait conclure assez vraisemblablement que c’est par lui-même que ses désirs sont allumés, plutôt que par la beauté et par le mérite de ses objets; que son goût est le prix qui les relève et le fard qui les embellit; que c’est après lui- même qu’il court, et qu’il suit son gré lorsqu’il suit les choses qui sont à son gré. Il est tous les contraires il est impérieux et obéissant, sincère et dissimulé, miséricordieux et cruel, timide et audacieux. Il a de différentes inclinations, selon la diversité des tempéraments, qui le tournent et le dévouent tantôt à la gloire, tantôt aux richesses, et tantôt aux plaisirs. Il en change selon le changement de nos âges, de nos fortunes et de nos expériences ; mais il lui est indifférent d’en avoir plusieurs ou de n’en avoir qu’une, parce qu'il se partage en plusieurs, et se ramasse en une quand il le faut, et comme il lui plaît. 11 est inconstant, et, outre les changements qui viennent des causes étrangères, il y en a une infinité qui naissent de lui et de son propre fonds. 11 est inconstant d'inconstance, de légèreté, d’autour, de nouveauté, de lassitude et de dégoût. Il est capricieux, et on le voit quelquefois travailler avec le dernier empressement et avec des travaux incroyables à obtenir des choses qui ne lui sont point avantageuses, et qui même lui sont nuisibles, mais qu’il poursuit parce qu’il les veut. Il est bizarre, et met souvent toute son application dans les emplois les plus frivoles ; il trouve tout son plaisir dans les plus fades, et conserve toute sa fierté dans les plus méprisables. Il est dans tous les états de la vie et dans toutes les conditions il vit partout, et il vit de tout ; il vit de rien, il s’accommode des choses et de leur privation ; il passe même dans le parti des gens qui lui font la guerre ; il entre dans leurs desseins, et, ce qui est admirable, il se hait lui- 82 MAXIMES même avec eux; il conjure sa perte, il travaille lui-même à sa ruine; enfin il ne se soucie que d’être, et pourvu qu’il soit, il veut bien être son ennemi. Il ne faut donc pas s’étonner s’il se joint quelquefois à la plus rude austérité, et s’il entre si hardiment eu société avec elle pour se détruire, parce que dans le même temps qu'il se ruine en un endroit il se rétablit en un autre. Quand on pense qu’il quitte son plaisir, il ne fait que le suspendre ou le changer ; et lors même qu’il est vaincu et qu’on croit en être défait , on le retrouve qui triomphe dans sa propre défaite. Voilà la peinture de l’amour-propre, donttoutela vie n’est qu’une grande et longue agitation. La mer en est une image sensible ; et l’amour-propre trouve dans le flux et le reflux de ses vagues continuelles une fidèle expression de la succession turbulente de ses pensées et de ses éternels mouvements. Édition de 1665, n° 1. n Toutes les passions ne sont autre chose que les divers degrés de la chaleur et de la froideur du sang. 1G65, n» 13. m La modération dans la bonne fortune n’est que l’appréhension de la honte qui suit l’em portement, ou la peur de perdre ce que l’on a. 1665, n° 18. iv La modération est comme la sobriété; on voudrait bien manger davantage, maison craint de se faire mal. 1665, n° 21. v Tout le monde trouve à redire en autrui ce qu’on trouve à redire en lui. 1665, n°33. VI L’orgueil, comme lassé de ses artifices et de ses différentes métamorphoses, après avoir joué tout seul les personnages de la comédie humaine, se montre avec un visage naturel, et se découvre par la fierté ; de sorte qu’à proprement parler la fierté est l’éclat et la déclaration de l’orgueil. 1665, n° 37. vu C’est une espèce de bonheur de connaître jusques a quel point on doit être malheureux. 1665,n ü 53. DE LA ROCHEFOUCAULD. 83 viii Quand onne trouve pas son repos en soi-même, il est inutile de le chercher ailleurs. 1665,n°55. ix Il faudrait pouvoir répondre de sa fortune, pour pouvoir répondre de ce que l’on fera. 1665,n°70. x L’amour est à l’âme de celui qui aime ce que l’âme est au corps qu’elle anime. 1665, n° 77. xi Comme on n’est jamais en liberté d’aimer, ou de cesser d’aimer, l’amant ne peut se plaindre avec justice de l’inconstance de sa maîtresse, ni elle de la légèreté de son amant. 1665, n° 81. xu La justice dans les juges qui sont modérés n’est que l’amour de leur élévation. 1665,n°89. xixi Quand nous sommes las d’aimer, nous sommes bien aises que l’on devienne infidèle pour nous dégager de notre Gdé* lité -. 1665,n°85. xrv Le premier mouvement de joie que nous avons du bonheur de nos amis ne vient ni de la bonté de notre naturel, ni de l’amitié que nous avons pour eux; c’est un effet de l’amour- propre , qui nous flatte de l’espérance d’être heureux à notre tour, ouderetirerquelque utilité de leur bonne fortune. 1665, n° 97. xv Dans l’adversité de nos meilleurs amis nous trouvons toujours quelque chose qui ne nous déplaît pas. 1665, n°99. xvi Comment prétendons-nous qu’un autre garde notre secret, si nous n’avons pas pu le garder nous-même? 1665, n° 100. 1 On lit dans les éditions de Brotier et de M. de Forlia pour nous dégager de notre infidélité. Cependant les éditions de 1666, 1671 et 1673, dans lesquelles on retrouve encore cette pensée, sont conformes à celle de 1663. 84 MAXIMES xvii Comme si ce n’était pas assez à l’araour-propre d’avoir la vertu de se transformer lui-même, il a encore celle de transformer les objets, ce qu’il fait d’une manière fort étonnante ; car non-seulement il les déguise si bien qu’il y est lui- même trompé, mais il change aussi l’état et la nature des choses. En effet, lorsqu’une personne nous est contraire, et qu’elle tourne sa haine et sa persécution contre nous, c’est avec toute la sévérité de la justice que l’amour-propre juge de ses actions il donne à ses défauts une étendue qui les rend énormes, et il met ses bonnes qualités dans un jour si désavantageux, qu’elles deviennent plus dégoûtantes que ses défauts. Cependant dès que cette même personne nous devient favorable, ou que quelqu’un de nos intérêts la réconcilie avec nous, notre seule satisfaction rend aussitôt à son mérite le lustre que notre aversion venait de lui ôter. Les mauvaises qualités s’effacent, et les bonnes paraissent avec plus d’avantage qu’auparavant ; nous rappelons même toute notre indulgence pour la forcer à justifier la guerre qu’elle nous a faite. Quoique toutes les passions montrent cette vérité, l’amour la fait voir plus clairement que les autres ; car nous voyons un amoureux, agité de la rage où l’a mis l’oubli ou l’infidélité de ce qu’il aime, méditer pour sa vengeance tout ce que cette passion inspire de plus violent. Néanmoins, aussitôt que sa vue a calmé la fureur de ses mouvements, son ravissement rend cette beauté innocente ; il n’accuse plus que lui-même, il condamne ses condamnations; et par cette vertu miraculeuse de l’amour-propre il ôte la noirceur aux mauvaises actions de sa maîtresse, et en sépare le crime pour s’en charger lui- même. xvm Il n’v en a point qui pressent tant les autres que les paresseux lorsqu’ils ont satisfait à leur paresse, afin de paraître diligents. 1666, n° 91. xix L’aveuglement des hommes est le plus dangereux effet de leur orgueil il sert à le nourrir et à l’augmenter, et nous ôte la connaissance des remèdes qui pourraient soulager nos misères et nous guérir de nos défauts. 1665, n° 102. DE LA ROCHEFOUCAULD. 85 xx On n’a plus de raison quand on n’espère plus d’en trouver aux autres. 1665, n° 103. xxi Les philosophes, et Sénèque sur tous, n’ont point ôté les crimes par leurs préceptes ils n’ont fait que les employer au bâtiment de l’orgueil. 1665, n° 105. xxii C’est une preuve de peu d’amitié de ne s’apercevoir pasdu refroidissement de celle de nos amis. 1666, n°97. xxiii Les plus sages le sont dans les choses indifférentes, mais ils ne le sont presque jamais dans leurs plus sérieuses affaires. 1665,n° 132. xxiv La plus subtile folie se fait de la plus subtile sagesse. 1665, n° 134. xxv La sobriété est l’amour de la santé ou l’impuissance de manger beaucoup. 1665,n° 135. xxvi On n’oublie jamais mieux les choses que quand on s’est lassé d’en parler. 1665, n° 144. xxvii La louange qu’on nous donne sert au moins à nous fixer dans la pratique des vertus. 1665, n° 155. xxviii L’amour-propre empêche bien que celui qui nous flatte ne soit jamais celui qui nous flatte le plus. 1665, n° 157. xxix On ne blâme le vice et on ne loue la vertu que par intérêt. 1665,n° 151. xxx On ne fait point de distinction dans les espèces de colère, bien qu’il y en ait une légère et quasi innocente, qui vient de l’ardeur de la complexion, et une autre très-criminelle, qui est a proprement parler la fureur de l’orgueil. 1665, n° 159. 86 MAXIMES xxxi Les grandes âmes ne sont pas celles qui ont moins de passions et plus de vertus que les âmes communes, mais celles seulement qui ont de plus grands desseins. 1665, n° 161. xxxn Les rois font des hommes comme des pièces de monnaie ; ils les font valoir ce qu’ils veulent, et l’on est forcé de les recevoir selon leur cours, et non Das selon leur véritable prix. 1665,n°165. xxxm La férocité naturelle fait moins de cruels que l’amour-propre. 1665, n° 174. xxxiv On peut dire de toutes nos vertus ce qu’un poete italien a dit de l’honnêteté des femmes, que ce n’est souvent autre chose qu’un art de paraître honnête. 1665, n° 176. xxxv Il y a des crimes qui deviennent innocents et même glorieux par leur éclat, leur nombre et leur excès de là vient que les voleries publiques sont des habiletés, et que prendre des provinces injustement s’appelle faire des conquêtes. 1665 n° 192. xxxvi On ne trouve point dans l’homme le bien ni le mal dans l’excès. 1665, n° 201. xxxvn Ceux qui sont incapables de commettre de grands crimes n’en soupçonnent pas facilement les autres. 1665, n° 508. xxxvm La pompe des enterrements regarde plus la vanité des vivants que l’honneur des morts. 1665, n u 213. xxxix Quelque incertitude et quelque variété qui paraisse dans le monde, on y remarque néanmoins un certain enchaînement secret, et un ordre réglé de tout temps par la Providence, qui fait que chaque chose marche en son rang, et suit le cours de sa destinée. 1665, n° 225. DE LA ROCHEFOUCAULD. 87 XL L’intrépidité doit soutenir lecœurdansles conjurations, au lieu que la seule valeur lui fournit toute la fermeté qui lui est nécessaire dans les périls de la guerre. 1665, n°231. xli Ceux qui voudraient définir la victoire par sa naissance seraient tentés, comme les poètes, de l’appeler la fille du ciel, puisqu’on ne trouve point son origine sur la terre. En effet, elle est reproduite par une infinité d’actions, qui au lieu de l’avoir pour but, regardent seulement les intérêts particuliers de ceux qui les font ; puisque tous ceux qui composent une armée, allant à leur propre gloire et à leur élévation, procurent un bien si grand et si général. 1665, n° 232. xlii On ne peut répondre de son courage quand on n’a jamais été dans le péril. 1665 , n°236. xliii Ou donne plus souvent des bornes à sa reconnaissance qu’à ses désirs et à ses espérances. 1665, n° 241. xnv L’imitation est toujours malheureuse, et tout ce qui est contrefait déplaît avec les mêmes choses qui charment lorsqu’elles sont naturelles. 1665, n° 245. xl y Nous ne regrettons pas la perte de nos amis selon leur mérite, maisselon nosbesoins, et selon l’opinion que nous croyons leur avoir donnée de ce que nous valons. 1665, n° 248. xlvi Il est bien malaisé de distinguer la bonté générale et répanduesur tout le monde, de la grande habileté. 1665, n° 252. xlvii Pour pouvoir être toujours bon, il faut que les autres croient qu’ils ne peuvent jamais nous être impunément méchants. 1665, n° 254. xlvïii La confiance de plaire est souvent un moyen de déplaire infailliblement. 1665, n°256. xlix La confiance que l’on a en soi fait naître la plus grande partie de celle que l’on a aux autres. 1665. n°258. MAXIMES S»8 i. Il y a une révolution générale qui change le goût des esprits aussi bien que les fortunes du monde. 1665 , n° 259. ; lï La vérité est le fondement et la raison de la perfection et de la beauté ; une chose, de quelque nature qu’elle soit, ne saurait être belle et parfaite si elle n’est véritablement tout ce qu’elle doit être et si elle n’a tout ce qu’elle doit avoir. 1665, n° 260. li bis li y a de belles choses qui ont plus d’éclat quand elles demeurent imparfaites que quand elles sont trop achevées. 1665, n°262. lii La magnanimité est un noble effort de l’orgueil par lequel il rend l’homme maître de lui-même, pour le rendre maître de toutes choses. 1665, n° 271. lui Le luxe et la trop grande politesse dans les États sont le présage assuré de leur décadence, parce que tous les particuliers s’attachant à leurs intérêts propres, ils se détournent du bien public. 1665,n°282. liy De toutes les passions celle qui est la plus inconnue à nous-mêmes, c’est la paresse; elle est la plus ardente et la la plus maligne de toutes, quoique sa violence soit insensible , et que les dommages qu’elle cause soient très-cachés si nous considérons attentivement son pouvoir, nous verrons qu’elle se rend en toutes rencontres maîtresse de nos sentiments, de nos intérêts et de nos plaisirs c’est la rémore qui a la force d’arrêter les plus grands vaisseaux. c’est une bonace plus dangereuse aux plus importantes affaires que les écueils et que les plus grandes tempêtes. Le repos de la paresse est un charme secret de l’âme qui suspend soudainement les plus ardentes poursuites et les plus opiniâtres résolutions. Pour donner enfin la véritable idée de cette passion, il faut dire que la paresse est comme une béatitude de l’âme, qui la console de toutes ses pertes, et qui lui tient lieu de tous les biens. 1665, n°290. DE LA ROCHEFOUCAULD Sÿ lv On aime bien à deviner les autres, mais l’on n’aime pas à être deviné. 1665, n°296. lvi C’est une ennuyeuse maladie que de conserver sa santé par un trop grand régime. 1665, n° 298. lvii Il est plus facile de prendre de l’amour quand on n’en a pas que de s’en défaire quand on en a. 1665 , n° 300. LvmLa plupart des femmes se rendent plutôt par faiblesse que par passion. De là vient que pour l’ordinaire les hommes entreprenants réussissent mieux que les autres, quoiqu’ils ne soient pas plus aimables. 1665, n°301. lix N’aimer guère en amour est un moyen assuré pour être aimé. 1665, n°302. lx La sincérité que se demandent les amants et les maîtresses pour savoir l’un et l’autre quand ils cesseront de s’aimer est bien moins pour vouloir être avertis quand on ne les aimera plus, que pour être mieux assurés qu’on les aime, lorsque l’on ne dit point le contraire. 1665, n° LxiLa plus juste comparaison qu’on puisse faire de l’amour, c’est celle de la fièvre ; nous n’avons non plus de pouvoir sur l’un que sur l’autre, soit pour sa violence ou pour sa durée. 1665, n° 305. lxii La plus grande habileté des moins habiles est de savoir se soumettre à la bonne conduite d’autrui. 1665, n° 309.} lxiii On craint toujours de voir ce qu’ou aime quand on vientde faire des coquetteries ailleurs. 1675 , n" 372. lxiv On doit se consoler de ses fautes quand on a la force de les avouer. 1675 , n° 375. SECOND SUPPLÉMENT. PENSÉES TIRÉES DES LETTRES MANUSCRITES QUI SE TROUVENT A LA BIBLIOTHEQUE DU ROI i L’intérêt est l’âme de l’amour-propre de sorte que comme le corps privé de son âme est sans vue, sans ouïe, sans connaissance, sans sentiment et sans mouvement, de même l’amour- propre séparé, s’il le faut dire ainsi, de son intérêt, ne voit, n’entend, ne sent et ne se remue plus de là vient qu’un même homme qui court la terre et les mers pour son intérêt devient soudainement paralytique pour l’intérêt des autres ; de là vient le soudain assoupissement et cette mort que nous causons à tous ceux à qui nous contons nos affaires de là vient leur prompte résurrection lorsque dans notre narration nous y mêlons quelque chose qui les regarde de sorte que nous voyons, dans nos conversations et dans nos traités, que dans un même moment un homme perd connaissance et revient à soi, selon que son propre intérêt s’approche de lui ou qu’il s’en retire. {Lettre à madame de. Sablé, manusc., folio 211. u Ce qui fait tant crier contre les maximes qui découvrent le cœur de l’homme est que l’on craint d’y être découvert. Maxime 103. {Manusc., folio 310. ni L’espérance et la crainte sont inséparables. Maxime 168. Lettre à madame de Sablé, manusc., folio 222. 1 M. Aimé Martin a indiqué les numéros des maximes auxquelles Les Pensées de ce Supplément peuvent servir de variantes. PENSEES DE LA ROCHEFOUCAULD. 91 rv Il est assez ordinaire de hasarder sa vie pour empêcher d’être déshonoré ; mais quand cela est fait, on en est assez content pour ne se mettre pas d’ordinaire fort en peine du succès de l’entreprise que l’on veut faire réussir ; et il est certain que ceux qui s’exposent et font autant qu’il est nécessaire pour prendre une place que l’on attaque, ou pour conquérir une province, ont plus de mérite, sont meilleurs officiers, et ont de plus grandes et de plus utiles vues que ceux qui s’exposent seulement pour mettre leur honneur à couvert ; il est fort commun de trouver des gens de la dernière espèce, et fort rare d’en trouver de l’autre. Maxime 219 .{LettreàM. Esprit, manusc.,folio 173. v Le goût change, mais l’inclination ne change point. Maxime 252. Lettre à madame de Sablé, manusc.., folio 223. vi Le pouvoir que des personnes que nous aimons ont sur nous est presque toujours plus grand que celui que nous avons nous-même. Maxime 259. Lettre a madame de Sablé, manusc., folio 211. vu Ce qui fait croire si facilement que les autres ont des défauts, c’est la facilité que l’on a de croire ce que l’on souhaite. Maxime 397 .^{Lettre à madame de Sablé, manusc., folio 223. viu Je sais bien que le bon sens et le bon esprit ennuient à tous les âges, mais les goûts n’y mènent pas toujours, et ce qui serait bien en un temps ne serait pas bien en un autre. Ce qui méfait croire que peu de gens savent être vieux. Maxime423. Lettre à madame de Sablé, manusc., folio 202. ix Dieu a permis', pour punir l’homme du péché originel, qu’il se fît un bien de son amour-propre pour en être tourmenté dans toutes les actions de sa vie. Maxime 494. {Manusc., folio 310. x Ilme semble que voilà jusqu’où la philosophie d’un laquais 92 MAXIMES méritait d’aller; je crois que toute gaieté en cet état-là est bien suspecte'. Maxime 504. {Lettreà madame de Sablé, manusc., folio 161. TROISIÈME SUPPLÉMENT. i 1 Force gens veulent être dévots ; mais personne ne veut être humble. n Le travail du corps délivre des peines de l’esprit, et c’est ce qui rend les pauvres heureux. m Les véritables mortifications sont celles qui ne sont point connues ; la vanité rend les autres faciles. iv L’humilité est l’autel sur lequel Dieu veutqu’on lui offre des sacrifices. v Il faut peu de choses pour rendre le sage heureux; rien ne peut rendre un fol content ; c’est pourquoi presque tous les hommes sont misérables. vi Nous nous tourmentons moins pour devenir heureux que pour faire croire que nous le sommes. vu 11 est bien plus aisé d’éteindre un premier désir que de satisfaire tous ceux qui le suivent. 1 La Rochefoucauld cite dans la 504 e maxime le trait d’un laquais qui dansa sur l’échafaud où il allait être roué. ? Les cinquante maximes suivantes sont tirées delà sixième édition des Pensées de La Rochefoucauld, publiée chez Claude Barbin, en 1693, plus de douze ans après la mort de l'auteur, arrivée le 17 mai 1680. DE LA ROCHEFOUCAULD. 93 xxxix Il n’est jamais plus difficile de bien parler que quand on a honte de se taire. xl Les fautessont toujours pardonnables quand onalaforce de les avouer. xli Le plus grand défaut de la pénétration n’est pas de ne pas aller au but, c’est de le passer. xlii On donne des conseils, mais on ne donne point la sagesse d’en profiter. xliii Quand notre mérite baisse, notre goût diminue aussi. xliv La fortune fait paraître nos vertus et nos vices, comme la lumière fait paraître les objets. xlv Nos actions sont comme des bouts-rimés, que chacun tourne comme il lui plaît. xlvi Il n’est rien de plus naturel ni de plus trompeur que de croire qu’on est aimé. 96 MAXIMES DE LA ROCHEFOUCAULD. xlvii Nous aimons mieux voir ceux à qui nous faisons du bien que ceux qui nous en font. xlviii Il est plus difficile de dissimuler les sentiments que l’on a que de feindre ceux que l’on n’a pas. xiiix Les amitiés renouées demandent plus de soins que celles qui n’ont jamais été rompues. l Un homme à qui personne ne plaît est bien puis malheureux que celui qui ne plaît à personne. REFLEXIONS DIVERSES DU DUC DE LA. ROCHEFOUCAULD I. De la Confiance. Bien que la sincérité et la confiance aient du rapport, elles sont néanmoins différentes en plusieurs choses. La sincérité est une ouverture de cœur qui nous montre tels que nous sommes ; c’est un amour de la vérité, une répugnance à se déguiser, un désir de se dédommager de ses défauts, et de les diminuer même par le mérite de les avouer. La confiance ne nous laisse pas tant de liberté ses règles sont plus étroites ; elle demande plus de prudence et de retenue, et nous ne sommes pas toujours libres d’en disposer. Il ne s’agit pas de nousuniquement,etnos intérêts sont mêlés d’ordinaire avec les intérêts des autres elle a besoin d’une grande justesse pour ne pas livrer nos amis en nous livrant nous-même et pour ne pas faire des présents de leur bien, dans la vue d’augmenter le prix de ce que nous donnons. La confiance plaît toujours à celui qui la reçoit c’est un tribut que nous payons à son mérite, c’est un dépôt que l’on commet à sa foi ; ce sont des gages qui lui donnent un droit sur nous, et une sorte de dépendance où nous nous assujettissons volontairement. 1 Les réflexions suivantes sont tirées dun Recueil de pièces d’histoire et de littérature, Paris, 1731, tome I, page 32. Gabriel Brotier est le premier qui les ait insérées à la suite des Maximes , dans l'édition qu’il a donnée de cet ouvrage. 08 REFLEXIONS DIVERSES Je ne prétends pas détruire, par ce que je dis, la confiance si nécessaire entre les hommes, puisqu’elle est le lien de la société et de l’amitié. Je prétends seulement y mettre des bornes, et la rendre honnête et fidèle. Je veux qu’elle soit toujours vraie et toujours prudente, et qu’elle n’ait ni faiblesse ni intérêt. Je sais Lien qu’il est malaisé de donner de justes limites à la manière de recevoir toute sorte de confiance de nos amis, et de leur faire part delà nôtre. On se confie le plus souvent par vanité, par envie de parler, par le désir de s’attirer la confiance des autres, et pour faire un échange de secrets. Il y a des personnes qui peuvent avoir raison de se fier en nous, vers qui nous n’aurions pas raison d’avoir la même conduite ; et on s’acquitte avec ceux-ci en leur gardant le secret et en les payant de légères confidences. II y en a d’autres dont la fidélité nous est connue, qui ne ménagent rien avec nous, et à qui on peut se confier par choix et par estime. On doit ne leur rien cacher de ce qui ne regarde que nous; se montrer à eux toujours vrai dans nos bonnes qualités et dans nos défauts même, sans exagérer les unes et sans diminuer les autres; se faire une loi de ne leur faire jamais des demi-confidences elles embarrassent toujours ceux qui les font, et ne contentent jamais ceux qui les reçoivent. On leur donne des lumières confuses de ce qu’on veut cacher, on augmente leur curiosité on les met en droit de vouloir en savoir davantage, et ils se croient en liberté de disposer de ce qu’ils ont pénétré. Il est plus sûr et plus honnête de ne leur rien dire, que de se taire quand on commencé à parler. Il y a d’autres règles à suivre pour les choses qui nous ont été confiées plus elles sont importantes, et plus la prudence et la fidélité y sont nécessaires. Tout le monde convient que le secret doit être inviolable mais on ne convient pas toujours de la nature et de l’importance du secret. Nous ne consultons le plus souvent que nous- même sur ce que nous devons dire et sur ce que nous devons DE LA ROCHEFOUCAULD. 09 taire. 11 y a peu de secrets de tous les temps, et le scrupule de les révéler ne dure pas toujours. On a des liaisons étroites avec des amis dont on connaît la lidélité ; ils nous ont toujours parlé sans réserve, et nous avons toujours gardé les mêmes mesures avec eux. Us savent nos habitudes et nos commerces, et ils nous voient de trop près pour ne pas s’apercevoir du moindre changement. Ils peuvent savoir par ailleurs ce que nous sommes engagé de ne dire jamais à personne. Il n’a pas été en notre pouvoir de les faire entrer dans ce qu’on nous a confié; ils ont peut-être même quelque intérêt de le savoir ; on est assuré d’eux comme de soi, et on se voit réduit à la cruelle nécessité de perdre leur amitié, qui nous est précieuse, ou de manquer à la foi du secret. Cet état est sans doute la plus rude épreuve de la fidélité, mais il ne doit pas ébranler un honnête homme c’est alors qu’il lui est permis de se préférer aux autres. Son premier devoir est de conserver indispensablement ce dépôt en son entier. Il doit non-seulement ménager ses paroles et ses tons, il doit encore ménager ses conjectures, et 11 e laisser rien voir, dans ses discours ni dans son air, qui puisse tourner l’esprit des autres vers ce qu’il ne veut pas dire. On a souvent besoin de force et de prudence pour les opposer a la tyrannie de la plupart de nos amis, qui se font un droit sur notre conliance, et qui veulent tout savoir de nous on ne doit jamais leur laisser établir ce droit sans exception. Il y a des rencontres et des circonstances qui ne sont pas de leur juridiction s’ils s’en plaignent, on doit souffrir leurs plaintes, et s'en justifier avec douceur; mais s’ils demeurent injustes, on doit sacrifier leur amitié à son devoir ; et choisir entre deux maux inévitables, dont l’un se peut réparer, et l’autre est sans remède. II. De la Différence des esprits. Bien que toutes les qualités de l’esprit se puissent rencontrer dans un grand génie, il y en a néanmoins qui lui sont propres 100 RÉFLEXIONS DIVERSES et particulières; ses lumières n’ont point de bornes, il agit toujours également et avec la même activité ; il discerne les objets éloignés comme s’ils étaient présents; il comprend, il imagine les plus grandes choses; il voit et connaît les plus petites; ses pensées sont relevées, étendues, justes et intelligibles rien n’échappe à sa pénétration , et elle lui fait souvent découvrir la vérité au travers des obscurités qui la cachent aux autres. Un bel esprit'pense toujours noblement; il produit avec facilité des choses claires, agréables et naturelles ; il les fait voir dans leur plus beau jour, et il les pare de tous les ornements qui leur conviennent ; il entre dansle goûtdesautres, et retranche de ses pensées ce qui est inutile, ou ce qui peut déplaire. Un esprit adroit, facile, insinuant, sait éviter et surmonter les difficultés. Il se plie aisément à ce qu’il veut, il sait connaître l’esprit et l’humeur de ceux avec qui il traite ; et en ménageant leurs intérêts il avance et il établit les siens. Un bon esprit voit toutes choses comme elles doivent être vues ; il leur donne le prix qu’elles méritent, il les fait tourner du côté qui lui est le plus avantageux, et il s’attache avec fermeté à ses pensées, parce qu’il en connaît toute la force et toute la raison. 11 y a de la différence entre un esprit utile et un esprit d’affaires; on peut entendre les affaires, sans s’appliquer à son intérêt particulier. Il y a des gens habiles dans tout ce qui ne les regarde pas, et très-malhabiles dans tout ce qui les regarde et il y en a d’autres au contraire qui ont une habileté bornée à ce qui les touche, et qui savent trouver leur avantage en toutes choses. On peut avoir tout ensemble un air sérieux dans l’esprit, et dire souvent des choses agréables et enjouées. Cette sorte d’esprit convient à toutes personnes et à tous les âges de la vie. Les jeunes gens ont d’ordinaire l’esprit enjoué et moqueur, sans l’avoir sérieux ; et c’est ce qui les rend souvent incommodes. Rien n’est plus aisé à soutenir que le dessein d’être toujours DE LA ROCHEFOUCAULD. 101 plaisant; et les applaudissements qu’on reçoit quelquefois eu divertissant les autres ne valent pas que l’on s’expose à la honte de les ennuyer souvent quand ils sont de méchante humeur. La moquerie est une des plus agréables et des plus dangereuses qualités de l’esprit. Elle plaît toujours quand elle est délicate ; mais on craint aussi toujours ceux qui s’en servent trop souvent. La moquerie peut néanmoins êlre permise quand elle n’est mêlée d’aucune malignité, et quand on y fait entrer les personnes mêmes dont on parle. Il est malaisé d'avoir un esprit de raillerie sans affecter d’être plaisant, ou sans aimera se moquer; il faut une grande justesse pour railler longtemps sans tomber dans l’une ou l’autre de ces extrémités. La raillerie est un air de gaieté qui remplit l’imagination, et qui lui fait voir en ridicule les objets qui se présentent l’humeur y mêle plus ou moins de douceur ou d’âpreté. Il y a une manière de railler, délicate et flatteuse, qui touche seulement les défauts que les personnes dont on parle veulent avouer, qui sait déguiser les louanges qu’on leur donne sous des apparences de blâme, et qui découvre ce qu’elles ont d’aimable, en feignant de le vouloir cacher. Un esprit fin et un esprit de finesse sont très-différents. Le premier plaît toujours il est délié, il pense des choses délicates, et voit les plus imperceptibles; un esprit de finesse ne va jamais droit il cherche des biais et des détours pour faire réussir ses desseins. Cette conduite est bientôt découverte; elle se fait toujours craindre, et ne mène presque jamais aux grandes choses. Il y a quelque différence entre un esprit de feu et un esprit brillant un esprit de feu va plus loin et avec plus de rapidité. Un esprit brillant a de la vivacité, de l’agrément et de la justesse. La douceur de l’esprit est un air facile et accommodant, et qui plaît toujours quand il n’est point fade. 6 . 102 RÉFLEXIONS DIVERSES Un esprit de détail s’applique avec de l’ordre et de la règle à toutes les particularités des sujets qu’on lui présente. Cette application le renferme d’ordinaire à de petites choses; elle n est pas néanmoins toujours incompatible avec de grandes vues ; et quand ces deux qualités se trouvent ensemble dans un même esprit, elles l’élèvent infiniment au-dessus des autres. On a abusé du terme de bel esprit, et bien que tout ce qu’on vient de dire des différentes qualités de l’esprit puisse convenir à un bel esprit, néanmoins, comme ce titre a été donné à un nombre infini de mauvais poètes et d’auteurs ennuyeux, on s’en sert plus souvent pour tourner les gens en ridicule que pour les louer. Bien qu’il y ait plusieurs épithètes pour l’esprit qui paraissent une même chose, le ton et la manière de les prononcer y mettent de la différence; mais comme les tons et les manières ne se peuvent écrire, je n’entrerai point dans un détail qu’il serait impossible de bien expliquer. L’usage ordinaire le fait assez entendre; et en disant qu'un homme a de l’esprit, qu’il a beaucoup d’esprit, et qu’il a un bon esprit, il n’y a que les tons et les manières qui puissent mettre de la différence entre ces expressions, qui paraissent semblables sur le papier, et qui expriment néanmoins différentes sortes d’esprit. On dit encore qu’un homme n’a qu’une sorte d’esprit, qu’il a de plusieurs sortes d’esprit, et qu’il a toutes sortes d’esprit. On peut être sot avec beaucoup d’esprit, et on peut n’être pas sot avec peu d’esprit. Avoir beaucoup d’esprit est un terme équivoque. 11 peut comprendre toutes les sortes d’esprit dont on vient de parler ; mais il peut aussi n’en marquer aucune distinctement. On peut quelquefois faire paraître de l’esprit dans ce qu’on dit, sans en avoir dans sa conduite. On peut avoir de l’esprit, et l’avoir orné. Un esprit peut être propre à de certaines choses, et ne ’étre pas à d’autres on peut avoir beaucoup d’esprit, et n’être nopre à rien; et avec beaucoup d’esprit on est souvent fort incommode. Il semble néanmoins que le plus grand mérite de cette sorte d’esf rit est de plaire quelquefois dans la conversation. DE LA ROCHEFOUCAULD. 103 Bien que les productions d’esprit soient infinies, on peut, ce me semble, les distinguer de cette sorte Il y a des choses si belles, que tout le monde est capable d'en voir et d’en sentir la beauté. Il y en a qui ont de la beauté, et qui ennuient. Il y en a qui sont belles, et que tout le monde sent, bien que tous n’en sachent pas la raison. 11 y en a qui sont si fines et si délicates, que peu de gens sont capables d’en remarquer toutes les beautés. II y en a d’autres qui ne sont pas parfaites, mais qui sont dites avec tant d’art, et qui sont soutenues et conduites avec tant de raison et tant de grâce, qu’elles méritent d’être admirées. III. Des Goûts. Il y a des personnes qui ont plus d’esprit que de goût, et d’autres qui ont plus de goût que d’esprit. 11 y a plus de variété et de caprice dans le goût que dans l’esprit. Ce terme de goût a diverses significations, et il est aisé de s’v méprendre. Il y a différence entre le goût qui nous porte vers les choses, et le goût qui nous en fait connaître et discerner les qualités en nous attachant aux règles. On peut aimer la comédie sans avoir le goût assez in et assez délicat pour en bien juger; et on peut avoir le goût assez bon pour bien juger de la comédie sans l’aimer. Il y a des goûts qui nous approchent imperceptiblement de ce qui se montre à nous, et d’autres nous entraînent par leur force ou par leur durée. 11 y a des gens qui ont le goût faux en tout, d’autres ne l’ont faux qu’en certaines choses ; et ils l’ont droit et juste dans tout ce qui est de leur portée. D’autres ont des goûts particuliers, qu’ils connaissent mauvais, et ne laissent pas de les suivre. Il y en a qui ont le goût incertain; le hasard en décide ils chan- 104 REFLEXIONS DIVERSES gcnt par légèreté, et sont touchés de plaisir ou d'ennui sur la parole de leurs amis. D’autres sont toujours prévenus ; ils sont esclaves de leurs goûts, et les respectent en toutes choses. Il y en a qui sont sensibles à ce qui est bon et choqués de ce qui ne l’est pas leurs vues sont nettes et justes, et ils trouvent la raison de leur goût dans leur esprit et dans leur discernement. 11 y en a qui, par une sorte d'instinct dont ils ignorentla cause, décident de ce qui se présente à eux, et prennent toujours le bon parti. Ceux-ci font paraître plus de goût que d’esprit, parce que leur amour-propre et leur humeur ne prévalent point sur leurs lumières naturelles. Tout agit de concert en eux, tout y est sur un même ton. Cet accord les fait juger sainement des objets, et leur en forme une idée véritable mais, à parler généralement, il y a peu de gens qui aient le goût fixe et indépendant de celui des autres ; ils suivent l’exemple et la coutume, et ils en empruntent presque tout ce qu’ils ont de goût. Dans toutes ces différences de goût qu’on vient de marquer, il est très-rare, et presque impossible, de rencontrer cette sorte de bon goût qui sait donner le prix à chaque chose, qui en connaît toute la valeur, et qui se porte généralement sur tout. Nos connaissances sont trop bornées, et cette juste disposition de qualités qui font bien juger ne se maintient d’ordinaire que sur ce qui ne nous regarde pas directement. Quand il s’agit de nous, notre goût n’a plus cette justesse si nécessaire la préoccupation le trouble ; tout ce qui a du rapport à nous paraît sous une autre figure. Personne ne voit des mêmes veux ce qui le touche et ce qui ne le touche pas. Notre goût n’est conduit alors que par la pente de l’amour-propre et de l’humeur, qui nous fournissent des vues nouvelles, et nous assujettissent à un nombre infini de changements et d’incertitudes. Notre goût n’est plus à nous, nous n’en disposons plus. Il change sans notre consentement; et les mêmes objets nous paraissent par tant de côtés différents, que nous méconnaissons enfin ce que nous avons vu et ce que nous avons senti. DE LA ROCHEFOUCAULD. 105 IV. De la Société. Mon dessein n’est pas de parler de l’amitié en parlant de la société; bienqu’elles aient quelque rapport, elles sont néanmoins très-différentes la première a plus d’élévation et d’humilité, et le plus grand mérite de l’autre est de lui ressembler. Je ne parlerai donc présentement que du commerce particulier que les honnêtes gens doivent avoir ensemble. Il serait inutile de dire combien la société est nécessaire aux hommes tous la désirent, et tous la cherchent ; mais peu se servent des moyens de la rendre agréable et de la faire durer. Chacun veut trouver son plaisir et ses avantages aux dépens des autres. On se préfère toujours à ceux avec qui on se propose de vivre,et on leur fait presquetoujours sentir cette préférence ; c’est ce qui trouble et ce qui détruit la société. Il faudrait du moins savoir cacher ce désir de préférence, puisqu’il est trop naturel en nous pour nous en pouvoir défaire. 11 faudrait faire son plaisir de celui des autres, ménager leur amour-propre, et ne le blesser jamais. L’esprit a beaucoup de part à un si grand ouvrage ; mais il ne suflit pas seul pour nous conduire dans les divers chemins qu’il faut tenir. Le rapport qui se rencontre entre les esprits ne maintiendrait pas longtemps la société si elle n’était réglée et soutenue par le bon sens, par l’humeur, et par les égards qui doivent être entre les personnes qui veulent vivre ensemble. S’il arrive quelquefois que des gens opposés d’humeur et d’esprit paraissent unis, ils tiennent sans doute par des raisons étrangères, qui ne durent pas longtemps. On peut être aussi en société avec des personnes sur qui nous avons de la supériorité par la naissance, ou par des qualités personnelles ; mais ceux qui ont cet avantage n’en doivent pas abuser ils doivent rarement le faire sentir, et ne s’en servir que pour instruire les autres. Ils doivent leur faire apercevoir qu’ils ont besoin d’être 106 RÉFLEXIONS DIVERSES ronduits, et les mener par la raison, en s'accommodant, auUnt qu'il est possible, à leurs sentiments et à leur intérêts. Pour rendre la société commode il faut que chacun conserve sa liberté. Il ne faut point se voir, ou se voir sans sujétion, et pour se divertir ensemble. Il faut pouvoir se séparer sans que cette séparation apporte de changement. Ilfaut se pouvoir passer .es uns des autres, si on ne veut pas s’exposer à embarrasser quelquefois; et on doit se souvenir qu’on incommode souvent, quand on croit ne pouvoir jamais incommoder. Il faut contri- ouer autant qu’on le peut au divertissement des personnes avec qui on veut vivre, mais il ne faut pas être toujours chargé du soin d’y contribuer. La complaisance est nécessaire dans la société; mais elle doit avoir des bornes elle devient une servitude quand elle est excessive. Il faut du moins qu’elle paraisse libre, et qu’en suivant le sentiment de nos amis ils soient persuadés que c’est le nôtre aussi que nous suivons. Il faut être facile à excuser nos amis quand leurs défauts sont nés avec eux , et qu’ils sont moindres que leurs bonnes qualités. II faut souvent éviter de leur faire voir qu’on les ait remarqués et qu’on en soit choqué. On doit essayer de faire en sorte qu’ils puissent s’en apercevoir eux-mêmes, pour leur laisser le mérite de s’en corriger. 11 y a une sorte de politesse qui est nécessaire dans le commerce des honnêtes gens elle leur fait entendre raillerie, et elle les empêche d’être choqués, et de choquer les autres par de certaines façons de parler trop sèches et trop dures, qui échappent souvent sans y penser quand on soutient son opinion avec chaleur. Le commerce des honnêtes gens ne peut subsister sans une certaine sorte de confiance; elle doit être commune entre eux; il faut que chacun ait un air de sûreté et de discrétion qui ne donne jamais lieu de craindre qu’on puisse rien dire par imprudence. DE LA ROCHEFOUCAULD. 107 Il faut de la variété dans l’esprit ceux qui n’ont que d’une sorte d’esprit ne peuvent pas plaire longtemps ; on peut prendre des routes diverses, n’avoir pas les mêmes talents, pourvu ru’on aide au plaisir de la société, et qu’on y observe la même justesse que les différentes voix et les divers instruments doivent observer dans la musique. Comme il est malaisé que plusieurs personnes puissent avoir les mêmes intérêts , il est nécessaire, au moins pour la douceur de la société, qu’ils n’en aient pas de contraires. On doit aller au-devant de ce qui peut plaire à ses amis , chercher les moyens de leur être utile, leur épargner des chagrins, leur faire voir qu’on les partage avec eux, quand on ne peut les détourner, les effacer insensiblement sans prétendre de les arracher tout d’un coup, et mettre à la place des objets agréables, ou du moins qui les occupent. On peut leur parler de choses qui les regardent, mais ce n’est qu’autant qu’ils le permettent, et on v doit garder beaucoup de mesure. Il y a delà politesse, et quelquefois même de l’humanité, à ne pas entrer trop avant dans les replis de leur cœur ; ils ont souvent de la peine à laisser voir tout ce qu’ils en connaissent, et ils en ont encore davantage quand on pénètre ce qu’ils ne connaissent pas bien. Que le commerce que les honnêtes gens ont ensemble leur donne de la familiarité, et leur fournisse un nombre infini de sujets de se parler sincèrement. Personne presque n’a assez de docilité et de bon sens pour bien recevoir plusieurs avis qui sont nécessaires pour maintenir la société. On veut être averti jusqu’à un certain point, mais on ne veut pas l’être en toutes choses , et on craint de savoir toutes sortes de vérités. Comme on doit garder des distances pour voir les objeîs, il en faut garder aussi pour la société ; chacun a son point de vue, d’où il veut être regardé. On a raison le plus souvent de ne vouloir pas être éclairé de trop près; et il n’y a presque point d’homme qui veuille en toutes choses se laisser voir tel qu’il est. 108 RÉFLEXIONS DIVERSES V. De la Conversation. Ce qui fait que peu de personnes sont agréables dans la conversation, c’est que chacun songe plus à ce qu’il a dessein de dire qu’à ce que les autres disent, et que l’on n’écoute guère quand on a bien envie de parler. Néanmoins il est nécessaire d’écouter ceux qui parlent. Il faut leur donner le temps de se faire entendre, et souffrir même qu’ils disent des choses inutiles. Bien loin de les contredire et de les interrompre, on doit, au contraire, entrer dans leur esprit et dans leur goût, montrer qu’on les entend, louer ce qu’ils disent autant qu’il mérite d’être loué, et faire voir que c’est plutôt par choix qu’on les loue que par complaisance. Pour plaire aux autres il faut parler de ce qu’ils aiment et de ce qui les touche, éviter les disputes sur les choses indifférentes, leur faire rarement des questions, et ne leur laisser jamais croire qu’on prétend avoir plus de raison qu’eux. On doit dire les choses d’un air plus ou moins sérieux , et sur des sujets plus ou moins relevés, selon l’humeur et la capacité des personnes que l’on entretient, et leur céder aisément l’avantage de décider, sans les obliger de répondre quand ils n'ont pas envie de parler. Après avoir satisfait de cette sorte aux devoirs de la politesse, on peut dire ses sentiments en montrant qu’on cherche à les appuyer de l’avis de ceux qui écoutent, sans marquer de présomption ni d’opiniâtreté. Évitons surtout de parler souvent de nous-même et de nou mais, dit Marmontel, qui en avait connu plusieurs, ceux qui étaient capables d’apprécier un si rare mérite, avaient conçu pour lui une si tendre vénération, que je lui ai entendu donner par quelques-uns le nom respectable de père. » Ce nom respectable n’était peut-être pas donné bien sérieusement par de jeunes militaires à un camarade de leur âge ; mais le ton même du badinage, en se mêlant à la justice qu’ils se plaisaient à lui rendre, prouverait encore à quel point Vauvenargues avait su se faire pardonner cette supériorité de raison qu’il ne pouvait dissimuler, mais que sa modeste douceur ne permettait aux autres ni de craindre ni d’envier. La guerre d’Italie n’avait pas été longue ; mais la paix qui la suivit ne fut pas non plus de longue durée. Une nouvelle guerre 1 vint troubler la France en 1741. Le régiment du roi fît partie de l’armée qu’on envoya en Allemagne, et qui pénétra jusqu’en Bohême. On se rappelle tout ce que les troupes françaises eurent à souffrir dans cette honorable et pénible campagne, et surtout dans la fameuse retraite de Prague 2 , qui s’exécuta au mois de décembre 1742. Le froid fut excessif. Vauvenargues, naturellement faible, en souffrit plus que les autres. Il rentra en France au commencement de 1743, avec une santé détruite ; la fortune, peu considérable, avait été épuisée par les dépenses de la guerre. Neuf années de service ne lui avaient procuré que le grade de capitaine, et ne lui donnaient aucun espoir d’avancement. Il se détermina à quitter un état, honorable sans doute pour tous ceux qui s’y livrent, mais où il est difficile de se faire honorer plus que des milliers d’autres, lorsque la faveur ou les circonstances ne font pas sortir un militaire de la foule pour l’élever à quelque commandement. Vauvenargues avait étudié l’histoire et le droit public; l’habitude et le goût du travail, et aussi ce sentiment de ses forces que la modestie la plus vraie n’éteint pas dans un esprit supérieur, lui firent croire qu il pourrait se distinguer dans la carrière des négociations. Il désira 1 La guerre dite de la Succession , après la mort de l'empereur Charles VI, arrivée le 20 octobre 740. Brière. 2 Cette célèbre retraite s'exécuta sous la conduite du maréchal de Belle-Me, qui sortit de Prague dans la nuit du 16 au 17 décembre 742, et se rendit à Egra le 26. Le maréchal de Saxe avait tenu la même conduite l’année précédente. Brière. ]! • V A U V K NARGUES. 153 d’y entrer, et fit part de son désir à M. de Biron, son colonel, qui, loin de lui promettre son appui, ne lui laissa entrevoir que la difficulté de réussir dans un tel projet. Tout ce qui sort de la route ordinaire des usages effraye ou choque ceux qui, favorisés par ces usages mêmes, n’ont jamais eu besoin de les braver ; et voilà pourquoi les gens de la cour observent d’ordinaire à l’égard des gens en place une beaucoup plus grande circonspection que ceux qui, placés dans les rangs inférieurs , ont beaucoup moins à perdre, et par cela même peuvent risquer davantage. Vauvenargues, malheureux par sa santé, par sa fortune, et surtout par son inaction, sentait qu’il ne pouvait sortir de cette situation pénible que par une résolution extraordinaire. Les caractères timides en société sont souvent ceux qui prennent le plus volontiers des partis extrêmes dans les affaires embarrassantes privés des ressources habituelles que donne l’assurance, ils cherchent à y suppléer par l’élan momentané du courage; ils aiment mieux risquer une fois une démarche hasardée, que d’avoir tous les jours quelque chose à oser. Vauvenargues, étranger à la cour, inconnu du ministre dont il aurait pu solliciter la faveur, privé du secours du chef qui aurait pu appuyer sa demande, prit le parti de s’adresser directement au roi, pour lui témoigner le désir de le servir dans les négociations. Bans sa lettre, il rappelait à sa majesté que les hommes qui avaient eu le plus de succès dans cette carrière étaient ceux-là même que la fortune en avait le plus éloignés. Qui doit, en effet, ajoutait-il, servir votre ma- jesté avec plus de zèle qu’un gentilhomme qui, n’étant pas né à la cour, n’a rien à espérer que de son maître et de ses services? » Vauvenargues avait écrit en même temps à M. Amelot, ministre des affaires étrangères. Ses deux lettres, comme on le conçoit aisémenl , restèrent sans réponse. Louis XV n’était pas dans l’usage d’accorder des places sans la médiation de son ministre, et le ministre connaissait trop bien les droits de sa place pour favoriser une démarche où l'on croyait pouvoir se passer de son autorité. Vauvenargues, ayant donné, en 1744, la démission de son emploi dans le régiment du roi, écrivit à M. Amelot une lettre que nous croyons devoir transcrire ici. a Monseigneur, Je suis sensiblement touché que la lettre que j’ai eu l’honneur de vous écrire et celle que j'ai pris la liberté de vous adresser pour le roi n’aient pu attirer votre attention. Il n’est pas surprenant peut- être qu’un ministre si occupé ne trouve pas le temps d’examiner de S. 154 NOTICE SUR LA VIE ET LES OUVRAGES pareilles lettres; mais, monseigneur, me permettrez vous de vous dire que c’est cette impossibilité morale où se trouve un gentilhomme qui n’a que du zèle, de parvenir jusqu’à son maître, qui fait le dé- " couragement que l’on remarque dans la noblesse des provinces , et qui éteint toute émulation ? J'ai passé, monseigneur, toute ma jeu nesse loin des distractions du monde, pour tâcher de me rendre ca- " pable des emplois où j’ai cru que mon caractère m'appelait ; et j’osais penser qu’une volonté si laborieuse me mettrait du moins au niveau > de ceux qui attendent toute leur fortune de leurs intrigues et de leurs . Si notre existence était parfaite, nous ne connaîtrions que le plaisir. Étant imparfaite, nous devons connaître le plaisir et la douleur or, c’est de l’expérience de ces deux contraires que nous tirons l’idée du bien et du mal. Mais comme le plaisir et la douleur ne viennent pas à tous les hommes par les mêmes choses, ils attachent à divers objets l’idée du bien et du mal, chacun selon son expérience, ses passions , ses opinions, etc. Il n’y a cependant que deux organes de nos biens et de nos maux les sens et la réflexion. Les impressions qui viennent par les sens sont immédiates, et ne peuvent se définir; on n’en connaît pas les ressorts elles sont l’effet du rapport qui est entre les choses et nous ; mais ce rapport secret ne nous est pas connu. 1 Nous éprouvons, etc. Je ne sais si on peut dire éprouver un étaU Oin éprouve une impression qui passe. Être imparfaitement n’explique pas ce que c’est qn'être douloureusement, M. —Le plaisir n’est pas naturellennenit attaché à être; car on existe souvent sans plaisir ni douleur. Être imparfaitement donnerait plutôt l’idée du désir que de la S. de L’ESI’RIT HUMAIN. 193 Les passions qui viennent par l’organe de la réflexion sont moins ignorées. Elles ont leur principe dans l’amour de l'être ou de la perfection de l’être, ou dans le sentiment de son imperfection et de son dépérissement. Nous tirons de l’expérience de notre être une idée de grandeur, de plaisir, de puissance, que nous voudrions toujours augmenter nous prenons dans l’imperfection de notre être une idée de petitesse, de sujétion, de misère, que nous tâchons d’étouffer voilà toutes nos passions. Il v a des hommes en qui le sentiment de l’être est plus fort que celui de leur imperfection; de là l’enjouement, la douceur, la modération des désirs. Il y en a d’autres en qui le sentiment de leur imperfection est plus vif que celui de l’être; de là l’inquiétude, la mélancolie, etc. De ces deux sentiments unis, c’est-à-dire celui de nos forces et celui de notre misère, naissent les plus grandes passions; parce que le sentiment de nos misères nous pousse à sortir de nous-même, et que le sentiment de nos ressources nous y encourage et nous y porte par l’espérance. Niais ceux qui ne sentent que leur misère sans leur force ne se passionnent jamais autant, car ils n’osent rien espérer ; ni ceux qui ne sentent que leur force sans leur impuissance, car ils ont trop peu à désirer ainsi il faut un mélange de courage et de faiblesse, de tristesse et de présomption. Or, cela dépend de la chaleur du sang et des esprits ; et la réflexion qui modère les velléités des gens froids encourage l’ardeur des autres, en leur fournissant des ressources qui nourrissent leurs illusions d’où vient que les passions des hommes d’un esprit profond sont plus opiniâtres et plus invincibles, car ils ne sont pas obligés de s’en distraire comme le reste des hommes, par épuisement de pensée ; mais leurs réflexions, au contraire, sont un entretien éternel à leurs désirs, qui les échauffe; et cela explique encore pourquoi ceux qsui pensent peu, ou qui ne sauraient penser longtemps de suite siur la même chose, n’ont que l’inconstance en partage. 194 vauveiurgues. XXIII. De la Gaieté, de la Joie, de la Mélancolie. Le premier degré du sentiment agréable de notre existence est la gaieté lajoieest un sentimentplus pénétrant. Les hommes enjoués n’étant pas d’ordinaire si ardents que le reste des hommes, ils ne sont peut-être pas capables des plus vives joies ; mais les grandes joies durent peu, et laissent notre âme épuisée. La gaieté, plus proportionnée à notre faiblesse que la joie, nous rend confiants et hardis, donne un être et un intérêt aux choses les moins importantes, fait que nous nous plaisons par instinct en nous-même, dans nos possessions, nos en- tours, notre esprit, notre suffisance , malgré d’assez grandes misères. Cette intime satisfaction nous conduit quelquefois à nous estimer nous-même par de très-frivoles endroits ; il me semble que les personnes enjouées sont ordinairement un peu plus vaines que les autres. D’autre part, les mélancoliques sont ardents, timides, inquiets, et ne se sauvent, la plupart, de la vanité, que par l’ambition et l’orgueil. XXIV. De ïAmour-Propre et de l'amour de nous-même. L’amour est une complaisance dans l’objet aimé. Aimer une chose, c’est se complaire dans sa possession, sa grâce,son accroissement; craindre sa privation, ses déchéances , etc. Plusieurs philosophes rapportent généralement à l’amour- propre toutes sortes d’attachements. Ils prétendent qu’on s’approprie tout ce que l’on aime, qu’on n’y cherche que son plaisir et sa propre satisfaction, qu’on se met soi-même avant tout; jusque-là qu’ils nient que celui qui donne sa vie pour un autre le préfère à soi. Ils passent le but en ce point car si l’objet de DE D’ESPRIT HUMAIN. 195 notre amour nous est plus cher sans l’être, que l’être sans l’objet de notre amour, il paraît que c’est notre amour qui est notre passion dominante, et non notre individu propre; puisque tous nous échappeavec la vie, le bien que nous nous étions approprié par notre amour, comme notre être véritable. Ils répondent que la passion nous fait confondre dans ce sacrifice notre vie et celle de l’objet aimé; que nous croyons n’abandonner qu’une partie de nous-même pour conserver l’autre au moins iis ne peuvent nier que celle que nous conservons nous paraît plus considérable que celle que nous abandonnons. Or, des que nous nous regardons comme la moindre partie dans le tout, c’est une préférence manifeste de l’objet aimé. On peut dire la même chose d’un homme qui volontairement et de sang-froid meurt pour la gloire la vie imaginaire qu’il achète au prix de son être réel est une préférence bien incontestable de la gloire, et qui justifie la distinction que quelques écrivains ont mise avec sagesse entre l’amour-propre et l’amour de nous-même. Ceux-ci conviennent bien que l’amour de nous-même entre dans toutes nos passions ; mais ils distinguent cet amour de l’autre. Avec l’amour de nous- même , disent-ils, on peut chercher hors de soi son bonheur ; on peut s’aimer hors de soi plus que son existence propre ; on n’est point à soi-même son unique objet. L’amour-propre ', au contraire subordonne tout à ses commodités et à son bien-être ; il est a lui-même son seul objet et sa seule fin de sorte qu’au lieu que les passions qui viennent de l’amour de nous-même nous donnent aux choses, l’amour-propre veut que les choses se donnent à nous, et se fait le centre de tout. Rien ne caractérise donc l’amour-propre comme la complaisance qu’on a dans soi-même et les choses qu’on s’approprie. L’orgueil est un effet de cette complaisance. Comme on n’estime généralement les choses qu’autant qu’elles plaisent, et que nous nous plaisons si souvent à nous-même devant toutes choses, de là ces comparaisons toujours injustes qu’on fait de soi-même à autrui, et qui fondent tout notre orgueil. Ou plutôt l'égoïsme. S. VAUVEN' I9fi Mais les prétendus avantages pour lesquels nous nous estimons étant grandement variés, nous les désignons par les noms que nous leur avons rendus propres. L’orgueil qui vient d’une confiance aveugle dans nos forces, nous l’avons nommé présomption; celui qui s’attache à de petites choses, vanité; celui qui est courageux, fierté. Tout ce qu’on ressent de plaisir en s’appropriant quelque chose, richesse, agrément, héritage, etc., et ce qu’on éprouve de peine par la perte des mêmes biens, ou la crainte de quelque mal, la peur, le dépit, la colère, tout cela vient de l’amour- propre. L’amour-propre se mêle à presque tous nos sentiments, ou du moins l’amour de nous-même; mais pour prévenir l’embarras que feraient naître les disputes qu’on a sur les termes, j’use d’expressions synonymes, qui me semblent moins équivoques. Ainsi, je rapporte tous nos sentiments à celui de nos perfections et de notre imperfection ces deux grands principes nous portent de concert à aimer, estimer, conserver, agrandir et défendre du mal notre frêle existence. C’est la source de tous nos plaisirs et déplaisirs, et la cause féconde des passions qui viennent par l’organe de la réflexion. Tâchons d’approfondir les principales; nous suivrons plus aisément la trace des petites, qui ne sont que des dépendances et des branches de celles-ci. XXV. De F Ambition. L’instinct qui nous porte à nous agrandir n’est nulle part si sensible que dans l’ambition ; mais il ne faut pas confondre tous les ambitieux. Les uns attachent la grandeur solide à l’autorité des emplois, les autres aux grandes richesses, les autres au faste des titres, etc.; plusieurs vont à leur but sans nul choix des moyens, quelques-uns par de grandes choses, et d’autres par les plus petites ainsi telle ambition est vice ; telle, vertu ; telle, vigueur d’esprit; telle , égarement et bassesse, etc. DE L'ESPRIT HUMAIN. 197 Toutes les passions prennent le tour de notre caractère. Nous avons vu ailleurs que l’âme influait beaucoup sur l’esprit; l’esprit influe aussi sur l’âme. C’est de l’àme que viennent tous les sentiments ; mais c’est par les organes de l’esprit que passent les objets qui les excitent. Selon les couleurs qu’il leur donne, selon qu’il les pénètre, qu’il les embellit, qu’il les déguise,l’âme les rebute ou s’y attache. Quand donc même on ignorerait que tous les hommes ne sont pas égaux par le cœur, il suffit de savoir qu’ils envisagent les choses selon leurs lumières, peut-être encore plus inégales, pour comprendre la différencequidistingueles passions mêmes qu’on désigne du même nom. Si différemment partagés par l’esprit et les sentiments, ils s’attachent au même objet sans aller au même intérêt 1 2 '; et cela n’est pas seulement vrai des ambitieux, mais aussi de toute passion. XXVI. De ïAmour du Monde. Que de choses sont comprises dans l’amour du monde! le libertinage , le désir de plaire, l’envie de primer, etc. l’amour du sensible et du grand ne sont nulle part si mêlés J . Le génie et l’activité portent les hommes à la vertu et à la gloire les petits talents, la paresse, le goût des plaisirs, la gaieté etla vanité les fixent aux petites choses ; mais en tout c’est lemêmeinstinct, et l’amour du mondereoferme de vives semences de presque toutes les passions. 1 Ils s'attachent au même objet sans aller au même intérêt. C’est-à-dire sans voir de même l’objet où ils s’attachent, et sans y être portés par le même intérêt. Deux hommes veulent la même place, l’un pour l’argent et l’autre pour le crédit. Deux amants recherchent la même femme, l’un pour sa figure et l’autre pour son esprit, etc. S. 2 L'amour du sensible et du grand ne sont nulle part si mêlés. C’est-à-dire, je crois, selon la manière de voir de Vauvenargucs, les penchants physiques et les sentiments moraux. D’autant que dans la première édition il ajoutait je parle d'un grand, mesuré à l'esprit et au cœur qu'il touche. Dans tous les cas cela n’est pas clair. S. 198 VAUVEiV ARGUES. XXVII Sur F Amour de la Gloire. La gloire nous donne sur les cœurs une autorité naturelle qui nous touche sans doute autant que nulle de nos sensations, et nous étourdit plus sur nos misères qu’une vaine dissipation elle est donc réelle en tous sens. Ceux qui parlent de son néant inévitable soutiendraient peut- être avec peine le mépris ouvert d’un seul homme. Le vide des grandes passions est rempli par le grand nombre des petites les contempteurs de la gloire se piquent de bien danser ou de quelque misère encore plus basse. Ils sont si aveugles qu’ils ne sentent pas que c’est la gloire qu’ils cherchent si curieusement, et si vains qu’ils osent la mettre dans les choses les plus frivoles La gloire, disent-ils, n’est ni vertu ni mérite ; ils raisonnent bien en cela elle n’est que leur récompense ; mais elle nous excite donc au travail et à la vertu, et nous rend souvent estimables , afin de nous faire estimer. Tout est très-abject dans les hommes, la vertu, la gloire, la vie ; mais les plus petits ont des proportions reconnues. Le chêne est un grand arbre près du cerisier ; ainsi les hommes à l’égard les uns des autres. Quelles sont les vertus et les inclinations de ceux qui méprisent la gloire?L’ont-ils méritée! XXVIII. De F Amour des Sciences et des Lettres. La passion de la gloire et la passion des sciences se ressemblent dans leur principe; car elles viennent l’une et l’autre du sentimentde notre vide et de notre imperfection. Mais l’une voudrait se former comme un nouvel être hors de nous, et l’autre s’attache à étendre et à cultiver notre fonds. Ainsi, la passion de la gloire veut nous agrandir au dehors, et celle des sciences au dedans. On ne peut avoir Tâme grande ou l’esprit un peu pénétrant DE L’ESPRIT HUMAIN. 199 sans quelque passion pour les lettres. Les arts sont consacrés à peindre les traits de la belle nature; les sciences, à la vérité. Les arts et les sciences embrassent tout ce qu’il y a dans la pensée de noble et d’utile; de sorte qu’il ne reste à ceux qui les rejettent que ce qui est indigne d’être peint ou enseigné , etc. La plupart des hommes honorent les lettres comme la religion et la vertu 1 ; c’est-à-dire comme une chose qu’ils ne peuvent ni connaître, ni pratiquer, ni aimer. Personne néanmoins n’ignore que les bonslivres sont l’essence des meilleurs esprits, le précis de leurs connaissances et le fruit de leurs longues veilles. L’étude d’une vie entière s’y peut recueillir dans quelques heures; c’est un grand secours. Deux inconvénients sont à craindre dans cette passion le mauvais choix et l’excès. Quant au mauvais choix, il est probable que ceux qui s’attachent à des connaissances peu utiles ne seraient pas propres aux autres ; mais l’excès se peut corriger. Si nous étions sages, nous nous bornerions à un petit nombre de connaissances, afin de les mieux posséder. Nous tâcherions de nous les rendre familières et de les réduire en pratique la plus longue et la plus laborieuse théorie n’éclaire cu’imparfaitement. Un homme qui n’aurait jamais dansé posséderait inutilement les règles de la danse ; il en est sans doute de même des métiers d’esprit 2 . Je dirai bien plus rarement l’étude est utile lorsqu’elle n’est pas accompagnée du commerce du monde. Il ne faut pas séparer ces deux choses l’une nous apprend à penser, l’autre à agir ; l’une à parler, l’autre à écrire ; l’une à disposer nos actions, l’autre à les rendre faciles. L’usage du monde nous donne encore de penser naturellement, et l’habitude des sciences, de penser profondément. 1 La plupart des hommes honorent les lettres comme-la religion et la vertu. Il faut comme ils honorent. On avait copié cette pensée dans l’ Encyclopédie, sans en citer l’auteur. Les journalistes de Trévoux, qui avaient fort oué l’ouvrage de Vauvenargues lorsqu’il parut, firent un crime de cette maxime aux encyclopédistes. M. 2 II en est sans doute de même des métiers d’esprit, 11 faudrait, ce me semble, des métiers de l’esprit. M. 200 VAUVENARGUES. Par une suite naturelle de ees vérités, ceux qui sont privés de l’un et l’autre avantage par leur condition fournissent une preuve incontestable de l’indigence naturelle de l’esprit humain. Un vigneron, un couvreur, resserrés dans un petit cercle d’idées très-communes, connaissent à peine les plus grossiers usages de la raison, et n’exercent leur jugement, supposé qu’ils en aient reçu de la nature, que sur des objets très-palpables. Je sais bien que l’éducation ne peut suppléer le génie; je n’ignore pas que les dons de la nature valent mieux que les dons de l’art 1 cependant l’art est nécessaire pour faire fleurir les talents. Un beau naturel négligé ne porte jamais de fruits mûrs. ' Peut-on regarder comme un bien un génie à peu près stérile? Que servent à un grand seigneur les domaines qu’il laisse en friche? Est-il riche de ces champs incultes? XXIX. De l'Avarice. Ceux qui n’aiment l’argent que pour la dépense ne sont pas véritablement avares. L’avarice est une extrême défiance des événements, qui cherche à s’assurer contre les instabilités de la fortune par une excessive prévoyance, et manifeste cet instinct avide qui nous sollicite d’accroître, d’étayer, d’affermir notre être. Basse et déplorable manie, qui n’exige ni connaissance, ni vigueur d’esprit, ni jeunesse, et qui prend, par cette raison, dans la défaillance des sens la place des autres passions. XXX. De la Passion du Jeu. Quoique j'aie dit que l’avarice naît d’une défiance ridicule des événements de la fortune, et qu’il semble que l’amour du 1 Je n'ignore pas que les dons de la nature valent mieux que les dons de l'art Je ne sais si l’on peut dire les dons de Varl comme les dons de la nature. La nature donne, dote, doue; Fart ne fait rien de tout cela il vend et ne donne pas, et l’on achète ses biens avec l’étude et le travail. M. DE L'ESPRIT IIUMALN. 201 jeu vieune, au contraire, d’une ridicule confiance aux mêmes événements, je ne laisse pas de croire qu’il y a des joueurs avares et qui ne sont confiants qu’au jeu encore ont-ils, comme on dit, un jeu timide et serré. Des commencements souvent heureux remplissent l’esprit des joueurs de l’idée d’un gain très-rapide qui paraît toujours sous leurs mains cela détermine. Par combien de motifs d’ailleurs n’est-on pas porté à jouer? par cupidité, par amour du faste, par goût des plaisirs, etc. Il suffit donc d’aimer quelqu’une de ces choses pour aimer le jeu ; c’est une ressource pour les acquérir, hasardeuse à la vérité, mais propre à toutes sortes d’hommes, pauvres, riches, faibles , malades, jeunes et vieux, ignorants et savants, sots et habiles, etc. aussi n’y a-t-il point de passion plus commune que celle-ci. XXXI. De la Passion des Exercices. Il y a dans la passion des exercices un plaisir pour les sens et un plaisir pour l’âme. Les sens sont flattés d'agir, de galoper un cheval », d’entendre un bruit de chasse dans une forêt; l’âme jouit de la justesse de ses sens, de la force et de l’adresse de son corps, etc. Aux yeux d’un philosophe qui médite dans son cabinet cette gloire est bien puérile; mais dans l’ébranlement de l’exercice on ne scrute pas tant les choses. En approfondissant les hommes on rencontre des vérités humiliantes, mais incontestables. Vous voyez l’âme d’un pêcheur, qui se détache en quelque sorte de son corps pour suivre un poisson sous les eaux, et le pousser au piège que sa main lui tend. Qui croirait qu’elle s’applaudit de la défaite du faible animal et triomphe au fond du filet? Toutefois rien n’est si sensible. Un grand, à la chasse, aime mieux tuer un sanglier qu’une hirondelle par quelle raison ? Tous la voient. 1 Les sens sont flattés d'agir^ de galoper un cheval. Négligé. Les sens ne galopent pas un cheval. M. 201 VAUVENARGUES. XXXII. De l’Amour paternel. L’amour paternel ne diffère pas de l’amour-propre Un enfant ne subsiste que par ses parents, dépend d’eux, vient d’eux, leur doit tout ; ils n’ont rien qui leur soit si propre. Aussi un père ne sépare point l’idée d’un fils de la sienne, à moins que le fils n’affaiblisse cette idée de propriété par quelque contradiction ; mais plus un père s’irrite de cette contradiction , plus il s’afflige, plus il prouve ce que je dis. XXXIII. De l’Amour filial et fraternel. Comme les enfants n’ont nul droit sur la volonté de leur père, la leur étant, au contraire, toujours combattue, cela leur fait sentir qu’ils sont des êtres à part, et ne peut pas leur inspirer de l’amour-propre; parce que la propriété ne saurait être du côté de la dépendance cela est visible. C’est par cette raison que la tendresse des enfants n’est pas aussi vive que celle des pères ; mais les lois ont pourvu à cet inconvénient. Elle sont un garant au père contre l’ingratitude des enfants, comme la nature est aux enfants un otage assuré contre l’abus des lois. Il était juste d’assurer à la vieillesse les secours qu’elle avait prêtés à la faiblesse de l’enfance. La reconnaissance prévient dans les enfants bien nés ce que le devoir leur impose. Il est dans la saine nature d’aimer ceux qui nous aiment et nous protègent, et l’habitude d’une juste dépendance en fait perdre le sentiment ; mais il suffit d’être homme pour être bon père; et si l’on n’est homme de bien, il est rare qu’on soit bon fils. Du reste, qu’on mette à la place de ce que je dis la sympathie ou le sang, et qu’on me fasse entendre pourquoi le sang ne parle pas autant dans les enfants que dans les pères ; pourquoi la sympathie périt quand la soumission diminue; pourquoi des DE L’ESPRIT HUMAIN. 20 ? frères souvent se haïssent sur des fondements si légers, etc. Mais quel est donc le nœud de l’amitié des frères ? Une fortune , ud nom commun, même naissance et même éducation, quelquefois même caractère ; enfin l’habitude de se regarder comme appartenant les uns aux autres, et comme n’ayant qu’un seul être. Voilà ce qui fait que l’on s’aime, voilà l’amour-propre mais trouvez le moyen de séparer des frères d’intérêt, i’amitié lui survit à peine ; l’amour-propre, qui en était le fond, se porte vers d’autres objets. XXXIV. De F Amour qu'on a pour les bêtes. 11 peut entrer quelque chose qui flatte les sens dans le goût qu’on nourrit pour certains animaux, quand ils nous appartiennent. J’ai toujours pensé qu’il s’y mêle de l’amour-propre rien n’est si ridicule à dire, et je suis fâché que cela soit vrai ; mais nous sommes si vides, que s’il offre à nous la moindre ombre de propriété nous nous y attachons aussitôt. Nous prêtons à un perroquet des pensées et des sentiments; nous nous figurons qu’il nous aime, qu’il nous craint, qu’il sent nos faveurs, etc. Ainsi nous aimons l’avantage que nous nous accordons sur lui. Quel empire! Mais c’est là l’homme. XXXV. De l’Amitié. C’est l’insuffisance de notre être qui fait naître l’amitié, et c’est l’insuffisance de l’amitié même qui la fait périr. Est-on seul, on sent sa misère, on sent qu’on a besoin d’appui; on cherche un fauteur de ses goûts, un compagnon de ses plaisirs et de ses peines ; on veut un homme dont on puisse posséder le cœur et la pensée. Alors l’amitié paraît être ce qu’il y a de plus doux au monde. A-t-on ce qu’on a souhaité, on change bientôt de pensée. Lorsqu’on voit de loin quelque bien, il fixe d’abord nos ÏOi VAUVENARGUES. désirs ; et lorsqu’on y parvient on en sent le néant. Notre âme, dont il arrêtait la vue dans l’éloignement, ne saurait s’y reposer quand elle voit au delà ainsi l’amitié, qui de loin bornait toutes nos prétentions, cesse de les borner de près; elle ne remplit pas le vide qu’elle avait promis de remplir; elle nous laisse des besoins qui nous distraient et nous portent vers d’autres biens. Alors on se néglige, on devient difficile, on exige bientôt comme un tribut les complaisances qu’on avait d’abord reçues comme un don. C’est le caractère des hommes de s’approprier peu à peu jusqu’aux grâces dont ils jouissent ; une longue possession les accoutume naturellement à regarder les choses qu’ils possèdent comme à eux ; ainsi l’habitude leur persuade qu’ils ont un droit naturel sur la volonté de leurs amis. Ils voudraient s’en former un titre pour les gouverner ; lorsque ces prétentions sont réciproques, comme on le voit souvent, l’amour-propre s’irrite et crie des deux côtés, produit de l’aigreur, des froideurs, et d’amères explications, etc. On se trouve aussi quelquefois mutuellement des défauts qu’on s’était cachés ; ou l’on tombe dans des passions qui dégoûtent de l’amitié, comme les maladies violentes dégoûtent des plus doux plaisirs. Ainsi les hommes les plus extrêmes ne sont pas les plus capables d’une constante amitié. On ne la trouve nulle part si vive et si solide que dans les esprits timides et sérieux, dont l’âme modérée connaît la vertu car elle soulage leur cœur oppressé sous le mystère et sous le poids du secret, détend leur esprit, l’élargit, les rend plus confiants et plus vifs, se mêle à leurs amusements , à leurs affaires et à leurs plaisirs mystérieux c’est l’âme de toute leur vie. Les jeunes gens sont aussi très-sensibles et très-confiants ; mais la vivacité de leurs passions les distrait et les rend volages. La sensibilité et la confiance sont usées dans les vieillards ; mais le besoin les rapproche, et la raison est leur lien les uns aiment plus tendrement, les autres plus solidement. Le devoir de l’amitié s’étend plus loin qu’on ne croit nous suivons notre ami dans ses disgrâces ; mais dans ses faiblesses nous l’abandonnons c’est être plus faible que lui. DE L'ESPRIT HUMAIN. 205 Quiconque se cache, obligé d’avouer les défautsdes siens, fait voir sa bassesse'. Êtes-vous exempt de ces vices, déclarez-vous donc hautement ; prenez sous votre protection la faiblesse des malheureux ; vous ne risquez rien en cela mais il n’y a que les grandes âmes qui osent se montrer ainsi. Les faibles se désavouent les uns les autres, se sacrifient lâchement aux jugements, souvent injustes, du public ; ils n’ont pas de quoi résister, etc. XXXVI. De CAmour. Il entre ordinairement beaucoup de sympathie dans l’amour, c’est-à-dire une inclination dont les sens forment le nœud ; mais, quoiqu’ils en forment le nœud, ils n’en sont pas toujours l’intérêt principal; il n’est pas impossible qu’il y ait un amour exempt de grossièreté. Les mêmes passions sont bien différentes dans les hommes. Le même objet peut leur plaire par des endroits opposés. Je suppose que plusieurs hommes s’attachent à la même femme les uns l’aiment pour son esprit, les autres pour sa vertu, les autres pour ses défauts, etc. ; et il se peut faire encore que tous l’aiment pour des choses qu’elle n’a pas, comme lorsque l’on aime une femme légère que l’on croit solide. N’importe, on s’attache à l’idée qu’on se plaît à s’en figurer ; ce n’est même que cette idée que l’on aime, ce n’est pas la femme légère ainsi l’objet des passions n’est pas ce qui les dégrade ou ce qui les ennoblit, mais la manière dont on envisage cet objet. Or, j’ai dit qu’il étaitpos- sible que l’on cherchât dans l’amour quelque chose de plus que l’intérêt de nos sens. Voici ce qui me le fait croire. Je vois tous les jours dans le monde qu’un homme environné de femmes auxquelles il n’a jamais parlé, comme à la messe, au sermon, ne se décide pas toujours pour celle qui est la plus jolie, et qui même lui paraît telle. Quelle est la raison de cela ? C’est que chaque 1 Quiconque se cache, obligé cFavouer les défauts des siens , fait voir sa bassesse. Toute cette pensée est mal exprimée et obscure. Quiconque se cache d’avoir des amis dont il est obligé d’avouer les défauts fait voir sa bas sesse. Je crois que c’est ainsi qu’il faut l’expliquer. M. VI 206 VAUVENARGUES. beauté exprime un caractère tout particulier ; et celui qui entre le plus dans le nôtre, nous le préférons. C’est donc le caractère qui nous détermine quelquefois ; c’est donc l’âme que nous cherchons on ne peut me nier cela. Donc tout ce qui s’offre à nos sens ne nous plaît alors que comme une image de ce qui se cache à leur vue ; donc nous n’aimons alors les qualités sensibles que comme les organes de notre plaisir, et avec subordination aux qualités insensibles dont elles sont l’expression ; donc il est au moins vrai que l’âme est ce qui nous touche le plus. Or ce n’est pas aux sens que l’âme est agréable , mais à l’esprit ; ainsi l’intérêt de l’esprit devient l’intérêt principal, et si celui des sens lui était opposé, nous le lui sacrifierions. On n’a donc qu’à nous persuader qu’il lui est vraiment opposé, qu’il est une tache pour l’âme voilà l’amour pur. Amour cependant véritable, qu’on ne saurait confondre avec l’amitié ; car dans l’amitié c’est l’esprit qui est l’organe du sentiment ; ici ce sont les sens. Et comme les idées qui viennent par les sens sont infiniment plus puissantes que les vues de la réflexion, ce qu’elles inspirent est passion. L’amitié ne va pas si loin; et, malgré tout cela, je ne décide pas je le laisse à ceux qui ont blanchi sur ces importantes questions. XXXVII. De la Physionomie. La physionomie est l’expression du caractère et celle du tempérament. Une sotte physionomie est celle qui n’exprime que la complexion, comme un tempérament robuste, etc. ; mais il ne faut jamais juger sur la physionomie car il y a tant de traits mâles sur le visage et dans le maintien des hommes, que cela peut souvent confondre ; sans parler des accidents qui défigurent les traits naturels, et qui empêchent que l’âme ne s’y manifeste, comme la petite vérole, la maigreur, etc. On pourrait conjecturer plutôt du caractère des hommes par l’agrément qu’ils attachent à de certaines figures qui répondent a leurs passions ; mais encore s’y tromperait-on- DE L’ESPRIT HUMAIN. 207 XXXVIII. De la Pitié. La pitié n'est qu’un sentiment mêlé de tristesse et d’amour 1 2 ; je ne pense pas qu’elle ait besoin d’être excitée par un retour sur nous-même, comme on le croit. Pourquoi la misère ne pourrait-elle sur notre cœur ce que fait la vue d’une plaie sur nos sens? N’y a-t-il pas des choses qui affectent immédiatement l’esprit? L’impression des nouveautés ne prévient-elle pas toujours nos réflexions? Notre âme est-elle incapable d’un sentiment désintéressé ? XXXIX. De la Haine. La haine est une déplaisance dans l’objet haï C’est une tristesse qui nous donne pour la cause qui l’excite une secrète aversion on appelle cette tristesse jalousie lorsqu’elle est un effetdu sentiment de nos désavantages comparés aubiendequel- qu’un. Quand il se joint à cette jalousie de la haine, une volonté de vengeance dissimulée par faiblesse, c’est envie. Il y a peu de passions où il n’entre de l’amour ou de la haine. La colère n’est qu’une aversion subite et violente, enflammée d’un désir aveugle de vengeance ; l’indignation, un sentiment de colère et de mépris; le mépris, un sentiment mêlé de haine et 1 La pitié n'est qu'un sentiment mêlé de tristesse et d’amour. Vauvenar- gues entend ici par amour toute disposition qui nous porte vers un objet, comme il entend par haine toute disposition qui nous en éloigne. Autrement il serait impossible d’expliquer le chapitre suivant, où il dit qu’iï y a peu de passions où il n'entre de l'amour ou de la haine; que le mépris est un sentiment mêlé de haine et d'orgueil. S. 2 La haine est une déplaisance dans l'objet haï. C’est plutôt l’effet de cette déplaisance. Il faudrait, ce semble la haine naît du déplaisir que nous cause, etc. M. Je crois, comme je l’ai dit plus haut, que Vauvenargues prend plutôt ici la haine pour ce sentiment même de déplaisance qui nous éloigne d’un objet. Cette expression n’est pas usitée en ce sens; cependant je crois bien que c’est celui qu'il lui donne. S. 208 VAUVENARGUES. d’orgueil; l’antipathie, une haine violente et qui ne raisonne pas. Il entre aussi de l’aversion dans le dégoût ; il n’est pas une simple privation, comme l’indifférence ; et la mélancolie, qui n’est communément qu’un dégoût universel sans espérance, tient encore beaucoup de la haine. A l’égard des passions qui viennent de l’amour, j’en ai déjà parlé ailleurs; je me contente donc de répéter ici que tous les sentiments que le désir allume sont mêlés d’amour et de haine. XL. De l'Estime, du Respect, et du Mépris. L’estime est un aveu intérieur du mérite de quelque chose ; le respect est le sentiment de la supériorité d’autrui. Il n’y a pas d’amour sans estime j’en ai dit la raison. L’amour étant une complaisance dans l’objet aimé, et les hommes ne pouvant se défendre de trouver un prix aux choses qui leur plaisent, peu s’en faut qu’ils ne règlent leur estime sur le degré d’agrément que les objets ont pour eux. Et s’il est vrai que chacun s’estime personnellement plus que tout autre, c’est, ainsi que je l’ai déjà dit, parce qu’il n’y a rien qui nous plaise ordinairement tant que nous-même. Ainsi, non-seulement on s’estime avant tout, mais on estime encore toutes les choses que l’on aime, comme la chasse, la musique, les chevaux, etc. ; et ceux qui méprisent leurs propres passions ne le font que par réflexion, et par un effort de raison car l’instinct les porte au contraire. Par une suite naturelle du même principe, la haine rabaisse ceux qui en sont l’objet, avec le même soin que l’ainour les relève. Il est impossible aux hommes de se persuader que ce qui les blesse n’ait pas quelque grand défaut ; c’est un jugement confus que l’esprit porte en lui-même, comme il en use au contraire en aimant 1 . 1 Cest un jugement confus que Vesprit porte en lui-même, comme il DE L’ESPRIT HUMAIN. 209 Et si !a réflexion contrarie cet instinct, car il y a des qualités qu’on est convenu d’estimer, et d’autres de mépriser, alors cette contradiction ne fait qu’irriter la passion ; et plutôt que de céder aux traits de la vérité, elle en détourne les yeux. Ainsi elle dépouille son objet de ses qualités naturelles, pour lui en donner de conformes à son intérêt dominant. Ensuite elle se livre témérairement et sans scrupule à ses préventions insensées. Il n’y a presque point d’homme dont le jugement soit supérieur à ses passions. Il faut donc bien prendre garde, lorsqu’on veut se faire estimer, à ne pas se faire haïr, mais tâcher, au contraire, de se présenter par des endroits agréables, parce que les hommes penchent à juger du prix des choses par le plaisir qu’elles leur font. Il y en a à la vérité qu’on peut surprendre par une conduite opposée, en paraissant au dehors plus pénétré de soi-même qu’on ne l’est au dedans ; cette confiance extérieure les persuade et les maîtrise. Mais il est un moyen plus noble de gagner l’estime des hommes c’est de leur faire souhaiter la nôtre par un vrai mérite, et ensuite d’être modeste et de s’accommoder à eux. Quand on a véritablement les qualités qui emportent l’estime du monde, il n’y a plus qu’à les rendre populaires pour leur concilier l’amour ; et lorsque l’amour les adopte, il en fait élever le prix. Mais pour les petites finesses qu’on emploie en vue de surprendre ou de conserver les suffrages, attendre les autres, se faire valoir, réveiller par des froideurs étudiées ou des amitiés ménagées le goût inconstant du public, c’est la ressource des hommes superficiels, qui craignent d’être approfondis; il faut leur laisser ces misères dont ils ont besoin avec leur mérite spécieux. Mais c’est trop s’arrêter aux choses ; tâchons d’abréger ces principes par de courtes définitions. Le désir est une espèce de mésaise que, l’amour du bien-être met en nous, et l’inquiétude un désir sans objet. en use au contraire en aimant. Au contraire , pour d’une manière con• traire expression négligée. S. 12 . 210 VAUVENARGUES. L’ennui vient du sentiment de notre vide ; la paresse naît d’impuissance ; la langueur est un témoignage de notre faiblesse, et la tristesse, de notre misère. L’espérance est le sentiment d’un bien prochain, et la reconnaissance celui d’un bien fait. Le regret consiste dans le sentiment de quelque perte ; le repentir, dans celui d’une faute ; le remords, dans celui d’un crime et la crainte du châtiment \ La timidité peut être la crainte du blâme, la honte en est la conviction. La raillerie naît d’un mépris content. La surprise est un ébranlement soudain à la vue d’une nou - veauté. L’étonnement est une surprise longue et accablante; l’admiration , une surprise pleine de respect. La plupart de ces sentiments ne sont pas trop composés, et n’affectent pas aussi durablement nos âmes que les grandes passions, l’amour, l’ambition, l’avarice, etc. Le peu que je viens de 1 L’ennui vient du sentiment de notre vide, la paresse naît d'impuissance. Qu’est-ce que notre vide P La paresse suppose, au contraire, le pouvoir d'agir combiné avec l'inaction. M. L’auteur entend ici par notre vide ce qu'il entend ailleurs par l'insuffisance de noire être , c'est-à-dire l'impossibilité où nous sommes de trouver en nous- même de quoi suffire à notre bonheur. Par impuissance , il entend, je crois, impuissance de l’âme, l’impossibilité où elle est de sortir de sa langueur. S. 2 Le regret consiste dans le sentiment de quelque perle; le repentir, dans celui d'une faute; le remords, dans celui d’un crime et la crainte du châtiment. Ce n’est pas, à ce qu’il semble, la différence de la faute et du crime qui constitue celle du repentir et du remords. On peut expier ses crimes par le repentir , et sentir le remords d'une faute. Si le repentir est moins cruel, c’est qu’il suppose le retour, et une résolution de ne plus retomber, qui console toujours. Le remords peut exister avec la résolution de se rendre encore coupable. Heureux , si je puis, dit Mathan dans Athalie, A force d’attentats perdre tons mes remords 1 D'est ainsi que les scélérats les perdent II n’y a point, pour eux de repentir. Dieu fit du repentir la Yertu des mortels. Heureusement le remords peut naître sans la crainte du châtiment; mais ce n’est guère que pour les premiers crimes. S. DE L’ESPRIT HUMAIN. 211 dire a cette occasion répandra une sorte de lumière sur ceux dont je me réserve de parler ailleurs. XLI. De l'Amour des objets sensibles. Il serait impertinent de dire que l’amour des choses sensibles, comme l’harmonie, les saveurs, etc., n’est qu’un effet de l’amour-propre, du désir de nous agrandir, etc., etc. Cependant tout cela s’y mêle quelquefois. Il y a des musiciens, des peintres , qui n’aiment chacun dans leur art que l’expression des grandeurs, et qui ne cultivent leurs talents que pour la gloire ainsi d’une infinité d’autres. Les hommes que les sens dominentne sont pas ordinairement si sujets aux passions sérieuses, l’ambition, l’amour de la gloire, etc. Les objets sensibles les amusent et les amollissent; et s’ils ont les autres passions, ils ne les ont pas aussi vives. On peut dire la même chose des hommes enjoués ; parce que ayant une manière d’exister assez heureuse, ils n’en cherchent pas une autre avec ardeur. Trop de choses les distraient ou les préoccupent. On pourrait entrer là-dessus, et sur tous les sujets que j’ai traités, dans des détails intéressants. Mais mon dessein n’est pas de sortir des principes, quelque sécheresse qui les accompagne ils sont l’objet unique de tout mon discours ; et je n’ai ni la volonté ni le pouvoir de donner plus d’application à cet ouvrage XLII. Des Passions en général. Les passions s’opposent aux passions, et peuvent servir de contre poids ; mais la passion dominante ne peut se conduire > Je n'ai ni la volonté ni le pouvoir de donner plus d'application à cet Hvrage. Donner plus d'application , mauvaise expression, pour dire déve- opper davantage des principes par des applications, ce qui précède prouve ue c’est là le sens, S. 212 VAUVENARGUES. que par son propre intérêt, vrai ou imaginaire, parce qu’elle règne despotiquement sur la volonté, sans laquelle rien ne se peut. Je regarde humainement les choses, et j’ajoute dans cet esprit Toute nourriture n’est pas propre à tous les corps , tous objets ne sont pas suffisants pour toucher certaines âmes. Ceux qui croient les hommes souverains arbitres de leurs sentiments ne connaissent pas la nature qu’on obtienne qu’un sourd s’amuse des sons enchanteurs de Murer; qu’on demande à une joueuse qui fait une grosse partie, qu’elle ait la complaisance et la sagesse de s’y ennuyer nul art ne le peut. Les sages se trompent encore en offrant la paix aux passions ; les passions lui sont ennemies 1 . Ils vantent la modération à ceux qui sont nés pour l’action et pour une vie agitée ; qu’importe à un homme malade la délicatesse d’un festin qui le dégoûte? Nous ne connaissons pas les défauts de notre âme; mais quand nous pourrions les connaître, nous voudrions rarement les vaincre. Nos passions ne sont pas distinctes de nous-même ; il y en a qui sont tout le fondement et toute la substance de notre âme. Le plus faible de tous les êtres voudrait-il périr pour se voir remplacé par le plus sage? Qu’on me donne un esprit plus juste, plus aimable, plus pénétrant, j’accepte avec joie tous ces dons ; mais, si l’on m’ôte encore l’âme qui doit en jouir, ces présents ne sont plus pour moi. Cela ne dispeuse personne de combattre ses habitudes, et ne doit inspirer aux hommes ni abattement ni tristesse. Dieu peut tout; la vertu sincère n’abandonne pas ses amants; les vices même d’un homme bien né peuvent se tourner à sa gloire. 1 Les passions lui sont ennemies. C’est un latinisme gens inimica nulli Ün dit ennemi de quelqu'un, et non ennemi à quelqu'un . S. UE L’ESPRIT HUMAIN. 313 LIVRE TROISIÈME. XLIII. Du Bien el du Mal moral. Ce qui n’est bien ou mal qu’à un particulier, et qui peut être le contraire à l’égard du reste des hommes, ne peut être regardé en général comme un mal ou comme un bien '. Afin qu’une chose soit regardée comme un bien par toute la société, il faut qu’elle tende à l’avantage de toute la société; et afin qu’on la regarde comme un mal, il faut qu’elle tende à sa ruine voilà le grand caractère du bien et du mal moral. Les hommes, étant imparfaits, n’ont pu se suffire à eux-mêmes de là la nécessité de former des sociétés. Qui dit une société dit un corps qui subsiste par l’union de divers membres et confond l’intérêt particulier dans l’intérêt général ; c’est là le fondement de toute la morale. Mais parce que le bien commun exige de grands sacrifices, et qu’il ne peut se répandre également sur tous les hommes, la religion, qui répare le vice des choses humaines, assure des indemnités dignes d’envie à ceux qui nous semblent lésés. Et toutefois ces motifs respectables n’étant pas assez puissants pour donner un frein à la cupidité des hommes, il a fallu encore qu’ils convinssent de certaines règles pour le bien public, fondé, à la honte du genre humain, sur la crainte odieuse des supplices ; t c’est l’origine des lois. Nous naissons, nous croissons à l’ombre de ces conventions solennelles; nous leur devons la sûreté de notre vie et la tranquillité qui l’accompagne. Les lois sont aussi !e seul titre 1 Ce qui n'est bien ou mal qu'à un particulier, et qui peut être le contraire à l'égard du reste des hommes , ne peut être regardé en général comme un mal ou comme un bien . Oui ; mais si toute la société avait la fièvre ou la goutte, ou était manchote ou folle? V. — Qu'à un particulier, au lieu de pour un particulier. S. 214 VAUVENARGUES. de nos possessions dès l’aurore de notre vie nous en recueillons les doux fruits, et nous nous engageons toujours à elles par des liens plus forts. Quiconque prétend se soustraire à cette autorité dont il tient tout ne peut trouver injuste qu’elle lui ravisse tout, jusqu’à la vie. Où serait la raison qu’un particulier osât en sacrifier tant d’autres à soi seul, et que par sa ruine la société ne pût racheter le repos publie. C’est un vain prétexte de dire qu’on ne se doit pas à des lois qui favorisent l’inégalité des fortunes. Peuvent-elles égaliser les hommes, l’industrie, l’esprit, les talents? Peuvent-elles empêcher les dépositaires de l’autorité d’en user selon leur faiblesse ? Dans cette impuissance absolue d’empêcher l’inégalité des conditions, elles fixent les droits de chacune, elles les protègent. On suppose d’ailleurs, avec quelque raison, que le cœur des hommes se forme sur leur condition. Le laboureur a souvent dans le travail de ses mains la paix et la satiété qui fuient l’orgueil des grands 1 2 . Ceux-ci n’ont pas moins de désirs que les hommes les plus abjects 1 ; ils ont donc autant de besoins voilà dans l’inégalité une sorte d’égalité. Ainsi on suppose aujourd’hui toutes les conditions égales ou nécessairement inégales. Dans l’une et l’autre supposition, l’équité consiste à maintenir invariablement leurs droits réciproques , et c’est là tout l’objet des lois. Heureux qui les sait respecter comme elles méritent de l’être ! Plus heureux qui porte en son cœur celles d’un heureux naturel ! Il est bien facile de voir que je veux parler des vertus 3 ; leur noblesse et leur excellence sont l’objet de tout ce discours ; mais 1 Le laboureur a souvent dans le travail de ses mains la paix , etc. On pourrait dire tout cela bien mieux. V. — Satiété n’est pas là dans son sens ordinaire, selon lequel il signifie un peu de dégoût résultant de rabondance; au lieu qu’ici il signifie la satisfaction résultant de la jouissance du nécessaire. Cette acception n'est plus d’usage. ftl. — Voyez le Discours sur l’inégalité des richesses. B. 2 Ceux-ci n’ont pas moins de désirs que les hommes les plus abjects. Il faudrait de l’état le plus abject. M. J 11 est bien facile de voir que je veux parler des vertus. Distinguons vertus et qualités heureuses bienfaisance seule est vertu; tempérance, .sagesse; bonnes qualités! tant mieux pour toi. V DE L’ESPRIT HUMAIN. 215 j’ai cru qu’il fallait d’abord établir une règle sûre pour les bien distinguer du vice. Je l’ai rencontrée sans effort dans le bien et le mal moral ; je l’aurais cherchée vainement dans une moins grande origine. Dire simplement que la vertu est vertu parce qu’elle est bonne en son fonds, et le vice tout au contraire, ce n’est pas les faire connaître. La force et la beauté sont aussi de grands biens; la vieillesse et la maladie, des maux réels cependant on n’a jamais dit que ce fût là vice ou vertu. Le mot de vertu emporte l’idée de quelque chose d’estimable à l’égard de toute la terre le vice, au contraire. Or, il n’y a que le bien et que le mal moral qui portent ces grands caractères. La préférence de l’intérêt général au personnel est la seule définition qui soit digne de la vertu, et qui doive en fixer l’idée. Au contraire, le sacrifice mercenaire du bonheur public à l’intérêt propre est le sceau éternel du vice. Ces divers caractères ainsi établis et suffisamment discernés, nous pouvons distinguer encore les vertus naturelles des acquises. J’appelle vertus naturelles les vertus de tempérament ; les autres sont les fruits pénibles de la réflexion. Nous mettons ordinairement ces dernières à plus haut prix, parce qu’elles nous coûtent davantage; nous les estimons plus à nous, parce qu’elles sont les effets de notre fragile raison. Je dis la raison elle-même n’est-elle pas un don de la nature, comme l’heureux tempérament? L’heureux tempérament exclut-il la raison? n’en est-il pas plutôt la base? et si l’un peut nous égarer, l’autre est-elle plus infaillible? Je me hâte, afin d’en venir à une question plus sérieuse. On demande si la plupart des vices ne concourent pas au bien public, comme les pures vertus. Qui ferait fleurir le commerce sans la vanité, l’avarice, etc.? En un sens cela est très-vrai ; mais il faut m’accorder aussi que le bien produit par le vice est toujours mêlé de grands maux. Ce sont les lois qui arrêtent le progrès de ses désordres ; et c’est la raison, la vertu, qui le subjuguent, qui le contiennent dans certaines bornes et le rendent utile au monde. A la vérité, la vertu ne satisfait pas sans réserve toutes nos passions ; mais si nous n’avions aucun vice, nous n’aurions pas 216 vaüvenargües. ces passions à satisfaire; et nous ferions par devoir ce qu’on fait par ambition, par orgueil, par avarice, etc. 11 est donc ridicule de ne pas sentir que c’est le vice qui nous empêche d’être heureux par la vertu. Si elle est si insuffisante à faire le bonheur des hommes, c’est parce que les hommes sont vicieux ; et les vices, s’ils vont au bien, c’est qu’ils sont mêlés de vertus, de patience, de tempérance, de courage, etc. Un peuple qui n’aurait en partage que des vices courrait à sa perte infaillible. Quand le vice peut procurer quelque grand avantage au monde, pour surprendre l’admiration il agit comme la vertu, parce qu’elle est le vrai moyen, le moyen naturel du bien; mais celui que le vice opère n’est ni son objet ni son but. Ce n’est pas à un si beau terme que tendent ses déguisements. Ainsi, le caractère distinctif de la vertu subsiste ; ainsi rien ne peut l’effacer. Que prétendent donc quelques hommes qui confondent toutes *.es choses, ou qui nient leur réalité? Qui peut les empêcher de voir qu’il y a des qualités qui tendent naturellement au bien du monde, et d’autres à sa destruction? Ces premiers sentiments, élevés, courageux, bienfaisants à tout l’univers, et par conséquent estimables à l’égard de toute la terre, voilà ce que l’on nomme vertu. Et ces odieuses passions, tournées à la ruine des hommes, et par conséquent criminelles envers le genre humain, c’est ce que j’appelle des vices. Qu’entendent-ils, eux, par ces noms? Cette différence éclatante du faible et du fort, du faux et du vrai, du juste et de l’injuste, etc., leur échappe-t-elle ? Mais le jour n’est pas plus sensible. Pensent-ils que l’irréligion dont ils se piquent puisse anéantir la vertu ? Mais tout leur fait voir le contraire. Qu’imaginent-ils donc qui leur trouble l’esprit ? qui leur cache qu’ils ont eux-mêmes, parmi leurs faiblesses, des sentiments de vertu ? Est-il un homme assez insensé pour douter que la santé ne soit préférable aux maladies? Non, il n’y en a point dans le monde. Trouve-t-on quelqu’un qui confonde la sagesse avec la folie? Non, personne assurément. On ne voit personne non plus qui ne préfère la vérité à l’erreur, personne qui ne sente bie>- que le courage est différent de la crainte, et nvie de la bonté. On ne voit pas moins clairement que l’humanité vaut mieux que DE L’ESPRIT HUMAIN. 217 l’inhumanité, qu’elle est plus aimable, plus utile, et par conséquent plus estimable; et faiblesse de l’esprit humain ! il n’y a point de contradiction dont les hommes ne soient capables dès qu’ils veulent approfondir. N’est-ce pas le comble de l’extravagance qu’on puisse réduire en question si le courage vaut mieux que la peur ? On convient qu’il nous donne sur les hommes et sur nous-même un empire naturel. On ne nie pas non plus que la puissance n’enferme une idée de grandeur, et qu’elle ne soit utile. On sait encore que la peur est un témoignage de faiblesse ; et on convient que la faiblesse est très-nuisible, qu’elle jette les hommes dans la dépendance, et qu’elle prouve ainsi leur petitesse. Comment peut-il donc se trouver des esprits assez déréglés pour mettre de l’égalité dans des choses si inégales? Qu’entend-on par un grand génie ? Un esprit qui a de grandes vues, puissant, fécond, éloquent, etc. Et par une grande fortune ? Un état indépendant, commode, élevé, glorieux. Personne ne disputedonc qu’il n’y ait de grands génies et de grandes fortunes. Les caractères de ces avantages sont trop bien marqués. Ceux d’une âme vertueuse sont-ils moins sensibles ? Qui peut nous les faire confondre? Sur quel fondement ose-t-on égaler le bien et le mal? Est-ce sur ce que l’on suppose que nos vices et nos vertus sont des effets nécessaires de notre tempérament? Mais les maladies, la santé, ne sont-elles pas des effets nécessaires de la même cause? Les confond-on cependant, et a-1-on jamais dit que c’étaient des chimères, qu’il n’y avait ni santé ni maladies 1 ? Pense-t-on que tout ce qui est nécessaire ne soit d’aucun mérite? Mais c’est une nécessité en Dieu d’être tout-puissant, éternel la puissance et l’éternité seront-elles égales au néant? Ne seront- elles plus des attributs parfaits. Quoi ! parce que la vie et la mort sont en nous des états de nécessité, n’est-ce plus qu’une même chose, indifférente aux humains? Mais peut-être que les vertus, ’ Non pas précisément. Mais on sait l’histoire du stoïcien Possidonius d*A- pâmée, qui, au milieu d’un violent accès de goutte, prétendait que la douleur n'est point un mal. A la vérité, c’était en soutenant ce dogme des stoïciens Qu'il n'y a rien de bon que ce qui est honnête . Voyez le second livre des Tuseulanet de Cicéron. F. MAXIMES, SENTENCES, ETC. 13 218 VAUVENARGUES. que j’ai peintes comme un sacrifice de notre intérêt propre à l’intérêt public, ne sont qu’un pur effet de l’amour de nous- même. Peut-être ne faisons-nous le bien que parce que notre plaisir se trouve dans ce sacrifice ? Étrange objection! Parce que je me plais dans l’usagede ma vertu, en est-elle moins profitable, moins précieuse à tout l’univers, ou moins différente du vice, qui est la ruine du genre humain ? Le bien où je me plais change- t-il de nature? cesse-t-il d’être bien? Les oracles de la piété, continuent nos adversaires, condamnent cette complaisance. Est-ce à ceux qui nient la vertu à la combattre par la religion, qui l’établit? Qu’ils sachent qu’un Dieu bon et juste ne peut réprouver le plaisir que lui-même attache à bien faire. Nous prohiberait-il ce charme qui accompagne l’amour du bien? Lui-même nous ordonne d'aimer la vertu, et sait mieux que nous qu’il est contradictoire d’aimer une chose sans s'y plaire. S’il rejette donc nos vertus, c’est quand nous nous approprions les dons que sa main nous dispense, que nous arrêtons nos pensées à la possession de ses grâces, sans aller jusqu’à leur principe; que nous méconnaissons le bras qui répand sur nous ses bienfaits, etc. Une vérité s’offre à moi. Ceux qui nient la réalité des vertus sont forcés d’admettre des vices. Oseraient-ils dire que l’homme n’est pas insensé et méchant? Toutefois, s’il n’y avait que des malades, saurions-nous ce que c’est que la santé? XLIV. De la Grandeur d ame. Après ce que nous avons dit, je crois qu’il n’est pas nécessaire de prouver que la grandeur d’âme est quelque chose d’aussi réel que la santé, etc. Il est difficile de ne pas sentir dans un homme qui maîtrise la fortune, et qui par des moyens puissants arrive à des fins élevées, qui subjugue les autres hommes parson activité, par sa patience ou par de profonds conseils ; je dis qu’il est difficile de ne pas sentir dans un génie de cet ordre une noble réalité. Cependant il n’v a rien de pur et dont nous n’abusions sans peine. DE L’ESPRIT HUMAIN. 219 La grandeur d’âme est un instinct élevé qui porte les hommes au grand, de quelque nature qu’il soit, mais qui les tourne au bien ou au mal, selon leurs passions, leurs lumières, leur éducation, leur fortune, etc. Égale à tout ce qu’il y a sur terre de plus élevé, tantôt elle cherche à soumettre par toutes sortes d’efforts ou d’artifices les choses humaines à elle, et tantôt, dédaignant ces choses, elle s’y soumet elle-même sans que sa soumission l’abaisse pleine de sa propre grandeur, elle s’y repose en secret, contente de se posséder. Qu’elle est belle quand la vertu dirige tous ses mouvements ! mais qu’elle est dangereuse alors qu’elle se soustrait à la règle ! Représentez- vous Catilina au-dessus de tous les préjugés de la naissance, méditant de changer la face de la terre et d’anéantir le nom romain concevez ce génie audacieux menaçant le monde du sein des plaisirs, et formant d’une troupe de voluptueux et de voleurs un corps redoutable aux armées et à la sagesse de Rome. Qu’un homme de ce caractère aurait porté loin la vertu s’il eût été tourné au bien ! mais les circonstances malheureuses le poussent au crime. Catilina était né avec un amour ardent pour les plaisirs, que la sévérité des lois aigrissait et contraignait; sa dissipation et ses débauches l’engagèrent peu à peu dans des projets criminels ruiné, décrié, traversé, il se trouva dans un état où il lui était moins facile de gouverner la république que de la détruire; ne pouvant être le héros de sa patrie, il en méditait la conquête. Ainsi les hommes sont souvent portés au crime par de fatales rencontres ou par leur situation; ainsi leur vertu dépend de leur fortune. Que manquait-il à César? que d’être né souverain. Il était bon, magnanime, généreux, hardi, clément ; personne n’était plus capable de gouverner le monde et le rendre heureux s’il eût eu une fortune égale à son génie, sa vie aurait été sans tache ; mais parce qu’il s’était placé lui-même sur le trône par la force, on a cru pouvoir le compter avec justice parmi les tyrans. Cela fait sentir qu’il y a des vices qui n’excluent pas les grandes qualités, et par conséquent de grandes qualités qui s’éloignent de la vertu. Je reconnais cette vérité avec douleur il est 220 VAUVENARGUES. triste que la bonté n’accompagne pas toujours la force, et que l’amour de la justice ne prévale pas nécessairement dans tous les hommes et dans tout le cours de leur vie, sur tout autre amour; mais non-seulement les grands hommes se laissent entraîner au vice, les vertueux mêmes se démentent et sont inconstants dans le bien. Cependant ce qui est sain est sain, ce qui est fort est fort, etc. Les inégalités de la vertu, les faiblesses qui l’accompagnent, les vices qui flétrissent les plus belles vies, ces défauts inséparables de notre nature, mêlée si manifestement de grandeur et de petitesse, n’en détruisent pas les perfections. Ceux qui veulent que les hommes soient tout bons ou tout méchants, absolument grands ou petits, ne connaissent pas la nature. Tout est mélangé dans les hommes; tout y est limité ; et le vice même y a ses bornes. XLV. Du Courage. Le vrai courage est une des qualités qui supposent le plus de grandeur d’âme. J’en remarque beaucoup de sortes un courage contre la fortune, qui est philosophie; un courage contre la misère, qui est patience ; un courage à la guerre, qui est valeur ; un courage dans les entreprises, qui est hardiesse; un courage fier et téméraire, qui est audace; un courage contre l’injustice, qui est fermeté; un courage contre le vice, qui est sévérité; un courage de réflexion, de tempérament, etc. 11 n’est pas ordinaire qu’un même homme assemble tant de qualités. Octave, dans le plan de sa fortune, élevée sur des précipices , bravait des périls éminents ; mais la mort, présente à la guerre, ébranlait son âme. Un nombre innombrable de Romains qui n’avaient jamais craint la mort dans les batailles manquaient de cet autre courage qui soumit la terre à Auguste. On ne trouve pas seulement plusieurs sortes de courages, mais dans le même courage bien des inégalités. Brutus, qui eut la hardiesse d’attaquer la fortune de César, n’eut pas la force de suivre la sienne il avait formé le dessein de détruire la tyrannie DE L’ESPRIT HUMAIN. 221 avec les ressources de son seul courage, et il eut la faiblesse de l’abandonner avec toutes les forces du peuple romain, faute de cette égalité de force et de sentiment qui surmonte les obstacles et la lenteur des succès. Je voudrais pouvoir parcourir ainsi en détail toutes les qualités humaines ; un travail si long ne peut maintenant m’arrêter. Je terminerai cet écrit par de courtes définitions. Observons néanmoins encore que la petitesse est la source d’un nombre incroyable de vices de l’inconstance, la légèreté, la vanité, l’envie, l’avarice, la bassesse, etc.; elle rétrécit notre esprit autant que la grandeur d’âme l’élargit ; mais elle est malheureusement inséparable de l'humanité ; et il n’y a point d’âme si forte qui en soit tout à fait exempte. Je suis mon dessein. La probité est un attachement à toutes les vertus civiles *. La droiture est une habitude des sentiers de la vertu. L’équité peut se définir par l’amour de l’égalité 1 2 ; l’intégrité paraît une équité sans tache, et la justice une équité pratique. La noblesse est la préférence de l’honneur à l’intérêt; la bassesse , la préférence de l’intérêt à l’honneur. L’intérêt est la fin de l’amour-propre 3 ; la générosité en est le sacrifice. La méchanceté suppose un goût à faire du mal ; la malignité , une méchanceté cachée ; la noirceur, une méchanceté profonde. L’insensibilité à la vue des misères peut s’appeler dureté ; s’il y entre du plaisir, c’est cruauté. La sincérité me paraît l’expression de la vérité; la franchise, une sincérité sans voiles de droit à ceux qui savent les mettre à leur place. i cccxxxii 11 ne faut pas craindre non plus de redire une vérité ancienne, lorsqu’on peut la rendre plus sensible par un meil- j leur tour, ou la joindre à une autre vérité qui l’éclaircisse, et 1 former un corps de raisons. C’est le propre des inventeurs de saisir le rapport des choses, et de savoir les rassembler; et les j découvertes anciennes sont moins à leurs premiers auteurs qu’à • ceux qui les rendent utiles. \ j cccxxxiii On fait un ridicule à un homme du monde du j talent et du goût d’écrire 2 . Je demande aux gens raisonnables I Que font ceux qui u’écrivent pas ? cccxxxiv On ne peut avoir l’âme grande ou l’esprit un peu j pénétrantsans quelque passion pourles lettres. Les arts sontcon- sacrés à peindre les traits de la belle nature ; les sciences, à la vé- ; rité. Les arts ou les sciences embrassent tout ce qu’il y a dans les objets delà pensée de noble ou d’utile de sorte qu’il ne reste à ceux qui les rejettent que ce qui est indigne d’être peint ou enseigné. cccxxxv Voulez-vous démêler, rassembler vos idées, les mettre sous un même point de vue, et les réduire en principes ? jetez-lesd’abord surle papier. Quand vousn’auriez rienà gagner par cet usage du côté de la réflexion, ce qui est faux manifestement, que n’acquerriez-vous pas du côté de l’expression ? Laissez • 1 Le tour élevé; métaphore qui peut paraître incohérente. S. 1 Du goût d'écrire. On a déjà observé que cette expression étaitincorrccte. S. ; RÉFLEXIONS ET MAXIMES. 277 dire ceux qui regardent cette étudemomme au-dessous d’eux. Qui peut croire avoir plus d’esprit, un génie plus grand et plus noble que le cardinal de Richelieu? qui a été chargé de plus d’affaires et de plus importantes ? Cependant nous avons des Controverses de ce grand ministre et un Testament politique on sait même qu’il n’a pas dédaigné la poésie. Un esprit si ambitieux ne pouvait mépriser la gloire la plus empruntée et la plus à nous qu’on connaisse. 11 n’est pas besoin de citer, après un si grand nom, d’autres exemples le duc de La Rochefoucauld, l’homme de son siècle le plus poli et le plus capable d’intrigues, auteur du livre des Maximes ; le fameux cardinal de Retz , le cardinal d’Ossat , le chevalier Guillaume Temple 2 , et une infinité d’autres qui sont aussi connus par leurs écrits que par leurs actions immortelles. Si nous ne sommes pas à même d’exécuter de si grandes choses que ces hommes illustres, qu’il paraisse du moins par l’expression de nos pensées, et par ce qui dépend de nous, que nous n’étions pas incapables de les concevoir. Sur la Vérité et l'Éloquence. cccxxxvi Deux études sont importantes l’éloquence et la vérité; la vérité pour donner un fondement solide à l’éloquence et bien disposer notre vie ; l’éloquence, pour diriger la conduite des autres hommes et défendre la vérité. cccxxxvn La plupart des grandes affaires se traitent par écrit; il ne suffit donc pas de savoir parler tous les intérêts subalternes, les engagements, les plaisirs, les devoirs de la vie civile, demandent qu’on sache parler ; c’est donc peu de savoir écrire. Nous aurions besoin tous les jours d’unir l’une et l’autre éloquence mais nulle ne peut s’acquérir si d’abord on ne sait penser; et on ne sait guère penser si l’on n’a des principes fixes 1 Arnaud, cardinal d’Ossal, auteur de lettres regardées comme des chefs- d'œuvre de politique, mourut à Rome, le 15 mars t604. Brière. 1 Guillaume Temple, célèbre négociateur anglais, auteur d’un grand nombre d’ouvrages historiques, mourut dans le comté de Susses, en février 16US Rrière. lî 2 7 8 VAUVEN ARGUES. et puisés dans la vérité. Tout confirme notre maxime l’étude du vrai la première, l’éloquence après. Pensées diverses. cccxxxviii C’est un mauvais parti pour une femme que d’être coquette. Il est rare que celles de ce caractère allument de grandes passions ; et ce n’est pas à cause qu’elles sont légères, comme on croit communément, mais parce que personne ne veut être dupe. La vertu nous fait mépriser la fausseté, et l’amour-propre nous la fait haïr. cccxxxix Est-ce force dans les hommes d’avoir des passions, ou insuffisance et faiblesse ? Est-ce grandeur d’être exempt de passions, ou médiocrité de génie? Ou tout est-il mêlé de faiblesse et de force, de grandeur et de petitesse? cccxl Qui est plus nécessaire au maintien d’une société d’hommes faibles, et que leur faiblesse a unis, la douceur ou 'austérité? Il faut employer l’une et l’autre. Que la loi soit sévère , et les hommes indulgents. cccxli La sévérité dans les lois est humanité pour les peuples ; dans les hommes, elle est la marque d’un génie étroit et cruel. Il n’y a que la nécessité qui puisse la rendre innocente. cccxlii Le projet de rapprocher les conditions a toujours été un beau songe la loi ne saurait égaliser les hommes malgré la nature. cccxliii S’il n’y avait de domination légitime que celle qui s’exerce avec justice, nous ne devrions rien aux mauvais rois. cccxliv Comptez rarement sur l’estime et sur la confiance d’un homme qui entre dans tous vos intérêts, s’il ne vous parle aussitôt des siens. 279 RÉFLEXIONS ET MAXIMES. - cccxtv Nous haïssons les dévots qui font profession de mépriser tout ce dont nous nous piquons, et se piquent souvent eux-mêmes de choses encore plus méprisables. cccxlvi C’est par la conviction manifeste de notre incapacité ' que le hasard dispose si universellement et si absolument de tout. Il n’y a rien de plus rare dans le monde que les grands talents et que le mérite des emplois la fortune est plus partiale qu’elle n’est injuste. cccxLViiLe mystère dont on enveloppe ses desseins marque quelquefois plus de faiblesse que l’indiscrétion , et souvent nous fait plus de tort. cccxlviii Ceux qui font des métiers infâmes, comme les voleurs, les femmes perdues, s’honorent de leurs crimes, et regardent les honnêtes gens comme des dupes. La plupart des hommes, dans le fond du cœur, méprisent la vertu, peu la gloire. cccxLixUne mauvaise préface allonge considérablement un mauvais livre; mais ce qui est bien pensé est bien pensé, et ce qui est bien écrit est bien écrit. cccl Ce sont les ouvrages médiocres qu’il faut abréger. Je n’ai jamais vu de préface ennuyeuse à la tête d’un bon livre. cccli Toute hauteur 2 affectée est puérile-, si elle se fonde 1 C'est par la conviction manifeste de notre incapacité que le hasard dispose , etc Cette pensée est obscure; l’auteur veut dire, je crois, que c’est la conviction que noue avons de notre incapacité qui nous fait abandonner tant de choses au hasard. Il n'y a rien de plus rare dans le monde , dit-il ensuite, que les grands talents et que le mérite des emplois le mérite des emplois est une ellipse forcée. L’auteur ajoute s Infortune est plue partiale qu'elle n'est injuste , c’est-à-dire qu’entre des concurrents sans moyens, elle n’est pas injuste en refusant un emploi à tel qui ne le mérite pas, mais partiale en l’accordant à tel autre qui ne le mérite pas davantage. S. 2 l'oute hauteur^ t te. Je crois qn'orgueil est ici le mot propre. Hauteur, pris à l'absolu, ne peut s’entendre dans un sens favorable. S 280 VAUVENARGUES sur des titres supposés, elle est ridicule ; et si ces titres sont frivoles, elle est basse le caractère de la vraie hauteur est d’être toujours à sa place. ccclii Nous n’attendons pas d’un malade qu’il ait l'enjouement de la santé et la même force de corps ; s’il conserve même sa raison jusqu’à la fin, nous nous en étonnons; et s’il fait paraître quelque fermeté, nous disons qu’il y a de l’affectation dans cette mort tant cela est rare et difficile. Cependant, s’il arrive qu’un autre homme démente en mourant, ou la fermeté, ou les principes qu’il a professés pendant sa vie; si dans l’état du monde le plus faible, il donne quelque marque de faiblesse,.... ô aveugle malice de l’esprit humain! il n’y a pas de contradictions si manifestes que l’envie n’assembie pour nuire. cccliii On n’est pas appelé à la conduite des grandes affaires, ni aux sciences, ni aux beaux-arts, ni à la vertu, quand on n’aime pas ces choses pour elles-mêmes, indépendamment de la considération qu’elles attirent. On les cultiverait donc inutilement dans ces dispositions ni l’esprit ni la vanité ne peuvent donner le génie. cccliv Les femmes ne peuvent comprendre qu’il y ait des hommes désintéressés à leur égard. ccclv Il n’est pas libre à un homme qui vit dans le monde de n'être pas galant. ccclvi Quels que soient ordinairement les avantages de la jeunesse, un jeune homme n’est pas bien venu auprès des femmes jusqu’à ce qu’elles eu aient fait un fat. ccclviiU est plaisant qu’on ait fait une loi de la pudeur aux femmes, qui n’estiment dans les hommes que l’effronterie. ccclviii On ne loue point une femme ni un auteur médiocre comme eux-mêmes se louent. RÉFLEXIONS ET MAXIMES. 281 j ccclix Une femme qui croit se bien mettre ne soupçonne i pas, dit un auteur, que son ajustement deviendra un jour aussi ridicule que la coiffure de Catherine de Médicis. Toutes les modes dont nous sommes prévenus vieilliront peut-être avant I nous, et même le bon ton. ccclx Il y a peu de choses que nous sachions bien. ccclxi Si on n'écrit point parce qu’on pense, il est inutile de penser pour écrire. ccclxii Tout ce qu’on n’a pensé que pour les autres est ordinairement peu naturel. ccclxiii La clarté est la bonne foi des philosophes. ccclxi v La netteté est le vernis des maîtres. ccclxv La netteté épargne les longueurs, et sert de preuve aux idées. ccclxvi La marque d’une expression propre est que même dans les équivoques on ne puisse lui donner qu’un sens. ccclxvii Il semble que la raison, qui se communique aisément et se perfectionne quelquefois, devrait perdre d’autant plus vite tout son lustre et le mérite de la nouveauté ; cependant les ouvrages des grands hommes, copiés avec tant de soin par d’autres mains, conservent, malgré le temps, un caractère toujours original car il n’appartient pas aux autres hommes de concevoir et d’exprimer aussi parfaitement les choses qu’ils savent le mieux. C’est cette manière de concevoir si vive et si parfaite qui distingue dans tous les genres le génie, et qui fait que les idées les plus simples et les plus connues ne peuvent vieillir. cccLxvmLes grands philosophes sont les génies de la raison. 16 . 282 VAUVENARGUES. ccclxix Pour savoir si une pensée est nouvelle, il n’y a qu’à l’exprimer bien simplement. ccclxx Il y a peu de pensées synonymes, mais beaucoup d’approchantes. ccclxxi Lorsqu’un bon esprit ne voit pas qu’une pensée puisse être utile, il y a grande apparence qu’elle est fausse . ccclxxii Nous recevons de grandes louanges avant d’en mériter de raisonnables. ccclxxiii Les feux de l’aurore ne sont pas si doux que les premiers regards de la gloire. ccclxxiv Les réputations mal acquises se changent en mépris, ccclxxv L’espérance est le plus utile ouïe plus pernicieux des biens. ccclxx'vi L’adversité fait beaucoup de coupables et d’imprudents. Cccclxx'vii La raison est presque impuissante pour les faibles. ccclxxviii Le courage est la lumière de l’adversité. ccclxxix L’erreur est la nuit des esprits et le piège de l'innocence. ccclxxx Les demi-philosophes ne louent l’erreur que pour faire les honneurs de la vérité. Iccclxxxi C’est être bien impertinent de vouloir faire croire qu'on n’a pas assez d’erreurs pour être heureux. REFLEXIONS ET MAXIMES 2*3 ccclxxxii Celui qui souhaiterait sérieusement des illusions aurait au delà de ses vœux. ccclxxxiii Les corps politiques ont leurs défauts inévitables, comme les divers âges de la vie humaine. Qui peut garantir la vieillesse des infirmités, hors la mort? ccclxxxiv La sagesse est le tyran des faibles. ccclxxxv Les regards affables ornent le visage des rois. ccclxxxvi La licence étend toutes les vertus et tous les vices. ccclxxxvi i La paix rend les peuples plus heureux et les hommes plus faibles. ccclxxxviii Le premier soupir de l’enfance est pour la liberté. ccclxxxix La liberté est incompatible avec la faiblesse. cccxc L’indolence est le sommeil des esprits. cccxci Les passions les plus vives sont celles dont l’objet est le plus prochain, comme dans le jeu et l’amour, etc. cccxcil Lorsque la beauté règne sur les yeux, il est probable qu’elle règne encore ailleurs. cccxcm Tous les sujets de la beauté ne connaissent pas leur souveraine. i cccxciv Si les faiblesses de l’amour sont pardonnables, c’est principalement aux femmes, qui régnent par lui. v cccxcv Notre intempérance loue les plaisirs. 284 VAU VEN ARGUES. cccxcvi La constance est la chimère de l’amour. t cccxcvn Des hommes simples et vertueux mêlent de la délicatesse et de la probité jusque dans leurs plaisirs. cccxcviii Ceux qui ne sont plus en état de plaire aux femmes s'en corrigent. cccxcix Les premiers jours du printemps ont moins de grâce que la vertu naissante d’un jeune homme. cccc L’utilité de la vertu est si manifeste , que les méchants la pratiquent par intérêt. cccci Rien n’est si utile que la réputation, et rien ne donne la réputation si sûrement que le mérite. ccccu La gloire est la preuve de la vertu. cccciit La trop grande économie fait plus de dupes que la profusion. cccciv La profusion avilit ceux qu’elle n’illustre pas. ccccv Si un homme obéré et sans enfants se fait quelques rentes viagères, et jouit par cette conduite des commodités de la vie, nous disons que c’est un fou qui a mangé son bien. ccccvi Les sots admirent qu’un homme à talents ne soit pas une bête sur ses intérêts. ccccvn La libéralité et l’amour des lettres ne ruinent personne; mais les esclaves de la fortune trouvent toujours la vertu trop achetée. ccccviii On fait bon marché d’une médaille, lorsqu’on n’est pas curieux d’antiquités ainsi ceux qui n’ont pas de senti- RÉFLEXIONS ET MAXIMES 285 ments pour le mérite ne tiennent presque pas de compte de? plus grands talents. ccccix Le grand avaatagc des talents paraît en ce que la fortune sans mérite est presque inutile ccccx D’ordinaire on tente fortune par des talents qu'on n’a pas. ccccxi Il vaut mieux déroger à sa qualité qu’à son tenie. Ce serait être fou de conserver un état médiocre au prix d’une grande fortune ou de la gloire. ccccxn II n’y a pas de vice qui ne soit nuisible, dénué d’esprit. ccccxiii J’ai cherché s’il n’y avait point de moyen de faire sa fortune sans mérite, et je n’en ai trouvé aucun. ccccxiv Moins on veut mériter sa fortune, plus il faut se donner de peine pour la faire. ccccxvLes beaux esprits ont une place dans la bonne compagnie , mais la dernière. ccccxvi Les sots usent des gens d’esprit comme les petits hommes portent de grands talons. ccccxvii Il y a des hommes dont il vaut mieux se taire que de les louer selou leur mérite 1 . , ccccxviii I! ne faut pas tenter de contenter les envieux. ' Il y a des hommes dont il vaut mieux se taire que de les louer selon 2 ccccixxxv Quelque mérite qu’il puisse y avoir à négliger les grandes places, il y en a peut-être encore plus à les bien remplir. cccclxxxvi Si les grandes pensées nous trompent, elles nous amusent. cccclxxxvii Il n’y a point de faiseur de stances qui ne se préfère à Bossuet, simple auteur de prose ; et dans l’ordre de la nature, nul ne doit penser aussi peu juste qu’un génie manqué. Un versificateur ne connaît point de juge compétent de ses écrits si on ne fait pas de vers, on ne s’y connaît pas ; si on en fait, on est son rival. cccclxxxtx Le même croit parler la langue des dieux, lorsqu’il ne parle pas celle des hommes. C’est comme un mauvais comédien, qui ne peut déclamer comme l’on parle. ccccxc Un autre défaut de la mauvaise poésie est d’allonger la prose, comme le caractère de la bonne est de l’abréger. ccccxci Il n’y a personne qui ne pense d’un ouvrage en prose Si je me donnais de la peine, je le ferais mieux. Je dirais à beaucoup de gens Faites une seule réflexion digne d’être écrite. ccccxcii Tout ce que nous prenons dans la morale pour défaut n’est pas tel. ccccxciii Nous remarquons peu de vices pour admettre peu de vertus. ccccxciv L’esprit est borné jusque dans l'erreur, qu’on dit son domaine. ccccxcv L’intérêt d’une seule passion, souvent rnalheu- RÉFLEXIONS ET MAXIMES. 293 reuse, tient quelquefois toutes les autres en captivité; et la raison porte ses chaînes sans pouvoir les rompre. ccccxcvi Il y a des faiblesses, si on l’ose dire, inséparables de notre nature. ccccxcvn Si on aime la vie, on craint la mort. ccccxcviii La gloire et la stupidité cachent la mort sans triompher d'elle 1 . ccccxcix Le terme du courage est l’intrépidité dans le péril 2 . d La noblesse est un monument de la vertu, immortelle comme la gloire. di Lorsque nous appelons les réflexions, elles nous fuient ; et quand nous voulons les chasser, elles nous obsèdent, et tiennent malgré nous nos yeux ouverts pendant la nuit. du Trop de dissipation et trop d’étude épuisent egalement l’esprit et le laissent à sec ; les traits hardis en tout genre ne s’offrent pas à un esprit tendu et fatigué. diii Comme il y a des âmes volages que toutes les passions dominent tour à tour, on voit des esprits vifs et sans assiette que toutes les opinions entraînentsuccessivement, ou qui se partagent entre les contraires, sans oser décider. div Les héros deCorneilleétaient des maximes fastueuses et parlent magnifiquement d’eux-mêmes, et cette enflure de leurs La gloire et la stupidité cachent la mort sans triompher d’elle. 11 faut, je crois, l’amour de la gloire. Sans triompher d’elle, c'est-à-dire, je pense, ans la faire mépriser. S. ’ Le terme du courage, etc. Il semble qu'il faut dire, le dernier terme. M. 29i VMJVENARGUES. discours passe pour vertu parm i ceux qui n’ont point de règle dans e cœur pour distinguer la grandeur d’âme de l’ostentation *. nv L’esprit ne fait pas connaître la vertu. dvi Il n’y a point d’homme qui ait assez d’esprit pour n’être jamais ennuyeux. dvii La plus charmante conversation lasse l’oreille d’un homme occupé de quelque passion. dviii Les passions nous séparent quelquefois de la société, et nous rendent tout l’esprit qui est au monde aussi inutile que nous le devenons nous-méme aux plaisirs d’autrui. dix Le monde est rempli de ces hommes qui imposent aux autres par leur réputation ou leur fortune ; s’ils se laissent trop approcher, on passe tout à coup à leur égard de la curiosité jusqu’au mépris, comme on guérit quelquefois en un moment d’une femme qu’on a recherchée avec ardeur. dx On est encore bien éloigné de plaire lorsqu’on n’a que de l’esprit. dxi L’esprit ne nous garantit pas des sottises de notre humeur. dxii Le désespoir est la plus grande de nos erreurs 1 . dxiii La nécessité de mourir est la plus amère dî nos afflictions. dxiv Si la vie n’avait point de fin, qui désespérerait de sa fortune ? La mort comble l’adversité. 1 L’auteur a développé cette idée dans ses Réflexions sur ÇornelU. lî. 3 C'est à-dire, en d’autres termes, qu’il n’y a point de mai sans ’emède, et que le suicide est un acte de folie* F* RÉFLEXIONS ET MAXIMES. 295 dxv Combien les meilleurs conseils sont-ils peu utiles, si nos propres expériences nous instruisent si rarement ! dxvi Les conseils qu’on croit les plus sages sont les moins proportionnés à notre état. Dxvn Nous avons des règles pour le théâtre qui passent peut-être les forces de l’esprit humain. dxviii Lorsqu’une pièce est faite pour être jouée il est injuste de n’en juger que par la lecture. dxix Le but des poètes tragiques est d’émouvoir. C’est faire trop d’honneur à l’esprit humain de croire que des ouvrages irréguliers ne peuvent produire cet effet. II n’est pas besoin de tant d’art pour tirer les meilleurs esprits de leur assiette et leur cacher de grands défauts dans un ouvrage qui peint les passions. 1 ne faut pas supposer dans le sentiment une délicatesse que nous n’avons que par réflexion, ni imposer aux auteurs une perfection qu’ils ne puissent atteindre ; notre goût se contente à moins. Pourvu qu’il n’y ait pas plus d’irrégularités dans un ouvrage que dans nos propres conceptions, rien n’empêche qu’il ne puisse plaire, s’il est bon d’ailleurs. N’avons-nous pas des tragédies monstrueuses qui entraînenttoujours les suffrages, malgré es critiques, et qui sont les délices du peuple, je veux dire de la plus grande partie des hommes ? Je sais que le succès de ces ouvrages prouve moins le génie de leurs auteurs que la faiblesse de leurs partisans c’est aux hommes délicats à choisir de meilleurs modèles, et à s’efforcer, dans tous les genres, d’égaler la belle nature ; mais comme elle n’est pas exempte de défauts, toute belle qu’elle paraît, nous avons tort d’exiger des auteurs plus qu’elle ne peut leur fournir. Il s’en faut de beaucoup que notre goût soit toujours aussi difficile à contenter que notre esprit. nxx 11 peut plaire à un traducteur d’admirer jusqu’aux défauts de son original, et d’attribuer toutes ses sottises à la barbarie de son siècle. Lorsque je crois toujours apercevoir dans un •>% VAUVENABGUES. auteur les mêmes beautés et les mêmes défauts, il me paraît plus raisonnable d’en conclure que c’est un écrivain qui joint de grands défauts à des qualités éminentes, une grande imagination et peu de jugement, ou beaucoup de force et peu d’art, etc. ; et quoique je n’admire pas beaucoup l’esprit humain, je ne puis cependant ie dégrader jusqu’à mettre dans le premier rang un génie si défectueux , qui choque continuellement le sens commun. dxxt C’est faute de pénétration que nous concilions si peu de choses. dxxii Nous voudrions dépouiller de ses vertus l’espèce humaine, pournousjustifier nous-mêmesde nosvices, etles mettre à la nlace des vertus détruites semblables à ceux qui se révoltent contre les puissances légitimes, non pour égaliser tous les hommes oar la liberté, mais pour usurper la même autorité qu’ils calomnient. dxxiii Un peu de culture et beaucoup de mémoire, avec quelque hardiesse dans les opinions et contre les préjugés, font paraître l’esprit étendu. dxxiv Il ne faut pas jeter du ridicule sur les opinions respectées ; car on blesse par là leurs partisans, sans les confondre. dxxv La plaisanterie la mieux fondée ne persuade point, tant on est accoutumé qu’elle s’appuie sur de faux principes. dxxyi L’incrédulité a ses enthousiastes, ainsi que la superstition; et comme l’on voit des dévots qui refusent à Cromwell jusqu’au bon sens, on trouve d’autres hommes qui traitent Pascal et Bossuet de petits esprits. dxxvii Le plus sage et le plus courageux de tous les hommes, M. de Turenne, a respecté la religion; et une infinité d’hommes obscurs se placent au rang des génies et des âmes fortes, seulement à cause qu’ils la méprisent. RÉFLEXIONS ET MAXIMES. 297 dxxyiii Ainsi, nous tirons vanité de nos faiblesses et de nos fausses erreurs. La raison fait des philosophes, et la gloire fait des héros ; la seule vertu fait des sages. dxxix Si nous avons écrit quelque chose pour notre instruction ou pour le soulagement de notre cœur, il y a grande apparence que nos réflexions seront encore utiles à beaucoup d’autres -, car personne n’est seul dans son espèce ; et jamais nous ne sommes ni si vrais, ni si vifs, ni si pathétiques que lorsque nous traitons les choses pour nous-mêmes. dxxx Lorsque notre âme est pleine de sentiments nos discours sont pleins d’intérêt. dxxxi Le faux présenté avec art nous surprend et nous éblouit; mais le vrai nous persuade et nous maîtrise. dxxxii On ne peut contrefaire le génie. dxxxiii 11 ne faut pas beaucoup de réflexions pour faire cuire un poulet; et cependant nous voyons des hommes qui sont toute leur vie mauvais rôtisseurs tant il est nécessaire, dans tous les métiers, d’y être appelé par un instinct particulier et comme indépendant de la raison. dxxxiv Lorsque les réflexions se multiplient, les erreurs et les connaissances augmentent dans la même proportion. nxxxv Ceux qui viendront après nous sauront peut-être plus que nous, et ils s’en croiront plus d’esprit, mais seront-ils plus heureux ou plus sages? Nous-mêmes, qui savons beaucoup, sommes-nous meilleurs que nos pères, qui savaient si peu? dxxxvi Nous sommes tellement occupés de nous et de nos semblables, que nous ne faisons pas la moindre attention à tout le reste, quoique sous nos yeux et autour de nous. 17 . 298 VAUVENARGUES dxxxvii Qu’il y a peu de choses dont nous jugions bien nxxxvm Nous n’avons pas assez d’amour-propre pour dédaigner le mépris d’autrui. dxxxix Personne ne nous blâme aussi sévèrement que nous ne nous condamnons souvent nous-mêmes. dxl L’amour n’est pas si délicat que l’amour-propre. dxli Nous prenons ordinairement sur nos bons et nos mauvais succès ; et nous nous accusons ou nous louons des caprices de la fortune. dxlii Personne ne peut se vanter de n’avoir jamais été néprisé. dxliii Il s en faut men que toutes nos habiletés ou que toutes nos fautes portent coup tant il y a peu de choses qui dépendent de notre conduite. dxliv Combien de vertus et de vices sont sans conséquence. dxlv Nous ne sommes pas contents d’être habiles si on ne sait pas que nous le sommes ; et pour ne pas en perdre le mérite, nous en perdons quelquefois le fruit. dxlvi Les gens vains ne peuvent être habiles ; car ils n’ont pas la force de se taire. dxlvii C’est souvent un grand avantage pour un négociateur, s’il peut faire croire qu’il n’entend pas les intérêts de son maître et que la passion le conseille; il évite par là qu’on le pénètre, et réduit ceux qui ont envie de finir à se relâcher de leurs prétentions. Les plus habiles se croient quelquefois obligés REFLEXIONS ET MAXIMES. 299 de céder à un homme qui résiste lui-même à la raison, et qui échappe à toutes leurs prises. dxlviii Tout le fruit qu on a pu tirer de mettre quelques hommes dans les grandes places s’est réduit à savoir qu’ils étaient habiles. dxlix Il ne faut pas autant d’acquis pour être habile que pour le paraître. dl Rien n’est plus facile aux hommes en place que de s’approprier le savoir d’autrui. dli Il est peut-être plus utile, dans les grandes places, de savoir et dé vouloir se servir de gens instruits que de l’être soi- même. dlii Celui qui a un grand sens sait beaucoup. dliii Quelque amour qu’on ait pour les grandes affaires, ,1 y a peu de lectures si ennuyeuses et si fatigantes que celle d’un traité entre les princes. dliv L’essence de la paix est d’être éternelle, et cependant nous n’en voyons durer aucune l’âge d’un homme ; et à peine y a-t-il quelque règne où elle n’ait été renouvelée plusieurs fois. Mais faut-il s’étonner que ceux qui ont eu besoin de lois pour être justes soient capables de les violer? dlv La politique fait entre les princes ce que les tribunaux de la justice font entre les particuliers. Plusieurs faibles ligués contre un puissant lui imposent la nécessité de modérer son ambition et ses violences. dlvi Il était plus facile aux Romains et aux Grecs de subjuguer de grandes nations, qu’il ne l’est aujourd’hui de conserver une petite province justement conquise, an milieu de SCO VAUVENARGUES. tant de voisins jaloux, et de peuples également instruits dans la politique et dans la guerre, et aussi liés par leurs intérêts, par les arts, ou par le commerce, qu’ils sont séparés par leurs limites. dlvii M. de Voltaire ne regarde l’Europe que comme une république formée de différentes souverainetés. Ainsi un esprit étendu diminue en apparence les objets en les confondant dans un tout qui les réduit à leur juste étendue ; mais il les agrandit réellement en développant leurs rapports, et en ne formant de tant de parties irrégulières qu’un seul et magnifique tableau DLVin C’est une politique utile , mais bornée, de se déterminer toujours par le présent, et de préférer le certain à l’incertain, quoique moins flatteur; et ce n’est pas ainsi que les États s’élèvent, ni même les particuliers. dlix Qui sait tout souffrir peut tout oser. dlx Les hommes sontennemis-nés les uns des autres, non cause qu’ils se haïssent, mais parce qu’ils ne peuvent s’agrandir sans se traverser ; de sorte qu’en observant religieusement les bienséances , qui sont les lois de la guerre tacite qu’ils se font, j’ose dire que c’est presque toujours injustement qu’ils se taxent de part et d’autre d’injustice. dlxi Les particuliers négocient, font des alliances, des traités, des ligues, la paix et la guerre, en un mot, tout ce que les rois et les plus puissants peuples peuvent faire. dlxii Dire également du bien de tout le monde est une petite et une mauvaise politique. { dlxiii La méchanceté tient lieu d’esprit. dlx iv La fatuité dédommage du défaut de cœur. i dlxv Celui qui s'impose à soi-même impose à d’autres. RÉFLEXIONS ET MAXIMES. 301 dlxvi La nature n’ayant pas égalisé tous les hommes par le mérite, il semble qu’elle n’a pu ni dû les égaliser par la fortune. dlxvii L’espérance fait plus de dupes que l’habileté. dlxviii Le lâche a moins d’affronts à dévorer que l’ambitieux. dlxix On ne manque jamais de raisons, lorsqu’on a fait fortune, pour oublier un bienfaiteur ou un ancien ami ; et on rappelle alors avec dépit tout ce que l'on a si longtemps dissimulé de leur humeur. dlxx Tel que soit un bienfait, et quoi qu’il en coûte, lorsqu’on l’a reçu à ce titre, on est obligé de s’en revancher, comme on tient un mauvais marché quand on a donné sa parole. dlxxi Il n’y a point d’injure qu’on ne pardonne quand on s’est vengé. dlxxii On oublie un affront qu’on a souffert, jusqu’à s’en attirer un autre par son insolence. dlxxiii S’il est vrai que nos joies soient courtes, la plupart de nos afflictions ne sont pas longues. dlxxiv La plus grande force d’esprit nous console moins promptement que sa faiblesse. dlxxv 11 n’y a point de perte que l’on sente si vivement et si peu de temps que celle d’une femme aimée. dlxxvi Peu d’affligéssavent feindre tout le temps qu’il faut pour leur honneur. dlxxvii Nos consolations sont une flatterie envers les affligés. 302 ARGUES. dlxxviii Si les hommes ne se flattaient pas les uns les autres, il n’y aurait guère de société. dlxxix 11 ne tient qu’à nous d’admirer la religieuse franchise de nos pères, qui nous ont appris à nous égorger pour un démenti ; un tel respect de la vérité, parmi les barbares qui ne connaissaient que la loi de la nature, est glorieux pour l’humanité. dlxxx Nous souffrons peu d’injures par bonté. dlxxxi Nous nous persuadons quelquefois nos propres mensonges pour n’en avoir pas le démenti ; et nous nous trompons nous-même pour tromper les autres. dilxxxii La vérité est le soleil des intelligences. dlxxxiii Pendant qu’une partie de la nation atteint le terme de la politesse et du bon goût, l’autre moitié est barbare à nos yeux, sans qu’un spectacle si singulier puisse nous ôter le mépris de la culture. dlxxxiv Tout ce qui flatte le plus notre vanité n’est fondé que sur la culture, que nous méprisons. nLXxxv L’expérience que nous avons des bornes de notre raison nous rend dociles aux préjugés. dlxxxvi Comme il est naturel de croire beaucoup de choses sans démonstration, il ne l’est pas moins de douter de quelques autres malgré leurs preuves. dlxxxyii La conviction de l’esprit n’entraîne pas toujours celle du cœur. blx xxviii Les hommes ne se comprennent pas les uns les autres. 11 y a moins de fous qu’on ne croit. RÉFLEXIONS ET MAXIMES. 303 dlxxxix Pour peu qu’on se donne carrière sur la religion et sur les misères de l'homme, on ne fait pas difficulté de se placer parmi les esprits supérieurs. dxc Des hommes inquiets et tremblants pour les plus petits intérêts affectent de braver la mort. dxci Si les moindres périls dans les affaires nous donnent de vaines terreurs, dans quelles alarmes la mort ne doit-elle pas nous plonger, lorsqu’il est question pour toujours de tout notre être, et que l’unique intérêt qui nous reste, il n’est plus en notre puissance de le ménager, ni même quelquefois de le connaître ! dxcii Newton, Pascal, Bossuet, Bacine, Fenelon , c’est-à- dire les hommes de la terre les plus éclairés, dans le plus philosophe de tous les siècles, et dans la force de leur esprit et de leur âge, ont cru Jésus-Christ ; et le grand Condé, en mourant, répétait ces nobles paroles Oui, nous verrons Dieu comme il est, sicuti est, jade ad faciem. » dxciii Les maladies suspendent nos vertus et nos vices. dxciv La nécessité comble les maux qu’elle ne peut soulager. dxcv Le silence et la réflexion épuisent les passions, comme le travail et le jeûne consomment les humeurs. dxcvi La solitude est à l’esprit ce que la diète est au corps. dxcvii Les hommes actifs supportent plus impatiemment l’ennui que le travail. dxcviii Toute peinture vraie nous charme, jusqu’aux louanges d’autrui. dxcix Les images embellissent la raison, et le sentiment la persuade. 304 VAUVENARGUES. dc L’éloquence vaut mieux que le savoir. DCiCe qui fait que nous préférons très-justement l’esprit au savoir est que celui-ci est mal nommé, et qu’il n’est ordinairement ni si utile ni si étendu que ce que nous connaissons par expérience, ou que nous pouvons acquérir par réflexion. Nous regardons aussi l’esprit comme la cause du savoir, et nous estimons plus la causequesoneffet celaestraisonnable. Cependant, celui qui n’ignorerait rien aurait tout l’esprit qu’on peut avoir, le plus grand esprit du monde n’étant que science, ou capacité d’en acquérir. DcnLes hommes ne s’approuvent pas assez pour s’attribuer les uns aux autres la capacité des grands emplois. C’est tout ce qu’ils peuvent, pour ceux qui les occupent avec succès, de les en estimer après leur mort. Mais proposez l’homme du monde qui a le plus d’esprit Oui, dit-on, s’il avait plus d’expérience, ou s’il était moins paresseux, ou s’il n’avait pas de l’humeur, ou tout au contraire ; car il n’y a point de prétexte qu’on ne prenne pour donner l’exclusion à l’aspirant, jusqu’à dire qu’il est trop honnête homme, supposé qu'on ne puisse rien lui reprocher de plus plausible tant cette maxime est peu vraie, qu'il est plus aisé de paraître diqne des grandes places que de les remplir. dcui Ceux qui méprisent l’homme ne sont pas de grands hommes. dciv Nous sommes bien plus appliqués à noter les contradictions , souvent imaginaires, et les autres fautes d’un auteur, qu’à profiter de ses vues, vraies ou fausses. dcv Pour décider qu’un auteur se contredit, il faut qu’il soit impossible de le concilier. dcvi La grande faiblesse de ceux qui n’imaginent point est de se croire seuls judicieux et raisonnables. REFLEXIONS ET MAXIMES. 305 DCViiLes esprits subalternes n’ont point d’erreurs en leur privé nom, parce qu’ils sont incapables d’inventer, même en se trompant; mais ils sont toujours en traînés, sans le savoir, par l’erreur d’autrui. dcviii La vanité est ce qu’il y a de plus naturel dans les hommes , et ce qui les fait sortir le plus souvent de la nature. dcix Les grands hommes dogmatisent; le peuple croit. { dcx C’est une chose remarquable que presque tous les poètes se servent des expressions de Racine, et que Racine n’ait jamais répété ses propres expressions. DCXi 'Les vertus régnent plus glorieusement que la prudence. La magnanimité est l’esprit des rois. t dcxii L’opinion ne gouverne que les faibles; mais l’espérance trompe les plus grandes âmes. dcxiii Un prince qui n’est que bon aime ses domestiques, ses ministres, sa famille et son favori, et n’est point attaché à son État, Il faut être un grand roi pour aimer un peuple. dgxiv On ne corrigera jamais les hommes d'apprendre des choses inutiles. ncxv Plaisante fortune pour Bossuet d’être chapelain de Versailles ! Fénelon était à sa place il était né pour être le précepteur des rois ; mais Bossuet de vait être un grand ministre sous un roi ambitieux. dcxvi C’est une marque de férocité et de bassesse d'insulter à un homme dans l’ignominie, principalement s’il est misérable ; il n’y a point d’infamie dont la misère ne fasse un objet de pitié. L’opprobre est une loi de la pauvreté. 306 VAUVENARGUES. dcxvii J’ai la sévérité en horreur, et ne la crois P as tro P utile. Les Romains étaient-ils sévères ? N’exila-t-on pas Cicéron pour avoir fait mourir Lentulus, manifestement conva lncu de trahison? Le sénat ne fit-il pas grâce à tous les autres co m Pdces de Catilina ? Ainsi se gouvernait le plus puissant et le plus redoutable peuple de la terre. Et nous, petit peuple barbare, nous croyons qu’il n’y a pas assez de gibets et de supplices. dcxviii Il est plus aisé de dire des choses nouvelles que de concilier parfaitement et de réunir sous un seul point de vue toutes celles qui ont été dites. ncxix La netteté des pensées leur tient lieu de preuves. dcxx La raison est presque inutile à la faiblesse. dcxxi La solitude tente puissamment la chasteté. dcxxii La libéralité augmente le prix des richesses. dcxxiii Les passions des hommes sont autant de chemins ouverts pour aller à eux. dcxxiv Entre rois, entre peuples, entre particuliers, le plus fort se donne des droits sur le plus faible ; et la même règle est suivie par les animaux, par la matière, par les éléments, etc. de sorte que tout s’exécute dans l’univers par violence; et cet ordre, que nous blâmons avec quelque apparence de justice, est la loi la plus générale, la plus absolue, la plus ancienne et la plus immuable de la nature. dcxxv Si l’on découvrait le secret de proscrire à jamais la guerre, de multiplier le genre humain , et d’assurer à tous les hommes de quoi subsister, combien nos meilleures lois paraîtraient-elles ignorantes et barbares ! dcxxvi Il n’y a point de violence ni d’usurpation qui ne s’autorise de quelque loi. RÉFLEXIONS ET MAXIMES. *07 dcxxvii Rien de grand ne comporte la médiocrité. dcxxviii Tous les hommes naissent sincères et meurent trompeurs. dcxxix Il n’appartient qu’aux âmes fortes et pénétrantes de faire de la vérité le principal objet de leurs passions. dcxxx Pour avoir l’esprit toujours juste, il ne suffit pas de l’avoir droit, il faut encore l’avoir étendu. dcxxxi Ni la pauvreté ne peut avilir les âmes fortes, ni la richesse ne peut élever les âmes basses. On cultive la gloire dans l’obscurité ; on souffre l’opprobre dans la grandeur. La fortune, qu’on croit si souveraine, ne peut presque rien sans la nature. ncxxxn Les grandes places instruisent promptement les grands esprits. ,ncxxxinLa conscience est présomptueuse dans les sains, timide dans les faibles et les malheureux, inquiète dans les indécis, etc. ; organe obéissant du sentiment qui nous domine, plus trompeuse que la raison et la nature. DcxxxivLa science des mœurs ne donne pas celle des hommes. REFLEXIONS CRITIQUES SUR QUELQUES POETES. 1 . LA. FONTAINE. Lorsqu’on a entendu parler de La Fontaine, et qu’on vient a lire ses ouvrages, on est étonné d’y trouver, je ne dis pas plus de génie, mais plus même de ce qu’on appelle de l’esprit, qu’on n’en trouve dans le monde le plus cultivé. On remarque avec la même surprise la profonde intelligence qu’il fait paraître de son art; et on admire qu’un esprit si fin ait été en même temps si naturel. Userait superflu de s’arrêter à louer l'harmonie variée et légère de ses vers ; la grâce, le tour, l’élégance, les charmes naïfs de son style et de son badinage. Je remarquerai seulement que ie bon sens et la simplicité sont les caractères dominants de ses écrits. Il est bon d’opposer un tel exemple à ceux qui cherchent la grâce et le brillant hors de la raison et de la nature. La simplicité de La Fontaine donne de la grâce à son bon sens, et son bon sens rend sa simplicité piquante de sorte que le brillant de ses ouvrages naît peut-être essentiellement de ces deux sources réunies. Rien n’empêche au moins de le croire; car pourquoi le bon sens, qui est un don de la nature, n’en aurait-il pas l’agrément ? La raison ne déplaît, dans la plupart des hommes, que parce qu’elle leur est étrangère. Un bon sens naturel est presque inséparable d’une grande simplicité; et une simplicité éclairée est un charme que rien n’égale. Je ne donne pas ces louanges aux grâces d’un homme si sage pour dissimuler ses défauts; je crois qu’on peut trouver dans 309 RÉFLEXIONS CRITIQUES. ses écrits plus de style que d’invention, et plus de négligence que d’exactitude. Le nœud et le fond de ses contes ont peu d’intérêt, et les sujets en sont bas. On y remarque quelquefois bien des longueurs, et un air de crapule qui ne saurait plaire. Ni cet auteur n’est parfait en ce genre, ni ce genre n’est assez noble. II. BOILEAU. Boileau prouve, autant par son exemple que par ses préceptes, que toutes les beautés des bons ouvrages naissent de la vive expression et de la peinture du vrai; mais cette expression si touchante appartient moins à la réflexion, sujette à l’erreur, qu’à un sentiment très-intime et très-fidèle de la nature. La raison n’était pas distincte, dans Boileau, du sentiment c'était son instinct. Aussi a-t-elle animé ses écrits de cet intérêt qu’il est si rare de rencontrer dans les ouvrages didactiques. Cela met, je crois, dans son jour ce que je viens de toucher en parlant de La Fontaine. S’il n’est pas ordinaire de trouver de l’agrément parmi ceux qui se piquent d’être raisonnables, c’est peut-être parce que la raison est entrée dans leur esprit, où elle n’a qu’une vie artificielle et empruntée ; c’est parce qu’on honore trop souvent du nom de raison une certaine médiocrité de sentiment et de génie, qui assujettit les hommes aux lois de l’usage, et les détourne des grandes hardiesses, sources ordinaires des grandes fautes. Boileau ne s’est pas contenté de mettre de la vérité et de la poésie dans ses ouvrages, il a enseigné son art aux autres. Il a éclairé tout son siècle ; il en a banni le faux goût, autant qu’il est permis de le bannir chez les hommes. Il fallait qu’il fût né avec un génie bien singulier, pour échapper, comme il a fait, aux mauvais exemples de ses contemporains, et pour leur imposer ses propres lois. Ceux qui bornent le mérite de sa poésie a l’art et à l’exactitude de la versification ne font pas peut-être attention que ses vers sont pleins de pensées, de vivacité, de saillies, et même d’invention de style. Admirable dans la jus- 310 VAV. v’ENARGUES tesse, dans la solidité et la netteté de ses idées, il a su conserver ces caractères dans ses expressions, sans perdre de son feu et de sa force ce qui témoigne incontestablement un grand talent. Je sais bien que quelques personnes, dont l’autorité est respectable, ne nomment génie dans les poètes que l’invention dans le dessein de leurs ouvrages. Ce n’est, disent-ils, ni l’harmonie, ni l’élégance des vers, ni l’imagination dans l’expression, ni même l’expression du sentiment, qui caractérisent le poète ce sont, à leur avis, les pensées mâles et hardies, jointes à l’esprit créateur. Par là on prouverait que Bossuet et Newton ont été les plus grands poètes de la terre ; car certainement l’invention, la hardiesse et les pensées mâles ne leur manquaient pas. J’ose leur répondre que c’est confondre les limites des arts que d’en parler de la sorte. J’ajoute que les plus grands poètes de l’antiquité, tels qu’Homère, Sophocle, Virgile, se trouveraient confondus avec une foule d’écrivains médiocres, si on ne jugeait d’eux que par le plan de leurs poèmes et par l’invention du dessein, et non par l’invention du style, par leur harmonie, par la chaleur de leur versification, et enfin par la vérité de leurs images. Si l’on est donc fondé à reprocher quelque défaut à Boileau, ce n’est pas, à ce qu’il me semble, le défaut de génie. C’est au contraire d’avoir eu plus de génie que d’étendue ou de profondeur d’esprit, plus de feu et de vérité que d’élévation et de délicatesse, plus de solidité et de sel dans la critique que de finesse ou de gaieté, et plus d’agrément que de grâce on l’attaque encore sur quelques-uns de ses jugements, qui semblent injustes ; et je ne prétends pas qu’il fut infaillible. III. CHAULIEU. Chaulieu a su mêler avec une simplicité noble et touchante i’esprit et le sentiment. Ses vers, négligés mais faciles et remplis d’imagination, de vivacité et de grâce, m’ont toujours paru supérieurs à sa prose, qui n’est le plus souvent qu’ingénieuse. On REFLEXIONS CRITIQUES. 311 ne peut s’empêcher de regretter qu’un auteur si aimable n’ait pas plus écrit, et n’ait pas travaillé avec le même soin tous ses ouvrages. Quelque différence que l’on ait mise, avec beaucoup de raison, entre l’esprit et le génie, il semble que le génie de l’abbé de Chaulieu ne soit essentiellement que beaucoup d’esprit naturel. Cependant il est remarquable que tout cet esprit n’a pu faire d’un poète, d’ailleurs si aimable, un grand homme ni un grand génie. IV. MOLIÈBE. Molière me paraît un peu répréhensible d’avoir pris des sujets trop bas '. La Bruyère, animé à peu près du même génie, a peint avec la même vérité et la même véhémence que Molière les travers des hommes 1 * 3 ; mais je crois que l’on peut trouver plus d’éloquence et d’élévation dans ses peintures. On peut mettre encore ce poète en parallèle avec Racine. L’un et l’autre ont parfaitement connu le cœur de l’homme ; l’un et l’autre se sont attachés à peindre la nature. Racine la saisit dans les passions des grandes âmes; Molière, dans l’humeur et les 1 II semble que les Femmes Savantes , le Tartufe, le Misanthrope , ne sont pas assurément des sujets bas ; la comédie n’en peut guère traiter de plus relevés. Pourquoi TAvare encore serait-il un sujet trop bas pour la comédie ! Passe pour les Fourberies de Scapin, le Médecin malgré lui, Sganarelle , et si l'on veut même Georges Dandin, Mais e'est d’après les chefs-d’œuvre d’un grand homme qu’on doit juger de son génie et en déterminer le caractère. On sait d’ailleurs que Molière, forcé d’abord de se conformer au goût de son siècle pour en obtenir le droit de le ramener au sien, forcé souvent de faire servir son travail au soutien de la troupe dont il était le directeur* ne fut pas toujours le maître de choisir les sujets de ses comédies, ni d’en soigner l’exécution. S. 3 On ne peut pas dire que La Bruyère fût animé du même genre que Molière. Vauvenargues disait autrement dans la première édition, toujours en donnant à La Bruyère une sorte de supériorité aussi est-il plus facile de caractériser les hommes que de faire qu'ils se caractérisent eux-mêmes. On ne voit pas trop pourquoi il a retranché cette phrase, qui était du moins une espèce de correctif. S. 312 vauvenargues. bizarreries des gens du commun '. L’un a joué avec un agrément inexplicable les petits sujets ; l’autre a traité les grands avec une sagesse et une majesté touchantes. Molière a ce bel avantage que ses dialogues jamais ne languissent une forte et continuelle imitation des mœurs passionne ses moindres discours. Cependant, à considérer simplement ces deux auteurs comme poètes, je crois qu’il ne serait pas juste d’en faire comparaison. Sans parler de la supériorité du genre sublime 2 donné à Racine, on trouve dans Molière tant de négligences et d’expressions bizarres et impropres, qu’il y a peu de poètes, si j’ose le dire, moins corrects et moins purs que lui. On peut se convaincre de ce que je dis en lisant le poème du Eal-de-Grâce, où Molière n’est que poète on n’est pas toujours satisfait. En pensant bien, il parle souvent mal, dit l’illustre archevêque de Cambray ; il se sert des phrases les plus forcées et les moins naturelles. Térence dit en quatre mots, avec la plus élégante simplicité, ce que celui-ci ne dit qu'avec une multitude de métaphores qui approchent du galimatias. J'aime bien mieux sa prose que ses vers 3 , etc. Alceste n’est certainement pas un homme du commun; U y a peu de caractères plus nobles. S. 2 Cette préférence presque exclusive que donne Vauvenargues au genre sublime, et qui tenait à son caractère, explique son injustice envers Molière; injustice qui sans cela serait difficile à concevoir dans un homme d’un esprit aussi juste et d’un goût généralement aussi sûr que le sien. S. 3 Le jugement de Fénelon sur Molière nous semble trop intéressant pour que dous puissions nous dispenser de le citer en entier * Il faut avouer que Molière est un grand poète comique. Je ne crains pas de dire qu’il a enfoncé plus avant que Térence dans certains caractères; il a embrassé une plus grande variété de sujets ; il a peint par des traits forts tout ce que nous voyons de déréglé et de ridicule. Térence se borne à représenter des vieillards avares et ombrageux, des jeunes hommes prodigues et étourdis, des courtisanes avides et impudentes, des parasites bas et flatteurs, des esclaves imposteurs et scélérats. Ces caractères méritaient sans doute d’être traités suivant les mœurs des Grecs et des Romains. De plus, nous n'avons que six pièces de ce grand auteur. Mais enfin Molière a ouvert un chemin tout nouveau. Encore une fois, je le trouve grand; mais ne puis-je pas parler en toutn liberté sur ses défauts! En pensant bien, il parle souvent mal ; il se sert des phrases les plus forcées elles moins naturelles Térence dit en quatre mots, avec la plus élégante 313 RÉFLEXIONS CRITIQUES. Cependant l’opinion commune est qu’aucun des auteurs de notre théâtre n’a porté aussi loin son genre que Molière a poussé le sien; et la raison en est, je crois, qu’il est plus naturel que tous les autres 1 . C’est une leçon importante pour tous ceux qui veulent écrire. simplicité, ce que celui-ci ne dit qu'avec une multitude de métaphores qui approchent du galimatias. J’aime bien mieux sa prose que ses vers, etc. Par exemple VAvare est moins mal écrit que les pièces qui sont en vers. Il est vrai que la versification française I*a gêné ; il est vrai même qu’il a mieux réussi pour les vers dans l* Amphitryon , où U a pris la liberté de faire des vers irréguliers. Mais en général il me parait, jusque dans la prose, ne parler point assez simplement pour exprimer toutes les passions. D’ailleurs, il a outré souvent les caractères ; il a voulu par cette liberté plaire au parterre, frapper les spectateurs les moins délicats, et rendrez ridicule plus sensible. Mais, quoiqu’on doive marquer chaque passion dans son plus fort degré et par les traits les plus vifs, pour en mieux montrer l’excès et la difformité, on n’a pas besoin de forcer la nature et d’abandonner le vraisemblable. Ainsi, malgré l’exemple de Plaute, où nous lisons cedo tertiam, je soutiens, contre Molière, qu’un avare qui n’est point fou ne va jamais jusqu'à vouloir regarder dans la troisième main de l'homme qu’il soupçonne de l’avoir volé. * Un autre défaut de Molière, que beaucoup de gens d’esprit lui pardonnent , et que je n’ai garde de lui pardonner, est qu'il a donné un tour gracieux au vice, avec une austérité ridicule et odieuse à la vertu. Je comprends que ses défenseurs ne manqueront pas de dire qu’il a traité avec honneur la vraie probité, qu’il n’a attaqué qu’une vertu chagrine et qu’une hypocrisie détestable; mais, sans entrer dans cette longue discussion, je soutiens que Platon et les autres législateurs de l’antiquité païenne n’auraient jamais admis dans leurs républiques un tel jeu sur les mœurs. Enfin, je ne puis m’empêcher de croire, avec M. Despréaux, que Molière, qui peint avec tant de force et de beauté les mœurs de son pays, tombe trop bas quand il imite le badinage de la comédie italienne * î » Dans ce sac ridicule où Scapin s’enveloppe Je ne reconnais plus l’auteur du Misanthrope. Boileau, Art poétique , chant Ul. 1 Si Molière n’était que le plus naturel des auteurs dramatiques, il ne serait pas assurément un des premiers ; car le naturel n’est un mérite que là où la nature est bonne à imiter. Mais Molière est celui qui a le mieux choisi, le plus approfondi, comme il est celui qui a le mieux peint, c’est-à-dire quia le mieux su donner à ses personnages, non pas seulement les actions, les discours * OEuvres choisies de Fénelon, t. If, p. 244; Lettre sur T Éloquence, § VU , in-8°; Paris, 1821. B. 18 VAUVENARGUES. i 1 V, VI. CORNEILLE ET RACINE. Je dois à la lecture des ouvrages de M. de Voltaire le peu de connaissance que je puis avoir de la poésie. Je lui proposai mes idées lorsque j’eus envie de parler de Corneille et de Racine ; et il eut la bonté de me marquer les endroits de Corneille qui méritent le plus d’admiration pour répondre à une critique que appartenant à tel caractère, mais pour ainsi dire le maintien , la physionomie, tes traits Ce n’est pas un portrait, une image semblable C’est un amant, un fils, un père véritable. Est-ce là ce que Vauvenargues a entendu par le plus naturel! En ce cas l’expression serait loin de rendre toute la pensée. B. C’est une chose digne d’être remarquée que ce fut Voltaire qui força en quelque sorte Vauvenargues à admirer Corneille, dont celui-ci avoue lui- même qu’il n’avait pas senti d’abord les beautés. On est meme étonné, en lisant ses lettres à Voltaire, de son aveuglement à cet égard, et de la singularité de ses opinions. Elles cédèrent à l’autorité de Voltaire ; mais il n’en revint jamais bien entièrement. On le voit dans ce parallèle moins occupé à caractériser Corneille et Racine, qu’à se justifier son extrême prédilection pour cc dernier, dont le genre de beautés était plus conforme à son caractère. Corneille, à qui il a été donné, comme dit Vauvenargues, de perdre les vertus ausleres , dures , inflexibles , devait produire bien moins d’effet que Racine sur l’âme d’un homme tel que Vauvenargues, qui, naturellement doux et facile, mêlant toujours l’indulgence aux sentiments les plus élevés, tempérait encore par l’habitude d’une certaine élégance de mœurs ce que la morale a de plus austère. D’ailleurs, à cette préférence pour Racine se joignait encore pour Vauvenargues le sentiment de l’injustice qu’on faisait à ce grand poète, que généralement on plaçait encore au-dessous de Corneille. Vauve- nargups et Voltaire sont les premiers qui lui aient assigné son véritable rang, et ses admirateurs les plus vifs et les plus sincères sont de l’école de Voltaire, qui ainsi défendait Corneille contre Vauvenargues, et Racine contre les partisans exclusifs de Corneille. C’est surtout à combattre ces derniers que s’attache Vauvenargues dans son parallèle de Corneille et de Racine, ce qui fait qu’il a dû nécessairement relever davantage les beautés, alors moins senties, du dernier de ces poètes, et les défauts, moins avoués, de l’autre. Si Von trouve dit-il à la tin de cet article, en parlant des jugements qu’il a portés sur la plupart de nos grands écrivains, si Von trouve que je relève davantage les défauts des uns que ceux des autres, je déclare que c’est à cause que les uns me sont plus sensibles que les autres, ou pour éviter de répéter des choses gui sont trop connues. S. REFLEXIONS CRITIQUES. 3 là j’en avais faite. Engagé par là à relire ses meilleures tragédies, j’y trouvai sans peine les rares beautés que m’avait indiquées M. de Voltaire. Je ne m’y étais pas arrêté en lisant autrefois Corneille, refroidi ou prévenu par ses défauts, et né, selon toute apparence, moins sensible au caractère de ses perfections. Cette nouvelle lumière me fît craindre de m’être trompé encore sur Racine et sur les défauts même de Corneille mais, ayant relu l’un et l’autre avec quelque attention, je n’ai pas changé de pensée à cet égard ; et voici ce qu’il me semble de ces hommes illustres. Les héros de Corneille disent souvent de grandes choses sans les inspirer; ceux de Racine, les inspirent sans les dire. Les uns parlent, et toujours trop, afin de se faire connaître; les autres se font connaître parce qu’ils parlent. Surtout Corneille paraît ignorer que les grands hommes se caractérisent souvent davantage par les chosesqu’ils ne disent pas que par celles qu’ils disent. Lorsque Racine veut peindre Acomat, Osmin l’assure de l'amour des janissaires; ce vizir répond Quoi ! tu crois, cher Osmin, que ma gloire passée Flatte encor leur valeur, et vit dans leur pensée ? Crois-tu qu’ils me suivraient encore avec plaisir, Et qu’ils reconnaîtraient la voix de leur vizir? Bajazet, acte I, scène i. On voit dans les deux premiers vers un général disgracié que le souvenir de sa gloire et l’attachement des soldats attendrissent sensiblement; dans les deux derniers, un rebelle oui médite quelque dessein voilà comme il échappe aux hommes de se caractériser sans en avoir l’intention. On en trouverait dans Racine beaucoup d’exemples plus sensibles que celui-ci. On peut voir dans la même tragédie que lorsque Roxane, blessée des froideurs de Bajazet, en marque son étonnement à Atalide, et que celle-ci proteste que ce prince l’aime, Roxane répond brie vement U y va de sa vie au moins que je le croie. Bajazet, acte III, scène vi. Ainsi cette sultane ne s’amuse point à dire Je suis d’un caractère fier et violent. J’aime avec jalousie et avec fureur. 316 VAUVE1N ARGUES. * Je ferai mourir Bajazet s’il me trahit. » Le poète tait ces do tails, qu’on pénètre assez d’un coup d’œil, et Roxane se trouvi caractérisée avec plus de force. Voilà la manière de peindre de Racine il est rare qu’il s’en écarte; et j’en rapporterais de grands exemples si ses ouvrages étaient moins connus. Il est vrai qu’il la quitte un peu, par exemple lorsqu’il met dans la bouche du même Acomat Et s’il faut que je meure, Mourons moi, cher Osmin, comme un vizir; et toi, Comme le favori d’un homme tel que moi. Bojazei, acte IV, scène vu. Ces paroles ne sont peut-être pas d’un grand homme; mais je les cite, parce qu’elles semblent imitées du style de Corneille ; c’est là ce que j’appelle, en quelque sorte, parler pour se faire connaître, et dire de grandes choses sans les inspirer. Mais écoutons Corneille même, et voyons de quelle manière il caractérise ses personnages. C’est le comte qui parle dans le Ciel Les exemples vivants sont d’un autre pouvoir; Un prince dans un livre apprend mal son devoir. Et qu’a fait, après tout, ce grand nombre d’années, Que ne puisse égaler une de mes journées? Si vous fûtes vaillant, je le suis aujourd'hui ; Et ce bras du royaume est le plus ferme appui. Grenade et l’Aragon tremblent quand ce fer brille ; Mon nom sert de rempart à toute la Castille; Sans moi vous passeriez bientôt sous d’autres lois, Et vous auriez bientôt vos ennemis pour rois. Chaque jour, chaque instant, pour rehausser ma gloire, Met laurier sur laurier, victoire sur victoire. Le prince à mes côtés ferait, dans les combats, L’essai de son courage à l’ombre de mon bras; 11 apprendrait à vaincre en me regardant faire, Et... Le Cid, acte 1, scène vi. Il n’y a personne peut-être aujourd’hui qui ne sente la ridicule ostentation de ces paroles, et je crois qu’elles ont été citées longtemps avant moi. Il faut les pardonner au temps où Corneille RÉFLEXIONS CRITIQUES 317 a écrit, et aux mauvais exemples qui l'environnaient. Mais voici d’autres vers, qu’on loue encore, et qui, n’étaut pas aussi affectés, sont plus propres, par cet endroit même, à faire illusion. C’est Cornélie, veuve de Pompée, qui parle à César César ; car le destin, que dans tes fers je brave, Me fait ta prisonnière et non pas ton esclave, Et tu ne prétends pas qu’il m’abatte le cœur Jusqu’à te rendre hommage et te nommer seigneur. De quelque rude trait qu’il m’ose avoir frappée, Veuve du jeune Crasse, et veuve de Pompée, Fille de Scipion, et pour dire encor plus, Romaine, mon courage est encore au-dessus. Je le l’ai déjà dit, César, je suis Romaine Et quoique ta captive , un cœur comme le mien , De peur de s’oublier, ne te demande rien. Ordonne ; et, sans vouloir qu’il tremble ou s’humilie, Souvicns-toi seulement que je suis Cornélie. Pompée, acte III, scène tv. Et dans un autre endroit, où la même Cornélie parle de César, qui punit les meurtriers du grand Pompée Tant d’intérêts sont joints à ceux de mon époux, Que je ne devrais rien à ce qu’il fait pour nous, Si, comme par soi même un grand cœur juge un autre Je n’aimais mieux juger sa vertu par la nôtre , Et croire que nous seuls armons ce combattant, Parce qu’au point qu’il est j’en voudrais faire autant. Pompée , acte Y , srène i. tl me paraît , dit encore Fénelon qu'on a donné souvent aux liomaius un discours trop fastueux.... Je ne trouve point de proportion entre P emphase avec laquelle Auguste parle dans la tragédie de Cinna, et la modeste simplicité avec laquelle tSuétone le dépeint dans tout le détail de ses mœurs. Tout ce que nous voyons dans Tite-Live, dans Plutarque, dans Cicéron, ' Œuvres choisies de FCuelon, Lettre sur VEloquence , tome U, S VI, l-iigu 238 et suivantes. Paris, 1821. B. VAUV EN ARGUËS. 318 dans Suétone, nous représente les Romains comme des hommes hautains dans leurs sentiments, mais simples, naturels et modestes dans leurs paroles, etc. Cette affectation de grandeur que nous leur prêtons m’a toujours paru le principal défaut de notre théâtre et l’écueil ordinaire des poètes. Je n’ignore pas que la hauteur est en possession d’en imposer à l’esprit humain-, mais rien ne décèle plus parfaitement aux esprits fins une hauteur fausse et contrefaite, qu’un discours fastueux et emphatique. Il est aisé d’ailleurs aux moindres poètes de mettre dans la bouche de leurs personnages des paroles Gères. Ce qui est difficile, c’est de leur faire tenir ce langage hautain avec vérité et à propos. C’était le talent admirable de Racine, et celui qu’on a le moins remarqué dans ce grand homme. Il y a toujours si peu d’affectation dans ses discours, qu’on ne s’aperçoit pas de la hauteur qu’on y rencontre. Ainsi, lorsque Agrippine, arrêtée par l’ordre de Néron, et obligée de se justifier, commence par ces mots si simples Approchez-vous, Néron , et prenez votre place. On veut sur vos soupçons que je vous satisfasse. Bnlannicus, acte IV, scène u. je ne crois pas que beaucoup de personnes fassentattention qu’elle commande en quelque manière à l’empereur de s'approcher et de s’asseoir, elle qui était réduite à rendre compte de sa vie, non à son fils, mais à son maître. Si elle eût dit, comme Cornélie Néron ; car le destin, que dans tes fers je brave, Me fait ta prisonnière, et non pas ton esclave, Et tu ne prétends pas qu’il m’abatte le coeur Jusqu’à te rendre hommage et te nommer seigneur. alors je ne doute pas que bien des gens n’eussent applaudi à ces paroles, et les eussent trouvées fort élevées. Corneille est tombé trop souvent dans ce défaut de prendre l’ostentation pour la hauteur, et la déclamation pour l’éloquence; et ceux qui se sont aperçus qu’il était peu naturel à beaucoup d’égards ont dit, pour le justifier, qu’il s’était attaché à peindre les hommes tels qu’ils devaient être. II est donc vrai du moins RÉFLEXIONS CRITIQUES. J10 qu’il ne les a pas peints tels qu’ils étaient c’est un grand aveu que cela. Corneille a cru donner sans doute à ses héros un caractère supérieur à celui de la nature. Les peintres n’ont pas eu la même présomption. Lorsqu’ils ont voulu peindre les anges, ils ont pris les traits de l’enfance ; ils ont rendu cet hommage à la nature, leur riche modèle. C’était néanmoins un beau champ pour leur imagination; mais c’est qu’ils étaient persuadés que l’imagination des hommes, d’ailleurs si féconde en chimères, ne pouvait donner de la vie à ses propres inventions. Si Corneille eût fait attention que tous les panégyriques étaient froids, il en aurait trouvé la cause en ce que les orateurs voulaient accommoder les hommes à leurs idées, au lieu de former leurs idées sur les hommes. Mais l’erreur de Corneille ne me surprend point le hou goût n’est qu’un sentiment fin et fidèle de la belle nature, et n’appartient qu’à ceux qui ont l’esprit naturel. Corneille, né dans un siècle plein d’affectation, ne pouvait avoir le goût juste aussi l’a-t-il fait paraître, non-seulement dans ses ouvrages, mais encore dans le choix de ses modèles, qu’il a pris chez les Espagnols et les Latins, auteurs pleins d’enflure, dont il a préféré la force gigantesque à la simplicité plus noble et plus touchante des poètes grecs. De là ses antithèses affectées, ses négligences basses, ses licences continuelles, son obscurité, son emphase, et enfin ces phrases synonymes, où la même pensée est plus remaniée que la division d’un sermon. De là encore ces disputes opiniâtres qui refroidissent quelquefois les plus fortes scènes, et où l’on croit assister à une thèse publique de philosophie, qui noue les choses pour les dénouer. Les premiers personnages de ses tragédies argumentent alors avec les tournures et les subtilités de l’école, et s’amusent à faire des jeux frivoles de raisonnements et de mots, comme des écoliers ou des légistes. C’est ainsi que Cinna dit Que le peuple aux tyrans ne soit plus exposé S’il eût puni Sylla, César eût moins osé. Cinna, acte II, scene u 320 VAUVENARGUES. Car il n’y a personne qui ne prévienne la réponse de Maxime Mais la mort de César, que vous trouvez si juste, A servi de prétexte aux cruautés d’Auguste. Voulant nous affranchir, lîrutes’est abusé; S’il n’eût puni César, Auguste eût moins osé. Cinna, acte II, scène n. Cependant je suis moins choqué de ees subtilités que des gros sièretés de quelques scènes. Par exemple, lorsque Horace quitte Curiace, c’est-à-dire dans un dialogue d’ailleurs admirable, Curiace parle ainsi d’abord Je vous connais encore, et c’est ce qui me lue. Mais cette âpre vertu ne m’était point connue Comme notre malheur, elle est au plus haut point ; Souffrez que je l’admire et ne l’imite point. Horace, acte II, scène tu. Horace, le héros de cette tragédie, lui répond Non, non, n’embrassez pas de vertu par contrainte; Et puisque vous trouvez plus de charme à la plainte, En toute liberté goûtez un bien si doux. Vaici venir ma soeur pour se plaindre avec vous. Horace , acte 11, scène in. Ici Corneille veut peindre apparemment une valeur féroce ; mais la férocité s’exprime-t-elle ainsi contre un ami et un rival modeste ? La fierté est une passion fort théâtrale ; mais elle dégénère en vanité et en petitesse sitôt qu’elle se montre sans qu’on la provoque. Me permettra-t-on de le dire? il me semble que l’idée des caractères de Corneille est presque toujours assez grande; mais l’exécution en est quelquefois bien faible, et le coloris faux ou peu agréable. Quelques uns des caractères de Racine peuvent bien manquer de grandeur dans le dessein ; mais les expressions sont toujours de main de maître, et puisées dans la vérité et la nature. J’ai cru remarquer encore qu’on ne trouvait guère dans les personnages de Corneille de ces traits simples qui annoncent une grande étendue d'esprit. Ces traits se rencontrent en foule dans Roxane, dans Agrippine, Joad , Acomat, Athalie. REFLEXIONS CRITIQUES. Sîl Je ne puis cacher ma pensée il était donne à Corneille de peindre des vertus austères, dures et inflexibles ; mais il appartient à Racine de caractériser les esprits supérieurs , et de les caractériser sans raisonnements et sans maximes, par la seule nécessité où naissent les grands hommes d’imprimer leur caractère dans leurs expressions. Joad ne se montre jamais avec plus d'avantage que lorsqu’il parle avec une simplicité ma jestueuse et tendre au petit Joas, et qu’il semble cacher tout son esprit pour se proportionner à cet enfant; de même Athalie. Corneille, au contraire , se guindé souvent pour élever ses personnages ; et on est étonnéque le même pinceau ait caractérisé quelquefois l’héroïsme avec des traits si naturels et si énergiques. Que dirai-je encore de la pesanteur qu’il donne quelquefois aux plus grands hommes ? Auguste, en parlant à Cinna, fait d’abord un exorde de rhéteur. Remarquez que je prends l’exemple de tous ses défauts dans les scènes les plus admirées. Prends un siège, Cinna, prends, et sur toute chose Observe exactement la loi que je t’impose; Prête, sans me troubler, l’oreille à mes discours; Êk 1 aucun mot, d’aucun cri n’en interromps le cours Tiens ta langue captive ; et si ce grand silence A ton émotion fait trop de violence, Tu pourras me répondre après tout à loisir Sur ce point seulement contente mon désir. Cinna , ade V, scène i. De combien la simplicité d’Agrippine, dans Ilritannicua, est elle plus noble et plus naturelle ! Approchez-vous, Néron, et prenez votre place. On veut sur vos soupçons que je vous satisfasse. Britannicus , acte IV, scène n. Cependant, lorsqu’on fait le parallèle de ces deux poetes, il semble qu’on ue convienne de l’art de Racine que pour donner à Corneille l’avantage du génie. Qu’on emploie cette distinction pour marquer le caractère d’un faiseur de phrases, je la trouverai raisonnable; mais lorsqu’on parle de l’art de Racine, l’art qui met toutes les choses à leur place, qui caractérise les hommes , 322 VACVENAIÎCUES. leurs passions, leurs mœurs, leur génie; qui chasse les obscurités, les superfluités, les faux brillants; qui peint la nature avec feu, avec sublimité et avec grâce, que peut-on penser d’un tel art, si ce n’est qu’il est le génie des hommes extraordinaires et l'original même de ces règles que les écrivains sans génie embrassent avec tant de zèle et avec si peu de succès? Qu’est-ce, dans la Mort de César', que l’art des harangues d’Antoine, si ce n’est le génie d’un esprit supérieur et celui de la vraie éloquence ? C’est le défaut trop fréquent de cet art qui gâte les plus beaux ouvrages de Corneille. Je ne dis pas que la plupart de ses tragédies ne soient très-bien imaginées et très-bien conduites. Je crois même qu’il a connu mieux que personne l’art des situations et des contrastes. Mais l’art des expressions et l’art des vers, qu’il a si souvent négligés ou pris à faux , déparent ses autres beautés. Il paraît avoir ignoré que pour être lu avec plaisir, ou même pour faire illusion à tout le monde dans la représentation d’un poème dramatique, il fallait, par une éloquence continue, soutenir l’attention des spectateurs, qui se relâche et se rebute nécessairement quand les détails sont négligés. Il y a longtemps qu’on a dit que l’expression était la principale partie de tout ouvrage écrit en vers. C’est le sentiment des grands maîtres, qu’il n’est pas besoin de justifier. Chacun sait ce qu’on souffre, je ne dis pas à lire de mauvais vers, mais même à entendre mal réciter un bon poème. Si l’emphase d’un comédien détruit le charme naturel de la poésie, comment l’emphase même du poète ou l’impropriété de ses expressions ne dégoûteraient-elles pas les esprits justes de sa fiction et de ses idées ? Racine n’est pas sans défauts. Il a mis quelquefois dans ses ouvrages un amour faible, qui fait languir son action. Il n’a pas conçu assez fortement la tragédie. Il n’a point assez fait agir ses personnages. On ne remarque pas dans ses écrits autant d’énergie que d’élévation, ni autant de hardiesse que d’égalité. Plus savant encore à faire naître la pitié que la terreur, et l’admiration que l’étonnement, il n’a pu atteindre au tragique de quelques poètes. Nul homme n’a eu en partage tous les dons. Si d’ailleurs 1 Tragédie de Voltaire. REFnEXIOXS CRITIQUES. 323 on veut être juste, on avouera que personne ne donna jamais au théâtre plus de pompe, n’éleva plus haut la parole, et n’y versa plus de douceur. Qu’on examine ses ouvrages sans prévention quelle facilité ! quelle abondance! quelle poésie ! quelle imagination dans l’expression ! Qui créa jamais une langue ou plus magnifique, ou plus simple, ou plus variée, ou plus noble, ou plus harmonieuse et plus touchante ? Qui mit jamais autant de vérité dans ses dialogues, dans ses images , dans ses caractères, dans l'expression des passions ? Serait-il trop hardi de dire que c’est le plus beau génie que la France ait eu et le plus éloquent de ses poètes? Corneille a trouvé le théâtre vide, et a eu l’avantage de former le goût de son siècle sur son caractère. Racine a paru après lui, et a partagé les esprits. S’il eût été possible de changer cet ordre, peut être qu’on aurait jugé de l’un et de l’autre fort différemment. Oui, dit-on; mais Corneille est venu le premier, il a créé le théâtre. Je ne puis souscrire à cela. Corneille avait de grands modèles parmi les anciens ; Racine ne l’a point suivi personne n’a pris une route, je ne dis pas plus différente, mais plus opposée ; personne n’est plus original à meilleur titre. Si Corneille a droit de prétendre à la gloire des inventeurs, on ne peut Fêter à Racine. Mais si l’un et l’autre ont eu des maîtres, lequel a choisi les meilleurs et les a le mieux imités ? On reproche à Racine de n’avoir pas donne à ses héros le caractère de leur siècle et de leur nation ; mais les grands hommes sont de tous les âges et de tous les pays. On rendrait le vicomte de Turenne et le cardinal de Richelieu méconnaissables en leur donnant le caractère de leur siècle. Les âmes véritablement grandes ne sont telles que parce qu’elles se trouvent en quelque manière supérieures à l’éducation et aux coutumes. Je sais qu’elles retiennent toujours quelque chose de l’une et de l’autre ; mais le poète peut négliger ces bagatelles, qui ne touchent pas plus au fond du caractère que la coiffure et l’habit du comédien, pour ne s’attacher qu’à peindre vivement les traits d’une nature forte et éclairée et ce génie élevé qui appartient également à tous les peuples. Je ne vois point d’ailleurs que Racine ait manqué à ces 324 VAU VEN ARGUES. prétendues bienséances du théâtre. Ne parlons pas des tragédies faibles de ce poète, Alexandre, la Thébalde, Bérénice, Esther, dans lesquelles on pourrait citer encore de grandes beautés. Ce n’est point par les essais d’un auteur, et par le plus petit nombre de ses ouvrages, qu’on doit en juger; mais par le plus grand nombre de ses ouvrages et par ses chefs-d’œuvre. Qu’on observe cette règle avec Racine, et qu’on examine ensuite ses écrits. Dira-t-on qu’Acomat, Roxane, Joad, Athalie, Mithridate, Néron, Agrippine, Burrhus, Narcisse, Clytemnestre, Agamem- non, etc., n’aient pas le caractère de leur siècle et celui que les historiens leur ont donné? Parce que Bajazet et Xipharès ressemblent à Britannicus, parce qu’ils ont un caractère faible pour le théâtre, quoique naturel, sera-t on fondé à prétendre que Racine n’ait pas su caractériser les hommes, lui dont le talent éminent était de les peindre avec vérité et avec noblesse ? Bajazet, Xipharès, Britannicus, caractères si critiqués, ont la douceur et la délicatesse de nos mœurs, qualités qui ont pu se rencontrer chez d’autres hommes, et n’en ont pas le ridicule, comme on l’insinue. Mais je veux qu’ils soient plus faibles qu’ils ne me paraissent quelle tragédie a-t-on vue où tous les personnages fussent de la même force ? Cela ne se peut Mathan et Abner sont peu considérables dans Athalie, et cela n’est pas un défaut, mais privation d’une beauté plus achevée. Que voit-on d’ailleurs de plus suh’ime que toute cette tragédie? Que reprocher donc à Racine? d’avoir mis quelquefois dans ses ouvrages un amour faible, tel peut-être qu’il est déplacé au théâtre ? Je l’avoue ; mais ceux qui se fondent là-dessus pour bannir de la scène une passion si générale et si violente passent, ce me semble, dans un autre excès. Les grands hommes sont grands dans leurs amours, et ne sont jamais plus aimables. 1 amour est le caractère le plus tendre de l’humanité, et l'humanité est le charme et la perfection de la nature. .1 e reviens encore à Corneille, afin de finir ce discours. Je crois qu’il a connu mieux que Racine le pouvoir des situations et des tragédies, toujours fort au-dessous, par l’expression, de celles de son rival, sont moins agréables à lire, RÉFLEXIONS CRI TIQUES. mais plus intéressantes quelquefois dans la représentation, soit par le choc des caractères, soit par l’art des situations, soit par la grandeur des intérêts. Moins intelligent que Racine, il concevait peut-être moins profondément, mais plus fortement ses sujets. Il n’était ni si grand poète ni si éloquent ; mais il s’exprimait quelquefois avec uuegrande énergie. Personne n’a des traits plus élevés et plus hardis ; personne n’a laissé l’idée d’un dialogue si serré et si véhément personne n’a peint avec le même bonheur l’inflexibilité et la force d’esprit qui naissent de la vertu. De ces disputes même que je lui reproche sortent quelquefois des éclairs qui laissent l'esprit étonné, et des combats qui véritablement élèvent l’âme; et enfin, quoiqu’il lui arrive continuellement des’écarter de la nature, on est obligé d’avouer qu’il la peint naïvement et bien fortement dans quelques endroits ; et c’est uniquement dans ces morceaux naturels qu’il est admirable. Voilà ce qu’il me semble qu’on peut dire sans partialité de ses talents. Mais lorsqu’on a rendu justice à son génie, qui a surmonté si souvent le goût barbare de son siècle, on ne peut s’empêcher de rejeter, danssesouvrages, ce qu’ils retiennentde ce mauvais goût, et ce qui servirait à le perpétuer dans les admirateurs trop passionnés de ce grand maître. Les gens du métier sont plus indulgents que les autres à ces defauts, parce qu’ils ne regardent qu’aux traits originaux de leurs modèles, et qu’ils connaissent mieux le prix de l’invention et du génie. Mais le reste des hommes juge des ouvrages tels qu’ils sont, sans égard pour le temps et pour les auteurs et je crois qu’il serait à désirer que les gens de lettres voulussent bien séparer les défauts des plus grands hommes de leurs perfections ; car si l’on confond leurs beautés avec leurs fautes par une admiration superstitieuse, il pourra bien arriver que les jeunes gens imiteront les défauts de leurs maîtres, qui sont aisés à imiter, et n’atteindront jamais à leur génie. Pour moi, quand je fais la critique de tant d’hommes illustres, mon objet est de prendre des idées plus justes de leur caractère. Je ne crois pas qu’on puisse raisonnablement me reprocher cette hardiesse la nature a donné aux grands hommes de faire, et laissé aux autres déjuger. KXX1UES, . 19 326 VAUVENARGUES. Si l’on trouve que je relève davantage les défauts des uns que ceux des autres, je déclare que c’est à cause que les uns me son plus sensibles que les autres, ou pour éviter de répéter des choses qui sont trop connues. Pour finir, et marquer chacun de ces poètes par ce qu’ils ont eu de plus propre, je dirai que Corneille a éminemment la force, Boileau la justesse, La Fontaine la naïveté, Chaulieu les grâces et l’ingénieux, Molière les saillies et la vive imitation des mœurs, Racine la dignité et l’éloquence. Ils n’ont pas ces avantages à l’exclusion les uns des autres ; ils les ont seulement dans un degré plus éminent, avec une infinité d’autres perfections que chacun y peut remarquer. Vil. J. -B. HOUSSEAU. On ne peut disputer à Rousseau d’avoir connu parfaitement la mécanique des vers. Égal peut-être à Despréaux par cet endroit, on pourrait le mettre à côté de ce grand homme si celui-ci, né à l’aurore du bon goût, n’avait été le maître de Rousseau et de tous les poètes de son siècle. Ces deux excellents écrivains se sont distingués l’un et l’autre par l’art difficile de faire régner dans les vers une extrême simplicité, par le talent d’y conserver le tour et le génie de notre langue, et enfin par cette harmonie continue sans laquelle il n’y a point de véritable poésie. On leur a reproché, à la vérité, d’avoir manqué de délicatesse et d’expression pour le sentiment. Ce dernier défaut me paraît peu considérable dans Despréaux, parce que, s’étant attaché uniquement à peindre la raison, il lui suffisait de la peindre avec vivacité et avec feu, comme il a fait ; mais l’expression des passions ne lui était pas nécessaire. Son Art poétique et quelques autres de ses ouvrages approchent de la perfection qui leur est propre, et on n’y regrette point la langue du sentiment, quoiqu’elle puisse entrer peut-être dans tous les genres et les embellir de ses charmes. RÉFLEXIOXS CRITIQUES. 327 Il n'est pas tout à fait si facile de justifier Rousseau à ce! égard. L’ode étant, comme il dit lui-même, le véritable champ du pathétique et du sublime , on voudrait toujours trouver dans les siennes ce haut caractère ; mais, quoiqu’elles soient dessinées avec une grande noblesse, je ne sais si elles sont toutes assez passionnées. J’excepte quelques-unes des odes sacrées, dont le fonds appartient 5 de plus grands maîtres. Quant à celles qu’il a tirées de son propre fonds, il me semble qu’en général les fortes images qui les embellissent ne produisent pas de grands mouvements, et n’excitent ni la pitié, ni l’étonnement, ni la crainte, ni ce sombre saisissement que le vrai sublime fait naître. La marche impétueuse de l’ode n’est pas celle de l’esprit tranquille il faut donc qu’elle soit justifiée par un enthousiasme véritable. Lorsqu’un auteur se jette de sang-froid dans ces écarts qui n’appartiennent qu’aux grandes passions, il court risque de marcher seul; car le lecteur se lasse de ces transitions forcées, et de ces fréquentes hardiesses que l’art s’efforce d’imiter du sentiment, et qu’il imite toujours sans succès. Les endroits où le poète paraît s’égarer devraient être, à ce qu’il me semble, les plus passionnés de son ouvrage; il est même d’autant plus nécessaire de mettre du sentiment dans nos odes, que ces petits poèmes sont ordinairement vides de pensées, et qu’un ouvrage vide dépensées sera toujours faible s’il n’est rempli de passion. Or, je ne crois pas qu’on puisse dire que les odes de Rousseau soient fort passionnées. Il est tombé quelquefois dans le défaut de ces poètes qui semblent s’être proposé dans leurs écrits, non d’exprimer plus fortement par des images,des passions violentes, mais seulement d’assembler des images magnifiques, plus occupés de chercher de grandes figures que de faire naître dans leur âme de grandes pensées. Les défenseurs de Rousseau répondent qu’il a surpassé Horace et Pindare, auteurs illustres dans le même genre et de plus rendus respectables par l’estime dont ils sont en possession depuis tant de siècles. Si cela est ainsi, je ne m’étonne point que Rousseau ait emporté tous les suffrages. On ne juge que par comparaison de toutes choses , et ceux gui font mieux que les autres dans leur genre 528 vauvenargues. passent toujours pour excellents, personne n’osant leur contester d’être dans le bon chemin. Il m’appartient moins qu’à tout .1 utre de dire que Rousseau n’a pu atteindre le but de son art; mais je crains bien que si on n’aspire pas à faire de l’ode une imitation plus fidèle de la nature, ce genre ne demeure enseveli dans une espèce de médiocrité. S’il m’est permis d’être sincère jusqu’à la fin, j’avouerai que je trouve encore des pensées bien fausses dans les meilleures odes de Rousseau. Cette fameuse Ode à la Fortune, qu’on regarde comme le triomphe de la raison, présente, ce me semble, peu de réflexions qui ne soient plus éblouissantes que solides. Écoutons ce poète philosophe Quoi ! Rome et l’Italie en cendre Me feront honorer Sylla ? Non vraiment, U Italie en cendre ne peut faire honorer Sylla, mais ce qui doit, je crois, le faire respecter avec justice, c’est ce génie supérieur et puissant qui vainquit le génie de Rome, qui lui fit défier dans sa vieillesse les ressentiments de ce même peuple qu’il avait soumis, et qui suttoujours subjuguer, par les bienfaits ou par la force, le courage ailleurs indomptable de ses ennemis. Voyons ce qui suit J’admirerai dans Alexandre Ce que j’abhorre en Attila 1 * 3 ? Je ne sais quel était le caractère d’Attila ; mais je suis forcé d’admirer les rares talents d’Alexandre, et cette hauteur de génie qui, soit dans le gouvernement, soit dans la guerre, soit dans les sciences, soit même dans sa vie privée, l’a toujours fait paraître comme un homme extraordinaire et qu’un instinct grand et sublime dispensait des moindres vertus ». Je veux révérer un héros qui parvenu au faîte des grandeurs humaines ne 1 U ne s’agit ici ni du génie de Sylla ni des grandes qualités d’Alexandre, mais des maux que leur ambition et leur exemple ont faits au monde ; et le poète philosophe a pu sous ce rapport les comparer avec AtUla. B. 3 Pour dispensait des vertus d’un ordre moins relevé , paraît amphibologique. S. 329 REFLEXIONS CRITIQUES. dédaignait pas l’amitié, qui dans cette haute fortune respectait encore le mérite; qui aima mieux s’exposer à mourir que de soupçonner son médecin de quelque crime, et d’affliger par une défiance qu’on n’aurait pas blâmée la fidélité d’un sujet qu’il estimait; le maître le plus libéral qu’il y eut jamais, jusqu’à ne réserver pour lui que Y espérance ; plus prompt à réparer ses injustices qu’à les commettre, et plus pénétré de ses fautes que de ses triomphes; né pour conquérir l’univers, parce qu’il était digne de lui commander, et en quelque sorte excusable de s’être fait rendre les honneurs divins dans un temps où toute la terre adorait des dieux moins aimables. Rousseau paraît donc trop injuste lorsqu’il ose ajouter d’un si grand homme Mais à la place de Socrate, Le fameux vainqueur de l’Euphrate Sera le dernier des mortels. Apparemment que Rousseau ne voulait épargner aucun conquérant; et voici comme il parle encore L’inexpérience indocile Du compagnon de Paul-Émile Fit tout le succès d’Annibal. Combien toutes ces réflexions ne sont-elles pas superficielles! Qui ne sait que la science de la guerre consiste à profiter des fautes de ses ennemis ? Qui ne sait qu’Annibal s’est montré aussi grand dans ses défaites que dans ses victoires ? S’il était reçu de tous les poètes, comme il l’est du reste des hommes, qu’il n’y a rien de beau dans aucun genre que le vrai, et que les fictions mêmes de la poésie n’ont été inventées que pour peindre plus vivement la vérité, que pourrait-on penser des invectives que je viens de rapporter? Serait-on trop sévère de juger que l’Ode à la Fortune n’est qu’une pompeuse déclamation et un tissu de lieux communs énergiquement exprimés ? Je ne dirai rien des allégories et de quelques autres ouvrages de Rousseau. Je n’oserais surtout juger d’aucun ouvrage allégorique , parce que c’est un genre que je n’aime pas ; mais je louerai volontiers ses épigrammes, où l’on trouve toute la naïveté deMarot avec une énergie que Marot n’avait pas. Je louerai des 330 VAUVKNARGUES. morceaux admirables dans ses épîtres, où le génie de ses épi grammes se fait singulièrement apercevoir. Mais en admiran ces morceaux, si dignes de l’être, je ne puis m’empêcher d’êtr choque de ia grossièreté insupportable qu’on remarque en d’autres endroits. Rousseau voulant dépeindre, dans 1 ’Êpitre aux Muses, je ne sais quel mauvais poète, il le compare à un oison que la flatterie enhardit à préférer sa voix au chant du cygne. Un autre oison lui fait un long discours pour l’obliger à chanter, et Rousseau continue ainsi A ce discours notre oiseau tout gaillard Perce le ciel de son cri nasillard ; Et tout d’abord, oubliant leur mangeaille, Vous eussiez vu canards, dindons, poulaille De toutes parts accourir, l’entourer, Battre de l’aile, applaudir, admirer, V anter la voix dont nature le doue, Et faire nargue au cygne de Mantoue. Le chant fini, le pindarîque oison, Se rengorgeant, rentre dans la maison Tout orgueilleux d’avoir, par son ramage. Du poulailler mérité le suffrage '. On ne nie pas qu’il n’y ait quelque force dans cette peinture ; mais combien en sont basses les images! La même épître est remplie de choses qui ne sont ni plus agréables ni plus délicates. C’est un dialogue avec les Muses, qui est plein de longueurs, dont les transitions sont forcées et trop ressemblantes; où l’on trouve à la vérité de grandes beautés de détails, mais qui en rachètent à peine les défauts. J’ai choisi cette épître exprès, ainsi que VOde à la Fortune, afin qu’on ne m’accusât pas de rapporter les ouvrages les plus faibles de Rousseau pour diminuer l’estime que l’on doit aux autres. Puis-je me flatter en cela d’avoir contenté la délicatesse de tant de gens de goût et de génie qui respectent tous les écrits de ce poète ? Quelque crainte que je •- Toute cette tirade est dirigée contre La Motte, dont les odes jouissaient du temps de J. B. Rousseau d'une réputation que la postérité n'a point confirmée. B. 331 RÉFLEXIONS CRITIQUES. doive avoir de me tromper en m’écartant de leur sentiment et de celui du public, je hasarderai eneore ici une réflexion. C’est que le vieux langage employé par Rousseau dans ses meilleures épîtres ne me paraît ni nécessaire pour écrire naïvement, ni assez noble pour la poésie. C’est à ceux qui font profession eux- mêmes de cet art à prononcer là-dessus je leur soumets sans répugnance toutes les remarques que j’ai osé faire sur les plus illustres écrivains de notre langue. Personne n’est plus passionné que je ne le suis pour les véritables beautés de leurs ouvrages, .le ne connais peut-être pas tout le mérite de Rousseau, mais je ne serai pas fâché qu’on me détrompe des défauts que j’ai cru pouvoir lui reprocher 1 . On ne saurait trop honorer les grands talents d’un auteur dont la célébrité a fait les disgrâces, comme c'est la coutume chez les hommes, et qui n’a pu jouir dans sa patrie de la réputation qu’il méritait que lorsque, accablé sous le poids de l’humiliation et de l’exil, la longueur de son infortune a désarmé la haine de ses ennemis et fléchi l’injustice de l’envie. Vlll. QUINAULT. Ou ne peut trop aimer la douceur, la mollesse, la facilité et l’harmonie tendre et touchante de la poésie de Quinault. On peut même estimer beaucoup l’art de quelques-uns de ses opéras, intéressants par le spectacle dont ils sont remplis, par l’invention ou la disposition des faits qui les composent, par le merveilleux qui y règne, et enfin par le pathétique des situations, qui donne lieu à celui de la musique, et qui l’augmente nécessairement. Ni la grâce, ni la noblesse, ni le naturel, n’ont manqué à l’auteur de ces poèmes singuliers. 11 y a presque toujours de la naïveté dans son dialogue, et quelquefois du sentiment. Ses vers sont semés d’images charmantes et de pensées ingénieuses. On admirerait trop les fleurs dont il se pare s’il eût évité les défauts ' fceorrect. Reconnaître quon s'esi trompé en regardant comme un dé faut ce oui n'en est pas un, ce n'est pas se détromper des défauts. M. 335 VAUVENARGUES. qui font languir quelquefois ses beaux ouvrages. Je n’aime pas les familiarités qu’il a introduites dans ses tragédies je suis fâché qu’on trouve dans beaucoup de scènes, qui sont faites pour inspirer la terreur et la pitié, des personnages qui, par le contraste de leurs discours avec les intérêts des malheureux, rendent ces mêmes scènes ridicules et en détruisent tout le pathétique. Je ne puis m’empêcher encore de trouver ses meilleurs opéras trop vides de choses, trop négligés dans les détails, trop fades même dans bien des endroits. Enfin, je pense qu’on a dit de lui avec vérité qu’il n’avait fait qu’effleurer d’ordinaire les passions. Il me paraît que Lulli a donné à sa musique un caractère supérieur à la poésie de Quinault. Lulli s’est élevé souvent jusqu’au sublime par la grandeur et par le pathétique de ses expressions ; et Quinault n’a d’autre mérite à cet égard que celui d’avoir fourni les situations et les canevas auxquels le musicien a fait recevoir la profonde empreinte de son génie. Ce sont sans doute les défauts de ce poète et la faiblesse de ses premiers ouvrages qui ont fermé les yeux de Despréaux sur son mérite ; mais Despréaux peut être excusable de n’avoir pas cru que l’opéra, théâtre plein d’irrégularités et de licences, eût atteint en naissant sa perfection. Ne penserions-nous pas encore qu’il manque quelque chose à ce spectacle, si les efforts inutiles de tant d’auteurs renommés ne nous avaient fait supposer que le défaut de ces poèmes était peut-être un vice irréparable ? Cependant je conçois sans peine qu’on ait fait à Despréaux un grand reproche de sa sévérité trop opiniâtre 1 . Avec des talents si aimables que ceux de Quinault, et la gloire qu’il a d’être l’inventeur de son genre, on ne saurait être surpris qu’il ait des partisans très-passionnés, qui pensent qu’on doit respecter ses défauts même. Mais cette excessive indulgence de ses admirateurs me fait comprendre encore l’extrême rigueur de ses critiques. Je vois qu’il n’est point dans le caractère des hommes de 1 Boileau a cependant dit lui-même, dans la préface de la dernière édition 1e ses Œuvres, que dans le temps où il écrivit contre Quinault tous deux •taient fort jeunes, et Quinault n’avait pas fait alors beaucoup d’ouvrages qui uiont acquis dans la suite une juste réputation. Ce sont les expressions doni 1 se sert. F. 333 RÉFLEXIONS CRITIQUES. juger du mérite d’un autre homme par l’ensemble de ses qualités on envisage sous divers aspects le génie d’un auteur illustre; on le méprise ou l’admire avec une égale apparence de raison, selon les choses que l’on considère en ses ouvrages. Les beautés que Quinault a imaginées demandent grâce pour ses défauts; mais j’avoue que je voudrais bien qu’on se dispensât de copier jusqu’à ses fautes. Je suis fâché qu’on désespère de mettre plus de passion, plus de conduite, plus de raison et plus de force dans nos opéras, que leur inventeur n’y en a mis. J’aimerais qu’on en retranchât le nombre excessif des refrains qui s’y rencontrent, qu’on ne refroidît pas les tragédies par des puérilités, et qu’on n’en fit pas des paroles pour le musicien, entièrement vides de sens. Les divers morceaux qu’on admire dans Quinault prouvent qu’il y a peu de beautés incompatibles avec la musique; et que c’est la faiblesse des poètes ou celle du genre qui fait languir tant d’opéras, faits à la hâte et aussi mal écrits qu’ils sont frivoles. IX. SUR QUELQUES OUVRAGES DE VOLTAIRE. Après avoir parlé de Rousseau et des plus grands poètes du siècle passé, je crois que ce peut être ici la place de dire quelque chose des ouvrages d’un homme qui honore notre siècle, et qui n’est ni moins grand ni moins célèbre que tous ceux qui l’ont précédé, quoique sa gloire , plus près de nos yeux, soit plus exposée à l’envie. Il ne m’appartient pas de faire une critique raisonnée de tous ses écrits, qui passent de bien loin mes connaissances et la faible étendue de mes lumières; ce soin me convient d’autant moins, qu’une infinité d’hommes plus instruits que moi ont déjà fixé les idées qu’on doit en avoir. Ainsi je ne parlerai pas de la Hen- riade, qui, malgré les défauts qu’on lui impute, et ceux qui y sont en effet, passe néanmoins, sans contestation, pour le plus grand ouvrage de ce siècle, et le seul poème en ce genre de notre nation. VAUVEN ARGUES. 33 i Je dirai peu de chose encore de ses tragédies comme il n’y en a aucune qu’on ne joue au moins une fois chaque année, tous ceux qui ont quelque étincelle de bon goût peuvent y remarquer d’eux-mêmes le caractère original de l’auteur, les grandes pensées qui y régnent, les morceaux éclatants de poésie qui les embellissent, la manière forte dont les passions y sont ordinairement traitées, et les traits hardis et sublimes dont elles sont pleines. Je ne m’arrêterai donc pas à faire remarquer dans Mahomet cette expression grande et tragique du genre terrible, qu’on croyait épuisée par l’auteur à'Electre 1 . Je ne parlerai pas de la tendresse répandue dans Zaïre, ni du caractère théâtral des passions violentes d’Hérode 5 , ni de la singulière et noble nouveauté à'Mzire, ni des éloquentes harangues qu’on voit dans la Mort de César, ni enfin de tant d’autres pièces, toutes différentes , qui font admirer le génie et la fécondité de leur auteur. Mais parce que la tragédie de Mérope me paraît encore mieux écrite, plus touchante et plus naturelle que les autres, je n’hésiterai pas à lui donner la préférence. J’admire les grands caractères qui y sont décrits, le vrai qui règne dans les sentiments et les expressions, la simplicité sublime, et tout à fait nouvelle sur notre théâtre, du rôle d’Égisthe ; la tendresse impétueuse de Mérope, ses discours coupés, véhéments, et tantôt remplis de violence, tantôt de hauteur. Je ne suis pas assez tranquille à une pièce qui produit de si grands mouvements, pour examiner si les règles et les vraisemblances sévères n’y sont pas blessées. La pièce me serre le cœur dès le commencement, et me mène jusqu’à la catastrophe sans me laisser la liberté de respirer. S’il y a donc quelqu’un qui prétende que la conduite de l’ouvrage est peu régulière, et qui pense qu’en général M. de Voltaire n’est pas heureux dans la fiction ou dans le tissu de ses ièces ; sans entrer dans cette question, trop longue à discuter, e me contenterai de lui répondre que ce même défaut dont on accuse M. de Voltaire a été reproché très-justement à plusieurs pièces excellentes, sans leur faire tort. Les dénoûments de Mo- 1 VÊlectre de Voltaire, et non celle de Crébillon. 1 Dans la tragédie de Marianne. B. REFLEXIONS CRITIQUES. 335 lière sont peu estimés, et le Misanthrope, qui est le chef-d’œuvre de la comédie, est une comédie sans action. Mais c’est le privilège des hommes comme Molière et M. de Voltaire d'être admirables malgré leurs défauts, et souvent dans leurs défauts mêmes. La manière dont quelques personnes, d’ailleurs éclairées, parlent aujourd’hui de la poésie me surprend beaucoup. Ce n’est pas, disent-ils, la beauté des vers et des images qui caractérise le poète, ce sont les pensées mâles et hardies ; ce n’est pas l’expression du sentiment et de l’harmonie, c’est l’invention. Par là on prouverait que Bossuet et Newton ont été les plus grands poètes de leur siècle ; car assurément l’invention, la hardiesse et les pensées mâles ne leur manquaient point. Reprenons Mérope. Ce que j’admire encore dans cette tragédie , c’est que les personnages y disent toujours ce qu’ils doivent dire, et sont grands sans affectation. Il faut lire la seconde scène du second acte pour comprendre ce que je dis. Qu’on me permette d’en citer la fin , quoiqu’on pût trouver dans la même pièce de plus beaux endroits. ÉCISTIIE. Un vain désir de gloire a séduit mes esprits. On me parlait souvent des troubles de Messène Des malheurs dont le ciel avait frappé la reine, Surtout de ses vertus, dignes d’un autre prix Je me sentais ému par ces tristes récits. De l’Élide en secret dédaignant la mollesse, J’ai voulu dans la guerre exercer ma jeunesse, Servir sous vos drapeaux, et vous offrir mon bras Voilà le seul dessein qui conduisit mes pas. Ce faux instinct de gloire égara mon courage A mes parents, flétris par les rides de l’âge, J’ai de mes jeunes ans dérobé les secours ; C’est ma première faute, elle a troublé mes jours. Le ciel m’en a puni ; le ciel inexorable M’a conduit dans le piège, et m’a rendu coupable. MÉROPE. 11 ne l’est point, j’en crois son ingénuité; Le mensonge n’a point cette simplicité. 336 VACYlCNAKüCliS. Tendons à sa jeunesse une main bienfaisante; C’est un infortuné que le ciel me présente Il suffit qu’il soit bomme et qu’il soit malheureux. Mon fils peut éprouver un sort plus rigoureux. Il me rappelle Égisthe, Égisthe est de son âge ; Peut-être comme lui, de rivage en rivage, Inconnu, fugitif, et partout rebuté, 11 souffre le mépris qui suit la pauvreté. L’opprobre avilit l’âme et flétrit le courage. Mérope, acte II, scène ir. Cette dernière réflexion de Mérope est bien naturelle et bien sublime. Une mère aurait pu être touchée de toute autre crainte dans une telle calamité; et néanmoins Mérope paraît pénétrée de ce sentiment. Voilà comme les sentences sont grandes dans la tragédie, et comme il faudrait toujours les y placer. C’est, je crois , cette sorte de grandeur qui est propre à Racine, et que tant de poètes après lui ont négligée, ou parce qu’ils ne la connaissaient pas, ou parce qu’il leur a été bien plus facile de dire des choses guindées, et d’exagérer la nature. Aujourd’hui on croit avoir fait un caractère lorsqu’on a mis dans la bouche d’un personnage ce qu’on veut faire penser de lui, et qui est précisément ce qu’il doit taire. Une mère affligée dit qu’elle est affligée, et un héros dit qu'il est un héros. Il faudrait que les personnages fissent penser tout cela d’eux, et que rarement ils le dissent ; mais, tout au contraire, ils le disent, et le fopt rarement penser. Le grand Corneille n’a pas été exempt de ce défaut, et cela a gâté tous ses caractères. Car enfin ce qui forme un caractère , ce n’est pas, je crois, quelques traits, ou hardis, ou forts, ou sublimes, c’est l’ensemble de tous les traits et des moindres discours d’un personnage. Si on fait parler un héros, qui mêle partout de l’ostentation, de la vanité, et des choses basses à de grandes choses, j’admire ces traits de grandeur qui appartiennent au poète, mais je sens du mépris pour son héros, dont le caractère est manqué. L’éloquent Racine, qu’on accuse de stéril ité dans ses caractères, est le seul de son temps qui ait fait des caractères ; et ceux qui admirent la variété du grand Corneille sont bien indulgents de lui pardonner l’invariable ostentation de ses per- REFLEXIONS CRITIQUES 337 sonnages, et le caractère toujours dur des vertus qu’il a .ta décrire. C’est pourquoi quand M. de Voltaire a critiqué 1 les caractères d’Hippolyte, Bajazet, Xipharès, Britannicus, il n’a pas prétendu, je crois, diminuer l’estime de ceux d’Athalie, Joad, Acomat, Agrippine, Néron, Burrhus, Mithridate, etc. Mais, puisque cela me conduit à parler du Temple du Goût , je suis bien aise d’avoir occasion de dire que j’en estime grandement les décisions. J’excepte ces mots Bossuet, le seul éloquent entre tant d’écrivains qui ne sont qu’élégants 2 car je ne crois pas que M. de Voltaire lui-même voulût sérieusement réduire à ce petit mérite d’élégance les ouvrages de M. Pascal, l’homme de la terre qui savait mettre la vérité dans un plus beau jour et raisonner avec plus de force. Je prends la liberté de défendre encore contre son autorité le vertueux auteur de Télémaque, homme né véritablement pour enseigner aux rois l’humanité, dont les paroles tendres et persuasives pénètrent le cœur, et qui, par la noblesse et par la vérité de ses peintures, par les grâces touchantes de son style, se fait aisément pardonner d’avoir employé trop souvent les lieux communs de la poésie et un peu de déclamation. 1 Dans son Temple du Goût , Voltaire, après avoir parlé de Pierre Corneille, s’exprime ainsi sur Racine Plus pur, plus élégant, plus tendre, Et parlant au cœur de plus près, Nbus attachant sans nous surprendre, Et ne se démentant jamais, Racine observe les portraits De Bajazet, de Xipharès, De Britannicus, d’Hippolyte. A peine il distingue leurs traits; lis ont tons le même mérite Tendres, galants, doux et discrets; Et l’Amour, qui marche à leur suite, Les croit des courtisans français. ; Dans l’édition faite sous les yeux de Voltaire, à Genève, en 1768, etdaus les réimpressions faites depuis sa mort, cette phrase ne se trouve point ; et le Temple du Goût s’exprime ainsi sur l’évêque de Meaux L'éloquent Bossuet voulait bien rayer quelques familiarités échappées à son génie vaste , impétueux et facile, lesquelles déparent un peu la sublimité de ses orai - tons funèbres. 338 VAUVENARGUES. Mais, quoi qu’il puisse être de cette trop grande partialité de M. de Voltaire pour Bossuet, que je respecte d’ailleurs plus que personne, je déclare que tout le reste du Temple du Goût m’a frappé par la vérité des jugements, par la vivacité, la variété et le tour aimable du style ; et je ne puis comprendre que l’on juge si sévèrement d’un ouvrage si peu sérieux, et qui est un modèle d’agréments. Dans un genre assez différent, YÉpitre aux mânes de Génonville et celle sur la mort de mademoiselle Lecouvreur m’ont paru deux morceaux remplis de charmes, et où la douleur, l’amitié, l’éloquence et la poésie parlaient avec la grâce la plus ingénue et la simplicité la plus touchante. J’estime plus deux petites pièces faites de génie, comme celles-ci, et qui ne respirent que la passion, que beaucoup d’assez longs poèmes. Je finirai sur les ouvrages de M. de Voltaire en disant quelque chose de sa prose. Il n’y a guère de mérite essentiel qu’on ne puisse trouver dans ses écrits. Si l’on est bien aise de voir toute la politesse de notre siècle, avec un grand art pour faire sentir la vérité dans les choses de goût, on n’a qu’à lire la préface d'OEdipe, écrite contre M. de La Motte avec une délicatesse inimitable. Si on cherche du sentiment, de l’harmonie jointe à une noblesse singulière, on peut jeter les yeux sur la préface à'Jlzire, et sur YÉpître à madame la marquise du Châtelet. Si on souhaite une littérature universelle, un goût étendu , qui embrasse le caractère de plusieurs nations, et qui peigne les manières différentes des plus grands poètes, on trouvera cela dans les Réflexions sur tes voëtes épiques, et les divers morceaux traduits par M. de Voltaire des poètes anglais, d’une manière qui passe peut-être les originaux. Je ne parle pas de Y Histoire de Charles XII, qui, par la faiblesse des critiques que l’on a faites, a dû acquérir une autorité incontestable, et qui me paraît être écrite avec une force, une précision et des images dignes d’un tel peintre. Mais quand ou n’aurait vu de M. de Voltaire que son Essai sur le Siècle de Louis XIV et ses Réflexions sur C Histoire, ce serait déjà trop 1 pour reconnaître 1 Trop emporte toujours l'idée d’excès, et l'auteur ne veut exprimer ici que surabondance. S. REFLEXIONS CRITIQUES. 339 en lui, non-seulement un écrivain du premier ordre, mais encore un génie sublime, qui voit tout en grand, une vaste imagination, qui rapproche de loin les choses humaines, enfin uü esprit supérieur aux préjugés, et qui joint à la politesse et à l’esprit philosophique de son siècle la connaissance des siècles passés, de leurs moeurs, de leur politique, de leurs religions, et de toute l’économie du genre humain. Si pourtant il se trouve encore des gens prévenus, qui s’attachent à relever ou les erreurs ou les défauts de ses ouvrages, et qui demandent à un homme si universel la même correction et la même justesse qu’à ceux qui se sont renfermés dans un seul genre, et souvent dans un genre assez petit, que peut-on répondre à des critiques si peu raisonnables ? J’espère que le petit nombre des juges désintéressés me saura du moins quelque gré d’avoir osé dire les choses que j’ai dites, parce que je les ai pensées, et que la vérité m’a été chère. C’est le témoignage que l’amour des lettres m’oblige de rendre à un homme qui n’est ni en place, ni puissant, ni favorisé, et auquel je ne dois que la justice que tous les hommes lui doivent comme moi et que l’ignorance ou l’envie s’efforcent inutilement de lui ravir. FRAGMENTS. BOSSUET. — PASCAL. — FÉNELON. Qui n’admire la majesté, la pompe, la magnificence, l’enthousiasme de Bossuet, et la vaste étendue de ce génie impétueux, fécond, sublime? Qui conçoit sans étonnement la profondeur incroyable de Pascal, son raisonnement invincible, sa mémoire surnaturelle, sa connaissance universelle et prématurée? Le premier élève l’esprit, l’autre le confond et le trouble. L’an éclate comme un tonnerre dans un tourbillon orageux, et par ses soudaines hardiesses échappe aux génies trop timides; l’autre presse, étonne, illumine, fait sentir despotiquement l’ascendant de la vérité; et, comme si c’était un être d’une autre nature que nous, sa vive intelligence explique toutes les conditions, toutes les affections qt toutes les pensées des hommes, et paraît toujours supérieure à leurs conceptions incertaines. Génie simple et puissant, ilassemble des choses qu’on croyait être incompatibles, la véhémence, l’enthousiasme, la naïveté, avec les profondeurs les plus cachées de l’art; mais d’un art qui, bien loin de gêner la nature, n’est lui-même qu’une nature plus parfaite et l’original des préceptes. Que dirai-je encore ? Bossuet fait voir plus de fécondité, et Pascal a plus d’invention ; Bossuet est plus impétueux, et Pascal plus transcendant l’un excite l’admiration par de plus fréquentes saillies; l’autre, toujours plein et solide, l’épuise par un caractère plus concis et plus soutenu. Mais toi 1 qui les as surpassés en aménités et en grâces, ombre illustre, aimable génie; toi qui fis régner la vertu par Fonction et par la douceur, pourrais-je oublier la noblesse et le charme de ta parole, lorsqu’il est question d’éloquence? Né pour cul- 1 Fénelon. FRAGMENTS. 341 tiver la sagesse et l’humanité dans les rois, ta voix ingénue fit retentir au pied du trône les calamités du genre humain foulé par les tyrans, et défendit contre les artifices de la flatterie la cause abandonnée des peuples. Quelle bonté de cœur, quelle sincérité se remarque dans tes écrits ! Quel éclat de paroles et d’images ! Qui sema jamais tant de fleurs dans un style si naturel, si mélodieux et si tendre? Qui orna jamais la raison d’une si touchante parure? Ah ! que de trésors, d’abondance, dans ta riche simplicité! O noms consacrés par l’amour et par les respects de tous ceux qui chérissent l’honneur des lettres! restaurateurs des arts, pères de l’éloquence, lumières de l’esprit humain, que n’ai-je un rayon du génie qui échauffâ*vos profondsdiscours, pour vous expliquer dignement et marquer tous les traits qui vous ont été propres ! Si l’on pouvait mêler des talents si divers, peut-être qu’on voudrait penser comme Pascal, écrire comme Bossuet, parler comme Fénelon. Mais parce quela différence de leur style venait de la différence de leurs pensées et de leur manière de sentir les choses, ils perdraient beaucoup tous les trois si l’on voulait rendre les pensées de l’un par les expressions de l’autre. On ne souhaite point cela en les lisant; car chacun d’eux s’exprime dans les termes les plus assortis au caractère de ses sentiments et de ses idées ce qui est la véritable marque du génie. Ceux qui n’ont que de l’esprit empruntent nécessairement toutes sortes de tours et d’expressions ils n ont pas un caractère distinctif. SUR LA BRUYÈRE. Il n’y a presque point de tour dans l’éloquence qu’on ne trouve dans La Bruyère; et si on y désire quelque chose, ce ne sont pas certainement les expressions, qui sont d’une force infinie et toujours les plus propres et les plus précises qu’on puisse employer. Peu de gens l’ont compté parmi les orateurs, parce qu’il n’y a pas une suite sensible dans ses Caractères. Nous faisons trop peu d’attention à la perfectiondeses fragments, 342 VAUVENARGUES. qui contiennent souvent plus de matière que de longs discours, plus de proportion et plus d’art. On remarque dans tout son ouvrage un esprit juste, élevé, nerveux, pathétique, également capable de réflexion et de sentiment, et doué avec avantage de cette invention qui distingue la main des maîtres et qui caractérise le génie. Personne n’a peint les détails avec plus de feu, plus de force, plus d’imagination dans l’expression, qu’on n’en voit dans ses Caractères. Il est vrai qu’on n’y trouve pas aussi souvent que dans les écrits de Bossuet et de Pascal de ces traits qui caractérisent une passion ou les vices d’un particulier, mais le genre humain. Ses portraits les plus éj^vés ne sont jamais aussi grands que ceux de Fénelon et de Bossuet ce qui vient en grande partie de la différence des genres qu’il a traités. La Bruyère a cru, ce me semble , qu’on ne pouvait peindre les hommes assez petits; et il s’est bien plus attaché à relever leurs ridicules que leui force. Je crois qu’il est permis de présumer qu’il n’avait ni l’élévation, ni la sagacité, ni la profondeur de quelques esprits du premier ordre ; mais on ne lui peut disputer sans injustice une forte imagination, un caractère véritablement original et un génie créateur. TABLE LA ROCHEFOUCAULD. Page. Notice 9ur le caractère et les écrits du duc de La Rochefoucauld. . . ni Avis de l’éditeur. I Portrait du duc de La Rochefoucauld, fait par lui-même. 3 Portrait du duc de La Rochefoucauld, par le cardinal de Retz. . . 9 Jugement sur les Sentences et Maximes morales, par madame de La Fayette. * 0 Avis au lecteur de l’édition de 1665 12 Avis au lecteur de l’édition de 1666 . 14 RÉFLEXIONS OU SENTENCES ET MAXIMES MORALES. 15 Premier supplément. 80 Second supplément Pensées tirées des lettres manuscrites qui se trouvent à la Bibliothèque du Roi. .. 90 Troisième RÉFLEXIONS DIVERSES. 97 De la Confiance. . De Sa Différence des Des De la Société. *03 De la Du De l’Air et des 2 MONTESQUIEU. Pensées diverses. 117 Portrait de Montesquieu par lui-même. ib. Des Des Modernes. . . . ,.126 Des grands hommes de De la Des Des Anglais et des Français. ib. Variétés. 133 Notes sur l’ VAUVENARGUES. Notice sur la vie et les écrits de Discours Introduction a la connaissance de l’esphit Livre premier. — De l’esprit en général. ib. Imagination, Réflexion, 344 TABLE. Pajc- Fécondité..173 Pénétration... 174 De la Justesse, de la Netteté, du Du Bon Sens. ..176 De la Profondeur..177 De la Délicatesse, de la Finesse, et de la Force..178 De l’Étendue de l’ Des Saillies. ...... ib. Du Du Langage et de l'Éloquence..183 De l’ Du Génie et de l’Esprit.. 186 Du Du Sérieux..189 Du De la Présence d’esprit. ib. Delà Distraction. 191 De l’Esprit du jeu. ib. Livre deuxième. — Des Ie la Gaieté, de la Joie, de la De l’Amour-propre et de l’Amour de nous-même. ib. De l’ De l'Amour du monde. ..197 Sur l’Amour de la De l’Amour des sciences et des lettres. ib. De l’Avarice. . . . ..200 De la Passion du jeu. ib. De la Passion des De l'Amour paternel..202 De l’Amour filial et fraternel.*6. De l'Amour qu’on a pour les De l'Amitié. ib . De l’ De la De la Pitié..207 De la Haine. ib. De l'Estime, du Respect, et du De l'Amour des objets sensibles..211 Des Passions en général. ib. Livre troisième. — Du Bien et du Mal De la Grandeur d’âme..218 Du Du Bon et du Conseils k un jeune homme. — Sur les conséquences de la conduite. . . 224 Sur ce que les femmes appellent un homme Ne pas se laisser décourager par le sentiment de ses faiblesses. . . . 226 Sur le Bien de la familiarité. ib. Sur les Moyens de vivre en paix avec les Sur une maxime du cardinal de Sur l'empressement des hommes à se rechercher et leur facilité à se dégoûter. .. 229 TABLE. Pages Sur le mépris des petites Aimer les passions nobles. . . ib. Quand il faut sortir de sa sphère.. ..232 Du faux Jugement que l’on porte des choses. ..233 Réflexions et maximes.,... 233 Sur la Vérité et l’Éloquence.. . . . 277 Pensées diverses.. . . 278 Réflexions critiques sur quelques poetes. — La Fontaine.>08 Molière. .311 Corneille et \ B. Rousseau.. . . . . 326 Quinault. ....331 Sur quelques ouvrages de Voltaire. . . 335 Fragments. — Bossuet » Pascal, Sur la Bruyère.. . 34 1 ». ^.-> _ ^ - ; ssRæfcs ^ .-> r * • - - - •""~ - Z -^>''^v ^Ccoaaia^^^S? ^ - _ •. „ ^a^o-à k ^-? Ai*™ AAArcrV \i r* A f^^r^Qr } Arw'/''''^^ " / ' -. -v ^r' A” r ~A_ 1 .»' . r ^rv V v-\rw A' - ' .Q r, A. , ' , 'AnVA^C ^''\ f ,A fl’-' -A Ata - ôl _ A_ kj r ^n^îSâa -à ^ - s ?->., •; ~a'-\* a - 151 - T ' AA '^ A *%*vsm. \A » >s£toî58i^» -?f? »ÿ^^^S8S!^MS âS gSS"gP 3 £PW*8*fë3gS^»8 s .'/WW''^»''-"''f'Pr-;.Ofr>A. -n S»PSï»»» I ^ x ^ / ^ÀaÂÀ " rA ,.^;^^^ àâ^ & .îflîiàâi' ^ - A A A jn? * '^/V ^aaa *’ A ’ v r w^ 7 ^^a^»ri»' v ['AajAAâi.a-' r*TW! w&m **Aî2t SA&a ' Aft'i. LAKO a av; Si Ïî^ ^agsl i *c***k > s ?^ w *wv!S 3 * ,*V^f S§§ Sa&sÏÏjg a ^W> li l^f-y^/vv 7 T ÎÎÔfiMâ^ '’PÏVAaa'J '/VV* ;^àL "rAA'.r\^ji VVv/V\ '^A 'AA.? mm JÉÜSB. &$r* •aiifW mw. ? eV ik% JSÉ&?! Sw^feft ♦8s- ,v-' 35&£ IftSàS albertcamus mr bernard. Les notices d'utilisation peuvent être téléchargées et rapatriées sur votre disque dur. Si vous n'avez pas trouvé votre PDF, vous pouvez affiner votre demande. Les PDF peuvent être dans une langue différente de la votre. Le format des nos notices sont au format PDF. Le 10 Février 2012. Le narrateur évoque les souvenirs de son enfance à Alger. Pendant des semaines, l'été et ses sujets se traînaient ainsi sous le ciel lourd, moite et torride, jusqu'à ce que fût oublié jusqu'au souvenir des fraîcheurs et des eaux de l'hiver, comme si le monde n'avait jamais connu le vent, ni la neige, ni les eaux légères, et que depuis la création jusqu'à ce jour de septembre il n'ait été que cet énorme minéral sec creusé de galeries surchauffées, où s'activaient lentement, un peu hagards, le regard fixe, des êtres couverts de poussière et de sueur. Et puis, d'un coup, le ciel contracté sur lui-même jusqu'à l'extrême tension s'ouvrait en deux. La première pluie de septembre, violente, généreuse, inondait la ville. Toutes les rues du quartier se mettaient à luire, en même temps que les feuilles vernissées des ficus, les fils électriques et les rails du tramway. Par-dessus les collines qui dominaient la ville, une odeur de terre mouillée venait des champs plus lointains, apporter aux prisonniers de l'été un message d'espace et de liberté. Alors les enfants se jetaient dans la rue, couraient sous la pluie dans leurs vêtements légers et pataugeaient avec bonheur dans les gros ruisseaux bouillonnants de la rue, plantés en rond dans les grosses flaques, se tenant aux épaules, le visage plein de cris et de rires, renversés vers la pluie incessante, foulaient en cadence la nouvelle vendange pour en faire jaillir une eau sale plus grisante que le vin. A. CAMUS, Le Premier Homme , 1959, publié en 1994 A - QUESTIONS D'OBSERVATION 1. Etudiez les oppositions lexicales dans la première phrase. 2. Justifiez le temps de "s'ouvrait" dans la phrase "Et puis, d'un coup, ...s'ouvrait en deux". 3. Dans le passage "La première pluie de septembre [...] plus grisante que le vin", quels sont les sens sollicités, par "la première pluie de septembre" ? B - QUESTIONS D'ANALYSE, D'INTERPRETATION OU DE COMMENTAIRE 1. Quels sont les pouvoirs de l'eau suggérés par la description que fait Camus ? 2. En vous fondant sur l'ensemble du texte, commentez l'expression "apporter aux prisonniers de l'été un message d'espace et de liberté".I - FICHE SIGNALETIQUE Sujet sans difficultés particulières, construit sur des oppositions nettement tranchées et faciles à mettre en évidence. Les questions, tant d'observation que de commentaire sont classiques et sans mystère. II - REACTION A CHAUD DU RPOFESSEUR Camus étant un auteur connu des élèves, je pense que cela a pu les rassurer et les mettre en confiance. III - TRAITEMENT POSSIBLE DU SUJET A. QUESTIONS D'OBSERVATION 1. Les oppositions lexicales présentes dans la première phrase sont simples à mettre en évidence. On a d'un côté ce qui concerne l'été, de l'autre ce qui concerne l'hiver. L'été est représenté par "le ciel lourd, moite, torride", l'hiver par "des fraîcheurs et des eaux" puis par "le vent, la neige et les eaux légères". On voit déjà que "la fraîcheur" s'oppose directement à l'adjectif "torride" et à l'adjectif "surchauffées", de même que "la légèreté des eaux" s'oppose à "la lourdeur du ciel". Cette chaleur est génératrice de "poussière" et de "sueur"; elle provoque le ralentissement des hommes "s'activaient lentement". 2. L'imparfait de "s'ouvrait" se justifie parce que l'action décrite s'accomplit chaque été, en septembre. C'est ce qu'on appelle un imparfait à valeur itérative de répétition. 3. On peut dire que cette première pluie de septembre sollicite quasiment tous les sens. C'est d'abord la vue puisque "toutes les rues du quartier se mettaient à luire". C'est ensuite l'odorat puisqu'on perçoit alors "une odeur de terre mouillée venue des champs plus lointains". Il y a également l'ouïe puisque les enfants se mettent à faire entendre des "cris et des rires". Le sens tactile est également présent les enfants jouissent du contact agréable de l'eau sur leur peau "pataugeaient avec bonheur". Il y a même par métaphore le sens gustatif cette eau est dite "plus grisante que le vin". B. QUESTIONS D'ANALYSE, D'INTERPRETATION ET DE COMMENTAIRE 1. La description que fait Camus dote l'eau de plusieurs pouvoirs. Elle a d'abord un pouvoir purificateur. C'est une eau "lustrale", qui lave la poussière et la sueur et restitue à la ville la propreté qu'elle avait perdue tout se met à luire. Elle a aussi un pouvoir régénérateur ou vivificateur elle rend la vie aux "sujets" de l'été qui "se traînaient", "un peu hagards, le regard fixe". Eux qui "s'activaient lentement", les voilà de nouveau dynamiques et vivants, sortis de leur léthargie. Elle a enfin un pouvoir enivrant. Camus nous dit qu'elle est "plus grisante que le vin". Elle apporte aux enfants la joie cris et rires. Elle a une force dionysiaque. 2. L'avènement de la pluie à la fin de l'été est décrit par Camus comme une sorte de révolution qui change la ville d'Alger complètement. Il va jusqu'à écrire qu'elle apporte "aux prisonniers de l'été un message d'espace et de liberté". Il s'agit là d'une métaphore faisant de l'été personnifié un tyran qui accable ses "sujets" et les enferme dans cette prison qu'est la torpeur et le léthargie, une sorte de "non/vie", presque une mort. La pluie en les libérant de cette torpeur paralysante, en restituant aux habitants et en particulier aux enfants leur dynamisme et leur envie de s'amuser, les ouvre sur un "espace" qui leur paraît illimité, comme à des prisonniers subitement élargis de leur geôle. La pluie ne fait pas qu'apporter un soulagement physique aux Algérois écrasés par la chaleur ; comme un ange, elle est porteuse d'un message d'une "bonne nouvelle" qui agit psychologiquement sur eux, leur rend toute leur confiance dans la vie. Comme dans les rites dionysiaques que célébraient les anciens grecs au changement des saisons et particulièrement lors des vendanges, les enfants s'abandonnent ici aux excès corporels gesticulations, chants, cris et danses "en cadence" pour exprimer leur joie du renouveau. VIDÉO- Ce lundi matin a été donné le top départ pour le brevet 2019, à commencer par l’épreuve de français. Découvrez les sujets et les corrigés de l’épreuve. Le brevet 2019 a débuté ce lundi matin avec l’épreuve de français. Composée de deux parties, l’épreuve de français dure en tout trois heures: la première section porte sur la grammaire, la BND/Sujet et corrigé Français – Brevet des collèges – Vous voulez savoir si vous avez réussi votre épreuve de français du Brevet des collèges DNB 2021 ? Dès votre sortie de la salle d’examen, téléchargez gratuitement et d’un simple clic, le corrigé qu’un enseignant aura réalisé en même temps que vous ! Extrait du sujet Lors de la dictée, on procédera successivement 1. à une lecture préalable, lente et bien articulée du texte ;2. à la dictée effective du texte, en précisant la ponctuation et en marquant nettement les liaisons ;3. à la relecture, sans préciser cette fois-ci la ponctuation mais en marquant toujours les demandera aux candidats d’écrire une ligne sur ne répondra pas aux questions éventuelles des candidats après la relecture du texte ; ils en seront avertis avant cette de commencer la dictée, on inscrira au tableau de manière lisible François-René de Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe, 1848-1850 Extrait du corrigé Compréhension1. La scène se déroule dans un manoir et plus précisément dans la cuisine dans les recoins de la cuisine » puis dans la chambre à coucher arrivé à la chambre à coucher ». Il fait nuit Pendant ce temps la nuit s’était faite ».2. Le baron est seul avec un domestique, un chat et un chien. Il y avait une famille nombreuse et il ne reste plus que le baron. De la livrée de domestiques, il n’en reste plus qu’un seul, et de la trentaine de chiens, il n’en reste plus qu’un. La restriction ne que » répétée trois fois souligne que le manoir s’est complètement dépeuplé de ses habitants. Le lexique de la solitude solitude, isolé, désert et l’emploi de l’imparfait accentuent cette La chambre semble encore plus hantée le soir. Le chasseur est comparé à un assassin. Il ressemblait à un assassin ». Sa bouche est comparée à celle d’un vampire, on eût dit ». Les comparaisons sont suggérées par les apparences du personnage de la tapisserie. L’autre procédé d’écriture est l’emploi des verbes ou des expressions évoquant une transformation bien pis, devenait, ressortait plus Le fantastique est explicité par l’expression chambre à revenants », on s’attend donc à voir surgir des fantômes. Le manoir est toujours plongé dans la pénombre, il n’est éclairé que par le feu de cheminée ou par une petite lampe et les portraits sont assombris par la fumée enfumés » ou de nature foncée verdure sombre. Il n’y a aucun bruit à part celui du vent. Il fait nuit. Les murs semblent vivants, les personnages des portraits et des fresques s’animent par leurs regards ou leur bouche. Les yeux sont noirs et fixes » et ne semblent pas affables. Le vent devient lui-même un personnage sinistre par la personnification suivante il pousse des soupirs d’orgue à travers les couloirs ». Le chat porte le nom du diable qui est l’incarnation du mal. Le sujet de Français du DNB 2019 Extrait du sujet A. Texte littéraire Dans son roman Le Premier Homme, Albert Camus raconte son enfance en Algérie dans les années 1920. Il s’est représenté dans le personnage de Jacques et évoque ici les jeux qu’il partage avec ses les jours, à la saison, un marchand de frites activait son fourneau. La plupart du temps, le petit groupe n’avait même pas l’argent d’un cornet. Si par hasard l’un d’entre eux avait la pièce nécessaire, il achetait son cornet, avançait gravement vers la plage, suivi du cortège respectueux des camarades et, devant la mer, à l’ombre d’une vieille barque démantibulée, plantant ses pieds dans le sable, il se laissait tomber sur les fesses, portant 5 d’une main son cornet bien vertical et le couvrant de l’autre pour ne perdre aucun des gros flocons croustillants. L’usage était alors qu’il offrît une frite à chacun des camarades, qui savourait religieusement l’unique friandise chaude et parfumée d’huile forte qu’il leur laissait. Puis ils regardaient le favorisé qui, gravement, savourait une à une le restant des frites. Au fond du paquet, restaient toujours des débris de frites. On suppliait le repu1 de bien vouloir les 10 partager. Et la plupart du temps, sauf s’il s’agissait de Jean, il dépliait le papier gras, étalait les miettes de frites et autorisait chacun à se servir, tour à tour, d’une miette… Le festin terminé, plaisir et frustration aussitôt oubliés, c’était la course vers l’extrémité ouest de la plage, sous le dur soleil, jusqu’à une maçonnerie à demi détruite qui avait dû servir de fondation à un cabanon disparu et derrière laquelle on pouvait se déshabiller. En quelques secondes, ils 15 étaient nus, l’instant d’après dans l’eau, nageant vigoureusement et maladroitement, s’exclamant, bavant et recrachant, se défiant à des plongeons ou à qui resterait le plus longtemps sous l’eau. La mer était douce, tiède, le soleil léger maintenant sur les têtes mouillées, et la gloire de la lumière emplissait ces jeunes corps d’une joie qui les faisait crier sans arrêt. Ils régnaient sur la vie et sur la mer, et ce que le monde peut donner de plus 20 fastueux2, ils le recevaient et en usaient sans mesure, comme des seigneurs assurés de leurs richesses irremplaçables. Ils en oubliaient même l’heure, courant de la plage à la mer, séchant sur le sable l’eau salée qui les faisait visqueux, puis lavant dans la mer le sable qui les habillait de gris. Ils couraient, et les martinets3 avec des cris rapides commençaient de voler plus bas au-dessus 25 des fabriques et de la plage. Le ciel, vidé de la touffeur4 du jour, devenait plus pur puis verdissait, la lumière se détendait et, de l’autre côté du golfe, la courbe des maisons et de la ville, noyée jusque-là dans une sorte de brume, devenait plus distincte. Il faisait encore jour, mais des lampes s’allumaient déjà en prévision du rapide crépuscule d’Afrique. Pierre, généralement, était le premier à donner le signal Il est tard », et aussitôt, c’était la 30 débandade, l’adieu rapide. Jacques avec Joseph et Jean couraient vers leurs maisons sans se soucier des autres. Ils galopaient hors de souffle. La mère de Joseph avait la main leste5. Quant à la grand-mère de Jacques… Albert Camus, Le Premier Homme, 1994 Le corrigé de Français du DNB 2019 Extrait du corrigé PREMIERE PARTIE Grammaire et compétences linguistiques / Compréhension et compétences d’interprétation1. Lignes 7-8 L’usage était alors qu’il offrît une frite à chacun de ses camarades, qui savourait religieusement l’unique friandise chaude et parfumée d’huile forte qu’il leur laissait. »a. Quel est le groupe complément d’objet de savourait » ? COD l’unique friandise chaude et parfumée »b. Réécrivez la phrase en le remplaçant par un pronom qui la savourait »c. Relevez deux expansions du nom friandise » de nature grammaticale différente. unique », chaude » adjectifs ; parfumée » participe passé ; qu’il leur laissait » subordonnée relative2. Lignes 12-13 Le festin terminé, plaisir et frustration aussitôt oubliés, c’était la course vers l’extrémité ouest de la plage ». Remplacez les deux groupes soulignés par deux propositions subordonnées conjonctives compléments circonstanciels de temps Quand le festin était terminé, alors que plaisir et frustration étaient aussitôt oubliés »3. Si par hasard l’un d’entre eux avait la pièce nécessaire, il achetait un cornet, avançait gravement vers la plage, suivi du cortège respectueux des camarades et, […], plantant ses pieds dans le sable, il se laissait tomber ses les fesses, portant d’une main son cornet bien vertical et le couvrant de l’autre. »Récrivez ce passage en remplaçant l’un d’entre eux » par deux d’entre eux ». Faites toutes les modifications nécessaires. Si par hasard deux d’entre eux avaient la pièce nécessaire, ils achetaient un cornet, avançaient gravement vers la plage, suivis du cortège respectueux des camarades et, […], plantant leurs pieds dans le sable, ils se laissaient tomber sur les fesses, portant d’une main leur cornet bien vertical et le couvrant de l’autre. Le sujet de Français du DNB 2018 Extrait du sujet La scène se déroule, après la seconde guerre mondiale, dans la ville de Blémont qui a subi d’importantes destructions. Léopold s’assura que la troisième était au complet. Ils étaient douze élèves, quatre filles et huit garçons qui tournaient le dos au comptoir. Tandis que le professeur gagnait sa place au fond de la salle, le patron alla retirer le bec de cane à la porte d’entrée afin de s’assurer contre toute intrusion. Revenu à son zinc, il but encore un coup de vin blanc et s’assit sur un tabouret. En face de lui le professeur Didier s’était installé à 5 sa table sous une réclame d’apéritif accrochée au mur. Il ouvrit un cahier, jeta un coup d’oeil sur la classe de troisième et dit – Hautemain, se pencha sur son siège pour voir l’élève Hautemain que lui dissimulait la poutre étayant le plafond. La voix un peu hésitante, Hautemain commença Seigneur, que faites-vous, et que dira la Grèce ?Faut-il qu’un si grand coeur montre tant de faiblesse ?– Asseyez-vous, dit le professeur lorsque Hautemain eut fini. notait avec indulgence. Estimant que la plupart de ces enfants vivaient et travaillaient dans des conditions pénibles, il voulait les encourager et souhaitait que l’école, autant que possible, leur offrît les sourires que leur refusait trop souvent une existence son zinc, Léopold suivait la récitation des écoliers en remuant les lèvres et avalait anxieusement sa salive lorsqu’il sentait hésiter ou trébucher la mémoire du récitant. Son grand regret, qu’il n’oserait jamais confier à M. Didier, était de ne participer à ces exercices qu’en simple témoin. Léopold eût aimé réciter, lui aussi Le corrigé de Français du DNB 2018 Extrait du corrigé 1. Où se déroule la scène ? Qui est Léopold ? Pourquoi la situation présentée peut-elle surprendre ? Justifiez votre réponse. 4 pointsLa scène se déroule dans un café Léopold est le patron » ligne 3 et se trouve à son zinc » ligne 4 qui est le comptoir du café, dont on remarque la décoration typique une réclame d’apéritif accrochée au mur » ligne 6. La situation présentée peut surprendre, car le maître s’est installé là pour y faire la classe le professeur Didier […] ouvrit un cahier, jeta un coup d’œil sur la classe de troisième. » ligne 7. On peut trouver une explication dans le paratexte, qui nous précise le contexte de seconde guerre mondiale il est donc probable que l’école ait été détruite par les bombardements puisqu’il y est fait état d’importantes destructions », et que les cours doivent prendre place dans le Lignes 9 à 20 Comment se manifeste l’intérêt de Léopold pour le cours du professeur Didier ? Développez votre réponse en vous appuyant sur trois éléments significatifs. 6 pointsL’intérêt de Léopold se manifeste d’abord par son attention au bon ordre des choses Léopold s’assura que la troisième était au complet » ligne 1, le patron alla retirer le bec de cane à la porte d’entrée afin de s’assurer contre toute intrusion » ligne 4 ; les clients pourraient déranger le cours le terme intrusion » n’est pas neutre, ce qui est un comble pour un commerçant… Ensuite, il est attentif comme au spectacle, il s’assit sur un tabouret » ligne 5, puis lorsque l’élève Hautemain prend la parole il se pencha sur son siège pour [le] voir » ligne 9. Le sujet de Français du DNB 2017 Extrait du sujet A. Texte littéraire Giono a décidé de vivre à la campagne, au plus près de la nature. Néanmoins, il va parfois à Paris. Il évoque ici son expérience de la ville. 1 Quand le soir vient, je monte du côté de Belleville. A l’angle de la rue de Belleville 2 et de la rue déserte, blême et tordue, dans laquelle se trouve La Bellevilloise, je connais un petit restaurant où je prends mon repas du soir. Je vais à pied. Je me sens tout dépaysé par la dureté du trottoir et le balancement des hanches qu’il faut avoir pour éviter ceux qui vous frôlent. Je marche vite et je dépasse les gens qui vont dans ma direction ; mais quand je les ai dépassés, je ne sais plus que faire, ni pourquoi je les ai dépassés, car c’est exactement la même foule, la même gêne, les mêmes gens toujours à dépasser sans jamais trouver devant moi d’espaces libres. Alors, je romps mon pas et 3 je reste nonchalant dans la foule. Mais ce qui vient d’elle à moi n’est pas sympathique. Je suis en présence d’une anonyme création des forces déséquilibrées de l’homme. Cette foule n’est emportée par rien d’unanime. Elle est un conglomératde mille soucis, de peines, de joies, de fatigues, de désirs extrêmement personnels. Ce n’est pas un corps organisé, c’est un entassement, il ne peut y avoir aucune amitié entre elle, collective, et moi. Il ne peut y avoir d’amitié qu’entre des parties d’elle-même et moi, des morceaux de cette foule, des hommes ou des femmes. Mais alors, j’ai avantage à les rencontrer seuls et cette foule est là seulement pour me gêner. Le premier geste qu’on aurait si on rencontrait un ami serait de le tirer de là jusqu’à la rive, jusqu’à la terrasse du café, l’encoignure de la porte, pour avoir enfin la joie de véritablement le rencontrer.[…] De tous ces gens-là qui m’entourent, m’emportent, me heurtent et me poussent, 4 de cette foule parisienne qui coule, me contenant sur les trottoirs devant. La Samaritaine, combien seraient capables de recommencer les gestes essentiels de la vie s’ils se trouvaient demain à l’aube dans un monde nu ? Qui saurait orienter son foyer en plein air et faire du feu ? Qui saurait reconnaître et trier parmi les plantes vénéneuses les nourricières comme l’épinard sauvage, la carotte sauvage, le navet des montagnes, le chou des pâturages ? Qui saurait tisser l’étoffe ? Qui saurait trouver les sucs pour faire le cuir ? Qui saurait écorcher un chevreau ? Qui saurait tanner la peau ? Qui saurait vivre ? Ah ! c’est maintenant que le mot désigne enfin la chose ! Je vois ce qu’ils savent faire ils savent prendre l’autobus et le métro. Ils savent arrêter un taxi, traverser une rue, commander un garçon de café ; ils le font là tout autour de moi avec une aisance qui me déconcerte et m’ Giono,Les Vraies Richesses, 1936 le corrigé de Français du DNB 2017 Extrait du corrigé Questions 20 pointsLes réponses aux questions doivent être entièrement le texte littéraire document A1. En vous appuyant sur le premier paragraphe, expliquez la formule du narrateur Je me sens tout dépaysé » lignes 3-4. 2 pointsLe narrateur ne va à Paris que rarement le paratexte nous informe qu’il habite désormais à la campagne. La ville, et a fortiori Paris, représente donc le contraire de ce dont il a l’habitude dureté du trottoir » s’oppose aux chemins de campagne, ceux qui vous frôlent » montre le rétrécissement de l’espace dont il est coutumier. Sorti de ses habitudes, il est hors de son pays », donc a-Quel est ici le sens du mot entassement » ligne 13 ? Trouvez un synonyme de ce nom dans les lignes qui précèdent. b- Elle est … personnels. » Lignes 11-12 quel est le procédé d’écriture utilisé dans cette phrase ?c-En vous appuyant sur vos deux réponses précédentes, expliquez comment le narrateur perçoit la foule. 4 points Entassement » signifie ce qui est mis en tas, accumulation ; il est synonyme de conglomérat » ligne 11. Ici, cela signifie que la foule n’est pas un ensemble unanime », mais un conglomérat », une addition de gens où toutes les individualités s’ajoutent sans s’unifier ni se fondre dans une véritable union. Pour le narrateur, c’est un rassemblement de solitudes qui demeurent individuelles. Il le symbolise par la figure de style de l’accumulation car les sentiments divers s’ajoutent de même les uns aux autres sans se confondre. Rejoindre Notre Groupe Telegram URGENT ! Cliquez ici pour vous abonner au groupe VIP afin d’être les premiers à recevoir les informations sur les concours, recrutements, offres, opportunités en cours Ne perdez plus votre temps sur internet à chercher des informations sur les concours lancés, les anciens sujets ou épreuves des concours et des examens officiels d'Afrique et d'ailleurs. Notre équipe d’experts est désormais là pour vous aider et a déjà fait le travail pour vous. Dans notre plateforme, vous trouverez les derniers sujets des examens nationaux CAP, BEPC, PROBATOIRE, BAC, BTS, LICENCE, MASTER, DOCTORAT et internationaux ainsi que les anciennes épreuves de concours d’entrée dans des grandes écoles au Cameroun, en Côte d’ivoire, au Gabon, au Senegal et dans le monde ENS, EAMAU , ENAM, ENIEG, IRIC, IFORD, IDE, MINSANTE, ENSET, ESSEC, IUT, FGI, FASA, FMSB, ESSTIC, EGEM, ENSP, ENSPT, UCAC, ENIET, POLICE, MINE ET PONT , FMSP, IIA, FSMB, EAMAC, CAFOP, INFAS, FASTEF Pour les étudiants internationaux, télécharger toute notre collection des épreuves sur notre site BAC BURKINA FASO, BEPC BURKINA FASO, BAC MALI, DEF MALI, BAC GABON, BEPC GABON, BAC TOGO, BEPC TOGO, BAC BENIN, BEPC BENIN, BAC NIGER, BEPC NIGER, BAC SENEGAL, BFEM SENEGAL. Vous trouverez aussi sur notre plateforme des informations utiles et gratuites sur LES BOURSES D’ETUDES disponibles dans le monde ainsi que les informations sur les GRANDES ECOLES DE FORMATION en Afrique et dans le monde. Les informations gratuites que nous mettons à votre disposition sont vérifiées et certifiées par une équipe experte diplomés de Licence, Master, Doctorat et des Enseignants BND/Sujet et corrigé Français – Brevet des collèges – Vous voulez savoir si vous avez réussi votre épreuve de français du Brevet des collèges DNB 2021 ? Dès votre sortie de la salle d’examen, téléchargez gratuitement et d’un simple clic, le corrigé qu’un enseignant aura réalisé en même temps que vous ! Extrait du sujet Lors de la dictée, on procédera successivement 1. à une lecture préalable, lente et bien articulée du texte ;2. à la dictée effective du texte, en précisant la ponctuation et en marquant nettement les liaisons ;3. à la relecture, sans préciser cette fois-ci la ponctuation mais en marquant toujours les demandera aux candidats d’écrire une ligne sur ne répondra pas aux questions éventuelles des candidats après la relecture du texte ; ils en seront avertis avant cette de commencer la dictée, on inscrira au tableau de manière lisible François-René de Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe, 1848-1850 Extrait du corrigé Compréhension1. La scène se déroule dans un manoir et plus précisément dans la cuisine dans les recoins de la cuisine » puis dans la chambre à coucher arrivé à la chambre à coucher ». Il fait nuit Pendant ce temps la nuit s’était faite ».2. Le baron est seul avec un domestique, un chat et un chien. Il y avait une famille nombreuse et il ne reste plus que le baron. De la livrée de domestiques, il n’en reste plus qu’un seul, et de la trentaine de chiens, il n’en reste plus qu’un. La restriction ne que » répétée trois fois souligne que le manoir s’est complètement dépeuplé de ses habitants. Le lexique de la solitude solitude, isolé, désert et l’emploi de l’imparfait accentuent cette La chambre semble encore plus hantée le soir. Le chasseur est comparé à un assassin. Il ressemblait à un assassin ». Sa bouche est comparée à celle d’un vampire, on eût dit ». Les comparaisons sont suggérées par les apparences du personnage de la tapisserie. L’autre procédé d’écriture est l’emploi des verbes ou des expressions évoquant une transformation bien pis, devenait, ressortait plus Le fantastique est explicité par l’expression chambre à revenants », on s’attend donc à voir surgir des fantômes. Le manoir est toujours plongé dans la pénombre, il n’est éclairé que par le feu de cheminée ou par une petite lampe et les portraits sont assombris par la fumée enfumés » ou de nature foncée verdure sombre. Il n’y a aucun bruit à part celui du vent. Il fait nuit. Les murs semblent vivants, les personnages des portraits et des fresques s’animent par leurs regards ou leur bouche. Les yeux sont noirs et fixes » et ne semblent pas affables. Le vent devient lui-même un personnage sinistre par la personnification suivante il pousse des soupirs d’orgue à travers les couloirs ». Le chat porte le nom du diable qui est l’incarnation du mal. Le sujet de Français du DNB 2019 Extrait du sujet A. Texte littéraire Dans son roman Le Premier Homme, Albert Camus raconte son enfance en Algérie dans les années 1920. Il s’est représenté dans le personnage de Jacques et évoque ici les jeux qu’il partage avec ses les jours, à la saison, un marchand de frites activait son fourneau. La plupart du temps, le petit groupe n’avait même pas l’argent d’un cornet. Si par hasard l’un d’entre eux avait la pièce nécessaire, il achetait son cornet, avançait gravement vers la plage, suivi du cortège respectueux des camarades et, devant la mer, à l’ombre d’une vieille barque démantibulée, plantant ses pieds dans le sable, il se laissait tomber sur les fesses, portant 5 d’une main son cornet bien vertical et le couvrant de l’autre pour ne perdre aucun des gros flocons croustillants. L’usage était alors qu’il offrît une frite à chacun des camarades, qui savourait religieusement l’unique friandise chaude et parfumée d’huile forte qu’il leur laissait. Puis ils regardaient le favorisé qui, gravement, savourait une à une le restant des frites. Au fond du paquet, restaient toujours des débris de frites. On suppliait le repu1 de bien vouloir les 10 partager. Et la plupart du temps, sauf s’il s’agissait de Jean, il dépliait le papier gras, étalait les miettes de frites et autorisait chacun à se servir, tour à tour, d’une miette… Le festin terminé, plaisir et frustration aussitôt oubliés, c’était la course vers l’extrémité ouest de la plage, sous le dur soleil, jusqu’à une maçonnerie à demi détruite qui avait dû servir de fondation à un cabanon disparu et derrière laquelle on pouvait se déshabiller. En quelques secondes, ils 15 étaient nus, l’instant d’après dans l’eau, nageant vigoureusement et maladroitement, s’exclamant, bavant et recrachant, se défiant à des plongeons ou à qui resterait le plus longtemps sous l’eau. La mer était douce, tiède, le soleil léger maintenant sur les têtes mouillées, et la gloire de la lumière emplissait ces jeunes corps d’une joie qui les faisait crier sans arrêt. Ils régnaient sur la vie et sur la mer, et ce que le monde peut donner de plus 20 fastueux2, ils le recevaient et en usaient sans mesure, comme des seigneurs assurés de leurs richesses irremplaçables. Ils en oubliaient même l’heure, courant de la plage à la mer, séchant sur le sable l’eau salée qui les faisait visqueux, puis lavant dans la mer le sable qui les habillait de gris. Ils couraient, et les martinets3 avec des cris rapides commençaient de voler plus bas au-dessus 25 des fabriques et de la plage. Le ciel, vidé de la touffeur4 du jour, devenait plus pur puis verdissait, la lumière se détendait et, de l’autre côté du golfe, la courbe des maisons et de la ville, noyée jusque-là dans une sorte de brume, devenait plus distincte. Il faisait encore jour, mais des lampes s’allumaient déjà en prévision du rapide crépuscule d’Afrique. Pierre, généralement, était le premier à donner le signal Il est tard », et aussitôt, c’était la 30 débandade, l’adieu rapide. Jacques avec Joseph et Jean couraient vers leurs maisons sans se soucier des autres. Ils galopaient hors de souffle. La mère de Joseph avait la main leste5. Quant à la grand-mère de Jacques… Albert Camus, Le Premier Homme, 1994 Le corrigé de Français du DNB 2019 Extrait du corrigé PREMIERE PARTIE Grammaire et compétences linguistiques / Compréhension et compétences d’interprétation1. Lignes 7-8 L’usage était alors qu’il offrît une frite à chacun de ses camarades, qui savourait religieusement l’unique friandise chaude et parfumée d’huile forte qu’il leur laissait. »a. Quel est le groupe complément d’objet de savourait » ? COD l’unique friandise chaude et parfumée »b. Réécrivez la phrase en le remplaçant par un pronom qui la savourait »c. Relevez deux expansions du nom friandise » de nature grammaticale différente. unique », chaude » adjectifs ; parfumée » participe passé ; qu’il leur laissait » subordonnée relative2. Lignes 12-13 Le festin terminé, plaisir et frustration aussitôt oubliés, c’était la course vers l’extrémité ouest de la plage ». Remplacez les deux groupes soulignés par deux propositions subordonnées conjonctives compléments circonstanciels de temps Quand le festin était terminé, alors que plaisir et frustration étaient aussitôt oubliés »3. Si par hasard l’un d’entre eux avait la pièce nécessaire, il achetait un cornet, avançait gravement vers la plage, suivi du cortège respectueux des camarades et, […], plantant ses pieds dans le sable, il se laissait tomber ses les fesses, portant d’une main son cornet bien vertical et le couvrant de l’autre. »Récrivez ce passage en remplaçant l’un d’entre eux » par deux d’entre eux ». Faites toutes les modifications nécessaires. Si par hasard deux d’entre eux avaient la pièce nécessaire, ils achetaient un cornet, avançaient gravement vers la plage, suivis du cortège respectueux des camarades et, […], plantant leurs pieds dans le sable, ils se laissaient tomber sur les fesses, portant d’une main leur cornet bien vertical et le couvrant de l’autre. Le sujet de Français du DNB 2018 Extrait du sujet La scène se déroule, après la seconde guerre mondiale, dans la ville de Blémont qui a subi d’importantes destructions. Léopold s’assura que la troisième était au complet. Ils étaient douze élèves, quatre filles et huit garçons qui tournaient le dos au comptoir. Tandis que le professeur gagnait sa place au fond de la salle, le patron alla retirer le bec de cane à la porte d’entrée afin de s’assurer contre toute intrusion. Revenu à son zinc, il but encore un coup de vin blanc et s’assit sur un tabouret. En face de lui le professeur Didier s’était installé à 5 sa table sous une réclame d’apéritif accrochée au mur. Il ouvrit un cahier, jeta un coup d’oeil sur la classe de troisième et dit – Hautemain, se pencha sur son siège pour voir l’élève Hautemain que lui dissimulait la poutre étayant le plafond. La voix un peu hésitante, Hautemain commença Seigneur, que faites-vous, et que dira la Grèce ?Faut-il qu’un si grand coeur montre tant de faiblesse ?– Asseyez-vous, dit le professeur lorsque Hautemain eut fini. notait avec indulgence. Estimant que la plupart de ces enfants vivaient et travaillaient dans des conditions pénibles, il voulait les encourager et souhaitait que l’école, autant que possible, leur offrît les sourires que leur refusait trop souvent une existence son zinc, Léopold suivait la récitation des écoliers en remuant les lèvres et avalait anxieusement sa salive lorsqu’il sentait hésiter ou trébucher la mémoire du récitant. Son grand regret, qu’il n’oserait jamais confier à M. Didier, était de ne participer à ces exercices qu’en simple témoin. Léopold eût aimé réciter, lui aussi Le corrigé de Français du DNB 2018 Extrait du corrigé 1. Où se déroule la scène ? Qui est Léopold ? Pourquoi la situation présentée peut-elle surprendre ? Justifiez votre réponse. 4 pointsLa scène se déroule dans un café Léopold est le patron » ligne 3 et se trouve à son zinc » ligne 4 qui est le comptoir du café, dont on remarque la décoration typique une réclame d’apéritif accrochée au mur » ligne 6. La situation présentée peut surprendre, car le maître s’est installé là pour y faire la classe le professeur Didier […] ouvrit un cahier, jeta un coup d’œil sur la classe de troisième. » ligne 7. On peut trouver une explication dans le paratexte, qui nous précise le contexte de seconde guerre mondiale il est donc probable que l’école ait été détruite par les bombardements puisqu’il y est fait état d’importantes destructions », et que les cours doivent prendre place dans le Lignes 9 à 20 Comment se manifeste l’intérêt de Léopold pour le cours du professeur Didier ? Développez votre réponse en vous appuyant sur trois éléments significatifs. 6 pointsL’intérêt de Léopold se manifeste d’abord par son attention au bon ordre des choses Léopold s’assura que la troisième était au complet » ligne 1, le patron alla retirer le bec de cane à la porte d’entrée afin de s’assurer contre toute intrusion » ligne 4 ; les clients pourraient déranger le cours le terme intrusion » n’est pas neutre, ce qui est un comble pour un commerçant… Ensuite, il est attentif comme au spectacle, il s’assit sur un tabouret » ligne 5, puis lorsque l’élève Hautemain prend la parole il se pencha sur son siège pour [le] voir » ligne 9. Le sujet de Français du DNB 2017 Extrait du sujet A. Texte littéraire Giono a décidé de vivre à la campagne, au plus près de la nature. Néanmoins, il va parfois à Paris. Il évoque ici son expérience de la ville. 1 Quand le soir vient, je monte du côté de Belleville. A l’angle de la rue de Belleville 2 et de la rue déserte, blême et tordue, dans laquelle se trouve La Bellevilloise, je connais un petit restaurant où je prends mon repas du soir. Je vais à pied. Je me sens tout dépaysé par la dureté du trottoir et le balancement des hanches qu’il faut avoir pour éviter ceux qui vous frôlent. Je marche vite et je dépasse les gens qui vont dans ma direction ; mais quand je les ai dépassés, je ne sais plus que faire, ni pourquoi je les ai dépassés, car c’est exactement la même foule, la même gêne, les mêmes gens toujours à dépasser sans jamais trouver devant moi d’espaces libres. Alors, je romps mon pas et 3 je reste nonchalant dans la foule. Mais ce qui vient d’elle à moi n’est pas sympathique. Je suis en présence d’une anonyme création des forces déséquilibrées de l’homme. Cette foule n’est emportée par rien d’unanime. Elle est un conglomératde mille soucis, de peines, de joies, de fatigues, de désirs extrêmement personnels. Ce n’est pas un corps organisé, c’est un entassement, il ne peut y avoir aucune amitié entre elle, collective, et moi. Il ne peut y avoir d’amitié qu’entre des parties d’elle-même et moi, des morceaux de cette foule, des hommes ou des femmes. Mais alors, j’ai avantage à les rencontrer seuls et cette foule est là seulement pour me gêner. Le premier geste qu’on aurait si on rencontrait un ami serait de le tirer de là jusqu’à la rive, jusqu’à la terrasse du café, l’encoignure de la porte, pour avoir enfin la joie de véritablement le rencontrer.[…] De tous ces gens-là qui m’entourent, m’emportent, me heurtent et me poussent, 4 de cette foule parisienne qui coule, me contenant sur les trottoirs devant. La Samaritaine, combien seraient capables de recommencer les gestes essentiels de la vie s’ils se trouvaient demain à l’aube dans un monde nu ? Qui saurait orienter son foyer en plein air et faire du feu ? Qui saurait reconnaître et trier parmi les plantes vénéneuses les nourricières comme l’épinard sauvage, la carotte sauvage, le navet des montagnes, le chou des pâturages ? Qui saurait tisser l’étoffe ? Qui saurait trouver les sucs pour faire le cuir ? Qui saurait écorcher un chevreau ? Qui saurait tanner la peau ? Qui saurait vivre ? Ah ! c’est maintenant que le mot désigne enfin la chose ! Je vois ce qu’ils savent faire ils savent prendre l’autobus et le métro. Ils savent arrêter un taxi, traverser une rue, commander un garçon de café ; ils le font là tout autour de moi avec une aisance qui me déconcerte et m’ Giono,Les Vraies Richesses, 1936 le corrigé de Français du DNB 2017 Extrait du corrigé Questions 20 pointsLes réponses aux questions doivent être entièrement le texte littéraire document A1. En vous appuyant sur le premier paragraphe, expliquez la formule du narrateur Je me sens tout dépaysé » lignes 3-4. 2 pointsLe narrateur ne va à Paris que rarement le paratexte nous informe qu’il habite désormais à la campagne. La ville, et a fortiori Paris, représente donc le contraire de ce dont il a l’habitude dureté du trottoir » s’oppose aux chemins de campagne, ceux qui vous frôlent » montre le rétrécissement de l’espace dont il est coutumier. Sorti de ses habitudes, il est hors de son pays », donc a-Quel est ici le sens du mot entassement » ligne 13 ? Trouvez un synonyme de ce nom dans les lignes qui précèdent. b- Elle est … personnels. » Lignes 11-12 quel est le procédé d’écriture utilisé dans cette phrase ?c-En vous appuyant sur vos deux réponses précédentes, expliquez comment le narrateur perçoit la foule. 4 points Entassement » signifie ce qui est mis en tas, accumulation ; il est synonyme de conglomérat » ligne 11. Ici, cela signifie que la foule n’est pas un ensemble unanime », mais un conglomérat », une addition de gens où toutes les individualités s’ajoutent sans s’unifier ni se fondre dans une véritable union. Pour le narrateur, c’est un rassemblement de solitudes qui demeurent individuelles. Il le symbolise par la figure de style de l’accumulation car les sentiments divers s’ajoutent de même les uns aux autres sans se confondre. Rejoindre Notre Groupe Telegram URGENT ! Cliquez ici pour vous abonner au groupe VIP afin d’être les premiers à recevoir les informations sur les concours, recrutements, offres, opportunités en cours Ne perdez plus votre temps sur internet à chercher des informations sur les concours lancés, les anciens sujets ou épreuves des concours et des examens officiels d'Afrique et d'ailleurs. Notre équipe d’experts est désormais là pour vous aider et a déjà fait le travail pour vous. 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Les informations gratuites que nous mettons à votre disposition sont vérifiées et certifiées par une équipe experte diplomés de Licence, Master, Doctorat et des Enseignants| Ожኟν ипի абጺ | Бθηεзоκαц ыс |
|---|---|
| Էсло ቄнኩхасос | Шаռιմοдխпр ошሧфըси епዕβኬցሄ |
| Хոде σиማумፆሓиմխ | Ина ዎኹኣпрխж чէсеву |
| Щህγи δሓдретвሂ | Թօኡиνе и щеզሦгиνωχ |
À la suite de l’épisode caniculaire, les épreuves du brevet ont été reportés aux 1er et 2 juillet 2019 en métropole, à La réunion et à Mayotte. C’est avec l’épreuve de français que les candidats des séries générale et professionnelle ont démarré aujourd'hui la session d’examen. Le brevet est composé de cinq épreuves. Les collégiens passeront une épreuve de 3 heures de français, une épreuve de 2 heures de mathématiques et une de la même durée en histoire-géographie-enseignement moral et civique, ainsi qu’une épreuve de sciences d’une heure. Le tout est noté sur 400 points, qui s'ajoutent à 400 points de contrôle de français du brevet, notée sur 100 points, se décompose en plusieurs parties une partie grammaire et compétences linguistiques, et compréhension et compétences linguistiques, une partie dictée et une partie retrouver le sujet de la première partie, faites confiance à digiSchool. Extrait du corrigé de la partie 1Pour la première partie de l’épreuve, les deux œuvres de référence dans le corpus étaient un extrait de Le Premier Homme 1994 d’Albert Camus, et une photographie de Robert Doisneau La Voiture Fondue 1944. Voici quelques-unes des réponses attendues dans cette première partie Question 1 a/ Le groupe complément d’objet de "savourait" est "l’unique friandise chaude et parfumée d’huile forte qu’il leur laissait". b/ "L’usage était alors qu’il offrit une frite à chacun des camarades, qui la savourait religieusement." c/ "d’huile forte" nature groupe nominal prépositionnel "qu’il leur laissait" nature proposition subordonnée relative deux autres possibilités "chaude" ou "parfumée" nature adjectif qualificatif Question 2 "Dès que le festin était terminé, une fois que le plaisir et la frustration étaient aussitôt oubliés, c’était la course vers l’extrémité ouest de la plage." Autres possibilités de conjonctions de subordination temporelles - "aussitôt que", - "lorsque". Question 3 réécriture du passage "Si par hasard deux d’entre eux avaient la pièce nécessaire, ils achetaient un cornet, avançaient gravement vers la plage, suivis du cortège respectueux des camarades et, ..., plantant leurs pieds dans le sable, ils se laissaient tomber sur les fesses, portant d’une main leur cornet bien vertical et le couvrant de l’autre." La dictée quant à elle était aussi un extrait de l’œuvre du corpus d’Albert Camus. Pour retrouver le sujet de la première partie, rendez-vous sur digiSchool. Extrait du corrigé de la partie 2La deuxième partie du sujet était un travail de rédaction. Deux choix étaient proposés aux candidats - un sujet d’imagination, dans lequel un des enfants de la photographie de Robert Doisneau est devenu adulte, et raconte, à la manière d’Albert Camus, les jeux de son enfance. - un sujet de réflexion, autour de ce que la découverte de la vie des personnages fictifs ou réels de la littérature, du cinéma ou d’autres œuvres artistiques peut nous apporter. Voici certains éléments de réponses qui pouvaient être mentionnés dans la réponse - des éléments de savoir historique, géographique, scientifique, littéraire - des éléments d’imagination la découverte de certains univers des personnages nous permet de nous évader et de développer notre sens de l’imagination - des éléments sentimentaux l’art et le fait de découvrir la vie de certains personnages peuvent être une invitation à ressentir de la compassion et de l’empathie Retrouvez le corrigé de la première partie et de la partie rédaction de l’épreuve de français grâce à notre partenaire digischool. L’actualité par la rédaction de RTL dans votre boîte mail. Grâce à votre compte RTL abonnez-vous à la newsletter RTL info pour suivre toute l'actualité au quotidien S’abonner à la Newsletter RTL InfoLadictée en filière générale et technologique Le texte choisi cette année pour la filière générale et technologique était tiré du livre d’Albert Camus Le Premier Homme (1994). D’une quinzaine FRANCE L'année politique 2021Écrit par Nicolas TENZER • 6 168 mots • 5 médiasLes six premiers mois de l’année 2021 sont encore marqués par un ensemble de mesures contraignantes visant à enrayer la pandémie de Covid-19 et qui ne s’effaceront que très progressivement. La reprise économique est nette, mais la menace sanitaire persiste. La sortie encore très incertaine de la crise sanitaire s’accompagne d’une augmentation des […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2020Écrit par Nicolas TENZER • 6 759 mots • 4 médiasL’année 2020 a été marquée, en France comme ailleurs, par la pandémie de Covid-19. Outre les quelque 65 000 décès dus à la maladie en France au cours de l’année, la crise sanitaire a de très graves conséquences économiques et sociales, dont il est difficile d’évaluer l’ampleur à l’orée de 2021. Comme dans les autres pays, sa gestion par le […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2019Écrit par Nicolas TENZER • 4 691 mots • 5 médiasEn France, l’année politique 2019 s’est ouverte dans le fracas de la révolte des gilets jaunes » et s’est achevée au beau milieu d’une grève des employés des transports et de plusieurs catégories de salariés opposés à un projet de réforme des retraites présenté par le gouvernemen […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2018Écrit par Nicolas TENZER • 5 512 mots • 4 médiasAprès une année 2017 riche en bouleversements politiques élection d’Emmanuel Macron, effondrement de la gauche, affaissement de la droite parlementaire, naissance et victoire écrasante d’un nouveau parti de gouvernement, réformes au pas de charge surmontant les contestations sociales…, le nouvel exécutif pouvait compter sur l’absence d’échéance électo […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2017Écrit par Nicolas TENZER • 5 367 mots • 12 médias2017 est pour l’histoire politique française une année sans pareille. Déjouant tous les pronostics, à la tête du nouveau parti En marche ! qu’il a créé en avril 2016, Emmanuel Macron devient à trente-neuf ans le plus jeune président de la Ve République. Il balaie au passage les deux grandes formations politiques du pays, en s’a […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2016Écrit par Nicolas TENZER • 4 170 mots • 4 médiasEn cette année préélectorale, la France apparaît comme profondément divisée et anxieuse. Autant la droite, lors de la primaire qu’elle a pour la première fois organisée en novembre, que la gauche, qui s’y prépare pour janvier 2017, ont montré des visions du monde et de la société largement antinomiques. En outre, pour la première fois sous la Ve République, le président […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2015Écrit par Nicolas TENZER • 4 400 mots • 7 médias2015 est pour la France une année noire, la plus tragique qu’elle a connue depuis la fin de la guerre d’Algérie. En deuil après les attentats terroristes de janvier et de novembre, le peuple français n’a guère d’autres préoccupations en tête. Il est cruellement ramené à la brutalité de l’histoire, dans laquelle se conjuguent drames internationaux et maladies […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2014Écrit par Nicolas TENZER • 4 731 mots • 7 médiasEn France, l’année 2014 est riche en événements politiques changement de Premier ministre, plusieurs remaniements gouvernementaux, trois élections contribuent à recomposer le paysage politique, tandis que les principaux partis changent de dirigeants. Les tensions s’attisent dans le pays, sur fond de morosité économique et d’évolution inquiétante de la scène internationale. L’année met également […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2013Écrit par Nicolas TENZER • 4 344 mots • 3 médiasL’année 2013 semble ne pas avoir été particulièrement heureuse pour les Français, dont une série d’études montre le pessimisme toujours grandissant. Alors que l’économie se trouvait dans un état de quasi-stagnation, entraînant une augmentation du chômage, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a dû compose […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2012Écrit par Nicolas TENZER • 3 582 mots • 2 médiasDominée par les élections présidentielle et législatives, l'année 2012 voit le retour au sommet de l'État d'un président socialiste et d'un gouvernement de gauche à forte majorité socialiste. Celui-ci s'emploie, dès son arrivée au pouvoir en mai, à envoyer des signaux manifestant sa volonté de rupture par rapport aux précédents gouvernements de droite. […] Lire la suiteFRANCE Les élections présidentielle et législatives de 2012Écrit par Nicolas TENZER • 3 019 mots • 8 médiasDix-sept ans après le départ de François Mitterrand de l'Élysée, l'élection présidentielle des 22 avril et 6 mai 2012 porte un socialiste, François Hollande, à la présidence de la République. Un mois et demi plus tard, les élections législatives donnent une majorité absolue aux socialistes à l'Ass […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2011Écrit par Nicolas TENZER • 4 649 mots • 3 médias2011 fut en France une année de crise profonde, non seulement en raison de l'aggravation de la situation économique, mais aussi de la crise de l'euro dans laquelle le pays s'est trouvé en première ligne. Ce fut aussi une année de crise morale », en raison du développement des affaires » qui a accru le trouble de l'opinion à l'égard du […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2010Écrit par Nicolas TENZER • 4 599 motsEn France, 2010 fut une année de troubles et de contestations en même temps que de réformes. À maints égards, elle apparaît comme marquée par le prolongement des tendances de l'année précédente poursuite de la crise économique et sociale malgré une légère amélioration de la croissance, progression de l'impopularité du chef de l'État, persistance des divisions de la gauche, multiplication des a […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2009Écrit par Nicolas TENZER • 4 725 mots2009 fut la deuxième année pleine de la présidence de Nicolas Sarkozy. Marquée par la crise économique et sociale, elle a vu le président de la République et le gouvernement se consacrer en grande partie à celle-ci, sans pour autant que la poursuite des réformes ait été abandonnée. Elle a aussi conduit les […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2008Écrit par Nicolas TENZER • 3 553 motsL'année 2008 fut la première année pleine de la présidence de Nicolas Sarkozy. La présidence de l'Union européenne par la France pendant le second semestre, des tensions internationales majeures et l'ouverture d'une crise financière et économique de grande ampleur ont naturellement pesé sur la perception par l'opinion de la stratégie suivie. Elles n' […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2007Écrit par Nicolas TENZER • 3 004 motsMarquée par deux élections successives, l'année 2007 aura été celle de la mise en place de l'équipe ministérielle dessinée par Nicolas Sarkozy et de ses premiers pas, après une campagne électorale placée sous le signe de l'attente de la nouveauté et d'une forme de rupture » que les deux principaux candidats à l'Élysée revendiquaient avec la politiq […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2006Écrit par Nicolas TENZER • 2 972 motsAnnée sans élections, 2006 fut tout entière marquée par la perspective de la présidentielle des 22 avril et 6 mai 2007. Année de tensions à gauche, où les plaies de la division lors du référendum du 29 mai 2005 ne s'étaient pas refermées, elle le fut aussi à droite, d'autant que le gouvernement a dû affronter d […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2005Écrit par Nicolas TENZER • 2 269 motsEn France, 2005 est une année de tensions dont la portée dépasse largement la seule classe politique. Si la gauche comme la droite apparaissent divisées par des querelles de personnes, celles-ci prennent place au sein d'une société inquiète et parcourue par des visions différentes de son avenir comme de son passé. L'événement majeur, le rejet par le référendum […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2004Écrit par Nicolas TENZER • 2 953 mots • 4 médiasAlors que l'année 2003, en France, n'avait connu aucune élection, 2004 en vit quatre cantonales, régionales, européennes et sénatoriales. Celles-ci traduisirent toutes une progression marquée de la gauche, principalement socialiste, et témoignèrent du mécontentement de nombre d'électeurs envers le gouvernement. Au-delà des résultats, les deux camps on […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2003Écrit par Nicolas TENZER • 2 534 motsAnnée sans élections, 2003 ne fut pas politiquement paisible en France. Encore marquée par le choc de l'élection présidentielle de 2002, elle fut aussi animée par la préparation des échéances électorales de 2004 régionales et européennes avec un nouveau mode de scrutin issu de la loi du 11 avril 2003, cantonales et sénatoriales et par l'aiguisement des rivalit […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2002Écrit par Nicolas TENZER • 2 615 mots • 2 médiasMarquée par l'élection présidentielle, l'année politique 2002, en France, fut aussi riche des bouleversements qui en furent la conséquence. D'abord, les législatives des 9 et 16 juin, placées sous l'étroite dépendance de la présidentielle, inversèrent les perspectives. Ensuite, la création de l'Union pour un mouvement populaire peut être considérée comme historique pour la première fois […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2001Écrit par Nicolas TENZER • 3 478 mots • 4 médiasPolitiquement, l'année 2001 fut riche non seulement elle vit se dérouler trois élections municipales, cantonales et sénatoriales, mais elle marqua le début de la campagne pour l'élection présidentielle et les élections législatives de 2002. Les conflits dans la cohabitation entre les deux têtes de l'exécutif, un temps atténués par les dramatiques événements du 11 septembre aux États-Unis, se d […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 2000Écrit par Nicolas TENZER • 2 833 motsL'année politique 2000 en France, comme toutes les années sans élections, ne connut pas de bouleversements. Pour autant, elle fut riche en événements annonciateurs de changements. Chaque camp connut des ruptures et vit s'accentuer ses divisions, éloignant encore plus les perspectives d'une évolution vers un système bi-partisan, alors même que l'affaiblissement de l' […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 1999Écrit par Bruno DIVE • 3 092 motsAvec 12,8 p. 100 des voix, Nicolas Sarkozy et Alain Madelin font réaliser une contre-performance à leurs partis respectifs, le et Démocratie libérale, qui faisaient liste commune. Jamais depuis le début de la Ve République, les gaullistes n'étaient descendus si bas. La surprise […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 1998Écrit par Nicolas TENZER • 3 158 motsEn France, l'année politique 1998 a été marquée par trois élections – régionales, cantonales et sénatoriales –, par l'émergence d'un mouvement nouveau, La Droite, créé par Charles Millon, par des divisions et des regroupements au sein de l'opposition, par l'éclatement du Front national et par l'accentuation des dissensions au sein de la majorité plurielle », dont le président de la République ch […] Lire la suiteFRANCE L'année politique 1997Écrit par Nicolas TENZER • 2 899 mots • 1 médiaL'année politique 1997 s'est achevée comme peu l'auraient imaginé en son début. La dissolution aventureuse de l'Assemblée nationale aura débouché sur une formule nouvelle de cohabitation entre un président de droite et un Premier ministre de gauche, caractérisée par un affaiblissement inédit, et peut-être durable, de l'Élysée. En ce qui concerne les forces politiques, les élections législatives tr […] Lire la suiteFRANCE - L'année politique 1996Écrit par Serge SUR • 3 966 mots • 1 médiaEn France, disait-on en 1996, il y a les optimistes et les pessimistes. Les optimistes pensent que la période est pré-révolutionnaire. Quant aux pessimistes, ils pensent que le gouvernement Juppé va durer. Au-delà de son caractère provocant, cette boutade comporte plusieurs enseignements. Elle dénote un sentiment d'attente, le caractère de transition – […] Lire la suiteABBÉ PIERRE HENRI GROUÈS dit L' 1912-2007Écrit par Jean-Claude PETIT • 1 094 mots L'abbé Pierre, de son vrai nom Henri Grouès, voit le jour à Lyon le 5 août 1912. Il est le cinquième d'une famille de huit enfants qu'il qualifie lui-même de bourgeoise. Cette famille nombreuse lui vaudra d'avoir cent vingt-trois neveux et nièces, tous âges, tous degrés et toutes conditions confondus, qui lui demanderont de répondre à leurs questions à l'occasion du cinquantième anniversaire de s […] Lire la suiteADDICTIONÉcrit par Bernard Pierre ROQUES, Eduardo VERA OCAMPO • 7 816 mots • 3 médias Le cerveau humain est uniformément recouvert d'une couche de substance grise contenant les corps cellulaires des neurones qui assurent les fonctions conscientes. Au-dedans de ces structures dites corticales, on trouve, au sein de la substance blanche interne du cerveau, des structures grises profondes qui régissent notre vie inconsciente. Elles interviennent pour coordonner nos moyens d'action fac […] Lire la suiteAGULHON MAURICE 1926-2014Écrit par Quentin DELUERMOZ • 1 312 mots • 1 média Historien, professeur au Collège de France, spécialiste d’histoire de la France des xix e et xx e siècles. Né à Uzès Gard en 1926 dans une famille d’instituteurs républicains, Maurice Agulhon effectue ses études à Avignon puis à Lyon, avant d’être reçu à l’École normale supérieure en 1946. Agrégé en 1950, professeur d’histoire en lycée et en khâgne, il devient en 1954 attaché de recherche au […] Lire la suiteALGÉRIEÉcrit par Charles-Robert AGERON, Sid-Ahmed SOUIAH, Benjamin STORA, Pierre VERMEREN, Universalis • 42 397 mots • 22 médias Dans le chapitre "La France dans le drame algérien" … Un nouvel appel est lancé par Paris aux derniers Français résidant en Algérie. Mais l'alternative peut-elle aussi facilement se limiter à rester ou partir ? Rester, c'est exposer sa vie, voire celle des autres. Partir, c'est faire le jeu de ceux qui entendent tirer un trait définitif sur toute trace de présence française en Algérie. En juillet 1994, M gr Pierre Claverie, archevêque d'Oran, exprim […] Lire la suiteALLEMAGNE Politique et économie depuis 1949 L'Allemagne unie Écrit par Anne-Marie LE GLOANNEC, Universalis • 7 750 mots • 1 média Dans le chapitre "La difficile coopération franco-allemande" … La coopération franco-allemande n'en est pas moins difficile et connaît une certaine morosité. Autant le président français Jacques Chirac que le chancelier Gerhard Schröder en sont responsables à leur arrivée au pouvoir. En effet, ce dernier affiche d'abord son inclination pour le Labour Party britannique et la social-démocratie nordique. Par la suite cependant, la mise en œuvre de plusieurs cha […] Lire la suiteALTERMONDIALISMEÉcrit par Christophe AGUITON, Isabelle SOMMIER • 5 504 mots • 1 média Dans le chapitre "La mobilisation du mouvement syndical" … Mais l'enjeu majeur se situe dans le rapport aux syndicats, qui sont encore, et de loin, la composante la plus nombreuse et la plus structurée des mouvements sociaux et citoyens. Aux États-Unis, le syndicalisme, organisé dans une confédération unique, l' était présent massivement à Seattle et à Washington. C'est une rupture importante avec une histoire récente où les syndicats restai […] Lire la suiteANTISÉMITISMEÉcrit par Esther BENBASSA • 12 229 mots • 9 médias Dans le chapitre "Europe de l'Ouest et Moyen- Orient" … En Europe de l'Ouest, hormis chez les groupuscules néo-nazis, l'antisémitisme ouvert demeurait un phénomène marginal marginal jusqu'à la projection du conflit israélo-palestinien sur la scène européenne. Contrairement aux États-Unis, certains États européens sanctionnent l'expression des opinions racistes, antisémites et négationnistes. Le Japon, pour sa part, développe un antisémitisme sans juifs […] Lire la suiteARTISANATÉcrit par Denis CHEVALLIER, Louis LERETAILLE, Universalis • 7 105 mots Dans le chapitre "Un contexte nouveau" … On peut dater de 1975 les débuts de la politique nationale de soutien aux métiers d'art, dont les grands principes sont désormais établis. Soucieux de ne pas voir disparaître un ensemble de spécialités utiles à l'entretien du patrimoine national, le président Valéry Giscard d'Estaing commande à Pierre Dehaye, ancien directeur des Monnaies et Médailles, un rapport sur les difficultés des métiers d' […] Lire la suiteASSOCIATIONÉcrit par Jean-Marie GARRIGOU-LAGRANGE, Pierre Patrick KALTENBACH • 7 084 mots Dans le chapitre " D'une liberté politique à un expédient socio-commercial" … On distinguera avant et après 1975. De 1901 à 1975, la vie associative connaît trois grandes vagues parfaitement en phase avec l'évolution politique et sociale du pays. La première vague est celle des bonnes œuvres » avec les bonnes sœurs » et les dames d'œuvres », les bals de charité et les sociétés de bienfaisance, etc. L'immense appareil créé par l'Église depuis des siècles pour les pauvr […] Lire la suiteASSOCIATION sociologieÉcrit par Matthieu HELY • 2 146 mots Dans le chapitre "Les institutions du monde associatif" … L’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981 a indéniablement constitué un temps fort dans la structuration institutionnelle et l’unification du mouvement » associatif, désormais rattaché à l’éphémère ministère du Temps libre. Le Conseil national de la vie associative est créé par le décret du 25 février 1983 et est placé sous l’autorité du Premier ministre. Il constitue la première inst […] Lire la suiteAUBRY MARTINE 1950- Écrit par Rémi LEFEBVRE • 1 352 mots • 1 média La carrière politique de Martine Aubry est emblématique de la trajectoire des hauts fonctionnaires entrés en politique après l'arrivée au pouvoir des socialistes dans les années 1980. Entre carrières locale et nationale, elle connaît des fortunes politiques diverses. Fille de Jacques Delors, ancien ministre et ancien président de la Commission européenne, elle est née le 8 août 1950 à Paris. Elle […] Lire la suiteAYRAULT JEAN-MARC 1950- Écrit par Blaise MAGNIN, Universalis • 1 308 mots • 1 média Homme politique français, Premier ministre de 2012 à 2014. La nomination de Jean-Marc Ayrault au poste de Premier ministre , le 15 mai 2012, a consacré une carrière politique commencée plus de trente ans auparavant. Ne comptant jusque-là aucune expérience gouvernementale, la trajectoire du chef du gouvernement français est à bien des égards représentative d'une génération de grands élus socialist […] Lire la suiteBADINTER ROBERT 1928- Écrit par Laurent WILLEMEZ • 1 374 mots • 1 média Dans le chapitre "Un combat contre la peine de mort" … Inscrit au barreau de Paris en 1951, Robert Badinter est d'abord un spécialiste de droit civil après sa thèse soutenue à la Sorbonne sur les conflits en matière de responsabilité civile dans le droit des États-Unis » et un ensemble de contributions au droit de l'automobile, il fonde en 1966, avec son ami Jean-Denis Bredin, un cabinet spécialisé en droit des affaires. Mais c'est aux assises qu' […] Lire la suiteBALLADUR ÉDOUARD 1929- Écrit par Bruno DIVE, Universalis • 1 396 mots Homme politique français, Premier ministre de 1993 à 1995. Édouard Balladur est né à Smyrne, aujourd’hui Izmir, le 2 mai 1929. Voici trois siècles que sa famille de riches négociants s'est installée auprès de la Sublime Porte. Mais il ne gardera que de lointains souvenirs d'enfance de la Turquie. Il a neuf ans lorsque son père s'installe à Marseille où il poursuivra sa scolarité, au lycée Thiers, […] Lire la suiteBANLIEUEÉcrit par Jean BASTIÉ, Stéphane BEAUD, Jean ROBERT • 6 571 mots Dans le chapitre "Les logiques de peuplement des grands ensembles" … Il faut se garder du piège de l'anachronisme si l'on veut retracer brièvement l'histoire des grands ensembles », construits à marche forcée dans les années 1950-1960, et ne pas prêter après-coup, à cette politique de logement, une volonté à tout prix de ségrégation. Le problème des mal logés » et de l'insalubrité des logements était devenu si grave en France dans les années 1950 le fameux a […] Lire la suiteBARRE RAYMOND 1924-2007Écrit par Éric PHÉLIPPEAU • 938 mots Homme politique français, Raymond Barre naît le 12 avril 1924 à Saint-Denis, sur l'île de la Réunion. La carrière universitaire le séduit dans un premier temps. Il commence en effet par obtenir son agrégation de droit et de science économique en 1950 et est nommé professeur à la faculté de droit de Caen. Comme universitaire, on doit notamment à cet esprit carré dans un corps rond », ainsi qu'il […] Lire la suiteBAUDIS DOMINIQUE 1947-2014Écrit par Blaise MAGNIN • 1 010 mots • 1 média Dans le chapitre "Le journaliste et le politique" … Dominique Baudis est né le 14 avril 1947 à Paris. Son père, Pierre Baudis, était une figure politique du centre droit, cinq fois député de Haute-Garonne entre 1958 et 1988, parlementaire européen de 1979 et 1984 et maire de Toulouse de 1971 à 1983. Autant de mandats que Dominique Baudis conquerra à son tour, après avoir poursuivi une brillante carrière dans le journalisme audiovisuel. Dès ses étud […] Lire la suiteBAYROU FRANÇOIS 1951- Écrit par Delphine DULONG, Universalis • 1 356 mots François Bayrou occupe une position particulière dans la vie politique française. Résolument ancré au centre, ce fervent partisan d'une Europe fédérale entend incarner une troisième voie, alternative à la traditionnelle opposition droite-gauche. Le parcours qui le mène au métier politique est également atypique, comparé à celui des autres dirigeants politiques de sa génération. Il découvre la poli […] Lire la suiteBENSAÏD DANIEL 1946-2010Écrit par Willy PELLETIER • 957 mots Daniel Bensaïd eut plusieurs vies, chacune recomposant l'autre, en la continuant. Né le 25 mars 1946 à Toulouse, il est mort le 12 janvier 2010 à Paris. Philosophe militant révolutionnaire, théoricien du mouvement trotskiste, il est l'une des rares incarnations du soixante-huitard resté fidèle à ce qu'il défendait alors. Dissident de l'Union des étudiants communistes, solidaire de l' opposition […] Lire la suiteBÉRÉGOVOY PIERRE 1925-1993Écrit par Christian SAUVAGE • 1 071 mots Homme politique français. Pierre Bérégovoy est né le 23 décembre 1925 à Déville-lès-Rouen Seine-Maritime. Son père, un Russe blanc », capitaine du tsar et menchevik, tient un café-épicerie. À cinq ans, l'enfant est confié à sa grand-mère, qui l'éduquera. Bon élève, il obtient le brevet élémentaire à douze ans, puis un d'ajusteur au lycée technique d'Elbeuf. Voilà pour les diplômes de ce […] Lire la suiteBERGERON ANDRÉ LOUIS 1922-2014Écrit par Christophe CHICLET • 890 mots • 1 média André Bergeron fut secrétaire général de la Confédération générale du travail-Force ouvrière de 1963 à 1989. André Louis Bergeron est né le 1 er janvier 1922, près de Belfort. Après avoir obtenu le certificat d’études, il entre, à l’âge de quatorze ans, comme apprenti typographe à la Société générale d’imprimerie du Fourneau à Belfort, et adhère aux Jeunesses socialistes et à la […] Lire la suiteBERTRAND XAVIER 1965- Écrit par Blaise MAGNIN, Universalis • 1 136 mots • 1 média Homme politique français, Xavier Bertrand a exercé des responsabilités aux échelles locale et régionale toujours dans le Nord de la France, dont il est originaire, mais aussi au niveau national. Porte-parole de la campagne de Nicolas Sarkozy pour l'élection présidentielle de 2007, secrétaire général de l'UMP en 2009-2010, Xavier Bertrand apparaît comme une figure clé de son parti et de la droit […] Lire la suiteBESANCENOT OLIVIER 1974- Écrit par Éric PHÉLIPPEAU • 935 mots • 1 média Olivier Besancenot est né à Levallois-Perret Hauts-de-Seine le 18 avril 1974, d'une mère psychologue scolaire et d'un père enseignant de collège. Après une licence d'histoire obtenue à l'université de Paris X-Nanterre, il devient facteur à Neuilly-sur-Seine en 1997. Rendu depuis lors célèbre sous la dénomination de facteur-candidat », les observateurs de la vie politique le dépeignent souvent […] Lire la suiteBIASINI ÉMILE 1922-2011Écrit par Universalis • 323 mots Administrateur civil français. Né en 1922 à Noves Bouches-du-Rhône, Émile Biasini fait des études de droit avant d'être breveté de l'École nationale de la France d'outre-mer. C'est donc dans des circonscriptions territoriales, en Afrique, qu'il fait ses premiers pas dans l'administration. Après la décolonisation, il va participer à la création du ministère des Affaires culturelles confié par le […] Lire la suiteBIBLIOTHÈQUESÉcrit par Henri-Jean MARTIN • 8 931 mots • 3 médias Dans le chapitre "Les bibliothèques nationales" … La principale fonction des bibliothèques nationales est de conserver pour les générations à venir le patrimoine national, qu'il s'agisse de livres imprimés et de périodiques, mais aussi de manuscrits, d'estampes, de cartes et plans, et, depuis une date plus récente, de photographies, de films et de tous documents sur nouveau support. Cette masse ne cesse de s'accroître par le biais du Dépôt légal. […] Lire la suiteBLONDEL MARC 1938-2014Écrit par Christophe CHICLET • 941 mots • 1 média Secrétaire général de la Confédération générale du travail-Force ouvrière de 1989 à 2004, Marc Fiacre Henry Blondel est né le 2 mai 1938 à Courbevoie dans une famille originaire de la ville minière Hénin-Liétard aujourd’hui Hénin-Beaumont dans le Nord. […] Lire la suiteBONGO ALBERT BERNARD puis OMAR 1935-2009Écrit par Patrick QUANTIN • 781 mots Albert Bernard Bongo, président de la République gabonaise de 1967 à 2009, est mort à Barcelone le 8 juin 2009. Depuis le retrait de Fidel Castro en février 2008, il était le dirigeant en exercice le plus ancien de la planète. Né à Lewai, dans le Haut-Ogooué en 1935, il débute comme fonctionnaire des postes à Brazzaville. Après son service militaire, il est affecté au ministère des Affaires étran […] Lire la suiteBOULIN ROBERT 1920-1979Écrit par Christian SAUVAGE, Universalis • 1 262 mots Né le 20 juillet 1920 à Villandraut Gironde, dans une famille modeste, le jeune Robert Boulin rêvait de devenir médecin. Ses parents lui conseillent plutôt de faire son droit les études médicales coûtent cher. Robert Boulin sera donc avocat. Il s'inscrit au barreau de Libourne, en 1946. Mais, entre-temps, son intérêt pour la chose publique s'est aiguisé. La guerre a joué le rôle de révélateur […] Lire la suiteBOUSQUET RENÉ 1909-1993Écrit par Charles-Louis FOULON • 1 106 mots Né le 11 mai 1909 à Montauban Tarn-et-Garonne, fils de notaire et docteur en droit de la faculté de Toulouse, René Bousquet était devenu, à vingt ans, chef de cabinet du préfet du Tarn-et-Garonne. Rendu célèbre, dès mars 1930, par le sauvetage de plusieurs personnes qu'emportait une inondation et fait chevalier de la Légion d'honneur à titre exceptionnel, il fut détaché à la présidence du Consei […] Lire la suiteBOVÉ JOSÉ 1953- Écrit par Paul PAYAN • 1 374 mots Né à Talence en juin 1953, de parents chercheurs à l'INRA, José Bové a passé sa vie à mettre en conformité ses pensées et ses actes. Opposant quand d'autres sont prétendants, son goût prononcé pour l'action subversive symbolique et pour l'action directe non violente l'amène naturellement à préférer ses activités antimilitaristes à la faculté de philosophie de Bordeaux. Le plateau du Larzac est al […] Lire la suiteBRAIBANT GUY 1927-2008Écrit par Universalis • 194 mots Juriste de droit public, ancien élève de l' entré au Conseil d'État en 1953, Guy Braibant a son nom associé à ceux de Marceau Long et de Prosper Weil en tant que coauteur d'un classique du droit administratif français, constamment réédité Les Grands Arrêts de la jurisprudence administrative . Membre du Parti communiste français depuis 1944, il est l'un des artisans du rapprochement avec l […] Lire la suiteBUFFET MARIE-GEORGE 1949- Écrit par Delphine DULONG • 1 083 mots Marie-George Buffet est la première femme à avoir dirigé 2001-2010 le Parti communiste français Née le 7 mai 1949 à Sceaux Hauts-de-Seine dans une famille peu politisée, Marie-George Buffet prend la carte du parti en pleine guerre du Vietnam, à une époque où celui-ci n'est plus vraiment en odeur de sainteté auprès des étudiants de son âge, qui se préfèrent gauchistes ». Depuis lors […] Lire la suiteCABROL CHRISTIAN 1925-2017Écrit par Gabriel GACHELIN • 1 041 mots • 1 média Christian Cabrol, né le 16 septembre 1925 à Chézy-sur-Marne Aisne, décédé le 16 juin 2017 à Paris, est connu d’un large public pour être le premier en France à avoir tenté et réussi une greffe du cœur, le 27 avril 1968, sur un malade de soixante-six ans . Ne retenir que cette première » en France la sixième dans le monde serait méconnaître la place pivot de Cabrol dans la construction de la […] Lire la suiteCARICATUREÉcrit par Marc THIVOLET • 8 333 mots • 8 médias Dans le chapitre "Retour de la caricature ?" … La fin des années 1960 et le début des années 1970 ont vu, en France, la flambée de la caricature contestataire. Alors que pendant les journées de Mai-68, les affiches de l'atelier de l'École des beaux-arts couvraient les murs, des magazines exclusivement consacrés à la satire – L'Enragé , Siné -Massacre, Hara-Kiri , puis Charlie ... – ont mené un même combat contre le pouvoir politique en pla […] Lire la suiteCASTEX JEAN 1965- Écrit par Bruno DIVE, Universalis • 1 558 mots • 1 média Dans le chapitre "L’énarque des territoires" … Un homme simple, proche du terrain, fils et petit-fils d’instituteurs. Ainsi aime à se présenter Jean Castex après sa nomination, le 3 juillet 2020, au poste de Premier ministre. Dans son discours de politique générale, il célèbre la France du bon sens », la France qui ne dit rien mais n’en pense pas moins » et vante les vertus du dialogue avec les territoires », mot qu’il prononce à vingt- […] Lire la suiteCATHOLICISME Le catholicisme contemporainÉcrit par Paul THIBAUD • 3 354 mots • 1 média Dans le chapitre "Déclin..." … Dans le contexte de la sécularisation, le christianisme, et particulièrement le catholicisme, était donc exclu de la société et devait désormais se cantonner dans les églises. D'instance structurante et identificatoire pour les sociétés occidentales, il devenait sous nos yeux un choix possible, particulier, quelque chose qui serait nécessairement minoritaire, lié à une option strictement personnel […] Lire la suiteCENTRAFRICAINE RÉPUBLIQUEÉcrit par Apolline GAGLIARDI, Jean-Claude GAUTRON, Jean KOKIDE, Jean-Pierre MAGNANT, Roland POURTIER • 10 308 mots • 7 médias Dans le chapitre "Vers l'Empire centrafricain" … Le putsch permit au colonel Jean Bedel Bokassa d'établir son pouvoir après avoir pris de vitesse et éliminé de la compétition le commandant de gendarmerie Jean Izamo, autre conjuré de la Saint-Sylvestre. Un régime provisoire fut établi qui, prévu pour durer le temps nécessaire à moraliser » et épurer l'administration publique, atténuer les désordres financiers » de l'ancien gouvernement, s' […] Lire la suiteCENTRE SPATIAL GUYANAISÉcrit par Jacques VILLAIN • 1 115 mots • 5 médias Le 26 novembre 1965, la France devenait la troisième puissance spatiale en mettant sur orbite avec le lanceur Diamant A, à partir de la base d'Hammaguir située dans le Sahara algérien, son premier satellite la capsule technologique A1, plus connue sous le nom d'Astérix. Les accords de 1962 avec le Front de libération national relatifs à l'indépendance de l'Algérie, autorisaient toute […] Lire la suiteCGT Confédération générale du travailÉcrit par Jean BRUHAT, René MOURIAUX, Universalis • 4 429 mots • 1 média Dans le chapitre " Maintenir la … Les tensions au sein de la confédération s'intensifient. Deux secrétaires confédéraux, Jean-Louis Moynot et Christiane Gilles, démissionnent en 1981 pour protester contre l'assujettissement de l'action syndicale aux seuls intérêts du La présence de ministres communistes au gouvernement de juin 1981 à juillet 1984 ne simplifie pas la situation. Henri Krasucki devient secrétaire général en 1 […] Lire la Confédération générale du travail-Force ouvrièreÉcrit par René MOURIAUX, Universalis • 1 828 mots • 1 média Dans le chapitre "La distanciation avec le … Durant la IV e République et au début de la V e , et la partageaient les mêmes options stratégiques, la troisième force d'abord, le soutien au régime gaulliste ensuite. Les dissensions apparurent après la fin de la guerre d'Algérie, lorsque la logique de la bipolarisation imposa le rapprochement du Parti socialiste et du L'apparition de la qui combinait l'unité d'a […] Lire la suiteCHABAN-DELMAS JACQUES 1915-2000Écrit par Charles-Louis FOULON • 887 mots Général à vingt-neuf ans, député radical à trente et un ans, maire de Bordeaux durant quarante-sept ans, ministre de Mendès France, Premier ministre de Georges Pompidou, Jacques Chaban-Delmas a été aux premiers rangs de la vie politique durant un demi-siècle. À sa mort, survenue le 10 novembre 2000, les drapeaux en berne au Palais-Bourbon ont salué la mémoire de celui qui avait présidé l'Assemblée […] Lire la suiteCHALANDON ALBIN 1920-2020Écrit par Bruno DIVE • 1 064 mots Haut fonctionnaire, homme d’affaires et homme politique français, ancien résistant, gaulliste de la première heure, Albin Chalandon a dirigé plusieurs ministères avant de devenir P-DG d’Elf-Aquitaine, puis d’occuper le poste de garde des Sceaux de 1986 à 1988. Né le 11 juin 1920 dans la commune de Reyrieux Ain, dont son père, un industriel, était le maire, Albin Chalandon fait ses études au lyc […] Lire la suiteCHARLIE HEBDOÉcrit par Yves FRÉMION • 995 mots • 4 médias Le journal Charlie Hebdo est né de l’interdiction de la publication de Hara-Kiri Hebdo en 1970. À la suite des événements de Mai-68, le monde du dessin de presse subit un changement radical. Le dessin d'humour était jusqu’à lors dominé par des publications familiales, à l'esprit conservateur, auquel, malgré leur talent, les dessinateurs devaient se conformer. Après Mai-68, cet humour va être ba […] Lire la suiteCHARTE DE L'ENVIRONNEMENTÉcrit par Thierry LIBAERT • 2 516 mots • 1 média La loi constitutionnelle visant à intégrer la Charte de l'environnement dans la Constitution française du 4 octobre 1958 a été adoptée le 28 février 2005 par le Parlement réuni en congrès. Cette révision de la Constitution s’est démarquée radicalement des révisions précédentes pour deux raisons. La première a été fondamentale puisqu'il s'agissait d'introduire une nouvelle génération de droit, ce […] Lire la suiteCHEVÈNEMENT JEAN-PIERRE 1939- Écrit par Bruno DIVE • 735 mots Né le 9 mars 1939, énarque, Jean-Pierre Chevènement commence sa carrière comme attaché commercial au ministère de l'Économie et des Finances avant de devenir conseiller commercial à Djakarta. Il adhère en 1964 à la crée l'année suivante le Centre d'études, de recherche et d'éducation socialistes et s'allie à François Mitterrand au congrès d'Épinay en 1971, ce qui permet à ce […] Lire la suiteCHIRAC JACQUES 1932-2019Écrit par Christian SAUVAGE, Universalis • 2 004 mots • 5 médias Dans le chapitre "Une carrière exemplaire" … Entré en 1959 à la Cour des comptes, il s'intéresse très vite à la politique et rejoint le cabinet de Georges Pompidou, alors Premier ministre, dès 1962. Son efficacité le fait remarquer par le Premier ministre qui l'appelle mon bull-dozer ». Conseiller référendaire à la Cour des comptes en 1965, il affronte le corps électoral en 1967 avec les jeunes loups » pompidoliens qui se lancent à l'as […] Lire la suiteCINQUIÈME RÉPUBLIQUE Les années Chirac 1995-2007Écrit par Pierre BRÉCHON • 9 350 mots • 4 médias Les douze années de présidence de Jacques Chirac 1995-2007 ont été marquées sur le plan institutionnel par le raccourcissement du mandat présidentiel à cinq ans, l'inversion du calendrier électoral et le rejet du traité constitutionnel européen. Sur le plan politique, on a assisté à la poursuite des alternances et à des sanctions régulières par les électeurs du pouvoir en place. Élu président […] Lire la suiteCINQUIÈME RÉPUBLIQUE Les années Hollande 2012-2017Écrit par Pierre BRÉCHON • 7 029 mots • 3 médias Après un quinquennat marqué par le style hyperactif de Nicolas Sarkozy, François Hollande avait affiché pendant sa campagne électorale une image diamétralement opposée. Revendiquant le titre de président normal », se voulant proche du peuple et exemplaire dans son rapport à l’argent, il avait construit une figure de dirigeant politique qui le distinguait point par point de l’ancien président de […] Lire la suiteCINQUIÈME RÉPUBLIQUE Les années Mitterrand 1981-1995Écrit par Pierre BRÉCHON • 7 342 mots • 4 médias L'année 1981 marque un tournant dans l'histoire de la V e République la gauche accède au pouvoir après vingt-trois ans dans l'opposition. Elle va utiliser à son profit tous les ressorts d'une Constitution qu'elle rejetait à l'origine, finissant ainsi de légitimer les institutions nées du pouvoir gaulliste. Les deux septennats de François Mitterrand sont marqués par des alternances au gouvernem […] Lire la suiteCLASSES SOCIALES Classe ouvrièreÉcrit par Julian MISCHI, Nicolas RENAHY • 4 428 mots • 1 média Dans le chapitre "De la classe ouvrière aux mondes ouvriers" … La marginalisation des ouvriers s'opère d'abord dans les représentations collectives et la vie politique. Alors que le référent classe ouvrière » était au cœur des mouvements sociaux du xx e siècle, notamment lors du Front populaire ou de Mai-68, on observe depuis les années 1970 son retrait progressif des débats idéologico-politiques. Ce processus s'ancre dans le déclin des organisations qui […] Lire la suiteCOHN-BENDIT DANIEL 1945- Écrit par Michel SOUDAIS • 1 172 mots Ancien leader de la révolte étudiante de Mai-68 à Paris, Daniel Cohn-Bendit a fait son retour sur la scène politique française en conduisant la liste des Verts aux élections européennes de juin 1999. Ardent défenseur de l'Europe fédérale et de l'euro, plus réformiste que révolutionnaire, encore libertaire mais aussi libéral, Dany le Vert » aurait bien fait oublier Dany le Rouge », n'était un f […] Lire la suiteCOLONISATION débats actuelsÉcrit par Myriam COTTIAS • 3 253 mots • 3 médias Dans le chapitre "Vers la reconnaissance par l'État d'un passé traumatique" … Le 23 mai 1998, à l'occasion de la célébration du cent cinquantième anniversaire de l'abolition de l'esclavage, une marche est organisée à l'initiative du Comité pour une commémoration unitaire de l'abolition de l'esclavage des Nègres dans les colonies françaises quarante mille Martiniquais, Guadeloupéens, Africains, Guyanais et Réunionnais défilent à Paris. La même année, une proposition de lo […] Lire la suiteCOLUCHE MICHEL COLUCCI, dit 1944-1986Écrit par Gilbert SALACHAS • 1 027 mots Le 19 juin 1986, Coluche a trouvé la mort dans un accident de la route ; alors qu'il conduisait une moto sa passion, il a heurté un camion. Il est entré aussitôt dans la légende. Pourtant, rien ne pouvait laisser prévoir que cet artiste, spécialisé dans le comique le plus immédiat, serait un jour reconnu, encensé, sacralisé. Il n'avait rien d'un demi-dieu. C'était au contraire un petit rigolo […] Lire la suiteCONGO RÉPUBLIQUE DUÉcrit par Philippe DECRAENE, Roland POURTIER, Patrick QUANTIN, Gilles SAUTTER • 12 369 mots • 10 médias Dans le chapitre "Un régime plus policier que militaire sous Sassou Nguesso 1979-1991" … Durant les mois qui suivent, le nouveau président du comité central assoit son pouvoir en disqualifiant ses adversaires. Une commission d'enquête dénonce l'enrichissement de Yhombi Opango, qui est emprisonné, ainsi que les autres membres du appartenant à son groupe ethnique kouyou. À l'égard de Thystère Tchicaya, l'intimidation militaire est utilisée. En juillet 1979, une nouvelle Constit […] Lire la suiteCOPÉ JEAN-FRANÇOIS 1964- Écrit par Thomas MARTY, Universalis • 1 298 mots Jean-François Copé, député-maire de Meaux, a été secrétaire général de l'UMP de 2010 à 2012 et président du mouvement de 2012 à 2014. Il est né en 1964 à Boulogne-Billancourt. Son père est un chirurgien réputé, fils d'un médecin généraliste qui a fui dans les années 1920 les persécutions antisémites de Roumanie. Sa mère, rapatriée pied-noire, déteste le général de Gaulle autant que son mari, mar […] Lire la suiteCÔTE D'IVOIREÉcrit par Richard BANÉGAS, Jean-Fabien STECK • 13 577 mots • 6 médias Dans le chapitre "Le rôle de la communauté internationale" … Le conflit en Côte d’Ivoire a suscité une implication importante de la communauté internationale. Les pays membres de la et la France envoyèrent des troupes pour assurer le cessez-le-feu signé à Lomé en 2002 ; ce qui eut pour conséquence de figer la situation militaire et de scinder le pays en deux territoires de taille similaire mais au bénéfice du Sud où se concentre la plupart de […] Lire la suiteCOVID-19Écrit par Gabriel GACHELIN • 5 884 mots • 7 médias Dans le chapitre "La pandémie de Covid-19 " … En dehors de la Chine, le premier patient atteint de la Covid-19 a été diagnostiqué en Thaïlande le 13 janvier 2020. Pendant ce même mois, des cas sporadiques ont été signalés dans le monde entier, sauf en Amérique du Sud et en Afrique si ce n’est en Égypte. Toutes ces contaminations sont liées à des voyageurs venant principalement de la province chinoise du Hubei. En France, les premiers cas d […] Lire la suiteCRÉPEAU MICHEL 1930-1999Écrit par Bruno DIVE • 605 mots Né en 1930 à Fontenay-le-Comte Vendée, avocat, membre du Parti radical dès l'âge de dix-huit ans, Michel Crépeau est élu maire de La Rochelle Charente-Maritime en 1971. Il le restera jusqu'à son décès. Dès 1973, il met en place la première zone piétonne de France et, en 1974, un système de vélos à la disposition de la population. Ce pionnier de l'écologie municipale innove encore en 1997 avec […] Lire la suiteCRISE DE L'UNION EUROPÉENNEÉcrit par Universalis • 312 mots Au printemps de 2005, l'Union européenne entre dans une crise politique grave, d'autant plus marquante que cette dernière vient contredire une dynamique apparemment irrésistible. Un an plus tôt, en effet, l' semblait être parvenue à mener de front les processus d'élargissement et d'approfondissement, deux axes majeurs de la construction européenne depuis l'origine. Passée le 1 er mai 2004 de […] Lire la suiteDÉCHETSÉcrit par Jean GOUHIER • 9 298 mots • 5 médias Dans le chapitre "Une application freinée l'exemple de la France" … Dans ce pays, la valorisation est restée faible jusqu'en 2000 le compostage et le tri/recyclage n'atteignent pas, chacun, 10 p. 100 du poids des ordures ménagères produites. Ces filières progressent sensiblement depuis cette date ; mais le stockage en décharge reste encore important tabl. 3. De fait, diverses difficultés spécifiques à la France freinent l'efficacité immédiate de la législation […] Lire la suiteDEFFERRE GASTON 1910-1986Écrit par Christian SAUVAGE • 1 407 mots Gaston Defferre est né le 14 septembre 1910 à Marsillargues Hérault, dans une famille protestante. Son père, avoué, le conduit à choisir des études de droit. Après le lycée de Nîmes, Gaston Defferre s'inscrit à la faculté d'Aix-en-Provence, où il obtient une licence de droit et un diplôme supérieur d'économie politique. Souci d'indépendance ? Il quitte à vingt et un ans sa famille pour Dakar, où […] Lire la suiteDELANOË BERTRAND 1950- Écrit par Antoine SCHWARTZ • 1 082 mots • 1 média Jusqu'à sa première élection à la mairie de Paris, en 2001, Bertrand Delanoë a longtemps souffert d'un déficit chronique de notoriété. L'homme n'avait pourtant rien d'un novice en politique déjà député puis porte-parole du Parti socialiste en 1981, il est en fait un représentant assez typique de cette génération d'hommes politiques de gauche qui ont accédé aux responsabilités dans les an […] Lire la suiteDÉMOCRATIE CHRÉTIENNEÉcrit par Pierre LETAMENDIA, Universalis • 6 307 mots • 1 média Dans le chapitre "L'Europe d'après guerre" … Le retour de la démocratie en Autriche, en Allemagne et en Italie, la libération du reste de l'Europe et l'action de nombreux chrétiens contre le nazisme vont donner de nouvelles perspectives au catholicisme politique, qui dans de nombreux pays est de surcroît conforté par l'introduction du suffrage féminin. Les tendances catholiques autoritaires sont privées de légitimité par l'issue du conflit. […] Lire la suiteDJIBOUTIÉcrit par Colette DUBOIS, Alain GASCON, Jean-Louis MIÈGE • 7 769 mots • 6 médias Dans le chapitre "Un acteur important dans les grands enjeux mondiaux" … Il entendait jouer un rôle pour régler pacifiquement la crise somalienne et s'assurer ainsi une situation plus calme à la frontière méridionale du pays. Avec le soutien de la communauté internationale, il prit l'initiative d'une conférence de réconciliation inter-somalienne pour inciter les Somaliens divisés à reprendre le dialogue conférence d'Arta, juillet-août 2000. Les délégués somaliens pré […] Lire la suiteDRUON MAURICE 1918-2009Écrit par Charles-Louis FOULON • 959 mots Maurice Druon voyait dans la guerre, les arts et le gouvernement, trois métiers du risque » ; il les a exercés comme officier de cavalerie, écrivain, ministre avant de devenir le secrétaire perpétuel de l'Académie française, paladin d'une francophonie ouverte. Fils d'une actrice divorcée et de Lazare Kessel, un comédien russe qui se suicida à vingt et un ans, Maurice Druon naquit à Paris, le 23 […] Lire la suiteDUFLOT CÉCILE 1975- Écrit par Blaise MAGNIN, Universalis • 1 346 mots Femme politique française, secrétaire nationale du parti écologiste Les Verts de 2006 à 2012 devenu Europe Écologie-Les Verts en 2010, puis ministre de l'Égalité des territoires et du Logement de mai 2012 à mars 2014. L’ascension politique de Cécile Duflot est atypique. Alors que la plupart des dirigeants politiques français ont fourbi leurs armes dans les écoles du pouvoir et les cabinets min […] Lire la suiteÉCOLOGISTE MOUVEMENTÉcrit par Bruno VILLALBA • 12 347 mots • 5 médias Dans le chapitre "Construire une organisation politique 1974-1981" … Les années 1970 sont celles des premiers engagements politiques des écologistes qui choisissent d’entrer dans l’arène électorale avec une offre politique originale l’écologisme, mais aussi dans le cadre d’une organisation différente. Ils veulent faire de la politique autrement ». Pendant plus d’une dizaine d’années, ils inventent des formes d’organisation destinées à accueillir et respecter le […] Lire la suiteÉCONOMIE MONDIALE 1993 une nouvelle année de purgatoireÉcrit par Tristan DOELNITZ • 6 802 mots Dans le chapitre "Le cycle de l'Uruguay" … Cette logique était implicite dans les objectifs du cycle de l'Uruguay, une négociation lancée en septembre 1986 à Punta del Este et qui a fini par aboutir le 15 décembre 1993 à Genève, siège du Après de multiples rebondissements et une âpre confrontation finale entre les États-Unis et la Communauté européenne, la conclusion des négociations a permis de renforcer le système des échanges […] Lire la suiteÉLECTION DE FRANÇOIS MITTERRANDÉcrit par Olivier COMPAGNON • 232 mots • 1 média Plusieurs fois ministre sous la IV e République, adversaire en son temps du général de Gaulle, battu de justesse en 1974 par Valéry Giscard d'Estaing, le socialiste François Mitterrand est élu à l'Élysée le 10 mai 1981 et permet ainsi à la gauche d'accéder au pouvoir pour la première fois depuis la fondation de la V e République. Cette alternance politique, confirmée par un raz-de-marée socialis […] Lire la suiteESSEL ANDRÉ 1918-2005Écrit par Universalis • 182 mots Homme politique et homme d'affaires français. Fils de négociant en textiles, le lycéen André Essel s'engage en politique sous le choc de l'émeute parisienne de février 1934. Il s'inscrit aux Jeunesses socialistes puis, découvrant Trotski, il participe à la fondation, en 1936, de la Jeunesse socialiste révolutionnaire, qui le nomme ensuite responsable de la propagande. Pendant l'Occupation, il ser […] Lire la suiteÉTAT ISLAMIQUE EI ou DAECH ou DAESHÉcrit par Universalis • 2 494 mots • 2 médias Dans le chapitre "L’État islamique en dehors de l’Irak et de la Syrie" … À la fin de 2014, dans plusieurs zones de conflit, en Afrique, au Moyen-Orient, en Asie centrale, des groupes armés commencent à se revendiquer de l’État islamique. Des groupes préexistants, comme Boko Haram au Nigeria, et certains talibans d’Afghanistan, déclarent faire allégeance à l’organisation – sans que leur coopération effective avec la direction de Syrie soit forcément avérée. En dehors d […] Lire la suiteEXTRÊME DROITEÉcrit par Jean-Yves CAMUS • 11 962 mots • 9 médias L’expression extrême droite » hante commentaires et analyses de l'actualité politique française depuis la fin des années 1970. Elle permet de rapprocher des événements aussi dissemblables que l'attentat d'Oklahoma City commis en 1995 aux États-Unis, l'entrée en 2000 et en 2017 dans le gouvernement autrichien du parti FPÖ Freiheitliche Partei Österreichs ou Parti libéral autrichien dirigé par […] Lire la suiteEXTRÊME GAUCHEÉcrit par Christine PINA • 7 196 mots • 4 médias Tout travail sur un mouvement ou un courant politique rencontre rapidement une limite celle liée à la difficulté de circonscrire un phénomène, d'en donner une description à la fois complète et réaliste. Quand il s'agit de l'extrême gauche, d'autres difficultés interviennent dans le travail d'analyse comment rendre compte des évolutions que cette famille » a connues au fil des décennies, alo […] Lire la suiteFABIUS LAURENT 1946- Écrit par Bruno DIVE • 1 364 mots Homme politique français, Premier ministre de 1984 à 1986. Jusqu'en 1988, tout a souri à Laurent Fabius. Né le 20 août 1946 à Paris dans une riche famille d'antiquaires, normalien, énarque, auditeur au Conseil d'État, il s'était fait connaître des téléspectateurs comme brillant participant d'un jeu télévisé au début des années 1970, Cavalier seul ». À peine entré au Parti socialiste, en 1974, i […] Lire la suiteFABRE ROBERT 1915-2006Écrit par Serge BERSTEIN • 757 mots La carrière politique de Robert Fabre illustre les hésitations et les incertitudes d'un radicalisme mal à l'aise dans les structures et les pratiques d'une V e République dont la bipolarité heurte la vocation centriste des radicaux et dont l'aspiration à la modernité convient mal à un parti qui représente traditionnellement la classe moyenne indépendante de province. De cette dernière, Robert Fab […] Lire la suiteFÉMINISME France du à la paritéÉcrit par Muriel ROUYER • 4 272 mots • 1 média Dans le chapitre "Situation du féminisme révolutionnaire au lendemain de Mai-68" … Réflexion, ou régression ? Régression, sans doute, à l'aune de la révolution identitaire collective dont le fut porteur, dans ses idées comme dans ses formes d'action. Ce mouvement de réflexion et de pratique, né de la révolte de Mai-68 et baptisé par les médias en 1970, renvoie, au-delà des querelles sur sa date de naissance, à une prise de parole collective des femmes. De l'université de […] Lire la suiteFILLON FRANÇOIS 1954- Écrit par Arnault SKORNICKI, Universalis • 1 607 mots • 1 média Homme politique français, François Fillon fut Premier ministre de 2007 à 2012. Sa carrière politique est assez éloignée du cursus honorum des commis de l'État sortis des grandes écoles de la République. […] Lire la suiteFRANCE Arts et culture L'art publicÉcrit par Caroline CROS, Universalis • 3 242 mots • 1 média Depuis les années 1980, en France, la politique de commandes d'œuvres d'art s'est développée en partenariat avec les régions et les collectivités territoriales. Adaptée à l'art d'aujourd'hui, cette procédure offre désormais un outil expérimental très sollicité à travers le territoire au bénéfice de projets artistiques inédits, adressés à la collectivité tout entière. Que signifie l'expression ar […] Lire la suiteFRANCE Histoire et institutions La France d'aujourd'huiÉcrit par Serge BERSTEIN • 6 677 mots • 7 médias Dans le chapitre "De la crise à la croissance molle" … Alors que l'histoire de la France depuis 1945 avait été marquée par la forte croissance des Trente Glorieuses, les choses changent brutalement à la fin de 1973. La première crise pétrolière qui fait suite à la guerre israélo-arabe d'octobre 1973 aboutit à un quadruplement du prix du pétrole en quelques semaines. Elle est suivie en 1979 d'une seconde crise consécutive à la révolution iranienne et […] Lire la suiteFRANCE Histoire et institutions Le droit françaisÉcrit par Jean-Louis HALPÉRIN • 7 154 mots • 2 médias Dans le chapitre "Modernisation accélérée depuis 1945" … La période de la Libération et des débuts de la IV e République constitue un nouveau temps fort de l'histoire du droit français. La création de la Sécurité sociale préparée, il est vrai, par les lois de 1928 et 1932 sur les assurances sociales et les allocations familiales, l'institution des comités d'entreprise, la réforme du droit de la nationalité réuni dans un Code, les ordonnances de 194 […] Lire la suiteFRANC FRANÇAISÉcrit par Dominique LACOUE-LABARTHE • 9 714 mots • 5 médias Dans le chapitre "Le franc dans le serpent monétaire européen 1972-1979" … L'accélération de l'inflation mondiale s'accentue avec le premier choc pétrolier dernier trimestre 1973 et se prolonge avec le deuxième second semestre 1979. L'économie française continue d'augmenter son degré d'ouverture à l'économie internationale qui passe de quelque 20 p. 100 en 1970 à 36 p. 100 en 1981. Globalement, la France, qui réalisait des gains nets sur l'extérieur, subit à partir d […] Lire la suiteGALLEY ROBERT 1921-2012Écrit par Charles-Louis FOULON • 662 mots • 1 média Treize années de charges ministérielles, un fauteuil de maire occupé durant vingt-trois ans à Troyes, des mandats de parlementaire dans l'Aube pendant trente-quatre ans font de Robert Galley un homme politique marquant de la V e République. Mais ce Français libre, nommé Compagnon de la Libération à vingt-quatre ans en 1945, a été aussi ingénieur et son rôle dans le développement de la filière nu […] Lire la suiteGAUCHE SOCIALISTE EN FRANCE DEPUIS 1945Écrit par Rémi LEFEBVRE • 10 121 mots • 8 médias Dans le chapitre "La préparation de la conquête du pouvoir 1971-1981" … N’ayant pas été en mesure de se présenter en 1969, François Mitterrand comprend l’importance cruciale de la maîtrise des partis politiques. Sa prise de pouvoir au Parti socialiste est la première étape de la présidentialisation de l’organisation. Lors du congrès d’Épinay de 1971, François Mitterrand est désigné de justesse premier secrétaire, avec l’appui d’une partie de l’aile sociale-démocrate d […] Lire la suiteGAULLISMEÉcrit par Serge BERSTEIN • 5 668 mots • 1 média Dans le chapitre "Post-gaullisme ou néo-gaullisme ?" … Après la mort de Georges Pompidou en 1974, le destin du gaullisme apparaît moins clair. Privé d'un leader naturel en la personne du chef de l'État, puisque durant plus de vingt années l'Élysée sera occupé par le libéral Valéry Giscard d'Estaing puis par le socialiste François Mitterrand, il se réduit à la formation gaulliste. Encore celle-ci se trouve-t-elle déchirée en 1974 entre les gaullistes […] Lire la suiteGAY PRIDEÉcrit par Christophe BROQUA • 2 650 mots Dans le chapitre "Les origines" … Lorsque la première marche est organisée à New York, la principale organisation homosexuelle qui existe en France, Arcadie, défend des principes de respectabilité et de discrétion diamétralement opposés à cette démarche. En mars 1971, son président participe à une émission de radio de Menie Grégoire sur qui est bruyamment interrompue par des lesbiennes féministes en rupture avec l'associat […] Lire la suiteGILETS JAUNESÉcrit par Rémi LEFEBVRE • 4 977 mots • 2 médias L’histoire politique française a été marquée par de grands mouvements sociaux, à forte conflictualité sociale. Le Front populaire, Mai-68 ou le mouvement de novembre-décembre 1995 grèves contre le plan Juppé » sur les retraites et la Sécurité sociale font partie de ces accès de fièvre hexagonale » analysés par l’historien Michel Winock. Le mouvement des gilets jaunes » qui éclate en novem […] Lire la suiteGIRAUD ANDRÉ 1925-1997Écrit par Dominique GANIAGE • 759 mots Né le 3 avril 1925 à Bordeaux dans une famille d'enseignants, André Giraud intègre l'École polytechnique en 1944. Il en sort major, ingénieur du corps des mines, non sans être passé par l'École nationale supérieure du pétrole et des moteurs. Sa carrière sera placée sous le signe de l'énergie. Entré en 1949 au ministère de l'Industrie, il entame en 1951 une longue période d'activité à l'Institut fr […] Lire la suiteGIROUD FRANÇOISE 1916-2003Écrit par Francis BALLE • 852 mots Née le 21 septembre 1916 à Genève Suisse, Françoise Giroud, de son vrai nom France Gourdji, a consacré sa vie au journalisme, dont elle fut l'une des grandes figures au xx e siècle, mais aussi à la politique et à la littérature. Fille d'une juive séfarade et d'un journaliste turc né à Bagdad, Salih Gourdji, directeur de l'Agence télégraphique ottomane, Françoise Giroud obtient à quatorze ans un […] Lire la suiteGISCARD D'ESTAING VALÉRY 1926-2020Écrit par Gérard PONTHIEU, Universalis • 1 300 mots • 4 médias Dans le chapitre "Un destin présidentiel" … Candidat à l'élection présidentielle d'avril 1974, Giscard d'Estaing fait campagne sur le thème d'une société libérale avancée ». Il obtient au premier tour près de 33 p. 100 des voix contre 43,3 p. 100 à François Mitterrand et 14,5 p. 100 à Jacques Chaban-Delmas ; au second tour, il l'emporte avec 50,8 p. 100 des suffrages exprimés contre 49,2 p. 100 à François Mitterrand. Sa présidence s'ouvr […] Lire la suiteGOLDMAN PIERRE 1944-1979Écrit par Jacqueline PUYAU • 1 383 mots Le 20 septembre 1979, Pierre Goldman est assassiné à Paris, à trente-cinq ans, fauché par les balles de trois tueurs inconnus. Ainsi meurt un juif polonais militant, délinquant, intellectuel et écrivain, né en France. Cette énumération d' identités » a une histoire, dont l'épisode le mieux connu – le plus public en tout cas, à défaut d'être l'essentiel – est d'ordre judiciaire. Le 14 décembre 197 […] Lire la suiteGRÈVEÉcrit par Hélène SINAY, Universalis • 12 540 mots • 8 médias Dans le chapitre "Les grèves depuis 1968" … Même s'ils n'ont plus revêtu les caractères d'une grève générale, plusieurs conflits saillants ont révélé depuis 1968des préoccupations nouvelles, liées soit à l'apparition de nouvelles technologies, soit au développement de la mondialisation et à la remise en cause parallèle des systèmes de protection sociale Sécurité sociale, chômage, retraite. La longue grève de Lip en 1973 a traduit la volon […] Lire la suiteGUADELOUPEÉcrit par Christian GIRAULT • 2 820 mots • 3 médias Dans le chapitre "De la conquête coloniale à la départementalisation" … Le peuplement amérindien des îles est attesté depuis au moins 2 500 ans avant Les premiers habitants, les Arawak, sont arrivés du continent sud-américain bassin du fleuve Orénoque en naviguant le long de la chaîne des îles. La plupart des migrations ultérieures ont suivi cette même voie. Des sites de roches gravées particulièrement importants signalent des lieux cérémoniels anciens Baill […] Lire la suiteGUÉNA YVES 1922-2016Écrit par Charles-Louis FOULON • 884 mots • 1 média Énarque de la promotion France combattante – la première de l’institution –, dernier haut-commissaire de la République française en Côte d'Ivoire, député, ministre, sénateur-maire, président du Conseil constitutionnel la brillante trajectoire d'Yves Guéna le caractérise moins que les deux présidences qu'il assuma au soir de sa longue vie, celles de la fondation de la France libre et de la fonda […] Lire la suiteHALIMI GISÈLE 1927-2020Écrit par Michel MIAILLE, Universalis • 1 335 mots • 1 média Dans le chapitre "Le combat féministe" … Gisèle Halimi est étroitement liée aux combats des femmes pour leur liberté et leurs droits à partir du début des années 1970. Elle est d'abord l'une des signataires du Manifeste des 343 en 1971, dénonciation de l'hypocrisie et de l'inégalité des femmes devant l'avortement. Les 343 femmes, très connues, reconnaissent qu'elles ont pratiqué l'avortement en infraction à la loi de 1920 et demandent l […] Lire la suiteHAMON BENOÎT 1967- Écrit par Blaise MAGNIN, Universalis • 1 283 mots Homme politique français. Membre du Parti socialiste PS, Benoît Hamon a construit sa carrière par la constitution progressive d'un solide réseau de soutiens au sein du Mouvement des jeunes socialistes MJS et à la gauche du PS, plutôt que par l'ENA et la haute fonction publique, filière la plus commune de recrutement des dirigeants socialistes. Né le 26 juin 1967 à Saint-Renan Finistère, d'un […] Lire la suiteHESSEL STÉPHANE 1917-2013Écrit par Universalis • 1 016 mots • 1 média Diplomate et personnalité éminente de la Résistance et de la gauche françaises, Stéphane Hessel naît le 20 octobre 1917, à Berlin. Ses parents, Helen Grund et Franz Hessel, tous deux allemands, bourgeois bohêmes proches du milieu artistique et intellectuel parisien d’avant la Première Guerre mondiale, ont accepté la liberté dans leur amour. À l’âge de sept ans, Stéphane Hessel quitte l’Allemagne […] Lire la suiteHIRSCH MARTIN 1963- Écrit par Blaise MAGNIN • 1 106 mots Membre du gouvernement de François Fillon de mai 2007 à mars 2010 en tant que haut-commissaire aux Solidarités actives contre la pauvreté – poste qu'il cumule à partir de janvier 2009 avec le haut-commissariat à la Jeunesse –, Martin Hirsch n'est pas à proprement parler un professionnel de la politique. Fruit de la volonté du président de la République Nicolas Sarkozy de s'attacher des personna […] Lire la suiteHOLLANDE FRANÇOIS 1954- Écrit par Delphine DULONG, Universalis • 1 390 mots • 2 médias Homme politique français, président de la République de 2012 à 2017 . François Hollande est élu président de la République française le 6 mai 2012 à l'issue d'un parcours ascendant au sein du Parti socialiste PS. Il est parvenu au sommet de l’État, en montrant, lui qu’on a souvent présenté comme un gentil », la ténacité d'un bretteur à l'humour caustique qui n'aime guère emprunter les chemins […] Lire la suiteHOMOSEXUALITÉÉcrit par Frédéric MARTEL • 9 195 mots • 1 média Dans le chapitre "La révolution des années 1970" … À travers le monde, l'acte de naissance de la révolution homosexuelle » porte une date le 27 juin 1969. Cette nuit-là, à New York, six officiers de police en civil pénètrent à l'intérieur d'un café homosexuel, le Stonewall Inn, au numéro 53 de Christopher Street à Greenwich Village. Descente habituelle, la visite se solde par quelques interpellations de travestis et une fermeture du café, tan […] Lire la suiteHUE ROBERT 1946- Écrit par Bruno DIVE • 668 mots Lorsque, en janvier 1994, au XXVIII e congrès du Parti communiste français PCF Georges Marchais l'appelle pour lui succéder, Robert Hue est encore un inconnu du grand public. Il avait juste fait parler de lui, pendant l'hiver de 1981, en prenant la tête d'une manifestation dans sa ville de Montigny-lès-Cormeilles Val-d'Oise contre une famille marocaine supposée se livrer au trafic de drogue. […] Lire la suiteHULOT NICOLAS 1955- Écrit par Robert BARBAULT, Dominique BOURG, Universalis • 1 766 mots • 2 médias Personnalité médiatique d’abord connue pour ses émissions télévisées présentant les richesses et les beautés de la Terre, Nicolas Hulot se consacre, à partir de 1990, à la protection de l'environnement. Engagé tout d’abord à titre associatif, à la tête notamment de la Fondation Nicolas-Hulot pour la nature et l’homme, il s’est peu à peu approché de la scène politique. Après avoir refusé à trois p […] Lire la suiteINÉGALITÉS Analyse et critiqueÉcrit par Alain BIHR, Roland PFEFFERKORN • 9 558 mots Dans le chapitre "Aggravation des inégalités" … D'après Alexis de Tocqueville, l'idéal démocratique trouverait sa traduction dans la tendance à l'égalisation des conditions. Force est cependant de constater que l'évolution des trois dernières décennies va nettement à l'opposé, c'est-à-dire dans le sens de l'aggravation des inégalités. L’inversion de tendance enregistrée au tournant des années 1970 et 1980 est repérable facilement en ayant recou […] Lire la suiteINÉGALITÉS HOMMES-FEMMES, FranceÉcrit par Alain BIHR, Roland PFEFFERKORN • 5 992 mots • 2 médias Depuis les années 1970, en France, l'égalité entre hommes et femmes est reconnue par tous, du moins sur le plan des principes. C'est une avancée considérable par rapport à une époque encore proche durant laquelle la tradition, comme le droit, s'accordait au contraire sur l'infériorité, considérée comme naturelle, des femmes. À l'aube du xxi e siècle, au terme de trois décennies de bouleversements […] Lire la suiteINÉGALITÉS Les inégalités économiquesÉcrit par Charlotte GUÉNARD, Éric MAURIN • 5 370 mots Dans le chapitre "Les problèmes de mesure des inégalités et de la pauvreté" … En France, le mouvement de réduction des inégalités de revenus qui a prévalu jusqu'au début des années 1980 s'est arrêté. Il n'en demeure pas moins que l'on n'observe pas dans ce pays de remontée spectaculaire des inégalités de revenus ni de la pauvreté. Avec le recul, on constate plutôt une fluctuation des inégalités et de la pauvreté au rythme du cycle économique. La pauvreté tend à se réduire d […] Lire la suiteINTELLECTUELÉcrit par Jean Marie GOULEMOT • 9 442 mots • 2 médias Dans le chapitre "Les ivresses de Mai" … Mai-1968 fut un moment difficile pour les intellectuels qui se rallièrent au mouvement sans y être invités. Sartre vint prendre la parole à la Sorbonne. Aragon résista mal aux interpellations gouailleuses de Daniel Cohn Bendit. Pouvait-il en être autrement, dans la mesure où ce moment fut d'abord un refus des savoirs imposés et des maîtres qui les détenaient ? Ni Barthes ni Althusser, ni Foucault […] Lire la suiteIRAKÉcrit par Loulouwa AL RACHID, Brigitte DUMORTIER, Philippe RONDOT, Pierre ROSSI • 29 463 mots • 25 médias Dans le chapitre "Actions diplomatiques" … Cette stratégie de l'Irak, consistant à ne pas se laisser enfermer dans une guerre terrestre qu'il sait ne pouvoir gagner et à parier sur une internationalisation du conflit, première étape d'une paix négociée, se double, durant le même temps, d'une action diplomatique également contrastée. Se départissant d'une attitude jusque-là constante de suspicion contre les États arabes modérés et d'hostili […] Lire la suiteIRAN Histoire et politique Écrit par Christian BROMBERGER, Robert MANTRAN, Universalis • 22 390 mots • 11 médias Dans le chapitre "Poursuite de la guerre et rivalités internes" … La guerre avec l'Irak conduit le gouvernement iranien à accentuer sa politique de répression à l'intérieur et à créer des rapports souvent tendus avec les pays qui soutiennent l'Irak et lui fournissent des armements au premier rang figurent l'Union soviétique et la France. En Iran, le Parti communiste Tudeh fait l'objet de mesures draconiennes mise hors la loi, arrestation et exécution de n […] Lire la suiteISLAM Histoire Le monde musulman contemporainÉcrit par Françoise AUBIN, Olivier CARRÉ, Nathalie CLAYER, Andrée FEILLARD, Marc GABORIEAU, Altan GOKALP, Denys LOMBARD, Robert MANTRAN, Alexandre POPOVIC, Catherine POUJOL, Jean-Louis TRIAUD, Universalis • 31 426 mots • 12 médias Dans le chapitre "Modes d'expression et de représentation" … Deux modes de structuration caractérisent, en Europe, l'islam organisé soit l'adoption d'une formule supranationale, sur le modèle des organisations non gouvernementales ONG, comme avec la Ligue islamique mondiale Rābitat-al alām al Islāmī, 1962 ; soit le système des confréries, terreau traditionnel de l'islam organisé autour d'une idée ou d'un maître. Cette seconde formule est celle de Foi […] Lire la Interruption volontaire de grossesseÉcrit par Muriel ROUYER, Odette THIBAULT, Universalis • 3 934 mots Dans le chapitre "La bataille parlementaire" … Une opportunité politique s'ouvre enfin après la mort de Georges Pompidou et la nomination par Valéry Giscard d'Estaing de Simone Veil au ministère de la Santé. Expressément chargée de régler au plus vite cette question pour éviter les débordements, elle a su défendre adroitement et courageusement une loi qu'elle présenta comme un moyen de rétablir l'ordre, la justice et de mettre fin à l'incohér […] Lire la suiteJACQUARD ALBERT 1925-2013Écrit par Jacques TESTART • 1 003 mots • 1 média Généticien, essayiste et militant, Albert Jacquard est né en 1925 dans une famille jurassienne, catholique et conservatrice. Son enfance fut surtout marquée par un accident dramatique qui le laissera défiguré . Après des études brillantes à l’École polytechnique, Albert Jacquard devient haut fonctionnaire à la Seita Société nationale d’exploitation industrielle des tabacs et allumettes puis au m […] Lire la suiteJEANNENEY JEAN-MARCEL 1910-2010Écrit par Charles-Louis FOULON • 828 mots S'il fut, comme son père, ministre du général de Gaulle puis son premier ambassadeur dans l'Algérie indépendante, Jean-Marcel Jeanneney a été surtout un économiste. Agrégé de sciences économiques en 1936, professeur à la faculté de droit de Grenoble à vingt-sept ans, il en fut le doyen de 1947 à 1951 avant d'être professeur d'économie politique à Paris dès 1952. À la Fondation nationale des scien […] Lire la suiteJOBERT MICHEL 1921-2002Écrit par Bruno DIVE • 850 mots Michel Jobert, décédé le 26 mai 2002, est enterré au côté de son épouse, à quelques kilomètres du château de La Ferté-Vidame qui appartint au duc de Saint-Simon. Né à Meknès, au Maroc, le 11 septembre 1921, Michel Jobert n'avait pourtant aucune attache particulière avec ce coin reculé de l'Eure-et-Loir, sinon une admiration pour le célèbre mémorialiste du xviii e siècle avec qui il partageait un […] Lire la suiteJOLY EVA 1943- Écrit par Thomas MARTY • 1 065 mots • 1 média Eva Joly, née Eva Gro Farseth à Oslo en 1943, fut d'abord, avant d'entrer en politique, une magistrate française dont la carrière atypique connut un point d'orgue avec l'instruction de l'affaire Elf dans les années 1990. Cette affaire a fait d'elle l'un des principaux protagonistes du combat juridique et de la révélation médiatique des formes de corruption des élites économiques et politiques en […] Lire la suiteJOSPIN LIONEL 1937- Écrit par Bruno DIVE, Universalis • 1 392 mots • 1 média Homme politique français, Premier ministre de 1997 à 2002. Le 3 avril 1993, lorsqu'il annonce, pour la première fois, son retrait de la vie politique, Lionel Jospin n'est plus rien. Ou presque. Simple conseiller général de Cintegabelle, en Haute-Garonne. Sainte-Gamelle », ironise-t-on alors. Il vient d'être battu, comme tant d'autres, aux élections législatives. Un an plus tôt, il a perdu le por […] Lire la suiteJUPPÉ ALAIN 1945- Écrit par Thomas FERENCZI, Universalis • 1 456 mots Brillante mécanique intellectuelle, pur produit de la méritocratie républicaine, Alain Juppé est né le 15 août 1945, à Mont-de-Marsan Landes, d'une famille d'exploitants agricoles aisés. Entré à Normale sup' à dix-neuf ans en 1964, agrégé de lettres classiques trois ans plus tard, puis énarque et inspecteur des finances, il a fait ainsi partie de ces premiers de la classe » qui peuplent en Fr […] Lire la suiteKOUCHNER BERNARD 1939- Écrit par Antoine SCHWARTZ • 1 132 mots En mai 2007, le choix du président Nicolas Sarkozy de nommer Bernard Kouchner, cofondateur de Médecins sans frontières et de Médecins du monde, au ministère des Affaires étrangères et européennes pouvait surprendre. Rien de moins évident, en effet, que d'imaginer cette figure emblématique de l'humanitaire, célèbre pour ses coups d'éclats médiatiques, endosser le costume de la Realpolitik et les m […] Lire la suiteKRASUCKI HENRI 1924-2003Écrit par Dominique ANDOLFATTO • 848 mots Syndicaliste français, Henoch Krasucki est né le 2 septembre 1924, à Wolomin, près de Varsovie. Il a deux ans lorsque ses parents, juifs et communistes, émigrent à Paris, où il prendra le prénom d'Henri. Son père, Isaac Krasucki, tient un atelier de tricot dans le quartier de Belleville, qui compte alors une importante communauté yiddish. Il est également syndicaliste à la la fraction de […] Lire la suiteLAGARDE CHRISTINE 1956- Écrit par Jean-Marc DANIEL, Universalis • 1 238 mots • 1 média Présidente du Fonds monétaire international FMI de 2011 à 2019 et de la Banque centrale européenne BCE depuis le 1 er novembre 2019, Christine Lagarde est une avocate d’affaires et femme politique entrée relativement tard dans le monde des hauts responsables de l’économie mondiale . Née le 1 er janvier 1956 à Paris, Christine Lallouette passe ses premières années au Havre où ses parents sont […] Lire la suiteLAGUILLER ARLETTE 1940- Écrit par Delphine DULONG • 979 mots Née le 18 mars 1940 à Paris dans une famille ouvrière, Arlette Laguiller incarne la tradition de lutte du mouvement ouvrier. Son parcours individuel comme ses prises de position aussi radicales qu'immuables en font une figure atypique du monde politique français. Contrairement à la plupart des dirigeants politiques, elle n'est guère diplômée. Elle n'a qu'un en poche lorsqu'elle commence à […] Lire la suiteLAMY PASCAL 1947- Écrit par Antoine SCHWARTZ • 1 206 mots • 1 média Inspecteur des finances, ancien commissaire européen, Pascal Lamy a été directeur général de l' Organisation mondiale du commerce OMC de 2005 à 2013. Né en 1947 à Levallois-Perret Hauts-de-Seine, ce fils de pharmaciens a suivi de brillantes études qui l'ont conduit à une carrière dans la haute fonction publique. Diplômé de l'École des hautes études commerciales HEC, puis de l'Institut d'étud […] Lire la suiteLANG JACK 1939- Écrit par Bruno DIVE • 549 mots Jack Lang est le seul homme politique à avoir siégé dans tous les gouvernements de gauche sous la présidence de François Mitterrand, de 1981 à 1986, puis de 1988 à 1993. Titulaire du seul portefeuille de la Culture durant le premier septennat, il retrouve, durant le second, le ministère de la rue de Valois, et est en charge également de la Communication 1988-1992, des Grands Travaux 1988-1991, […] Lire la suiteLECANUET JEAN 1920-1993Écrit par Christian SAUVAGE • 549 mots Né à Rouen, dans un milieu modeste, Jean Lecanuet s'est orienté vers des études littéraires. Diplômé d'études supérieures de lettres et, à vingt-deux ans, plus jeune agrégé de France, il est nommé professeur de philosophie à Douai et à Lille. Il s'engage bientôt dans la Résistance et dans la clandestinité. À la Libération, Jean Lecanuet est inspecteur général au ministère de l'Information ; il mil […] Lire la suiteLE PEN JEAN-MARIE 1928- Écrit par Bruno DIVE, Universalis • 808 mots • 1 média Homme politique français. Né en 1928 à la Trinité-sur-Mer Morbihan, orphelin de père depuis la Seconde Guerre mondiale, Jean-Marie Le Pen s'est investi dans les mouvements d'extrême droite en même temps que dans la vie étudiante. Engagé volontaire dans la légion, il part en 1954 combattre en Indochine, mais arrive après la bataille de Diên Biên Phu. Élu en 1956 député de Paris à la faveur de la […] Lire la suiteLE PEN MARINE 1968- Écrit par Blaise MAGNIN, Universalis • 1 943 mots • 1 média Femme politique française. À partir de son accession à la présidence du Front national FN, devenu Rassemblement national en janvier 2011, Marine Le Pen focalise l'attention des commentateurs politiques et perpétue la singularité du FN. D'une part, elle permet au parti d'extrême droite de se maintenir au cœur du jeu politique tout en suscitant l'hostilité quasi unanime de la classe politique et […] Lire la suiteLES RÉPUBLICAINS LR, parti politiqueÉcrit par Universalis • 314 mots Parti politique français. Les Républicains » est le nom choisi par Nicolas Sarkozy pour donner à l’ un nouveau souffle en 2015. À la suite de son élection à la présidence de l’ en novembre 2014, il renoue en effet avec la tradition des partis gaullistes qui se sont succédé depuis la Libération à nouvel homme, à nouvelle situation, à nouvelle époque doit correspondre un nouveau nom […] Lire la suiteLIBANÉcrit par Philippe DROZ-VINCENT, Elizabeth PICARD, Éric VERDEIL, Universalis • 26 514 mots • 18 médias Dans le chapitre "Mobilisations libanaises face à l'interventionnisme syrien " … La fragile réconciliation nationale après les accords de Taëf, le retour du communautarisme, la crise socio-économique et la souveraineté tronquée provoquent une exaspération générale au sein de la société libanaise, particulièrement exacerbée chez les maronites, qui rejettent les interférences syriennes. À Damas s'installe parallèlement un climat d'ouverture avec le nouveau président Bachar al-A […] Lire la suiteLIBYEÉcrit par Nora LAFI, Olivier PLIEZ, Pierre ROSSI • 11 752 mots • 14 médias Dans le chapitre "La guerre au Tchad" … Les années 1980 sont marquées également par la longue guerre du Tchad, nouvel épisode d'affrontements relatifs à la définition de la frontière sahélienne, contestée depuis la période coloniale. Cette région, à l'articulation de l'empire ottoman et des empires coloniaux français et britannique, avait déjà fait l'objet de débats juridiques franco-anglais en 1899, puis franco-ottomans et enfin franc […] Lire la suiteMACRON EMMANUEL 1977- Écrit par Blaise MAGNIN, Universalis • 2 070 mots • 1 média Emmanuel Macron est le président de la République française depuis mai 2017. Son parcours professionnel qui l’a d’abord mené de la haute fonction publique à la banque d’affaires, son parcours politique singulier qui ne l’avait jamais confronté au suffrage universel avant l’élection présidentielle de 2017, son application constante à transgresser le clivage gauche-droite et sa jeunesse dans un mon […] Lire la suiteMAI-68, L'AFFICHE EN HÉRITAGE M. WlassikoffÉcrit par Marc THIVOLET • 1 075 mots La célébration du quarantenaire des événements de mai 1968 a favorisé une suite d'opérations éditoriales, muséographiques et marchandes. Des expositions ont été organisées à Drouot à Paris par l'étude Camard et Associés et par Artcurial, où les affiches de Mai-68, qui devaient être le couronnement de la vente Mai-68 en mouvements », furent retirées pour une raison inconnue. Des ouvrages ont été […] Lire la suiteMAIRE EDMOND 1931-2017Écrit par Christian SAUVAGE • 518 mots • 1 média Né à Épinay-sur-Seine d'un père cheminot, Edmond Maire est entré dans la vie professionnelle dès sa sortie du lycée. Tout en travaillant aux peintures Valentine, il suit des cours de chimie au Conservatoire national des arts et métiers. Grâce à cette formation, il entre au centre de recherche Pechiney, en 1954, comme technicien chimiste. Il exerce peu son nouveau métier puisque, dès 1958, il devie […] Lire la suiteMALIÉcrit par Pierre BOILLEY, François BOST, Christian COULON, Universalis • 8 587 mots • 7 médias Dans le chapitre "L’internationalisation du problème malien" … La coalition djihadiste formée par AQMI, le MUJAO et Ansar ed-Dine, ayant chassé des villes du nord le MNLA, commença dès janvier 2012 à infliger aux populations un strict régime de charia. Malgré la réprobation internationale, les femmes durent se voiler, la musique, l’alcool et les cigarettes furent interdits, et une justice islamique fut mise en place, ordonnant de fouetter ou de lapider les c […] Lire la suiteMANIFESTATIONÉcrit par Danielle TARTAKOWSKY • 3 727 mots • 2 médias Dans le chapitre "Une forme de référendum d'initiative populaire" … Les manifestations sont devenues plus fréquentes après la crise de 1934. À partir des années 1970, leur croissance devient exponentielle. La Direction de l'ordre public et de la circulation en comptabilise quelque 15 000 à Paris de 1971 à 2002, autant que celles recensées par nos soins dans la France entière de 1918 à 1968. Qu'elle intègre, désormais, les usages officiels de l'espace public, les […] Lire la suiteMARCHAIS GEORGES 1920-1997Écrit par Christian SAUVAGE • 723 mots • 1 média Né à La Hoguette Calvados de père mineur, Georges Marchais entre à vingt ans comme mécanicien ajusteur à la Société nationale de construction aéronautique du Centre. Au cours de l'Occupation, il part travailler en Allemagne ; cette période de sa vie donnera lieu, après son accession à la tête du a une importante polémique qui se poursuivra devant les tribunaux. Dans un premier temps, Geo […] Lire la suiteMAUROY PIERRE 1928-2013Écrit par Christian SAUVAGE • 1 073 mots • 1 média Né à Cartignies Nord le 5 juillet 1928, Pierre Mauroy est le fils d'un instituteur laïc. Après des études à l'École normale nationale d'apprentissage de Cachan, il devient professeur de l'enseignement technique à Colombes, dans la banlieue parisienne, en 1952. Mais ses engagements sociaux et politiques l'éloignent vite de l'enseignement actif. Pierre Mauroy avait en effet adhéré à la dè […] Lire la Mouvement des citoyensÉcrit par Benoît VERRIER • 1 519 mots Dans l'histoire politique française récente, le Mouvement des citoyens est un parti politique dont la chronologie est a priori aisément repérable il est créé au congrès de Saint-Égrève, en 1993, par des socialistes principalement Jean-Pierre Chevènement, Didier Motchane, Georges Sarre, Jean-Pierre Michel, autour d'un triple refus – libéral, atlantiste et européen ; il disparaît en tan […] Lire la suiteMÉLENCHON JEAN-LUC 1951- Écrit par Éric PHÉLIPPEAU, Universalis • 1 737 mots Dans le chapitre "Le professionnel de la politique " … Comme d'autres élus de gauche de stature nationale, Jean-Luc Mélenchon a fait ses premiers pas en politique avec un engagement de jeunesse dans le monde associatif et syndical. Né le 19 août 1951 à Tanger d'une mère institutrice et d'un père télégraphiste pied-noir, il subit avec sa famille le choc du rapatriement, en 1962. Il se signale par son activisme lycéen en mai 1968 à Lons-le-Saunier Jur […] Lire la suiteMESSMER PIERRE 1916-2007Écrit par Jean JOANA • 788 mots Pierre Messmer est né le 20 mars 1916 d'un père industriel. Son engagement dans les Forces françaises libres, sa carrière de haut fonctionnaire colonial, puis ses responsabilités ministérielles, dès les premières années de la V e République, ont progressivement fait de lui une des figures historiques du gaullisme, jusqu'à sa mort, le 29 août 2007. Breveté de l'École nationale de la France d'outre […] Lire la suiteMITTERRAND FRANÇOIS 1916-1996Écrit par Gérard GRUNBERG • 1 871 mots • 2 médias François Mitterrand a été l'une des personnalités politiques françaises les plus importantes de la seconde moitié du xx e siècle. Plusieurs fois ministre sous la IV e République, président de la République sous la V e , il a marqué de son empreinte l'histoire de la gauche française depuis les années 1960, et a présidé à ses destinées pendant un quart de siècle. Il est difficile d'expliquer le pa […] Lire la suiteMONORY RENÉ 1923-2009Écrit par Universalis • 303 mots Homme politique français, ancien président du Sénat 1992-1998. Né à Loudun Vienne, René Monory commence à travailler dans le garage de son père à l'âge de quinze ans. D'un caractère entreprenant, il se lance tôt en politique et est élu maire de Loudun en 1959 ; il le restera durant quarante ans. En 1961, il est élu conseiller général de la Vienne, puis sénateur centriste en 1968. Alors qu'il […] Lire la suiteNATALISMEÉcrit par Hervé LE BRAS • 2 744 mots • 1 média Dans le chapitre "Politiques de l'enfance, familialisme, natalisme" … Comme on le voit, le natalisme interfère avec le soutien de la famille traditionnelle ou familialisme et avec la politique de l'enfant initiée par les États-providence, ce qui complique la situation car des mesures natalistes se dissimuleront derrière une politique de l'enfant et un soutien à la famille traditionnelle derrière le natalisme. Le cas a été particulièrement net en France, dans les an […] Lire la suiteNATIONALISATIONÉcrit par Jean-Claude BONICHOT, Universalis • 6 964 mots Dans le chapitre "Motifs" … Les motifs des nationalisations constituent le dernier élément de leur définition. L'idée fondamentale a toujours été de mettre les entreprises nationalisées au service de la collectivité. C'est la raison pour laquelle on a pu écrire que la nationalisation est vraiment le lieu géométrique du socialisme » B. Chenot, p. 361. Cependant, cette idée de subordination des ensembles économiques à l'in […] Lire la suiteNATIONALITÉÉcrit par Henri BATIFFOL, Patricia BUIRETTE, Jean-Éric MALABRE, Marthe SIMON-DEPITRE, Paul TAVERNIER, Universalis • 10 392 mots Dans le chapitre "Le tournant de la crise" … Le choc pétrolier de 1973 et le ralentissement de la croissance économique inciteront les pouvoirs publics, soucieux de montrer à l'opinion une action visible contre le chômage, à limiter l'entrée et le séjour des étrangers, bien que toutes les études démontrent l'absence de corrélation entre les deux phénomènes. La loi va désormais intégrer peu à peu, en les accréditant, les revendications de l' […] Lire la suiteNEUWIRTH LUCIEN 1924-2013Écrit par François AUDIGIER • 703 mots • 1 média Dans le chapitre "Le législateur engagé" … Nommé secrétaire général du groupe de l’Assemblée en 1959, il devient l’adjoint de Jacques Baumel, secrétaire général du parti. Il appartient au comité central des partis gaullistes successifs e , puis Il est constamment réélu comme député jusqu’en 1977 où, s’étant présenté à Cannes, il est battu. Des législatives partielles dans la Loire lui permettent en 19 […] Lire la suiteNICOLET CLAUDE 1930-2010Écrit par Universalis • 795 mots L' historien français Claude Nicolet, spécialiste d'histoire romaine ainsi que des institutions et idées politiques en France au xix e siècle, est né le 15 septembre 1930 à Marseille dans une famille profondément républicaine et laïque. Ces origines vont doublement marquer son parcours comme historien de la Rome antique J'ai grandi dans un décor de ruines romaines » et comme intellectuel enga […] Lire la suiteNORA SIMON 1921-2006Écrit par Universalis • 173 mots Haut fonctionnaire français. Après des études de droit dans l'Isère, Simon Nora rejoint la Résistance en 1942 Jura et Vercors. Entré à l' en 1945, il débute sa carrière à l'Inspection des finances et travaille, à partir de 1952, auprès de Pierre Mendès France, qui l'intègre dans son cabinet à Matignon, en 1954. L'avènement de la V e République met Nora à l'écart, jusqu'à ce que Georges P […] Lire la suiteNOTAT NICOLE 1947- Écrit par Dominique ANDOLFATTO • 1 126 mots Nicole Notat a été secrétaire générale de la Confédération française démocratique du travail CFDT d'octobre 1992 à mai 2002. Elle est la première femme et, à ce jour, la seule à avoir accédé à la direction d'une centrale syndicale. Mais sa désignation revêtait surtout une signification politique. Elle consacrait un cours nouveau de la CFDT, tournant la page du mouvement ouvrier » et, selon ses […] Lire la suiteNOUVELLE-CALÉDONIEÉcrit par Jean-Christophe GAY, Universalis • 5 096 mots • 6 médias Dans le chapitre "Du statut de TOM à l’insurrection kanak" … Après le sursaut démographique des années 1930, qui intervient grâce à la baisse rapide de la mortalité liée au développement des infrastructures médicales hôpitaux, dispensaires… et aux progrès en matière d’hygiène, la Seconde Guerre mondiale bouleverse la Nouvelle-Calédonie, choisie comme base arrière et tête de pont par les États-Unis pour reconquérir le Pacifique. À partir de 1942, elle est […] Lire la suiteNUCLÉAIRE Applications militairesÉcrit par Paul BOUÉ, Thierry MASSARD, François OLIVE • 8 644 mots • 5 médias Dans le chapitre "Bases des conceptions d'armes" … Le fonctionnement d'une arme nucléaire est un processus complexe qui fait intervenir un grand nombre de phénomènes physiques fortement couplés entre eux écoulements rapides lors de la compression de la matière nucléaire par l'action de l'explosif, neutronique des réactions de fission en chaîne, transport du rayonnement dans les matériaux portés à l'état de plasma, physique nucléaire avec les réa […] Lire la suiteNYSSEN FRANÇOISE 1951- Écrit par Claude COMBET • 1 035 mots • 1 média Scientifique devenue éditrice, Françoise Nyssen dirige les éditions Actes Sud, qui,en quarante ans, ont connu une vraie réussite leur permettant de trouver place parmi les plus prestigieuses maisons d’édition françaises . […] Lire la suiteOBS L', hebdomadaire, anc. NOUVEL OBSERVATEUR LEÉcrit par Christine LETEINTURIER • 924 mots L’ Obs est un magazine hebdomadaire qui a connu plusieurs changements de dénomination il s’appelle L'Observateur politique, économique et littéraire à son lancement en 1950, puis L'Observateur aujourd'hui en 1953 ; devenu France-Observateur en 1954, puis Le Nouvel Observateur en 1964, il prend son titre actuel en 2014. Son premier numéro, tiré à 20 000 exemplaires, paraît le 13 avril 1950 […] Lire la suiteORSENNA ERIK 1947- Écrit par Véronique HOTTE • 818 mots Erik Orsenna – pseudonyme d'Erik Arnoult – est né à Paris le 22 mars 1947. Après des études de philosophie et de sciences politiques, il choisit l'économie qui le mène à l'enseignement et à la recherche dans la finance internationale et l'économie du développement. En 1981, il rejoint le cabinet du ministère de la Coopération, et en 1983, l'Élysée, en tant que conseiller culturel une période qu' […] Lire la suitePAPON MAURICE 1910-2007Écrit par Charles-Louis FOULON • 839 mots Depuis sa condamnation pour complicité de crimes contre l'humanité, Maurice Papon incarne la collaboration de la haute fonction publique avec les persécutions antisémites du III e Reich. C'est pourquoi, au surlendemain de sa mort survenue le 17 février 2007, le journal Libération put qualifier de préfet du crime » celui qui fut ensuite préfet de police, député, trésorier du parti gaulliste et […] Lire la suitePARISÉcrit par Jean-Pierre BABELON, Michel FLEURY, Frédéric GILLI, Daniel NOIN, Jean ROBERT, Simon TEXIER, Jean TULARD • 32 119 mots • 21 médias Dans le chapitre "Les projets d'un siècle" … À l'occasion de l'inauguration de la Cité de l'architecture et du patrimoine, le 17 septembre 2007, le président de la République Nicolas Sarkozy a exprimé le souhait qu'un nouveau projet d'aménagement global du Grand Paris » puisse faire l'objet d'une consultation internationale assez ample pour mobiliser les compétences d'une dizaine d'agences d'architecture et d'urbanisme. Lancée au début de […] Lire la suitePASQUA CHARLES 1927-2015Écrit par Blaise MAGNIN • 984 mots • 1 média Dans le chapitre "L’engagement gaulliste" … Issu d’une famille corse, Charles Pasqua naît en 1927, à Grasse Alpes-Maritimes, où son père est policier. Au cours de la Seconde Guerre mondiale, encore adolescent, le futur ministre de l’Intérieur s’engage dans la résistance et rejoint la France libre du général de Gaulle. Après la guerre, il entreprend des études de droit et s’installe à Marseille, où il trouve un emploi chez Ricard en 1952. […] Lire la suitePATRIMOINE INDUSTRIEL FranceÉcrit par Bruno CHANETZ, Laurent CHANETZ • 6 548 mots • 2 médias Longtemps les conservateurs du patrimoine ne se sont mobilisés que pour la seule conservation des édifices civils et religieux anciens. Si un bâtiment industriel faisait l'objet d'une protection, c'était en raison de son ancienneté et de ses qualités architecturales propres. C'est seulement dans le dernier quart du xx e siècle, alors qu'un grand nombre de destructions avaient déjà été opérées au […] Lire la suitePATRIMOINE MINIER EN EUROPEÉcrit par Louis BERGERON • 2 676 mots Dans le chapitre "Les musées de sites miniers" … Le signal le plus visible du massacre du patrimoine des sites miniers a été sans aucun doute l'acharnement avec lequel en France, par exemple, les chevalements des bassins houillers ont été détruits jusqu'au début des années 1990. Dans le bassin de Blanzy-Montceau-les-Mines il n'en est pas resté un seul debout. Un désastre total a été évité grâce à la prise de conscience, de la part des pouvoirs […] Lire la suitePCF Parti communiste françaisÉcrit par Bernard PUDAL • 7 133 mots • 3 médias Dans le chapitre "Aggiornamento et union de la gauche 1956-1977" … Du début des années 1960 à la rupture de l'union de la gauche en 1977, le premier aggiornamento, mouvement complexe où la révision théorique, la pratique des alliances électorales, le renouvellement du personnel dirigeant et le nouveau statut concédé aux intellectuels s'appellent les uns les autres » Frédérique Matonti, s'est traduit par la refonte de très nombreux invariants rhétoriques de l' […] Lire la suitePÉDAGOGIE Les approches contemporainesÉcrit par Daniel HAMELINE, Jacques PAIN • 5 746 mots Dans le chapitre "Période contemporaine radicalisation du problème de fond" … Pour autant, les débats ne cessent pas, car, au fond, la pédagogie interroge directement l'école française. Or cette dernière fait piètre mine depuis le début des années 1990. Ses résultats moyens soutiennent l'effort des classes moyennes, et la pyramide scolaire » s'est reconstituée plus massive et plus large, mais tout aussi sélective et élitiste que dans les années 1950. Or la pédagogie est […] Lire la suitePEYREFITTE ALAIN 1925-1999Écrit par Bruno DIVE • 830 mots Académicien et ministre, homme politique et écrivain, diplomate et journaliste, Alain Peyrefitte est le type même de l'intellectuel engagé en politique, à moins que ce ne soit le contraire. Ce personnage brillant, mais aussi intransigeant, ne laissait pas indifférent. On l'admirait pour son œuvre ; il se fit aussi beaucoup d'ennemis lors de ses passages dans divers ministères. Né en 1925 à Najac […] Lire la suitePHILIPPE ÉDOUARD 1970- Écrit par Blaise MAGNIN, Universalis • 1 305 mots • 1 média Homme politique français, Premier ministre de 2017 à 2020. Après sa nomination au poste de Premier ministre le 15 mai 2017 par Emmanuel Macron, le président de la République nouvellement élu, Édouard Philippe est au faîte de sa carrière. Il se trouve pourtant dans une situation politique quelque peu inconfortable chef d’un gouvernement qui ne se voudrait ni de droite ni de gauche », il n’en a […] Lire la suitePOHER ALAIN 1909-1996Écrit par Bruno DIVE • 968 mots Alain Poher, décédé le 9 décembre 1996, a présidé le Sénat pendant vingt-quatre ans. C'est à ce titre, comme deuxième personnage de l'État, qu'il a assumé par deux fois l'intérim de la présidence de la République, en 1969 et en 1974. Mes cent jours », ironisait-il volontiers sur ce double séjour à l'Élysée qui le fit connaître des Français. Ces deux intérims se sont cependant déroulés dans des c […] Lire la suitePOLICE FRANÇAISE HISTOIRE DE LAÉcrit par Jean-Marc BERLIÈRE • 3 672 mots Dans le chapitre "La police depuis la Libération " … Ne manquait plus à cette centralisation et à cette unification que la fin du statut particulier et de l'autonomie de la police parisienne que le gouvernement de Vichy ne réussit pas à remettre en cause. Ironie du sort, c'est le général de Gaulle – qui incarne le refus de Vichy – qui met fin à cette insularité en 1966 à la suite de l'affaire Ben Barka. Le rattachement symbolique au ministère de l' […] Lire la suitePONCELET CHRISTIAN 1928-2020Écrit par Bruno DIVE • 909 mots Christian Poncelet est un homme politique français. Ce Vosgien a multiplié les mandats électifs et occupé quelques postes ministériels, avant de devenir président du Sénat de 1998 à 2008. Né dans un petit village des Ardennes le 24 mars 1928, d’une mère femme de ménage et d’un père mécanicien – qui quittera six mois plus tard le domicile conjugal –, Christian Poncelet est issu d’un milieu populair […] Lire la suitePROJET DU GRAND PARISÉcrit par Arnaud BALVAY • 306 mots Le 17 septembre 2007, lors de l'inauguration de la Cité de l'architecture et du patrimoine à Paris, le président de la République Nicolas Sarkozy prononce un discours dans lequel il déclare qu'il souhaite qu'un nouveau projet d' aménagement global du Grand Paris » soit l'objet d'une consultation internationale impliquant huit à dix agences d'architectes. L'objectif serait d'imaginer ce que pourr […] Lire la suitePROTECTION SOCIALEÉcrit par Vincent VIET • 4 332 mots • 1 média Dans le chapitre "De nouveaux enjeux" … Les difficultés grandissantes que les États-providence éprouvent, depuis le milieu des années 1970, à financer leur protection sociale redonnent une certaine actualité aux thèses libérales, promptes à dénoncer l'existence de trappes à inactivité » ou de profiteurs », mais aussi soucieuses de revivifier la prévoyance libre ou d'agir non sur les situations mais sur les ressources théories po […] Lire la suitePROTESTANTISME Problèmes contemporainsÉcrit par Jean BAUBÉROT • 3 720 mots Dans le chapitre "L'exemple de deux situations nationales" … Constituées généralement en des Églises nationales, les Églises protestantes sont profondément marquées par la situation de leurs pays respectifs, comme en témoignent l'exemple de l'Église évangélique allemande ou celui du protestantisme français. Avant la réunification de l'Allemagne, l'Église évangélique dénomination qui recouvre l'ensemble des protestants de la République démocratique alleman […] Lire la suitePS Parti socialiste, FranceÉcrit par Frédéric SAWICKI, Universalis • 7 736 mots • 5 médias Déjà, avril 2005, le avait célébré son centenaire, sans pompes particulières, principalement sous la forme d'un colloque. Cette discrète commémoration traduit le rapport problématique que ses dirigeants entretiennent avec leur histoire. Si ces derniers n'ont jamais cessé de revendiquer l'héritage de Jean Jaurès et de Léon Blum, la filiation avec la SFIO a toujours été beaucoup plus difficile […] Lire la suiteRAFFARIN JEAN-PIERRE 1948- Écrit par Delphine DULONG • 1 013 mots Né le 3 août 1948 à Poitiers, Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre du gouvernement français de 2002 à 2005, déroge au profil de ses prédécesseurs. Ni normalien, ni énarque, mais diplômé de l'École supérieure de commerce de Paris ESCP, il se prévaut de bien connaître le monde de l'entreprise et se présente comme un défenseur des terroirs » et de la France d'en bas ». Cette image d'anti-hér […] Lire la suiteRÉFORME DES RETRAITESÉcrit par Pierre CONCIALDI • 10 631 mots • 4 médias La question des retraites occupe régulièrement l'actualité économique et sociale depuis la fin des années 1980. Cet article propose quelques éclairages sur les réformes engagées et les principaux débats que ces transformations suscitent. Une première partie examine les enjeux liés à la question du vieillissement. On y montre aussi la coïncidence entre la montée en puissance de ce débat et l'arriv […] Lire la suiteRÉUNION ÎLE DE LAÉcrit par Yvan COMBEAU, Guy FONTAINE • 4 765 mots • 1 média Dans le chapitre "Les mutations de la départementalisation" … En 1946, alors que l'empire colonial français se fissure, La Réunion devient, le 19 mars, dans la continuité de ses revendications d'avant-guerre, le 87 e département français. Cette victoire électorale est étroitement liée à l'action des députés réunionnais Léon de Lepervanche et Raymond Vergès, tous deux membres du Parti communiste français. Pourtant, avec l'instauration de la IV e République, […] Lire la suiteREVENUS ET PATRIMOINE DES MÉNAGES, FranceÉcrit par Alain BIHR, Roland PFEFFERKORN • 4 560 mots • 3 médias Dans le chapitre " Les inégalités de revenus" … On appelle revenu disponible d'un ménage l'ensemble de ses revenus revenus d'activité, revenus patrimoniaux, revenus sociaux ou de transfert, déduction faite des prélèvements obligatoires impôts directs et cotisations sociales que le ménage et ses membres doivent acquitter. Pour tenir compte de la taille et de la composition du ménage, on rapporte ce revenu au nombre des unités de consommation […] Lire la suiteROCARD MICHEL 1930-2016Écrit par Blaise MAGNIN • 1 034 mots • 1 média Dans le chapitre "Du haut fonctionnaire au dirigeant politique" … Michel Rocard est né le 23 août 1930 à Courbevoie Seine d’une mère institutrice et d’un père, Yves Rocard, qui fut l’un des plus grands physiciens français de sa génération. C’est contre l’avis de ce dernier qu’il renonce à une carrière scientifique pour entrer en 1947 à l’Institut d’études politiques de Paris, avant de choisir la voie des carrières publiques en intégrant l’École nationale d’adm […] Lire la suiteROYAL SÉGOLÈNE 1953- Écrit par Frédérique MATONTI, Universalis • 1 535 mots • 1 média Femme politique française. Marie-Ségolène Royal est née le 22 septembre 1953 à Dakar, quatrième d'une famille de huit enfants. Elle est la fille d'un lieutenant-colonel, issu d'une longue lignée de hauts gradés, un homme qu'elle décrit comme très conservateur, voire Algérie française », votant Tixier-Vignancour en 1965, catholique traditionaliste. Sa famille s'étant installée dix ans plus tard […] Lire la suiteRPR Rassemblement pour la RépubliqueÉcrit par Christian SAUVAGE, Universalis • 1 256 mots • 1 média Après sa démission de l'hôtel Matignon, en 1976, Jacques Chirac entreprend de réorganiser le mouvement gaulliste. C'est ainsi que naît le Rassemblement pour la République le 5 décembre 1976. La croix de Lorraine fait place au bonnet phrygien. La volonté d'ouverture se manifeste aussi par la nomination comme secrétaire général d'un haut fonctionnaire, Jérôme Monod, peu habitué jusque-là a […] Lire la suiteRWANDAÉcrit par François BART, Jean-Pierre CHRÉTIEN, Marcel KABANDA • 11 976 mots • 5 médias Dans le chapitre "De la Révolution sociale » 1959-1961 au génocide 1994" … En novembre 1959, la Belgique met en route un processus d'autonomie interne. Mais la tension est montée au Rwanda depuis la mort subite de Mutara, en juillet précédent un nouveau mwami, Kigeri Ndahindurwa, a été intronisé par les milieux les plus traditionalistes ; des partis politiques sont nés le Parmehutu Parti du mouvement de l'émancipation des Hutu et l'Aprosoma Association pour la pr […] Lire la suiteSANGUINETTI ANTOINE 1917-2004Écrit par Universalis • 187 mots Militaire français. Résistant, commandant du porte-avions Clemenceau 1967-1968 et major général de la marine 1972-1974, il termine sa carrière au grade de vice-amiral d'escadre 1974. Antoine Sanguinetti s'est fait remarquer par sa liberté de ton, peu commune au sein de la grande muette ». Ses critiques de la politique atlantiste de la France lui valent une mise à la retraite anticipée en […] Lire la suiteSARKOZY NICOLAS 1955- Écrit par Bruno DIVE, Universalis • 1 733 mots • 3 médias Homme politique français, Nicolas Sarkozy a occupé différents postes locaux et nationaux mandats électifs, fonctions ministérielles puis a été président de la République française de 2007 à 2012. Quand il succède au président de la République Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy ne cache pas une certaine admiration pour l'ancien chef du Rassemblement pour la République RPR, auquel il se compare vo […] Lire la suiteSCHWARTZENBERG LÉON 1923-2003Écrit par Jacques MILLIEZ • 958 mots Cancérologue français, Léon Schwartzenberg est né le 2 décembre 1923 à Paris et mort le 14 octobre 2003 à Villejuif Val-de-Marne. À l'âge de vingt ans, il s'engagea dans la Résistance, dans les maquis des corps francs. Volontaires à ses côtés, ses deux frères cadets y perdront la vie, déportés à Mauthausen. Pour avoir de si près côtoyé la mort, titulaire de la médaille militaire, de la médaill […] Lire la suiteSÉGUIN PHILIPPE 1943-2010Écrit par Bruno DIVE, Universalis • 1 270 mots Président de l'Assemblée nationale et Premier président de la Cour des comptes, Philippe Séguin a eu à cœur toute sa vie de se montrer digne de son père, héroïque et inconnu, mort pour la France en septembre 1944, et dont il a reçu la médaille militaire le 11 novembre 1949, à six ans et demi. Philippe Séguin est né le 21 avril 1943 à Tunis. Il y fera ses études primaires avant que l'indépendance d […] Lire la suiteSERVAN-SCHREIBER JEAN-JACQUES 1924-2006Écrit par Serge BERSTEIN • 881 mots Jean-Jacques Servan-Schreiber, né en 1924, trouve dans son héritage familial la double tradition du journalisme et du radicalisme son père, Émile Schreiber, est codirecteur du journal Les Échos , et sa tahte, Suzanne Schreiber, accède en 1926 au secrétariat du Parti radical, dont elle devient la vice-présidente en 1931. Aux traditions familiales, le jeune Jean-Jacques ajoutera sa propre touche, […] Lire la suiteSERVICES SECRETSÉcrit par Pascal LE PAUTREMAT • 8 742 mots • 1 média Dans le chapitre "Autres pays" … Depuis le début des années 2000, en raison de la lutte internationale contre les terrorismes, de toute nature et de toute obédience, les grandes puissances ne cessent de redynamiser leurs pôles de renseignements. Si les services secrets occidentaux demeurent une référence incontestable, leurs homologues asiatiques ne sont pas à négliger, à l'instar des services spéciaux de la République populaire […] Lire la suiteSEXE ET GENRE Enseigner les études sur le genre au lycéeÉcrit par Christine GUIONNET • 2 565 mots • 1 média L'année 2011 fut l'occasion de vigoureux débats à propos de l'enseignement de la notion de genre au lycée. Le débat connut l'un de ses paroxysmes à la fin d’août 2011, lorsque quatre-vingts députés de la majorité présidentielle d'alors demandèrent le retrait d'un manuel scolaire de première ES et L, édité par Hachette et destiné à l'enseignement des sciences de la vie et de la Terre. L'o […] Lire la suiteSFIO Section française de l'Internationale ouvrièreÉcrit par François BROUSSE, Universalis • 1 522 mots Après la défaite de la Commune, le mouvement ouvrier français est réduit au silence pendant plusieurs années, puis, à partir de 1876, se tiennent des congrès ouvriers regroupant des délégués de syndicats et de coopératives, auxquels se joignent bientôt des représentants des groupes d'études socialistes animés notamment par Jules Guesde. Sous l'impulsion de ces derniers, le Congrès ouvrier de Marse […] Lire la suiteSOCIALISME Social-démocratieÉcrit par Philippe MARLIÈRE • 10 078 mots • 4 médias Dans le chapitre "Le virage social-libéral" … Dans les années 1980, les brèves expériences néo-keynésiennes du PS français 1981-1982 et du PASOK grec 1981-1984, poursuivies dans un environnement international hostile, se sont soldées par des échecs. La social-démocratie se retrouve sans cadre théorique et programmatique. Les partis sociaux-démocrates alors au pouvoir dans le sud de l'Europe mènent des politiques de désinflation compétiti […] Lire la suiteSPOLIATION DES ŒUVRES D'ART, France 1940-1944Écrit par Didier SCHULMANN • 4 785 mots Dans le chapitre "La tentation de la polémique" … En 1996, la presse quotidienne, les revues et les magazines eurent à rendre compte du colloque Pillages et restitutions, le destin des œuvres d'art sorties de France pendant la Seconde Guerre mondiale , organisé au Louvre par la Direction des musées de France le 17 novembre 1996 ainsi que des recherches menées sur la question des spoliations artistiques par les nazis, en tant que problém […] Lire la suiteSTORA BENJAMIN 1950- Écrit par Pierre VERMEREN • 1 168 mots • 1 média Benjamin Stora est un historien français spécialiste de l’histoire de l’Algérie contemporaine . Son œuvre, qui compte des dizaines de livres et de films, porte essentiellement sur le nationalisme algérien, la guerre d’Algérie, puis sur leurs mémoires croisées dans la longue durée, en France et en Algérie. En dépit d’une solide formation marxiste, il a rompu avec l’histoire anticolonialiste matéri […] Lire la suiteSTRAUSS-KAHN DOMINIQUE 1949- Écrit par Rémi LEFEBVRE • 1 176 mots La trajectoire de Dominique Strauss-Kahn, universitaire et homme politique, est celle d'un économiste en politique qui cherche à incarner et à porter la modernisation idéologique du socialisme français. Il fait valoir son expertise au sein du Parti socialiste, où le poids de l'économie a redéfini les critères de l'excellence politique mais où il n'est jamais parvenu à structurer une influence dur […] Lire la suiteSYNDICATS AGRICOLESÉcrit par Jean VERCHERAND • 8 876 mots Dans le chapitre "Les oppositions à la politique de modernisation" … Celles-ci sont d’abord l’œuvre du Mouvement de défense des exploitants familiaux Modef, créé en 1959 à Toulouse à l'initiative de militants communistes afin de coordonner l'action d'équipes éparses dont l'influence avait décliné depuis la Libération. Le Modef ne commence vraiment à faire parler de lui que dans la seconde moitié des années 1960 et au cours des années 1970 en obtenant de bons rés […] Lire la suiteSYRIEÉcrit par Fabrice BALANCHE, Jean-Pierre CALLOT, Philippe DROZ-VINCENT, Philippe RONDOT, Charles SIFFERT, Universalis • 37 006 mots • 12 médias Dans le chapitre "Ouverture sur l'extérieur" … Le régime de Bachar al-Assad manifeste une volonté d'ouverture extérieure, qui représente aussi une manière d'accéder à des ressources nouvelles. Les proximités avec la Russie et l' Iran sont naturellement renforcées, représentant des fondamentaux » du système syrien l'Iran pour l'approvisionnement énergétique qui s'accroît dans les années 2000 ; la Russie de Vladimir Poutine en matière financ […] Lire la suiteTAPIE BERNARD 1943-2021Écrit par Bruno DIVE • 1 053 mots • 1 média Bernard Tapie est un homme d’affaires et un homme politique français. Né le 26 janvier 1943 à Paris au sein d’une famille modeste, d’un père ouvrier-fraiseur et d’une mère aide-soignante, Bernard Tapie grandit en Seine-Saint-Denis. Il commence des études d’ingénieur mais, très vite, rêve de s’enrichir. En 1966, sous le nom de Bernard Tapy, il produit un disque de chansons yéyé ». Un an plus tard […] Lire la suiteTAUBIRA CHRISTIANE 1952- Écrit par Blaise MAGNIN, Universalis • 1 186 mots • 1 média Christiane Taubira est une figure singulière de la vie politique française tant par ses origines, son parcours militant, que par son style oratoire éloquent et lettré, au lyrisme presque suranné, tranchant avec les discours technocratiques qui dominent l’arène politique. Aussi, sa nomination au poste de ministre de la Justice en mai 2012, à la suite de l’élection de François Hollande à la présid […] Lire la suiteTCHADÉcrit par Marielle DEBOS, Jean-Pierre MAGNANT, Roland POURTIER, Universalis • 9 797 mots • 8 médias Dans le chapitre "La dictature brutale de Hissène Habré 1982-1990" … Hissène Habré, devenu président de la République, mit en place un gouvernement d'ouverture avec des personnalités de divers horizons. En décembre 1982 étaient créées les Forces armées nationales tchadiennes FANT réunissant les ex-rebelles des FAN et les anciens militaires des forces régulières qui s'étaient repliées vers le Sud. La victoire des troupes de Hissène Habré n'avait cependant pas mis […] Lire la suiteTEMPÊTES EN FRANCE 1999 et 2009Écrit par Christian BARTHOD • 971 mots • 1 média Des tempêtes de grande ampleur ont touché la France depuis la fin des années 1990. La tempête du 26 décembre et celle de la nuit du 27 au 28 décembre 1999 , nommées respectivement Lothar et Martin, ont causé des dégâts sans précédent, tout en affectant sévèrement les forêts suisses, allemandes Bade-Wurtemberg et danoises, marquant durablement les paysages et les mémoires ; la tempête du 23 au 25 […] Lire la suiteTHÉÂTRE OCCIDENTAL L'École du spectateurÉcrit par Dominique PAQUET • 2 547 mots Dans le chapitre "L'institutionnalisation" … À partir de 1981, les ministères de la Culture et de l'Éducation nationale vont mettre en commun leurs moyens de réflexion. Dès 1983, une ligne budgétaire prévoit des financements pour les actions artistiques. Le ministère de l'Éducation nationale crée ainsi un plan académique de formation » des enseignants pendant leurs heures de service. En 1983, l'Association nationale de recherche et d'acti […] Lire la suiteTHIBAULT BERNARD 1959- Écrit par Dominique LABBÉ • 1 170 mots En février 1999, Bernard Thibault a été élu secrétaire général de la Confédération générale du travail à l'occasion du 46 e congrès confédéral. Âgé de quarante ans, il symbolise le nouveau cours souhaité par la majorité des responsables de la première centrale syndicale française. En effet, il succède à deux dirigeants âgés Henri Krasucki puis Louis Viannet qui, durant les années 1980 […] Lire la suiteTHINK TANKSÉcrit par Keith DIXON • 4 211 mots Dans le chapitre "Expansion mondiale" … Le succès apparent des think tanks américains et britanniques dans la conversion de l'élite politique aux idées conservatrices et néolibérales au cours des années 1970 et 1980 va entraîner une véritable explosion du phénomène sur tous les continents. Les grands think tanks conservateurs américains y sont pour quelque chose puisque certains d'entre eux vont activement essaimer en Amérique latine, e […] Lire la suiteTJIBAOU JEAN-MARIE 1936-1989Écrit par Jean-Pierre DOUMENGE • 1 072 mots • 1 média Né en 1936 à Tiendanite, petit village tribal de la vallée de Hienghène, Jean-Marie Tjibaou reçut une éducation catholique qui devait durablement le marquer. Il fréquenta l'école de la mission de Canala jusqu'en 1947, puis entra au petit séminaire de Païta. Il effectua son noviciat à l'île des Pins et fut ordonné prêtre en 1965 à Hienghène, mais exerça son ministère à la cathédrale de Nouméa. Entr […] Lire la suiteTOLÉRANCE ZÉROÉcrit par Laurent MUCCHIELLI • 2 682 mots Venue des États-Unis, la notion de tolérance zéro » a pris une place importante dans le débat public français, dans le contexte électoral des années 2001 et 2002. Tout en se démarquant plus ou moins nettement du modèle américain, la plupart des responsables politiques à l'exception des écologistes et de l'extrême gauche ont repris à leur compte cette idée pour signifier à l'opinion publique qu […] Lire la suiteTOUAREGÉcrit par René OTAYEK • 4 579 mots • 1 média Dans le chapitre "La question touarègue et l’après-Kadhafi" … Mais cet intérêt des grandes puissances n’empêche pas le Sahara de s’embraser après la chute du régime du colonel Kadhafi à l’automne de 2011. Confronté, comme d’autres États arabes Tunisie, Égypte, Maroc, Bahreïn, etc., à une vague de contestation démocratique à partir de février 2011, le régime libyen doit, en outre, faire face à une intervention militaire internationale menée sous l’égide de […] Lire la suiteTOUBON JACQUES 1941- Écrit par Bruno DIVE, Universalis • 1 214 mots • 1 média Haut fonctionnaire et homme politique français , Jacques Toubon a été l’une des principales figures de la droite gaulliste française, avant d’exercer le mandat de Défenseur des droits de 2014 à 2020, institution à laquelle il a donné une envergure nouvelle par des prises de position sans concession. Jacques Toubon a quitté le 17 juillet 2020 cette fonction de Défenseur des droits, au terme d’un ma […] Lire la suiteTRANSPORTS Transports et risquesÉcrit par Michel QUATRE • 8 640 mots • 7 médias Dans le chapitre "Les déplacements personnels, la sécurité routière" … Le partage de la voirie par les usagers divers – piétons, cyclistes, motocyclistes, automobilistes, cars et poids lourds – a conduit les pouvoirs publics à réglementer les conditions d'usage de celle-ci par des dispositions générales comme le code de la route en France et des applications locales comme les sens uniques et les limitations de vitesse. Certes la navigation de plaisance ou l'aviation […] Lire la suiteTRAVAIL La fin du travail ?Écrit par Dominique MEDA • 7 671 mots Dans le chapitre "Montée de l'activité féminine et manque de temps" … On est passé d'un taux d'activité féminine entre vingt-cinq et quarante-neuf ans de 41,5 p. 100 en 1962 à 80 p. 100 en 2000, et l'on a assisté à de profondes modifications des comportements d'activité, du niveau d'études et des souhaits féminins de carrière sans que les modèles en place, les mentalités, les comportements, les institutions soient rénovés et adaptés à cette nouvelle donne. Les femm […] Lire la suiteTRIANGLE D'OR ParisÉcrit par Michel PINÇON, Monique PINÇON-CHARLOT • 2 318 mots • 1 média À Paris, les familles de la haute société, de la bourgeoisie ancienne et de la noblesse fortunée, ont manifesté leur position sociale par l'habitat qu'elles ont choisi et aménagé. Elles ont ainsi créé des quartiers, façonnés à leur image, sur des terres encore vierges, aux limites de Paris aux xviii e et xix e siècles les faubourgs Saint-Germain et Saint-Honoré ou, dans les années 1950, à Neui […] Lire la suiteTRICHET JEAN-CLAUDE 1942- Écrit par Jean-Marc DANIEL • 1 141 mots • 1 média Haut fonctionnaire français, il a dirigé la Banque centrale européenne de 2003 à 2011. En novembre 2003, couronnement de sa carrière d'inspecteur des finances, Jean-Claude Trichet passe du siège de gouverneur de la Banque de France à celui de gouverneur de la Banque centrale européenne . Cette promotion ne semble avoir changé ni sa philosophie économique, ni le type de relations qu'il ent […] Lire la suiteTUNNEL SOUS LA MANCHEÉcrit par Laurent BONNAUD • 9 420 mots • 9 médias Dans le chapitre "Le traité de Canterbury ou de Cantorbéry et la concession" … Le 12 février 1986, un traité fixe les engagements réciproques des États et leurs liens avec le promoteur retenu. Ce document juridique novateur définit une nouvelle frontière entre la France et le Royaume-Uni et précise les principes directeurs de la concession. Il est signé dans la cathédrale de Canterbury d’où son appellation de traité de Canterbury. Le 14 mars 1986 est conclue à Paris, puis […] Lire la suiteTUTSI GÉNOCIDE DESÉcrit par Marcel KABANDA • 7 532 mots Dans le chapitre "L'opération Turquoise ou les ambiguïtés d'une opération militaro-humanitaire" … Le 22 juin 1994, le Conseil de sécurité de l' votait sur proposition française une résolution autorisant l'intervention sur le territoire du Rwanda d'une force armée, à vocation humanitaire » et neutre, de 2 500 hommes, placés sous commandement français . La communauté internationale revient au Rwanda après avoir assisté de loin, pendant plus de deux mois, et sans réagir à la commission d' […] Lire la Union pour la démocratie françaiseÉcrit par Julien FRETEL • 2 672 mots • 2 médias L'Union pour la démocratie française est aujourd'hui l'une des principales formations de la droite républicaine française. En nombre d'élus et d'adhérents, elle est le deuxième parti politique de la droite et du centre, assez loin derrière l' Union pour un mouvement populaire On la définit généralement comme une organisation qui promeut des idées libérales, sociales et européen […] Lire la Union pour un mouvement populaireÉcrit par Pierre BRÉCHON, Universalis • 3 376 mots • 1 média Dans un contexte de bipolarisation du système politique sous la V e République, la droite française a, de 1978 à la fin des années 1990, été structurée autour de deux grandes forces politiques, le et l' qui avaient pendant longtemps une force comparable dans l'électorat. La lutte à l'intérieur de la coalition de droite fut féroce, chaque partenaire voulant dominer l'autre. La droi […] Lire la suiteURBANISME L'urbanisme en France au XXe siècleÉcrit par Simon TEXIER • 10 204 mots • 3 médias Dans le chapitre "De la ville à l'urbain" … Le 21 mars 1973, une directive ministérielle met fin à la construction des grands ensembles. Les mesures adoptées par la suite, notamment par le ministre de l'Équipement et du Logement Albin Chalandon, mettront l'accent sur les programmes de construction de maisons individuelles et de petits immeubles collectifs. Cette incitation à l'urbanisme pavillonnaire aura pour conséquence un étalement de p […] Lire la suiteVALLS MANUEL 1962- Écrit par Blaise MAGNIN, Universalis • 1 352 mots • 1 média Homme politique français, Manuel Valls a été Premier ministre de 2014 à 2016. Comme d’autres responsables de sa génération du Parti socialiste PS, après de longues années dans l’opposition, Manuel Valls a connu sa première expérience ministérielle sur le tard, en 2012, après l’élection de François Hollande à la présidence de la République. Au ministère de l’Intérieur, il a su s’imposer comme un […] Lire la suiteVEIL SIMONE 1927-2017Écrit par Catherine ACHIN, Universalis • 1 829 mots • 3 médias Simone Veil a sans nul doute été la femme politique française la plus célèbre et la plus populaire à partir du milieu des années 1970. Cette renommée est due à son combat pour la loi qui porte son nom, relative à l'interruption volontaire de grossesse IVG votée en 1975, et à un parcours de vie exceptionnel marqué par la tragédie, intimement inscrit dans l'histoire politique de l'Europe du xx e […] Lire la suiteVERTS LES, FranceÉcrit par Florence FAUCHER-KING • 3 052 mots L'écologie politique a fait son entrée sur la scène française avec la candidature de René Dumont à l'élection présidentielle de 1974. Critiques à l'égard des institutions, les écologistes se sont d'abord engagés dans des associations environnementalistes, tiers-mondistes et humanistes. Le mouvement antinucléaire a servi de catalyseur aux revendications en raison du soutien que les mouvements d'ex […] Lire la suiteVILLE Les politiques de la villeÉcrit par Véronique LE GOAZIOU • 4 382 mots • 1 média Dans le chapitre "Résoudre les maux des quartiers »" … La politique de la ville, ainsi dénommée officiellement à la fin des années 1980 le premier ministre de la Ville, en France, sera Michel Delebarre, en 1990, naît des tentatives successives pour résoudre ces difficultés. Lesquelles ne cesseront de croître, d'évoluer et de s'amplifier jusqu'à occuper une place majeure dans le débat public, au titre d'une des principales sources d'inquiétudes coll […] Lire la suiteVILLEPIN DOMINIQUE DE 1953- Écrit par Josseline ABONNEAU, Universalis • 1 288 mots Dominique de Villepin doit sa fulgurante carrière politique à sa relation de confiance avec Jacques Chirac dont il a partagé toutes les décisions à partir de 1995. Nommé Premier ministre, le 31 mai 2005, le surlendemain de l'échec du référendum sur le traité constitutionnel, il a été le troisième chef de gouvernement de la V e République après Georges Pompidou et Raymond Barre à n'avoir jamais […] Lire la suiteVOILE, islamÉcrit par Pascal BURESI • 1 152 mots • 1 média La question du voile islamique fait son entrée fracassante dans les médias français en octobre 1989, avec l' affaire du foulard », lorsque trois adolescentes musulmanes françaises voilées sont refoulées à l'entrée de leur collège, à Creil. Depuis lors, presque toutes les personnalités des médias ou de la politique ont pris la parole et tous les journaux ont fait leur une sur cette question, ou p […] Lire la suitePréciser avec l'index1 articleÀ L'AMI QUI NE M'A PAS SAUVÉ LA VIE, Hervé Guibert12 articlesA PRIORI CONNAISSANCE5 articlesA CAPPELLA, musique8 articlesVITAMINE A4 articlesSAGITTARIUS A*2 articlesHÉPATITE A1 articleCONCANAVALINE A1 articleMOTEURS PAS À PAS1 articleBISPHÉNOL A3 articlesÀ REBOURS, Joris-Karl Huysmans23 articlesPRÊT-À-PORTER2 articlesPOINTE-À-PITRE1 articleHERBE-À-ROBERT1 articleBOUCHE-À-BOUCHE2 articlesCARTE À PUCE ou CARTE À MÉMOIRE1 articleCHAMBRE À STREAMERS ou CHAMBRE À DARDS3 articlesCOENZYME A CoA1 articleLINÉAIRE A, écriture1 articleDOMINIQUE A 1968- 1 articleA TRIBE CALLED QUEST1 articlePORTE-À-FAUX, architecture44 articlesMALADIES À VECTEURS36 articlesQUATUOR À CORDES28 articlesMACHINE À VAPEUR24 articlesCANNE À SUCRE22 articlesÉTOILES À NEUTRONS13 articlesCHASSE À LA BALEINE12 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XVIe s.2 articlesLE DERNIER TANGO À PARIS, Bernardo Bertolucci2 articlesCUBIQUE À FACES CENTRÉES RÉSEAU1 articleMON CŒUR MIS À NU, Charles Baudelaire1 articleSCENES FROM A MARRIAGE, série télévisée4 articlesDÉGÉNÉRESCENCE MACULAIRE LIÉE À L'ÂGE articleBONS À MOYEN TERME NÉGOCIABLES articleEULER-POINSOT MOUVEMENT ou MOUVEMENT À LA POINSOT5 articlesITINÉRAIRE DE PARIS À JÉRUSALEM, François René de Chateaubriand3 articlesPROLÉGOMÈNES À UNE THÉORIE DU LANGAGE, Louis Trolle Hjelmslev1 articleLA MACHINE À EXPLORER LE TEMPS, Herbert-George Wells1 articlePOÈTE À NEW YORK, Federico García Lorca1 articleINTRODUCTION À L'ŒUVRE SUR LE KAVI, Wilhelm von Humboldt1 articleLETTRE À D'ALEMBERT SUR LES SPECTACLES, Jean-Jacques Rousseau62 articlesVENT INSTRUMENTS À10 articlesHUILE PEINTURE À L'3 articlesTHOMAS A KEMPIS THOMAS HEMERKEN dit 1379 articlesCALCULER MACHINES À4 articlesENCAUSTIQUE PEINTURE À L'4 articlesCROÛTES SOLS À3 articlesTIMOTHÉE ÉPÎTRES À3 articlesVITRE VERRE À2 articlesCHENILLES MATÉRIEL À2 articlesINERTIE CENTRALE À2 articlesPHILÉMON ÉPÎTRE À2 articlesTITE ÉPÎTRE À2 articlesINFINI RÉGRESSION À L'2 articlesAVALANCHE DIODE À1 articleSOBOLEVA P. articleÉCHO BOÎTE À1 articleMERCURE ÉLECTRODE À1 articleARC PROCÉDÉ À L'1 articleIMMERSION OBJECTIF À1 articleHYDROGÈNE CHALUMEAU À1 articlePSEUDOGLEY SOLS À1 articlePOINSOT MOUVEMENT À LA7 articlesRADIO-INTERFÉROMÉTRIE À LONGUE BASE ou articlesMUTATIONS DYNAMIQUES ou MALADIES À EXPANSION DE TRIPLETS1 articleAUTOMOBILE ou VOITURE À QUATRE ROUES MOTRICES1 articleCHROMATOGRAPHIE DE PARTAGE À POLARITÉ DE PHASES INVERSÉE1 articleCOMMISSION À L'ÉNERGIE ATOMIQUE DES NATIONS UNIES1 articleAUTOMOBILE ou VOITURE À QUATRE ROUES DIRECTRICES6 Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale214 articlesPHILOSOPHIE, de 1950 à nos jours210 articlesROME, des origines à la République1 Synthetic Aperture Radar RADAR À SYNTHÈSE D'OUVERTURE132 articlesPHILOSOPHIE, de 1900 à 19506 articlesAKERLOF GEORGE A. 1940- 4 articlesVARENNES FUITE À 17912 articlesURANIUM APPAUVRI ARMES À2 articlesCORNELL ERIC A. 1961- 2 articlesDOUDNA JENNIFER A. 1964- 1 articleCONTRE-COURANT SYSTÈME À1 articleZADEH LOTFI A. 1921- 1 articleCREUX PERDU MOULE À1 articleBON CREUX MOULE À1 articleREPLATS-GOLETZ VERSANT À1 articleFACES CENTRÉES RÉSEAUX À1 articleDOUBLE FOYER VERRES À1 articleSHELDON ROGER A. 1942- 1 articleCIEL OUVERT MINES À1 articleTIBERGHIEN GILLES A. 1953- 1 articleLYNN JOHN A. 1943- 4 articlesSCÉNOGRAPHIE, de Palladio à Appia3 articlesPPNA Prepottery Neolithic A1 articleAPL A Programming Language1 articleSaaS Software as a Service1 articleDaaS Data as a Service1 articlePaaS Platform as a Service1 articleIaaS Infrastructure as a Service2 articlesABRAHAM A SANCTA CLARA JOHANN ULRICH MEGERLE dit 1644-170919 articlesMYSTÈRES RELIGIONS DITES À2 articlesWARTBURG GUERRE DES CHANTEURS À LA2 articlesGARGAMELLE CHAMBRE À BULLES2 articlesOSEBERG TOMBE À NAVIRE D'1 articleMERCURE CELLULES À CATHODE DE1 articleLEWY DÉMENCE À CORPS DE3 articlesL'ŒUVRE D'ART À L'ÉPOQUE DE SA REPRODUCTION MÉCANISÉE, Walter Benjamin11 articlesRÉACTEUR À EAU PRESSURISÉE ou pressurised water reactor2 articlesRÉACTEUR À EAU BOUILLANTE ou boiling water reactor1 articleEUROPEAN XFEL laser européen à électrons libres et à rayons X1 articleMICROSCOPIE À DÉPLÉTION PAR ÉMISSION STIMULÉE ou STED stimulated emission depletion1 articleTRAITÉ DE L'HARMONIE RÉDUITE À SES PRINCIPES NATURELS, Jean-Philippe Rameau248 articlesFRANCE, histoire, de 1974 à nos jours244 articlesFRANCE, histoire, de 1789 à 1815244 articlesFRANCE, histoire, de 1939 à 1958204 articlesALLEMAGNE, histoire, de 1806 à 194510 articlesAFRIQUE-ÉQUATORIALE FRANÇAISE articleLIBRES ENFANTS DE SUMMERHILL, A. S. Neill170 articlesFRANCE, histoire, de 1871 à 19397 articlesMUNDELL ROBERT A. 1932-20214 articlesEFFET DE CHAMP TRANSISTOR À articlesEULER MÉTHODE DU PAS À PAS D', analyse numérique3 articlesWAKSMAN SELMAN A. 1888-19733 articlesDIAGNE BLAISE A. 1872-19342 articlesHĀLĪ A. H. 1837-19142 articlesNAISMITH JAMES A. 1861-19391 articlePENCK A. R. 1939-20171 articleWEIKARD MELCHIOR A. 1742-1803144 articlesFRANCE, histoire, de 1958 à 1974141 articlesRUSSIE, histoire, de 1801 à 1917137 articlesRUSSIE, histoire, des origines à 1801110 articlesCHINE, histoire, de 1949 à nos jours110 articlesFRANCE, histoire, de 1815 à 1871104 articlesITALIE, histoire, de 476 à 14942 articlesADMINISTRATIVE BEHAVIOR, Herbert A. Simon2 articlesSOCIODYNAMIQUE DE LA CULTURE, Abraham A. Moles1 articleJETABLE ou PàP prêt à photographier174 articlesFRANCE, histoire, du XVIe s. à 171591 articlesFRANCE, histoire, de 1715 à 178973 articlesITALIE, histoire, de 1870 à 194557 articlesINDE, histoire de 1947 à nos jours51 articlesESPAGNE, histoire, de 1900 à nos jours50 articlesITALIE, histoire, de 1945 à nos jours48 articlesGRÈCE, histoire, de 1830 à nos jours47 articlesITALIE, histoire, de 1494 à 178944 articlesPERSE, histoire de 651 à 150141 articlesÉGYPTE, histoire, de 1952 à nos jours40 articlesJAPON, histoire, des origines à 119239 articlesITALIE, histoire, de 1789 à 187038 articlesÉGYPTE, histoire de 1805 à 195237 articlesPOLOGNE, histoire, de 1914 à 194537 articlesPOLOGNE, histoire, de 1945 à nos jours36 articlesBELGIQUE, histoire, de 1945 à nos jours36 articlesPERSE, histoire de 1501 à 192535 articlesJAPON, histoire, de 1946 à nos jours34 articlesPOLOGNE, histoire, de 1500 à 176334 articlesSYRIE, histoire, de 1941 à nos jours33 articlesBELGIQUE, histoire, de 1830 à 194533 articlesMEXIQUE, histoire, de 1910 à nos jours33 articlesPOLOGNE, histoire, de 1764 à 19146 taxe à la valeur ajoutée17 articlesASSISTANCE MÉDICALE À LA PROCRÉATION AMP ou PROCRÉATION MÉDICALEMENT ASSISTÉE PMA4 ligne à grande vitesse29 articlesÉGYPTE, histoire de 639 à 180529 articlesHONGRIE, histoire, de 1945 à nos jours3 société à responsabilité limitée3 articlesSECAM séquentiel couleur à mémoire28 articlesBRÉSIL, histoire, de 1950 à nos jours2 zone à urbaniser en priorité26 articlesMEXIQUE, histoire, de la conquête à la révolution24 articlesBELGIQUE, histoire, des origines à 183024 articlesIRAN, histoire de 1925 à 197924 articlesJAPON, histoire, de 1192 à 160323 articlesITALIE, histoire, des origines à 47622 articlesMAROC, histoire, de 1956 à nos jours3 articlesAVIONS À DÉCOLLAGE & ATTERRISSAGE VERTICAUX ou vertical take off and landing2 articlesÉLECTRONS BIDIMENSIONNELS TRANSISTORS À GAZ D'18 articlesCANADA, histoire, de 1968 à nos jours2 articlesLE MERVEILLEUX VOYAGE DE NILS HOLGERSSON À TRAVERS LA SUÈDE, Selma Lagerlöf2 articlesART ET HUMANISME À FLORENCE AU TEMPS DE LAURENT LE MAGNIFIQUE, André Chastel13 articlesGRÈCE, histoire, jusqu'à l'indépendance 183012 articlesAUTRICHE, histoire, de 1945 à nos jours15 articlesVILLA, architecture du XVIIIe s. à nos jours3 articlesMATIF Marché à terme d'instruments financiers, puis Marché à terme international de France206 articlesPEINTURE DU XXe SIÈCLE, de 1900 à 19393 articlesHISTOIRE MONDIALE DE LA SPÉCULATION FINANCIÈRE, DE 1700 À NOS JOURS, Charles P. Kindleberger1 articleLETTRES À MIRANDA SUR LE DÉPLACEMENT DES MONUMENTS DE L'ART DE L'ITALIE, Antoine Quatremère de Quincy171 articlesÉGLISE HISTOIRE DE L', du concile de Trente à nos jours3 articlesLA NUIT DES MORTS-VIVANTS, George A. Romero101 articlesROYAUME-UNI, histoire, de 1945 à nos jours95 articlesROYAUME-UNI, histoire, de 1914 à 194595 articlesGRANDE-BRETAGNE, histoire, de 1801 à 191494 articlesAFRIQUE NOIRE, histoire, des indépendances à nos jours93 articlesGRANDE-BRETAGNE, histoire, de 1914 à 194591 articlesROYAUME-UNI, histoire, de 1801 à 191489 articlesGRANDE-BRETAGNE, histoire, de 1945 à nos jours57 articlesPAROLE POUVOIRS DE LA, de l'Antiquité à l'âge classique48 articlesPAYS-BAS, histoire, de 1579 à 18302 articlesLOMBARD STREET A DESCRIPTION OF THE MONEY MARKET, Walter Bagehot32 articlesPAYS-BAS, histoire, des origines à 15792 articlesBORGOÑA JUAN DE actif de 1494 à 15362 articlesJEAN DE ROUEN actif de 1510 à 15721 articleAFONSO JORGE actif de 1508 à 15401 articleFROMENT NICOLAS connu de 1461 à 14861 articleMEMMI LIPPO connu de 1317 à 13471 articleWYDITZ HANS actif de 1497 à 15161 articleYSELIN HEINRICH actif de 1478 à 15131 articleBENNET JOHN actif de 1599 à 16141 articleJONES ROBERT actif de 1597 à 16151 articleARRUDA DIOGO actif de 1508 à 153127 articlesAFRIQUE DU NORD, histoire, de 1945 à nos jours24 articlesPAYS-BAS, histoire, de 1830 à nos jours23 articlesPAYS-BAS PEINTURE DES, du XVIIIe s. à nos jours20 articlesAFRIQUE DU NORD, histoire, de 1880 à 19451 articleRUNCIE ROBERT A. K. 1921-20001 articleLOUIS PIERRE CHARLES A. 1787-1872103 articlesALLEMAGNE, histoire, du Moyen Âge à 1806103 articlesFRANÇAISE PEINTURE, XXe s. de 1900 à 193917 articlesAFRIQUE DU NORD, histoire, de 1440 à 188088 articlesJAPON, histoire, de l'ère Meiji à 19463 réseau numérique à intégration de services1 articleSICAV Société d'investissement à capital variable1 autorisations d'usage à des fins thérapeutiques1 articlePRADO Programme d'accompagnement du retour à domicile1 articleANTARES, télescope sous-marin à neutrinos285 articlesPEINTURE DU XXe ET DU DÉBUT DU XXIeSIÈCLE, de 1939 à nos jours271 articlesÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE, histoire, de 1945 à nos jours4 articlesSVEN ou SVEND À LA BARBE FOURCHUE 960 roi de Danemark 986-1014 et d'Angleterre 1013-1014137 articlesÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE, histoire, de 1865 à 19452 articlesLA NOUVELLE JUSTINE, OU LES MALHEURS DE LA VERTU, D. A. F. de Sade107 articlesÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE, histoire, des origines à 18654 articlesARNAUD ou ARNAUT DANIEL actif de 1180 à 12001 articleELY REGINALD ou REYNOLD actif de 1438 à 14712 articlesCHANTEREINE NICOLAS activité connue de 1517 à 15371 articleKHĀZINĪ AL- actif de 1115 à 1121 env.9 articlesCEA Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives71 articlesCHINE, histoire l'Empire, des Yuan à la Révolution de 191167 articlesCHINE, histoire de la Révolution de 1911 à la République populaire39 articlesINDE, histoire du XIIIe s. à la conquête britannique 175777 articlesALLEMAGNE RÉPUBLIQUE FÉDÉRALE D' RFA, histoire, de 1945 à 19893 articlesPATENIER ou PATINIR JOACHIM 1475 à 1480 Système d'imagerie gamma à masque aléatoire, télescope1 articleMARSYAS PEINTRE DE milieu à 3e quart IVe s. av. articlesGRANDE-BRETAGNE, histoire, le Moyen Âge de 1066 à 1485149 articlesFRANÇAISE PEINTURE, XXe et début du XXIe s. de 1939 à nos jours2 articlesCEPMMT Centre européen de prévision météorologique à moyen terme27 articlesCHINE, histoire des origines à la fondation de l'Empire 221 av. articlesHENNEQUIN, JEAN DE BRUGES ou JEAN DE BONDOL actif de 1368 à 13811 articleMICROSCOPE MICRO-Satellite à traînée Compensée pour l'Observation du Principe d'Équivalence1 articleCREDIT RATIONING IN MARKETS WITH IMPERFECT INFORMATION, J. Stiglitz et A. Weiss3 articlesTHE MARKET FOR LEMONS QUALITY UNCERTAINTY AND THE MARKET MECHANISM, George A. Akerlof4 articlesIgA5 União nacional para a independência total de Angola ou Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola PREMIERHOMME (LE) : CAMUS,ALBERT: Amazon.ca: Livres. Aller au contenu principal.ca. Bonjour Entrez votre adresse Livres Bonjour, S'identifier. Comptes et Listes Retours et Commandes. Panier